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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Montréal |
14 décembre 2005 |
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Région : |
Montréal |
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239383-71-0407 246139-71-0410 254511-71-0502 255093-71-0502 |
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Dossier CSST : |
124880071 |
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Commissaire : |
Me Alain Suicco |
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Membres : |
Claude Jutras, associations d’employeurs |
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Marielle Trempe, associations syndicales |
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Assesseur : |
Serge Bélanger, médecin |
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239383-71-0407 246139-71-0410 255093-71-0502 |
254511-71-0502 |
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Métro Richelieu 2000 inc. |
François Tremblay |
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Partie requérante |
Partie requérante |
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et |
et |
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François Tremblay |
Métro Richelieu 2000 inc. |
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Partie intéressée |
Partie intéressée |
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et |
et |
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Commission de la santé et de la sécurité du travail |
Commission de la santé et de la sécurité du travail |
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Partie intervenante |
Partie intervenante |
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Dossier 239383-71-0407
[1] Le 13 juillet 2004, l’entreprise Métro Richelieu 2000 inc. (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête à l’encontre de la décision rendue le 6 juillet 2004 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d’une révision administrative. Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 19 mars 2004 et déclare que le diagnostic de hernie discale L5-S1 est en relation avec l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003.
Dossier 246139-71-0410
[2] Le 8 octobre 2004, l’employeur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête à l’encontre de la décision rendue le 8 octobre 2004 par la CSST à la suite d’une révision administrative. Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 14 septembre 2004 qui faisait suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale, et qui indiquait que le diagnostic est celui de hernie discale L5-S1 et que cette lésion a été consolidée le 2 septembre 2004.
Dossiers 254511-71-0502, 255093-71-0502
[3] Les 2 et 14 février 2005, monsieur François Tremblay (le travailleur) de même que l’employeur, ont respectivement déposé à la Commission des lésions professionnelles une requête à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 31 janvier 2005 à la suite d’une révision administrative. Par cette décision, la CSST confirme les décisions qu’elle a initialement rendues les 14 octobre 2004, 20 décembre 2004 et 11 janvier 2005. Ces décisions déclarent qu’en relation avec l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003, le travailleur conserve un déficit anatomo-physiologique de 6 % et des limitations fonctionnelles, que l’emploi de gardien de sécurité constitue un emploi convenable et qu’à compter du 10 janvier 2005, le travailleur est capable d’occuper cet emploi.
[4] À l’audience tenue les 25 octobre et 2 décembre 2005, le travailleur de même que l’employeur et la CSST étaient présents et représentés.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
Dossier 239383-71-0407
[5] L’employeur demande de reconnaître qu’il n’y a pas de relation entre l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003 et le diagnostic de hernie discale L5-S1.
Dossier 246139-71-0410
[6] L’employeur demande de reconnaître que la lésion subie le 29 septembre 2003 est une entorse lombaire, consolidée le 2 septembre 2004, sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles.
Dossier 254511-71-0502
[7] Le travailleur demande de déclarer que l’emploi de gardien de sécurité ne constitue pas un emploi convenable et que subsidiairement, il n’était pas capable de l’occuper à compter du 10 janvier 2005.
Dossier 255093-71-0502
[8] L’employeur demande de reconnaître que le travailleur ayant seulement été victime d’une entorse lombaire, consolidée sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles, il n’y avait pas lieu pour la CSST de déterminer l’emploi convenable non plus que la date de la capacité à l’exercer.
LES FAITS
[9] Le travailleur alors âgé de 24 ans et occupant la fonction de « préparateur de commandes » chez l’employeur, a été victime d’un accident du travail le 29 septembre 2003.
[10] La réclamation à la CSST de même que le témoignage du travailleur à l’audience indiquent « qu’en soulevant une caisse de céréales pesant environ une quarantaine de livres, son pied gauche s’est coincé dans un rack et en se tournant à gauche pour déposer la caisse, (le travailleur) a perdu l’équilibre et est tombé sur les genoux avec la caisse dans les mains ».
[11] Le travailleur a immédiatement été transporté en ambulance dans un centre hospitalier, d’où il a obtenu son congé la même journée. Le travailleur déclare que le lendemain, il avait de la douleur dans le membre inférieur gauche, jusqu’au mollet. Il a alors consulté un médecin et une attestation médicale datée du 30 septembre, fait état d’un diagnostic d’entorse lombaire et d’une réévaluation dans une semaine. Un autre rapport émis par le même médecin le 8 octobre suivant, réitère le même diagnostic et les mêmes conclusions.
