Mizrahi c. Autorité des marchés financiers |
2009 QCCQ 10542 |
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COUR DU QUÉBEC |
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Division administrative et d'appel |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N : |
500-80-011106-086 |
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DATE : |
20 octobre 2009 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
JEAN-F. KEABLE |
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DAVID MIZRAHI
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Partie Appelante Représentée par Me Eric Cadi |
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c.
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AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS
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Partie Intimée Représentée par Me Éric Blais |
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JUGEMENT EN APPEL D'UNE DÉCISION DU BUREAU DE DÉCISION ET DE RÉVISION EN VALEURS MOBILIÈRES (Articles 324 et 327 de la Loi sur les valeurs mobilières, L.R.Q. c. V-1.1) |
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L'objet de l'appel et les conclusions du Tribunal
[1] David Mizrahi et l'Autorité des marchés financiers (l'Autorité) demandent à la Cour du Québec d'infirmer une décision du Bureau de Décision et de Révision en Valeurs Mobilières (le Bureau) du 12 mai 2008. Le Bureau décide alors de maintenir « l'ordonnance d'interdiction d'opérations sur valeurs qui a été prononcée le 24 janvier 2008[1] jusqu'au 31 décembre 2012. » à l'égard de David Mizrahi. « Il modifie cependant l'ordonnance afin d'exclure les opérations sur valeurs effectuées à des fins strictement personnelles » [2].
[2] Cette décision du Bureau a pour effet de rejeter des suggestions communes des parties sur la sanction appropriée aux circonstances. L'exécution de la décision du Bureau du 12 mai 2008 a été suspendue en vertu de l'article 329 de la Loi sur les valeurs mobilières[3], par le juge Henri Richard, le 3 juin 2008.
[3] Les parties s'inspirent des règles jurisprudentielles en matière disciplinaire et criminelle et demandent à la Cour du Québec d'annuler la décision du Bureau qu'elles qualifient de déraisonnable.
[4] Pour les raisons qui suivent, le Tribunal accueille l'appel. Le Bureau s'est écarté des règles jurisprudentielles applicables et n'a pas respecté son obligation de motivation en ne mesurant pas l'importance de la collaboration de David Mizrahi à des enquêtes majeures de l'Autorité au sujet d'une fraude de plus de 100 000 000 $[4] visée par les ordonnances de blocage rendues à l'origine le 21 décembre 2007[5] et le 24 janvier 2008[6].
[5] Le Tribunal traitera de la mission de l'Autorité, de ses pouvoirs, du rôle du Bureau, de son obligation de motivation, du contexte factuel de la décision du 12 mai 2008, des suggestions communes des parties du 7 février 2008, des règles jurisprudentielles pertinentes et des conclusions de la décision du Bureau du 12 mai 2008.
La mission de l'Autorité
[6] Selon les articles 4[7] et 7 de la Loi sur l'Autorité des marchés financiers[8], l'Autorité exerce une importante mission sociale, économique et financière pour laquelle elle est investie de fonctions et pouvoirs considérables:
SECTION I
Mission de l'Autorité.
4. L'Autorité a pour mission de:
1° prêter assistance aux consommateurs de produits et utilisateurs de services financiers notamment en établissant des programmes éducationnels en matière de consommation de produits et services financiers, en assurant le traitement des plaintes reçues des consommateurs et en leur donnant accès à des services de règlement de différends;
2° veiller à ce que les institutions financières et autres intervenants du secteur financier respectent les normes de solvabilité qui leur sont applicables et se conforment aux obligations que la loi leur impose en vue de protéger les intérêts des consommateurs de produits et utilisateurs de services financiers et prendre toute mesure prévue à la loi à ces fins;
3° assurer l'encadrement des activités de distribution de produits et services financiers en administrant en outre les règles d'admissibilité et d'exercice de ces activités et en prenant toute mesure prévue à la loi à ces fins;
4° assurer l'encadrement des activités de bourse et de compensation et l'encadrement des marchés de valeurs mobilières en administrant notamment les contrôles prévus à la loi relativement à l'accès au marché public des capitaux, en veillant à ce que les émetteurs et les autres intervenants du secteur financier se conforment aux obligations qui leur sont applicables et en prenant toute mesure prévue à la loi à ces fins;
5° voir à la mise en place de programmes de protection et d'indemnisation des consommateurs de produits et utilisateurs de services financiers et administrer les fonds d'indemnisation prévus à la loi.
2002, c. 45, a. 4; 2004, c. 37, a. 90.
[...]
SECTION II
FONCTIONS ET POUVOIRS
7. L'Autorité est chargée d'exercer les fonctions et pouvoirs qui lui sont attribués par les lois énumérées à l'annexe 1 ou par d'autres lois et d'administrer toutes les lois ou dispositions d'une loi dont la loi ou le gouvernement lui confie l'administration.
Centre de renseignements et de référence.
L'Autorité agit également à titre de centre de renseignements et de référence dans tous les domaines du secteur financier.
Fonctions et pouvoirs.
Elle exerce de plus les fonctions et pouvoirs que lui attribue la présente loi.
2002, c. 45, a. 7; 2004, c. 37, a. 90.
[...]
[7] De plus, l’article 276 de la Loi sur les valeurs mobilières attribue à l’Autorité, au titre X de la Loi, la responsabilité de l’administration de la Loi sur les valeurs mobilières et celle d’exercer les fonctions et pouvoirs qui y sont prévus :
[…]
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Administration de la loi.
276. L'Autorité des marchés financiers instituée en vertu de l'article 1 de la Loi sur l’autorité des marchés financiers (chapitre A-33.2) est chargée de l'administration de la présente loi et exerce les fonctions et pouvoirs qui y sont prévus.
Mission.
L'Autorité a en outre pour mission:
1° de favoriser le bon fonctionnement du marché des valeurs mobilières;
2° d'assurer la protection des épargnants contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses;
3° de régir l'information des porteurs de valeurs mobilières et du public sur les personnes qui font publiquement appel à l'épargne et sur les valeurs émises par celles-ci;
4° d'encadrer l'activité des professionnels du marché des valeurs mobilières et des organismes chargés d'assurer le fonctionnement d'un marché de valeurs mobilières.
1982, c. 48, a. 276; 2002, c. 45, a. 644; 2004, c. 37, a. 90.
[8] L’exercice des fonctions et pouvoirs de l’Autorité répond à des objectifs fixés par l’article 8 de la Loi sur l’autorité des marchés financiers :
Exercice des fonctions et pouvoirs.
8. L'Autorité exerce ses fonctions et pouvoirs de manière:
1° à favoriser la confiance des personnes et des entreprises à l'égard des institutions financières et autres intervenants du secteur financier quant à leur solvabilité et à l'égard de la compétence des agents, des conseillers, des courtiers, des représentants et des autres intervenants qui oeuvrent dans le secteur financier;
2° à promouvoir une offre de produits et services financiers de haute qualité et à un prix concurrentiel pour l'ensemble des personnes et des entreprises dans toutes les régions du Québec;
3° à assurer la mise en place d'un cadre réglementaire efficace favorisant le développement du secteur financier et permettant l'évolution des pratiques de gestion et des pratiques commerciales dans ce secteur;
4° à donner aux personnes et aux entreprises un accès à une information fiable, exacte et complète sur les institutions financières et autres intervenants du secteur financier et sur les produits et services financiers offerts;
5° à assurer la protection du public contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses et à donner accès aux personnes et aux entreprises lésées à divers modes de règlement de différends.
2002, c. 45, a. 8; 2004, c. 37, a. 90.
Les pouvoirs d'enquête de l'Autorité
[9] Le chapitre I du titre IX de la Loi sur les valeurs mobilières décrit les importants pouvoirs d’enquête de l’Autorité aux articles 237 à 248 :
[…]
MESURES D'APPLICATION DE LA LOI
CHAPITRE I
POUVOIRS D'ENQUÊTE
Communication de documents.
237. L'Autorité ou l'agent commis par elle peut exiger la communication de tout document ou renseignement estimé utile à l'accomplissement de sa mission par les personnes suivantes:
1° une personne inscrite;
2° un organisme d'autoréglementation reconnu ou un de ses membres;
3° un émetteur assujetti;
[…]
5° une personne présentant une demande à l'Autorité ou déposant auprès d'elle des documents requis par la présente loi ou les règlements, ainsi que l'émetteur auquel se rapportent cette demande ou ces documents;
6° une personne visée à l'article 151.1.1.
Confirmation de l'authenticité de documents.
En outre, l'Autorité ou son agent peut demander à ces personnes de confirmer, par une déclaration sous serment, l'authenticité des documents ou la véracité des renseignements communiqués.
Délégation de pouvoirs.
Dans le cas des membres d'un organisme d'autoréglementation, de leurs dirigeants, de leurs administrateurs et de leurs représentants assujettis à l'inscription, l'Autorité peut, aux conditions qu'elle détermine, déléguer à l'organisme d'autoréglementation les pouvoirs prévus par le présent article et par l'article 238.[9]
1982, c. 48, a. 237; 1984, c. 41, a. 59; 1999, c. 40, a. 327; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 21; 2006, c. 50, a. 81.
Interrogatoire.
238. L'Autorité ou l'agent commis par elle peut soumettre les personnes visées à l'article 237, leurs dirigeants, leurs administrateurs ou préposés à un interrogatoire sous serment.
1982, c. 48, a. 238; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90; 2006, c. 50, a. 82.
Enquête.
239. L'Autorité peut instituer une enquête:
1° en vue d'assurer l'application de la présente loi et de ses règlements;
2° en vue de réprimer les infractions à la présente loi ou aux règlements;
3° en vue de réprimer les infractions aux dispositions adoptées par une autre autorité législative en matière de valeurs mobilières;
4° dans le cadre de l'exécution d'un accord visé à l'article 295.1;
5° pour vérifier s'il y aurait lieu de recommander au ministre la nomination d'un administrateur provisoire.[10]
1982, c. 48, a. 239; 1990, c. 77, a. 38; 2001, c. 38, a. 71; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
Dispositions applicables.
240. Le premier alinéa de l'article 6 et les articles 9 , 10 , 11 , 12 , 13 et 16 de la Loi sur les commissions d'enquête (chapitre C-37) s'appliquent à ces enquêtes, compte tenu des adaptations nécessaires.
Pouvoirs de l'Autorité.
L'Autorité exerce, en vue de l'enquête, toutes les attributions d'un juge de la Cour supérieure sauf celle d'imposer une peine d'emprisonnement.
1982, c. 48, a. 240; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
Témoin ou personne interrogée.
241. Une personne appelée à témoigner au cours d'une enquête ou soumise à un interrogatoire sous serment ne peut refuser de répondre, ni de produire une pièce en alléguant qu'elle pourrait s'incriminer ou s'exposer à une peine ou à des poursuites civiles, sous réserve des dispositions de la Loi sur la preuve au Canada (Lois révisées du Canada (1985), chapitre C-5).
1982, c. 48, a. 241; 1984, c. 41, a. 60.