[12] C’est ainsi que le 16 octobre suivant, le travailleur a consulté son médecin de famille, le docteur Y. Cornellier. Le docteur Cornellier confirme le diagnostic d’entorse lombaire et réfère le travailleur en physiothérapie.
[13] Des notes de consultation complétées à la demande de l’employeur le 4 novembre par le docteur Higgins, font état d’un diagnostic d’entorse lombaire survenue « en soulevant une caisse de Honey Comb », (pièce E-1, en liasse).
[14] Un rapport de physiothérapie daté du 5 novembre suivant, indique entre autres une lombalgie irradiant au membre inférieur gauche. Un autre rapport daté du 26 novembre, fait état d’une lombalgie « sans irradiation maintenant », alors que le rapport daté du 17 décembre fait état d’une irradiation occasionnelle.
[15] Des notes de consultation datées du 3 décembre et complétées par le docteur Le Bire à la demande de l’employeur, font état d’irradiation occasionnelle et suggèrent un test d’imagerie par résonance magnétique au niveau lombaire « pour éliminer une discopathie » (pièce E-1, en liasse).
[16] Un rapport d’imagerie par résonance magnétique du niveau lombaire de la colonne vertébrale du travailleur, daté du 24 décembre 2003 indique :
« […]
CONSTATATIONS :
Sur le plan sagittal, le seul espace inter-somatique anormal est l’espace L5-S1 et l’on note la présence d’une hernie discale bien démontrée intra-canalaire, postéro-latérale gauche, comprimant modérément la racine de S1 gauche.
L’espace L4-L5 est normal. Il en est de même de l’espace L3-L4. Le canal spinal est également normal.
Il n’y a pas d’évidence d’anomalie du conus médullaire et des racines de la queue de cheval.
OPINION :
Hernie discale intra-canalaire L5-S1 gauche comprenant modérément le sac dural et la racine de S1. »
[17] Un rapport médical émis par le docteur Cornellier le 8 janvier 2004, indique que « l’entorse lombaire se révèle être une hernie discale L5-S1 » et que le travailleur sera vu en neurochirurgie. C’est ainsi que le 1er mars 2004, le docteur M. F. Giroux, neurochirurgien, complète un rapport médical où il fait état d’un diagnostic de hernie discale L5-S1. Ses notes complétées la même journée (T-1), font état d’un Lasègue à 70o et d’une douleur irradiant au talon gauche du travailleur.
[18] Le travailleur avait été assigné temporairement à un travail plutôt clérical, concernant l’inventaire. Au début du mois d’avril, son médecin le docteur Cornellier, « l’a arrêté de travailler en raison de la position assise continuelle ».
[19] À la demande de l’employeur, le travailleur a rencontré le 8 avril 2004 le docteur Alain Roux, neurochirurgien. Son expertise datée la même journée indique :
« […]
ANTÉCÉDENTS PERSONNELS :
[…]
Du côté du dos, on retrouve au dossier des formulaires d’assurance complétés par deux médecins, dont le Dr Cornellier, avec un diagnostic de lombalgie. Il y a eu un arrêt de travail du 8 avril au 27 mai 2003. Par la suite, Monsieur Tremblay m’indique qu’il n’avait aucun problème avec son dos jusqu’à l’événement du 29 septembre 2003.
[…]
ÉTAT ACTUEL :
[…]
Concernant l’irradiation douloureuse déjà rapportée au membre inférieur gauche, il m’indique que ‘‘ ça va, ça part ‘’. (…)
[…]
EXAMEN OBJECTIF :
Monsieur mesure 6 pieds et est pesé ce jour à 188 livres.
[…]
DISCUSSION :
[…]
Le diagnostic à retenir en relation avec l’événement :
Le seul diagnostic qui puisse être retenu en relation avec l’événement du 29 septembre 2003 est un diagnostic d’entorse lombaire. La hernie L5-S1 décrite à l’imagerie est un diagnostic radiologique sans fondement clinique, tant du côté des symptômes que des signes objectifs.