Communication et remise de pièces.
242. L'Autorité peut exiger la communication ou la remise de toute pièce reliée à l'objet de l'enquête. L'Autorité a le pouvoir de rendre les pièces qui lui sont remises ou de déterminer ce qu'il y a lieu d'en faire.
1982, c. 48, a. 242; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
Reproduction.
243. La personne qui remet des pièces à l'Autorité dans les conditions prévues à l'article 242 peut les consulter ou les reproduire à ses frais, dans les conditions convenues avec l'Autorité.
1982, c. 48, a. 243; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
Huis clos.
244. L'enquête instituée en vertu de l'article 239 se déroule à huis clos.
1982, c. 48, a. 244.
(Nos soulignements)
Communication interdite.
245. L'Autorité peut interdire à une personne de communiquer à quiconque, si ce n'est à son avocat, toute information reliée à une enquête.
1982, c. 48, a. 245; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
Assistance d'un avocat.
246. Toute personne appelée à témoigner au cours d'une enquête ou lors d'un interrogatoire peut se faire assister d'un avocat de son choix.
1982, c. 48, a. 246.
Désignation de l'enquêteur.
247. L'Autorité désigne le membre de son personnel chargé de la conduite de l'enquête.
Enquêteur non membre du personnel.
L'Autorité peut aussi charger de la conduite de l'enquête une personne qui ne fait pas partie de son personnel. Cette personne prête serment devant un juge de la Cour du Québec ou devant un membre de l'Autorité, en la forme prévue à l'article 2 de la Loi sur les commissions d'enquête (chapitre C-37), compte tenu des adaptations nécessaires.
1982, c. 48, a. 247; 1984, c. 41, a. 61; 1988, c. 21, a. 66; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
Enquêteur.
248. L'enquêteur doit, sur demande, justifier de sa qualité.
Pouvoirs.
Il exerce, en vue de l'enquête, toutes les attributions de l'Autorité, sauf en matière d'outrage au tribunal.
Rapport à l'Autorité.
Il fait rapport à l'Autorité et met à sa disposition la transcription des témoignages et les pièces relatives à l'enquête.
1982, c. 48, a. 248; 2002, c. 45, a. 696; 2004, c. 37, a. 90.
[10] Le chapitre II du titre IX de la Loi sur les valeurs mobilières traite des mesures conservatoires, notamment des ordonnances de blocage que peut demander l’Autorité au Bureau :
[…]
MESURES CONSERVATOIRES
SECTION I
BLOCAGE
Pouvoirs au cours d'une enquête.
249. L'Autorité peut, en vue ou au cours d'une enquête, demander au Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières qu'il:
1° ordonne à la personne qui fait ou ferait l'objet de l'enquête de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu'elle a en sa possession;
2° ordonne à la personne qui fait ou ferait l'objet de l'enquête de ne pas retirer des fonds, titres ou autres biens des mains d'une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle;
3° ordonne à toute autre personne de ne pas se départir des fonds, titres ou autres biens visés au paragraphe 2°.
1982, c. 48, a. 249; 2002, c. 45, a. 639; 2004, c. 37, a. 90.
Effet de l'ordonnance.
250. L'ordonnance rendue en vertu de l'article 249 prend effet à compter du moment où la personne intéressée en est avisée, pour une période de 90 jours, renouvelable.[11]
Audience et prolongation.
La personne intéressée doit être avisée au moins 15 jours à l'avance de toute audience au cours de laquelle le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières doit considérer une prolongation. Le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières peut prononcer la prolongation si la personne intéressée ne manifeste pas son intention de se faire entendre ou si elle n'arrive pas à établir que les motifs de l'ordonnance initiale ont cessé d'exister.
(Nos soulignements)
1982, c. 48, a. 250; 1990, c. 77, a. 39; 2002, c. 45, a. 696.
[…]
Le rôle du Bureau et son obligation de motivation
[11] À la différence de l'Autorité, le Bureau n'est pas responsable d'une mission sociale, économique ou financière; le Bureau ne conduit pas non plus des enquêtes dont l'une des principales caractéristiques est de se dérouler à huis clos[12].
[12] Le Bureau est institué au titre IV de la Loi sur l’autorité des marchés financiers et il exerce, à la demande de l’Autorité ou de toute autre personne intéressée, les pouvoirs prévus à la Loi sur les valeurs mobilières, notamment ceux relatifs « à une ordonnance de blocage selon le titre neuvième de cette loi » :
Constitution.
92. Est institué le «Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières».
2002, c. 45, a. 92.
Pouvoirs.
93. Le Bureau exerce, à la demande de l'Autorité ou de toute personne intéressée, les pouvoirs prévus à la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1) relativement[13]:
[...]
3° à une ordonnance de blocage selon le titre neuvième de cette loi;
[...]
2002, c. 45, a. 93; 2004, c. 37, a. 90; 2006, c. 50, a. 117. (nos soulignements)
Mesures.
94. Le Bureau peut également, à la demande de l'Autorité, prendre toute mesure propre à assurer le respect des dispositions de la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1)[14].
2002, c. 45, a. 94; 2004, c. 37, a. 90.
[...]
[13] Fonctionnant sur un modèle judiciaire, le Bureau agit suite aux demandes de l'Autorité. Il supervise les demandes notamment lorsqu'il apprécie les ordonnances de blocage afin qu'elles soient raisonnables et proportionnées, et qu'elles n'affectent pas, sans motifs ou inutilement, les droits de tiers.
[14] En effet, l’article 96 de la Loi sur l’autorité des marchés financiers et les articles 323 à 323.13 de la Loi sur les valeurs mobilières s’appliquent aux audiences et aux décisions du Bureau :
Dispositions applicables.
96. Les articles 323 à 323.13 de la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1) s'appliquent aux audiences et aux décisions du Bureau.
2002, c. 45, a. 96.
Décision.
[...]
RÈGLES APPLICABLES AUX AUDIENCES ET AUX DÉCISIONS DU BUREAU DE DÉCISION ET DE RÉVISION EN VALEURS MOBILIÈRES
Audiences.
323. Le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières peut, dans le cadre de l'exercice de ses pouvoirs, tenir audience et délibérer avec toute autorité chargée de la surveillance du commerce des valeurs mobilières.
1982, c. 48, a. 323; 1990, c. 77, a. 53; 2002, c. 45, a. 681.
Règles de procédure.
323.1. Le Bureau détermine les règles de procédure applicables à ses audiences.
1990, c. 77, a. 54; 1992, c. 35, a. 15; 2002, c. 45, a. 682.
Dispositions applicables.
323.2. Les articles 240 à 243 s'appliquent à toute audience du Bureau, compte tenu des adaptations nécessaires.
2002, c. 45, a. 682.
Suspension.
323.3. Exceptionnellement, le Bureau peut suspendre la tenue d'une audience relative à une demande jusqu'à la souscription par le demandeur d'un engagement de supporter les frais des travaux de recherche que le Bureau juge nécessaires pour pouvoir trancher la question qui lui est soumise.
Frais de représentation.
De même, il peut imposer à une partie de prendre à sa charge les frais de représentation des épargnants ou, si l'intérêt public le requiert, prendre lui-même ces frais à sa charge.
2002, c. 45, a. 682.
Enregistrement et transcription.
323.4. Toute personne entendue par le Bureau peut demander l'enregistrement des témoignages, à ses frais. Si elle les fait transcrire, elle est tenue de fournir, sur demande du Bureau, un exemplaire de la transcription.
2002, c. 45, a. 682.
Intérêt public.
323.5. Sous réserve du troisième alinéa de l'article 93 de la Loi sur l’autorité des marchés financiers (chapitre A-33.2), le Bureau exerce la discrétion qui lui est conférée en fonction de l'intérêt public.
2002, c. 45, a. 682; D. 1366-2003, a. 8; 2004, c. 37, a. 90.
Audition préalable.
323.6. Le Bureau doit, avant de rendre une décision qui affecte défavorablement les droits d'une personne, lui donner l'occasion d'être entendue.
2002, c. 45, a. 682.
Décision sans audition préalable.
323.7. Toutefois, une décision affectant défavorablement les droits d'une personne peut être rendue sans audition préalable, lorsqu'un motif impérieux le requiert.
Audition.
Dans ce cas, le Bureau doit donner à la personne en cause l'occasion d'être entendue dans un délai de 15 jours.
2002, c. 45, a. 682.
Analyse.
323.8. Aux fins d'une décision, le Bureau peut, dans le cadre d'un régime de concertation établi par règlement ou dans le cadre d'un accord visé à l'article 295.1, considérer une analyse des faits effectuée par le personnel d'un organisme poursuivant une fin analogue[15].
2002, c. 45, a. 682.
Décision motivée.
323.9. Le Bureau est tenu de motiver la décision qui affecte défavorablement les droits d'une personne.
2002, c. 45, a. 682.
Copie authentique.
323.10. Le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières peut déposer au bureau du greffier de la Cour supérieure du district où est situé la résidence ou le domicile de la personne intéressée ou, si elle n'a ni résidence ni domicile au Québec, de la Cour supérieure du district de Montréal, une copie authentique d'une décision rendue par lui.
Décision exécutoire.
Par l'effet du dépôt, la décision devient exécutoire comme s'il s'agissait d'un jugement de la Cour supérieure et en a tous les effets.
2002, c. 45, a. 682.
Erreur matérielle.
323.11. Le membre du Bureau qui a participé à une décision peut, sur dossier, la rectifier pour corriger une erreur d'écriture, de calcul ou toute autre erreur matérielle.
2002, c. 45, a. 682.
Révision.
323.12. Le Bureau peut, à tout moment, réviser ses décisions, sauf dans le cas d'une erreur de droit.
2002, c. 45, a. 682.
Effet de la demande de révision.
323.13. La demande en révision auprès du Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières ne suspend pas la décision contestée, à moins que le Bureau n'en décide autrement.
2002, c. 45, a. 682.
(Nos soulignements)
Le contexte factuel de la décision du 12 mai 2008
[15] Une partie du contexte factuel pertinent de cette décision du 12 mai 2008 est décrite ainsi par le Bureau:
[…]
Le 23 janvier 2008, l’Autorité des marchés financiers (ci-après l’ « Autorité ») a saisi le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières (ci-après le « Bureau ») d’une demande à l’effet de prononcer les ordonnances suivantes à l’encontre des personnes intimées et à l’égard des mis en cause au présent dossier :
1. une ordonnance de blocage, en vertu des articles 249 et 250 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec et de l’article 93 (3°) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers;
2. une ordonnance d’interdiction d’opération sur valeurs, en vertu de l’article 265 de la Loi sur les valeurs mobilières et de l’article 93 (6°) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers;
3. une ordonnance d’interdiction d’agir à titre de conseiller en valeurs, en vertu de l’article 266 de la Loi sur les valeurs mobilières et de l’article 93 (7°) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers;
4. une recommandation au ministre de nommer un administrateur provisoire, en vertu de l’article 257 de la Loi sur les valeurs mobilières et de l’article 93 (4°) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers.