La date ou la période prévisible de consolidation :
Je ne crois pas que Monsieur Tremblay ait atteint un plateau thérapeutique en date d’aujourd’hui. Il reçoit encore des traitements actifs d’ergothérapie et il mentionne qu’il y a une amélioration lente. À titre indicatif, je crois qu’il sera en mesure d’être consolidé d’ici 8 à 12 semaines.
[…]
L’existence ou le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique :
Il est trop tôt pour se prononcer avec certitude sur ce point. Je suggère une réévaluation dans 8 à 12 semaines.
L’existence ou l’évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur :
Il est actuellement trop tôt pour se prononcer sur ce point.
[…] »
[20] Le dossier du travailleur a été acheminé à la procédure d’évaluation médicale. Un avis émis le 2 septembre 2004 par le docteur Pierre Bourgeau, neurologue, indique :
« […]
HISTORIQUE :
C’est en date du 29 septembre 2003 que ce requérant en soulevant une caisse de produits, se coince le pied entre deux palettes, chute vers l’avant, tombe sur les genoux et ressent une douleur sous forme d’un éclair au niveau de la région lombaire. Il sentait dit-il, que son dons « bloquait » et en raison des douleurs lombaires persistantes, il est par la suite, référé par ambulance à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont.
[…]
DIAGNOSTIC :
Le diagnostic qui s’impose dans le cas présent est celui de hernie discale L5-S1.
[…]
La date de consolidation doit être fixée à la date du présent examen soit le 2 septembre 2004, la condition du requérant étant stabilisée depuis plus de deux mois et tous les traitements cessés. »
[21] Le 14 septembre suivant, la CSST a rendu une décision conforme à l’avis du Bureau d’évaluation médicale.
[22] Le 14 octobre 2004, la CSST a décidé que l’emploi de gardien de sécurité constituait un emploi convenable. La décision précise également qu’afin d’être capable d’exercer cet emploi, le travailleur recevra de la formation à l’Académie de sécurité professionnelle, du 11 octobre au 19 novembre 2004.
[23] À cet effet, le travailleur déclare, qu’aux mois d’octobre et novembre 2004, il a travaillé pour l’entreprise Pepsi et que jusqu’à la mi-décembre, il a été à l’emploi de l’entreprise Molson.
[24] Concernant son emploi chez Pepsi, le travailleur indique qu’il travaillait à l’entrepôt de Ville St-Laurent et que sa tâche consistait à contrôler « les allée et venue » et à patrouiller à pied. Pour lui, « ça été bien ». Par contre chez Molson, bien que son travail devait être semblable à celui chez Pepsi, il est survenu deux incidents particuliers à deux heures d’intervalle. Ainsi à la demande d’un haut dirigeant de l’entreprise, il a dû soulever une douzaine de caisses de 24 bières. Ses symptômes au dos ont alors beaucoup augmenté. Au surplus, environ deux heures plus tard, deux travailleurs de l’entreprise ont été coincés sur le toit alors qu’une échelle est tombée. Le travailleur a dû monter à pied jusqu’au toit et soulever l’échelle qui était tombée.
[25] Le lendemain matin, soit le 14 décembre 2004, le travailleur a consulté son médecin, le docteur Cornellier. Ce dernier a émis un rapport médical où il est indiqué :
« Travail en sécurité mal adapté pour ce patient (CSST), trop taxant pour son problème lombaire. »
[26] Entre-temps, soit le 3 novembre, le travailleur a rencontré à la demande de la CSST, le docteur M. Maleki, neurochirurgien. Dans son rapport d’évaluation daté du 3 novembre 2004, le docteur Maleki indique :
« […]
EXAMEN PHYSIQUE EN RAPPORT AVEC LA LÉSION PROFESSIONNELLE
[…]
(…) Les mouvements du rachis dorso-lombaire se chiffrent comme suit :
· flexion antérieure 70o/90o;
· extension 25o /30o;
· flexions latérales droite et gauche 30o/30o;
· rotations droite et gauche 30o/30o.
Le Lasègue semble limité à 70o du côté gauche. Les réflexes au niveau des rotuliens et des achilléens sont évalués à 2+.
[…]
LES LIMITATIONS FONCTIONNELLES DU TRAVAILLEUR RÉSULTANT DE LA LÉSION PROFESSIONNELLE
· Éviter de forcer et de soulever des poids supérieurs à 30 livres.