Le 24 janvier 2008, le Bureau a accueilli la demande ex parte de l’Autorité et a fixé le début de l’audition de novo au 7 février 2008. La même journée, la ministre des Finances procédait à la nomination d’un administrateur provisoire des sociétés P.N.B. Management inc., 2967-9420 Québec inc., 4190424 Canada inc. et 4384610 Canada inc.
L’intimé David Mizrahi a comparu au dossier le 29 janvier 2008.
[…]
(Références omises)
[16] Il faut rappeler que l'objet de l'audition du 7 février 2008 devant le Bureau était de statuer sur une « demande de levée d'interdiction d'opération sur valeurs » présentée par David Mizrahi. Cette demande de levée d'interdiction s'inscrivait dans le cadre de l'article 249 de la Loi sur les valeurs mobilières[16], de l'article 96 de la Loi sur l'Autorité des marchés financiers, et des articles 323 à 323.13 de la Loi sur les valeurs mobilières[17].
[17] La décision du Bureau du 24 janvier 2008[18] contient les conclusions suivantes:
LA DÉCISION
Le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières a pris connaissance de la demande de l’Autorité des marchés financiers, du témoignage de l’enquêteur de cet organisme et de la preuve présentée en cours d’audience et des arguments de son procureur, le tout tel qu’entendu au cours de l’audience du 23 janvier 2008 devant ce tribunal. Cela l’amène à prononcer la décision suivante, le tout en vertu des paragraphes 3°, 4°, 6° et 7° de l’article 93 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et des articles 249 , 250 , 257 , 265 , 266 et 323.7 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec :
1. Ordonnance de blocage en vertu de l’article 93 (3) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et des articles 249 et 250 de la Loi sur les valeurs mobilières
· il ordonne à 2967-9420 Québec inc., située au 518-3551, boulevard St-Charles à Kirkland, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle;
· il ordonne à 2967-9420 Québec inc., de manière plus particulière, de ne pas se départir de l’immeuble sis au 5168-5182 du chemin de la Côte des Neiges, Montréal (Québec) H3T 1X8, numéro de cadastre du Québec, 2650832 ;
· il ordonne à l’officier de la publicité des droits de publier la présente ordonnance au registre foncier du Québec conformément à l’article 2939 du Code civil du Québec ;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos et Angela Skafidas de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens appartenant à 2967-9420 Québec inc. ;
· il ordonne à 4384610 Canada inc., située au 243, rue Montreuil à Laval, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos et Anthanasios Papadopoulos de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens appartenant à 4384610 Canada inc. ;
· il ordonne à 4190424 Canada inc., située au 1304, Avenue Green, 3e étage à Westmount, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos et Mario Bright de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens appartenant à 4190424 Canada inc. ;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos, Angela Skafidas, 2967-9420 Québec inc., 4190424 Canada inc., 4384610 Canada inc., Mario Bright et Anthanasios Papadopoulos de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens appartenant à des investisseurs et qui sont entre les mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle ;
Néanmoins, la présente ordonnance de blocage à l’encontre de 2967-9420 Québec inc., 4384610 Canada inc., 4190424 Canada inc. et celle rendue le 21 décembre 2007 dans le dossier 2007-033-001 visant PNB Management inc., ne seront pas opposables à un éventuel administrateur provisoire nommé par le ministre des Finances pour gérer lesdites compagnies suivant la recommandation du Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières.
2. Interdiction d’opération sur valeurs en vertu de l’article 93 (6) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et l’article 265 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec
· il interdit à Brian Ruse toute activité en vue d’effectuer une opération sur valeurs, notamment le placement de titres d’emprunt auprès de Focus Mangement inc. et Ivest Fund Ltd. ;
· il interdit à David Mizrahi toute activité en vue d’effectuer une opération sur valeurs, notamment le placement de titres d’emprunt auprès de Focus Mangement inc. et Ivest Fund Ltd. ;
3. Interdiction d’agir à titre de conseiller en valeurs en vertu de l’article 93 (7°) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et l’article 266 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec
· il interdit à Brian Ruse d’exercer l’activité de conseiller en valeurs ;
· il interdit à David Mizrahi d’exercer l’activité de conseiller en valeurs ;
4. Administration provisoire en vertu de l’article 93 (4) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et de l’article 257 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec
· il recommande au ministre des Finances de désigner un administrateur provisoire, chargé de l’administration de 2967-9420 Québec inc., PNB Management inc., 4384610 Canada inc. et 4190424 Canada inc. à la place de leur conseil d’administration.
Le Bureau informe toutes les personnes intimées et mises en cause qu’il tiendra une audience le 7 février 2008, à 14 h 00, dans la salle d’audience Paul Fortugno qui est située au 500 boulevard René-Lévesque ouest, bureau 16.40, à Montréal, Québec.