· Éviter de faire des torsions de la colonne, des flexions et des extensions à répétition.
· Éviter les positions stationnaires prolongées.
[…]
OPINION ET CONCLUSION
Monsieur Tremblay aurait développé une lombalgie et deux semaines plus tard une sciatalgie avec paresthésie est apparue aux membres inférieurs, surtout du côté gauche.
Il a été traité de façon conservatrice avec amélioration des douleurs sciatiques et les paresthésies se sont aussi améliorées. Il demeure avec une ankylose modérée et le Lasègue est limité du côté gauche, sans déficit neurologique.
L’imagerie médicale par résonance magnétique a montré une hernie discale L5-S1.
En ce qui a trait aux traitements, le patient a atteint un plateau thérapeutique. Il a donc déjà été consolidé.
Nous vous suggérons un recyclage dans un travail adapté, considérant ses limitations fonctionnelles.
[…]
SÉQUELLES ACTUELLES
Code 204148, hernie discale L5-S1 non opérée : |
DAP 2% |
Code 207608, flexion antérieure limitée : |
DAP 3% |
Code 207644, extension limitée : |
DAP 1% » |
[27] Le 7 décembre 2004, le docteur Cornellier émet un rapport médical final faisant état d’un diagnostic de hernie discale lombaire, avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles. À cet effet, il réfère à celles suggérées par le docteur Maleki.
[28] Le dossier comporte également une expertise complétée le 14 mars 2005 par le docteur M. Duhaime, chirurgien orthopédiste. Ce dernier indique :
« […]
Histoire de la maladie actuelle
[…]
Le réclamant nous rapporte que l’incident est survenu alors qu’il levait une boîte de céréales qui pèse environ 40 livres. Il a voulu faire un mouvement de torsion pour déposer la boîte. et son pied gauche est resté coincé; il a fait un mouvement de torsion, a fait une chute sur le genou et a ressenti un choc immédiatement à la colonne lombaire et en position agenouillée, il était barré.
[…]
COMMENTAIRES :
Considérant l’histoire de l’incident bien établi et le mécanisme lors de cet incident, un effort en torsion de la colonne lombaire;
Considérant l’évaluation spécifique qui apparaît au dossier (IRM), démontrant une hernie discale intra-canalaire postéro-latérale gauche, comprimant modérément le sac dural et la racine gauche;
Considérant l’opinion du Dr Marc Giroux, neurochirurgien, et des autres médecins et spécialistes;
Considérant l’examen d’aujourd’hui qui démontre un spasme musculaire paralombaire gauche, un Lasègue gauche positif, l’épuisement lors du test unipodal unipolaire de flexion plantaire répétée;
Considérant la limitation de la flexion antérieure de la charnière lombo-sacrée et de la douleur à la mobilité extrême;
Nous concluons que ce réclamant présente une pathologie lombaire quand même importante et l’examen d’aujourd’hui indique qu’il y a corrélation entre le diagnostic établi de hernie discale L5-S1 et l’examen physique.
Donc, pour toutes ces considérations, nous retenons une relation entre l’événement traumatique du 29 septembre 2003 et le diagnostic de hernie discale lombaire L5-S1 gauche. » (sic)
[29] Le travailleur termine son témoignage en précisant qu’à la suite des incidents survenus chez Molson au mois de décembre 2004 et du rapport médical émis par le docteur Cornellier le 14 décembre, il n’est pas retourné au travail. Il considère que l’emploi d’agent de sécurité ne constitue pas un emploi convenable pour lui, « parce que la sécurité, c’est d’être toujours en situation de crise ». Il admet par contre qu’il aurait aimé retourner chez Pepsi.
[30] Contre-interrogé par la procureure de la CSST, le travailleur déclare qu’il est d’accord avec les limitations fonctionnelles émises par le docteur Maleki. Il était également d’accord avec la réadaptation et le choix de l’emploi convenable d’agent de sécurité, « même s’il était un peu hésitant ». À cet effet, la procureure réfère à un document (REPÈRES, pièce C-1) qui définit l’emploi de gardien de sécurité, les principales tâches qu’il comporte de même que son champs d’action, les capacités physiques requises et enfin les principales fonctions qu’il compote. Le tribunal en a pris connaissance.
[31] Dans le cadre du témoignage du travailleur, l’employeur a déposé un document (pièce E-3, en liasse) qui fait état d’un arrêt de travail eu égard à un problème lombaire antérieur chez le travailleur. Cet arrêt de travail est survenu aux mois d’avril et mai 2003. Le tribunal a pris connaissance du document, plus particulièrement du rapport de radiographie qui fait état d’ostéophytes « débutantes » au niveau dorsal, compatibles avec une discrète arthrose, mais aucune anomalie au niveau lombaire n’est signalée. Le diagnostic émis tout au long de cet arrêt de travail, est celui de lombalgie. Le travailleur précise « que ce n’était rien d’important » et que lorsqu’il est retourné au travail, il n’avait plus aucun symptôme.
[32] Il termine son témoignage en précisant qu’il a occupé chez l’employeur l’emploi de préparateur de commandes durant une période de huit années et qu’avant l’incident du mois de septembre 2003, il n’avait jamais présenté de réclamation pour un accident du travail.
[33] L’employeur a fait témoigné le docteur Alain Roux, neurochirurgien.
[34] Le docteur Roux est d’avis que la preuve médicale contemporaine à l’accident, ne fait pas état d’irradiation assez significative pour conclure à un diagnostic de hernie discale. Quant au rapport d’imagerie par résonance magnétique, « il s’agit seulement d’une image », mais aucun signe clinique ne la confirme. Le docteur Roux soumet à cet effet un document de doctrine médicale dont le tribunal a pris connaissance (pièce D-1).
[35] Le docteur Roux est également d’avis que l’accident survenu au travail le 29 septembre 2003, constitue « un événement relativement banal » qui ne peut être à l’origine que d’une entorse et non d’une hernie.
[36] En contre-interrogatoire, le docteur Roux est d’avis que le mouvement de rotation effectué par le travailleur, ne peut être à l’origine que d’une élongation musculaire. Quant au Lasègue positif, il ne démontre qu’une irritation dure-mérienne.
[37] Interrogé par le tribunal, le docteur Roux est d’avis qu’aucune flexion ni torsion assez importante n’est survenue le 29 septembre 2003, pour être à l’origine d’une hernie discale.
[38] Le docteur Roux est également d’avis que même si le poids de la boîte était d’environ 40 livres, il n’y a eu qu’une légère augmentation de la pression intra-discale, parce que le travailleur ne soutenait pas ce poids « à bout de bras ».
[39] Le docteur Roux admet que la demande de test d’imagerie par résonance magnétique effectué par le docteur Le Bire pour l’employeur, ne constitue habituellement pas un test pour une entorse. Eu égard à l’analyse du rapport de ce test, le docteur Roux est d’avis qu’il ne fait état que d’une lésion unique au niveau L5-S1, qui peut s’expliquer par la dégénérescence. Il admet cependant qu’un tel résultat « est plus normal à 40 ans », mais qu’il n’est pas surpris.
[40] Le tribunal prend note de l’admission des trois parties qui suggèrent que si le tribunal conclut à un diagnostic d’entorse lombaire résultant de l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003, il y aurait lieu de retourner le dossier à la CSST, eu égard à la détermination de l’existence des séquelles permanentes et si tel est le cas, du droit à la réadaptation.
L’ARGUMENTATION DES PARTIES
[41] Le procureur de l’employeur soumet que la règle établit par la jurisprudence indique que pour reconnaître une hernie discale, l’imagerie doit être corroborée par des signes cliniques.
[42] Dans le présent dossier, l’employeur soumet que le témoignage du docteur Roux indique clairement qu’avant le rapport d’imagerie par résonance magnétique, il n’y avait rien dans les notes médicales qui faisaient état de la présence de signes cliniques. D’autant, que le travailleur a présenté « de petites différences dans la version des incidents survenus au mois de septembre 2003 ». L’employeur soumet donc que les examens contemporains à l’accident du travail auraient dû donner des signes cliniques, si la hernie était d’origine traumatique.
[43] Quant à l’examen du docteur Bourgeau du Bureau d’évaluation médicale, il s’avère tout à fait normal. Quant au docteur Maleki, l’employeur soumet qu’il n’avait pas à discuter de la nature du diagnostic. Enfin l’expertise complétée par le docteur Duhaime, fait état d’un examen clinique normal.