[…]
(Nos soulignements)
(Références omises)
[18] Les ordonnances de blocage rendues par le Bureau le 21 décembre 2007[19], à laquelle ce dernier réfère dans ses ordonnances de blocage du 24 janvier 2008[20], se terminent ainsi:
LA DÉCISION
Le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières a pris connaissance de la demande de l’Autorité des marchés financiers, du témoignage de l’enquêteur de cet organisme et de la preuve présentée en cours d’audience et des arguments de ses procureur, le tout tel qu’entendu au cours de l’audience du 20 décembre 2007 devant ce tribunal. Cela l’amène à prononcer la décision suivante, le tout en vertu des paragraphes 3°, 4°, 6° et 7° de l’article 93 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et des articles 249 , 250 , 257 , 265 , 266 et 323.7 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec :
1. Ordonnance de blocage en vertu de l’article 93 (3) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et des articles 249 et 250 de la Loi sur les valeurs mobilières
· il ordonne à Interactive Brokers, sise au 1800, av. McGill College, Bur. 2106, Montréal, Québec, H3A 3J6, de ne pas se départir des fonds en dépôt, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession au nom de Ivest Fund Ltd. ;
· il ordonne à Ivest Fund Ltd., située au British Colonial Center of Commerce, One Bay Street, suite 400, P.O. Box N-3935 à Nassau, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle pour elle, au Québec ;
· il ordonne à la Interactive Brokers, sise au 1800, av. McGill College, Bur. 2106, Montréal, Québec, H3A 3J6, de ne pas se départir des fonds en dépôt, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession au nom de Focus Management inc. ;
· il ordonne à Focus Management inc., située au P.O. Box 30440, Seven Mile Beach, Grand Cayman à Cayman Island, BWI, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle pour elle, au Québec ;
· il ordonne à la Interactive Brokers, sise au 1800, av. McGill College, Bur. 2106, Montréal, Québec, H3A 3J6, de ne pas se départir des fonds en dépôt, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession dans le compte portant le numéro no U93827 ainsi que dans tous les autres comptes au nom de PNB Management inc. ;
· il ordonne à la Banque CIBC, sise au 1155, boul. René-Lévesque Ouest, Montréal, Québec, H3B 3Z4, de ne pas se départir des fonds en dépôt, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession dans le compte portant le numéro no 3926214 ainsi que dans tous les autres comptes au nom de PNB Management inc. ;
· il ordonne à PNB Management inc., située au 518-3551, boul St-Charles, Kirkland, Québec, H9H 3C4, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle pour elle ;
· il ordonne à Groupe Financier Banque TD, sise au 500 , rue St-Jacques, 12ième étage, Montréal (Québec) H2Y 1S1 et 1289, av. Greene, Westmount (Québec) de ne pas se départir des fonds en dépôt, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession dans les comptes dont les numéros apparaissent ci-après ainsi que dans tous les autres comptes au nom de Gestion de Capital Triglobal inc. :
o no CDA 524887-4160 ;
o no CDA 5247153-4160 ;
o no CDA 0302568-4772 ;
o no CDA 0302894-4772 ;
o no CDA 5209319-4772 ;
o no CDA 5209327-4772 ; et
o no CDA 7301007-4772 ;
· il ordonne à Gestion de Capital Triglobal inc., située 1304, rue Green, bur. 301, Montréal, Québec, H3Z 2B1, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle pour elle ;
Cependant, la présente ordonnance de blocage à l’encontre de Gestion de Capital Triglobal inc. ne sera pas opposable à un éventuel administrateur provisoire nommé par la ministre des Finances pour gérer ladite compagnie, suivant la recommandation du Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières.
· il ordonne à Société de gestion de fortune Triglobal inc., située au 2000, rue Peel, bur. 540, Montréal, Québec, H3A 2W5, de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’elle a en sa possession et de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle pour elle ;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos, Anna Papathanasiou, Franco Mignacca, Joseph Jekkel et Mario Bright de ne pas se départir de fonds, titres ou autres biens qu’ils ont en leur possession ;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos, Anna Papathanasiou, Franco Mignacca, Joseph Jekkel et Mario Bright de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens des mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle pour eux ;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos, Anna Papathanasiou, Franco Mignacca, Joseph Jekkel, Mario Bright et Gestion de Capital Triglobal inc. de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens appartenant à des investisseurs et qui sont entre les mains d’une autre personne qui les a en dépôt ou qui en a la garde ou le contrôle ;
· il ordonne à Themistoklis Papadopoulos, Anna Papathanasiou, Franco Mignacca, Joseph Jekkel, Mario Bright et Gestion de Capital Triglobal inc. de ne pas retirer ou s’approprier de fonds, titres ou autres biens appartenant à Focus Management inc. et Ivest Fund Ltd ;
Conformément à l‘article 250 de la Loi sur les valeurs mobilières, la présente ordonnance de blocage entre immédiatement en vigueur pour une période de 90 jours, renouvelable, à moins qu’elle ne soit modifiée ou abrogée avant l’échéance de ce terme.
2. Interdiction d’opération sur valeurs en vertu de l’article 93 (6) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et l’article 265 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec
· il interdit aux personnes et aux entités dont les noms apparaissent ci-après toute activité en vue d’effectuer une opération sur valeurs, y compris des activités de courtier en valeurs :
o Ivest Fund Ltd. ;
o Focus Management inc. ;
o Société de gestion de fortune Triglobal inc. ;
o Gestion de Capital Triglobal inc.
o PNB Management inc. ;
o 3769682 Canada inc. ;
o Themistoklis Papadopoulos ;
o Anna Papathanasiou ;
o Franco Mignacca ;
o Joseph Jekkel ;
o Mario Bright ;
· il interdit à Gestion de Capital Triglobal inc. toute activité en vue d’effectuer une opération sur valeurs sur toutes formes d’investissement visées par la Loi sur les valeurs mobilières[34], autrement qu’en conformité avec son inscription de cabinet en courtage en épargne collective, en planification financière et en bourses d’étude ;
L’ordonnance d’interdiction d’opération sur valeurs entre en vigueur immédiatement et le restera jusqu’à ce qu’elle soit modifiée ou abrogée.
3. Interdiction d’agir à titre de conseiller en valeurs en vertu de l’article 93 (7°) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et l’article 266 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec
· il interdit aux personnes et aux entités dont les noms apparaissent ci-après d’exercer l’activité de conseiller en valeurs :
o Gestion de Capital Triglobal inc.
o Société de gestion de fortune Triglobal inc. ;
o PNB Management inc. ;
o 3769682 Canada inc. ;
o Themistoklis Papadopoulos ;
o Anna Papathanasiou ;
o Franco Mignacca ;
o Joseph Jekkel ;
o Mario Bright.
L’ordonnance d’interdiction d’agir à titre de conseiller en valeurs entre en vigueur immédiatement et le restera jusqu’à ce qu’elle soit modifiée ou abrogée.
4. Administration provisoire en vertu de l’article 93 (4) de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et de l’article 257 de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec
· il recommande au ministre des Finances de désigner un administrateur provisoire, chargé de l’administration de la société Gestion de Capital Triglobal inc. à la place du conseil d’administration.
En application de 323.7 de la Loi sur les valeurs mobilières, le Bureau informe toutes les personnes intimées qu’il pourra tenir une audience dans les quinze jours de la présente décision, dans la salle d’audience Paul Fortugno qui est située au 500 boulevard René-Lévesque ouest, bureau 16.40, à Montréal, Québec. Pour ce faire, elles doivent communiquer avec le secrétaire général du Bureau pour l’informer qu’elles entendent exercer leur droit d’être entendues [1-877-873-2211].
[…]
(Références omises)
[19] Les ordonnances de blocage rendues par le Bureau, le 21 décembre 2007[21] et le 24 janvier 2008[22], sont toujours en vigueur; d'une part, les ordonnances rendues par le Bureau le 21 décembre 2007 ont été renouvelées à plusieurs reprises et, le 23 juin 2009, le Bureau les prolonge à nouveau pour une période de 120 jours[23]. D'autre part, les ordonnances rendues par le Bureau le 24 janvier 2008 ont été renouvelées à plusieurs reprises et, le 30 juillet 2009, le Bureau les prolonge à nouveau pour une période de 120 jours[24]. Dans les ordonnances de blocage initiales des 21 décembre 2007 et 24 janvier 2008, le Bureau a recommandé au Ministre des Finances de désigner un administrateur provisoire chargé de l'administration de la Société Gestion de Capital Triglobal Inc., de 2967-9920 Québec Inc., de PNB Management Inc., de 43846310 Canada Inc. et de 4190424 Canada Inc. à la place de leur conseil d'administration. Les administrateurs provisoires ont été rapidement désignés et ils sont toujours en poste.
Les suggestions communes des parties
[20] Lors de l'audition du Bureau tenue le 7 février 2008, David Mizrahi rend un témoignage où son désir d'éclairer les enquêtes de l'Autorité est évident. Aucune preuve contradictoire n'affecte la fiabilité ou la crédibilité de son témoignage. À titre de suggestions communes, les avocats des parties déposent une lettre du 6 février 2008 contenant leurs engagements respectifs:
[…]
Québec, le 6 février 2008
Me Douglas Mitchel
[…]
Cher confrère,
Pour faire suite à notre dernière conversation téléphonique ainsi qu’à celle de ce jour avec votre collègue, Me Éric Cadi, nous vous confirmons que l’Autorité recommandera au Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières, ci-après le « BDRVM », d’amender la conclusion visant l’interdiction de monsieur Mizrahi, votre client, en ce sens :
INTERDIR (sic) à David Mizrahi toute activité en vue d’effectuer une opération sur valeurs sur toutes formes d’investissements visés par la Loi sur les valeurs mobilières, autrement qu’en conformité avec son inscription de représentant en assurance de personnes, en assurance collective de personnes, en planification financière et en courtage en épargne collective ;
Nous demanderons néanmoins de maintenir l’interdiction d’agir à titre de conseiller en valeurs vu que M. Mizrahi ne détient aucune accréditation à cet effet.
Cependant, l’Autorité des marchés financiers, ci-après l’« Autorité », soumet les conditions suivantes, que votre client s’engagera à respecter, avant de faire la recommandation ci-haut décrite au BDRVM. Ces conditions sont :
· M. Mizrahi témoignera le 7 février 2008, ou à une autre date si le BDRVM est dans l’impossibilité d’entendre son témoignage, afin d’établir :
o Son implication personnelle dans les investissements faits au nom de ses clients dans Focus Management inc. ;
o L’implication de Thémistoklis Papadopoulos, Mario Bright, Anna Papathanasiou, Joseph Jekkel, Franco Mignacca, Triglobal Capital Management inc. et PNB Management inc. dans ces dits investissements ;
o Les représentations que Papadopoulos ou Bright lui ont fait préalablement à sa décision de référer une partie de sa clientèle à Focus Management inc. ;
o Les vérifications qu’il a fait pour s’assurer de la qualité et de la légalité de ces investissements ;
o Le nombre de clients qu’il a référés et les sommes qu’ils ont investies ;
o Le cas de M. Bouthong Khounvoungsa ;
o Les problèmes connus en 2007 par ses clients pour récupérer leurs investissements ;
o La source des paiements (immeuble côte des neiges) ;
o La rencontre avec M. Papadopoulos lors du congrès CMA ;
o La lettre du 28 novembre 2007 qu’il a transmise à ses clients ;
o Son appui à ses clients ;
o Son initiative de rencontrer le service de la conformité de Dundee ;
o Son initiative de rencontrer l’Autorité ;
o Sa collaboration avec le service des enquêtes de l’Autorité malgré l’absence de protection à l’encontre de poursuite pénale que pourrait prendre l’Autorité ou de poursuites administratives que pourraient prendre la Chambre de la sécurité financière ;
o L’absence de dossier disciplinaire à la Chambre de la sécurité financière;
o L’absence de d’autres investissements illégaux ;
o Le nombre de clients qu’il représente légalement en vertu de son accréditation de représentant en assurance de personnes, en assurance collective de personnes, en planification financière et en courtage en épargne collective ;
o Toute autre question que l’Autorité ou le BDRVM pourrait lui poser dans le cadre de ce dossier ;
· M. Mizrahi s’engage envers l’Autorité à ne pas faire d’investissements illégaux en contravention aux articles 11 et 12 de la Loi sur les valeurs mobilières, L.R.Q., c. V-1.1, ci-après la « LVM » ;
· M. Mizrahi s’engage envers l’Autorité à ne pas agir à titre de courtier ou de conseiller en valeurs en contravention aux articles 148 et 149 de la LVM ;
· M. Mizrahi s’engage envers l’Autorité à continuer à collaborer à l’enquête de l’Autorité ;
· Et, M. Mizrahi produira au service des enquêtes de l’Autorité une copie de l’ensemble de tous ses dossiers clients actifs, dont ceux qui ont investis dans Focus management inc., dans les 15 jours de la présente.