[44] L’employeur soumet donc que l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003, est à l’origine d’une entorse lombaire.
[45] Subsidiairement, l’employeur soumet que la preuve de l’antécédent médical du travailleur aux mois d’avril et de mai 2003, constitue une condition personnelle préexistante, qui a été aggravée par l’incident survenu au travail le 29 septembre 2003.
[46] Eu égard à la convenabilité de l’emploi et à la capacité du travailleur à l’exercer, l’employeur s’en remet aux représentations de la CSST.
[47] Le représentant du travailleur soumet que l’accident survenu au travail le 29 septembre 2003, est de nature à être à l’origine d’une hernie discale.
[48] À cet effet, le témoignage du travailleur indique clairement qu’au moment où son pied gauche s’est coincé, il effectuait un mouvement de torsion et ce, en soutenant « à bout de bras » un poids d’environ 40 livres.
[49] La preuve médicale contemporaine, plus particulièrement les rapports de physiothérapie, font état d’irradiation au membre inférieur gauche. De plus le docteur Le Bire, médecin de l’employeur, a demandé un test d’imagerie par résonance magnétique en raison de la constatation d’une discopathie. Le rapport confirme clairement l’existence d’une hernie discale L5-S1 avec compression radiculaire. Aucune autre pathologie n’a été constatée aux autres niveaux de la colonne lombaire du travailleur.
[50] Les examens et les rapports des docteurs Giroux, neurochirurgien, Bourgeau, neurologue, Maleki, neurochirurgien, et Duhaime, orthopédiste, concluent à une hernie discale L5-S1, résultant de l’accident du travail survenu au mois de septembre 2003. Le docteur Roux est le seul à conclure à une entorse lombaire.
[51] Eu égard à l’atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles, le travailleur soumet qu’il est d’accord avec le rapport du docteur Maleki.
[52] Eu égard à son arrêt de travail du printemps 2003, le travailleur soumet que la preuve présentée, ne fait en aucune façon la démonstration d’une condition préexistante.
[53]
Le travailleur soumet enfin que l’emploi de gardien de sécurité a été décidé avant la détermination de l’atteinte permanente et
des limitations fonctionnelles. D’ailleurs le travail qu’il a effectué entre
les mois d’octobre et décembre 2004, indique clairement que cet emploi ne correspond
pas à ses limitations fonctionnelles. Enfin le rapport médical émis le 14
décembre 2004 par son médecin traitant, le docteur Cornellier, indique
clairement que cet emploi de gardien de
sécurité n’est pas adapté à sa condition. Il ne constitue donc pas un
emploi convenable. Subsidiairement, le travailleur soumet que les dispositions
de l’article
[54] La procureure de la CSST indique d’abord que les décisions rendues au plan médical, sont bien fondées.
[55] La procureure soumet également que l’emploi de gardien de sécurité, constitue un emploi convenable. Elle réfère à cet effet à la pièce C-1 (REPÈRES), qui fait état des tâches et des capacités physiques qui correspondent à cet emploi. La procureure soumet ainsi que les deux incidents survenus chez Molson au mois de décembre 2004, ne correspondent pas aux exigences de cet emploi convenable et qu’en aucune façon, « Molson aurait dû exiger du travailleur de soulever des caisses de bière et de grimper sur le toit de l’édifice ».
[56] La CSST soumet donc que l’emploi de gardien de sécurité respecte les limitations fonctionnelles émises par le docteur Maleki et que la description de cet emploi ( pièce C-1 ), est également conforme à ses limitations fonctionnelles.
[57]
Subsidiairement, la CSST s’interroge sur la
compétence du tribunal à rendre une décision eu égard à l’article
L’AVIS DES MEMBRES
[58] Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que le 29 septembre 2003, le travailleur a été victime d’une entorse lombaire et que le dossier devrait être retourné à la CSST. Subsidiairement, il est d’avis que si le travailleur a été victime d’une hernie discale, cette lésion ne l’empêche pas d’occuper l’emploi de gardien de sécurité.
[59] Le membre issu des associations syndicales est d’avis que le 29 septembre 2003, le travailleur a été victime d’une hernie discale, qu’il en conserve le déficit anatomo-physiologique et les limitations fonctionnelles suggérées par le docteur Maleki et qu’en raison de ces limitations, le travailleur est incapable d’occuper l’emploi de gardien de sécurité.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[60] Le tribunal doit d’abord décider du diagnostic résultant de l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003.
[61] Les rapports de physiothérapie datés des mois de novembre et décembre 2003, font état d’irradiations occasionnelles au membre inférieur gauche.
[62] De plus les notes de consultation du docteur Le Bire, datées du 13 décembre, indiquent l’opportunité de faire passer un test d’ imagerie par résonance magnétique eu égard à une possible discopathie. Le rapport de cette résonance magnétique pratiquée le 24 décembre 2003, fait état d’une hernie discale au niveau L5-S1 de la colonne vertébrale du travailleur. Par contre, tous les autres niveaux s’avèrent normaux.
[63] De même le rapport médical émis par le docteur Giroux le 1er mars 2004, fait état d’un Lasègue positif à gauche.
[64] Également l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale de même que l’expertise effectuée par le docteur Maleki, confirment cliniquement l’existence d’une hernie discale L5-S1, d’autant qu’un Lasègue limité à gauche est constaté.
[65] Enfin l’expertise effectuée par le docteur Duhaime le 14 mars 2005, fait également état d’un Lasègue positif à gauche et confirme l’existence d’une hernie discale L5 - S1.
[66] Le docteur Roux est le seul médecin à être d’avis que le seul diagnostic d’entorse lombaire devrait être retenu.
[67] Le tribunal constate enfin que les notes de consultation, complétées le 4 novembre 2004 par le docteur Higgins, font état d’un mécanisme accidentel tout à fait différent de celui établi par la preuve tant testimoniale que documentaire.
[68] Le tribunal est donc d’avis que le travailleur est victime d’une hernie discale au niveau L5‑S1 de sa colonne vertébrale.
[69] Le tribunal se doit maintenant de décider s’il y a une relation entre cette hernie discale et l’accident survenu au travail le 29 septembre 2003.
[70] Le témoignage du travailleur à l’audience de même que la preuve documentaire établissent qu’au moment de chuter le 29 septembre 2003, le travailleur a effectué une torsion du tronc alors qu’il avait un poids d’une quarantaine de livres dans les mains. Ce type de mouvement est tout à fait de nature à être à l’origine d’une hernie discale.
[71] Contrairement à ce que soumet l’employeur, tous les symptômes et les signes cliniques d’une telle lésion ne doivent pas nécessairement apparaître dans les instants qui suivent l’accident. Au surplus, comme l’a souligné le tribunal précédemment, les notes de physiothérapie font état d’irradiation, de façon tout à fait contemporaine à l’accident. Même les notes de consultation du docteur Le Bire qui font état d’une possible discopathie, le sont également. Enfin le rapport d’imagerie par résonance magnétique fait état d’une hernie discale à un seul niveau et aucune des constatations n’autorise à conclure qu’elle est d’origine dégénérative.
[72] Le Tribunal est donc d’avis que la preuve tout à fait probante et la conclusion la plus plausible compte tenu de l’ensemble des circonstances, indique qu’il y a une relation entre la hernie discale L5-S1 dont le travailleur est victime et l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003.
[73] Le caractère professionnel de la hernie discale ayant été reconnu, les parties ont convenu qu’il n’y avait pas de contestation eu égard au déficit anatomo-physiologique de 6 % et aux limitations fonctionnelles suggérées par le docteur Maleki, dans son expertise datée du 3 novembre 2004.
[74] Le tribunal doit également décider de la convenabilité de l’emploi de gardien de sécurité et de la capacité du travailleur à l’occuper à compter du 10 janvier 2005.
[75] Le tribunal constate d’abord que les limitations fonctionnelles établies par le docteur Maleki le 3 novembre 2004, sont très limitées. En effet, elles constituent des limitations qui sont mêmes inférieures à la Classe I, suggérées par l’IRSST[2] pour une entorse lombaire avec séquelles permanentes.
[76] De plus le tribunal a pris connaissance du document C-1, déposé par la CSST et qui décrit l’emploi de gardien de sécurité selon REPÈRES. L’ensemble des tâches et des capacités physiques exigées par cet emploi, sont tout à fait conformes et compatibles avec les limitations fonctionnelles émises par le docteur Maleki le 3 novembre 2004. Le tribunal rappelle d’ailleurs que le travailleur lui-même a déclaré qu’il était tout à fait à l’aise avec l’emploi qu’il a occupé chez Pepsi. Par contre les deux incidents survenus alors que le travailleur était à l’emploi de Molson, constituent des événements isolés, qui ne doivent pas faire partie des tâches de gardien de sécurité.
[77] Le tribunal est donc d’avis que l’emploi de gardien de sécurité constitue un emploi convenable au sens de la loi et qu’à compter du 10 janvier 2005, le travailleur était capable de l’occuper.
[78]
Le tribunal doit également disposer de
l’argument du travailleur concernant l’article
51. Le travailleur qui occupe à plein temps un emploi convenable et qui, dans les deux ans suivant la date où il a commencé à l'exercer, doit abandonner cet emploi selon l'avis du médecin qui en a charge récupère son droit à l'indemnité de remplacement du revenu prévue par l'article 45 et aux autres prestations prévues par la présente loi.
Le premier alinéa ne s'applique que si le médecin qui a charge du travailleur est d'avis que celui-ci n'est pas raisonnablement en mesure d'occuper cet emploi convenable ou que cet emploi convenable comporte un danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur.
__________
1985, c. 6, a. 51.
[79]
La jurisprudence du présent tribunal indique que
pour bénéficier de l’application de
l’article
[80]
Dans le présent dossier, le rapport médical émis
le 14 décembre 2004 par le docteur Cornellier, indique seulement que « le travail est mal adapté pour ce patient,
qu’il est trop taxant pour son problème lombaire ». D’une part, le rapport médical a été émis
après que le travailleur eut cessé d’occuper l’emploi de gardien de sécurité et surtout, il est fondé sur de simples allégations
d’incapacité du travailleur; aucune analyse de l’emploi n’est rapportée par le
médecin. Il est donc impossible de comprendre les raisons pour lesquelles le docteur
Cornellier conclue de cette façon. Le tribunal est d’avis que ce type de
rapport ne rencontre pas les critères établis par la jurisprudence eu égard à
l’interprétation de l’article
[81] Enfin le tribunal est d’avis que l’argument de l’employeur concernant la condition personnelle préexistante, n’a pas d’impact dans le présent dossier.
[82] D’une part la radiographie (E-3, en liasse) fait état d’ostéophytes au niveau dorsal, mais aucune anomalie au niveau lombaire n’est constatée. Au surplus, même si une telle condition personnelle était existante, elle ne constituerait pas un empêchement à la reconnaissance d’une lésion professionnelle. C’est plutôt dans le cadre d’une demande de partage des coûts reliés à la lésion professionnelle, que l’employeur pourrait faire valoir une telle preuve et un tel argument.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
246139-71-0410
REJETTE la requête de l’employeur, l’entreprise Métro Richelieu 2000 inc.;
CONFIRME la décision a rendue le 8 octobre 2004 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le diagnostic est celui de hernie discale L5-S1;
239383-71-0407
REJETTE la requête de l’employeur, l’entreprise Métro Richelieu 2000 inc.;
CONFIRME la décision rendue le 6 juillet 2004 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le diagnostic de hernie discale L5-S1 est en relation avec l’accident du travail survenu le 29 septembre 2003.
255093-71-0502
REJETTE la requête de l’employeur, l’entreprise Métro Richelieu 2000 inc.;
CONFIRME la décision rendue le 31 janvier 2005 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE qu’en relation avec la lésion professionnelle subie le 29 septembre 2003, le travailleur en conserve un déficit anatomo-physiologique de 6% et des limitations fonctionnelles, conformément à l’expertise complétée par le docteur Maleki le 3 novembre 2004.
254511-71-0502
REJETTE la requête du travailleur, monsieur François Tremblay,
CONFIRME la décision rendue le 31 janvier 2005 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que l’emploi de gardien de sécurité constitue un emploi convenable et qu’à compter du 10 janvier 2005, le travailleur est capable d’occuper cet emploi.
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Me Alain Suicco |
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Commissaire |
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Me Yves Girard |
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Procureur de l’employeur |
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M. Normand Whear |
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F.A.T.A. - Montréal |
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Représentant du travailleur |
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Me Lucie Jobin |
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PANNETON LESSARD |
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Procureure de la partie intervenante |
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