Aussi, la présente entente ne saurait être interprétée comme une renonciation de l’Autorité d’intenter des poursuites pénales contre M. Mizrahi et encore moins de limiter le pouvoir de la Chambre de la sécurité financière de sanctionner administrativement votre client.
[…]
________________
Éric Blais, avocat
Girard et al.
[…]
(Nos soulignements)
Les règles jurisprudentielles pertinentes
[21] En matière criminelle, la considération que doit accorder le décideur à des suggestions ou recommandations communes est établie depuis de nombreuses années.
[22] Plus récemment, en juillet 2006, la Cour d'appel rappelle l'état du droit dans Boucher-Gagnon c. R.[25]:
[…]
[3] Au Canada, les tribunaux d'appel ont défini à maintes reprises la règle de conduite devant guider le juge qui choisit de ne pas suivre pareille recommandation[26]. Dans Verdi-Douglas c. R.[27], le juge Fish, alors à notre Cour, l'a exprimée en ces termes :
[42] Canadian appellate courts have expressed in different ways the standard for determining when trial judges may properly reject joint submissions on sentence accompanied by negotiated admissions of guilt.
[43] Whatever the language used, the standard is meant to be an exacting one. Appellate courts, increasingly in recent years, have stated time and again that trial judges should not reject jointly proposed sentences unless they are "unreasonable", "contrary to the public interest", "unfit", or "would bring the administration of justice into disrepute".
[4] Il est aussi reconnu que le juge doit aviser les parties et leur donner l'occasion de réagir[28]. Il a enfin le devoir d'exposer les motifs qui le poussent à ne pas donner suite à la suggestion commune[29].
[5] Lorsque le juge se conforme en tous points à cette ligne de conduite, notre Cour doit à sa décision la déférence qui s'impose de façon générale en matière de détermination de la peine[30]. C’est le cas en l’espèce.
[…]
[23] D'autres arrêts de la Cour d'appel utilisent les mêmes règles quant à la considération qu'un Tribunal doit accorder à des recommandations communes:
· Siderus c. R., 2006 QCCA 1351 , paras. 9 à 12, 17 et 21;
· Karibyan c. R., 2006 QCCA 1531 , par. 2;
· Poissant c. R., 2007 QCCA 205 , par. 9.
[24] En 2008, le Tribunal des professions applique, à la considération des recommandations communes sur sanction disciplinaire, les mêmes critères que ceux énoncés par la Cour d'appel en matière criminelle.[31]
[25] Comme le résume fort bien Me Éric Vanchestein[32], il est maintenant bien établi que « le Comité de discipline, à qui une recommandation conjointe est soumise, n'est pas lié par celle-ci et conserve la discrétion d'imposer la sanction qu'il estime raisonnable. Cette discrétion doit être exercée en respectant certaines règles établies par la jurisprudence lorsque l'on s'apprête à rejeter une suggestion commune en faveur d'une sanction différente. Le Comité doit en principe donner aux parties l'occasion de lui faire part de leurs observations et exposer aux parties les motifs qui le pousse à ne pas donner suite à la recommandation commune. En n'informant pas les parties de son intention de ne pas suivre la recommandation conjointe et en les privant de la possibilité d'être entendu, un Comité n'a d'autre choix que de s'en remettre à la recommandation conjointe. »
La décision du 12 mai 2008 du Bureau
[26] Les parties informent le Tribunal qu'elles n'ont pas été avisées par le Bureau que ce dernier était en désaccord avec leurs suggestions communes. Aussi, c'est avec surprise qu'elles déclarent avoir pris connaissance des conclusions du Bureau formulées après son analyse de la preuve et sans qu'elles n'eurent l'occasion de répondre à ses inquiétudes. S'inspirant d'une décision récente de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario[33], les parties ne s'expliquent pas que le Bureau n'ait pas accordé le poids espéré à leurs recommandations communes et qu'il ait ainsi conclu sa décision:
La décision
Le tribunal est d’avis que l’entente avec l’Autorité est déraisonnable et ne comporte aucun effet dissuasif. Malgré la gravité des gestes posés et des pertes potentielles d’environ 2 millions de dollars, l’intimé pourrait en vertu de l’entente reprendre rapidement ses activités. De manière globale l’engagement l’empêche d’effectuer des activités qu’il n’a par ailleurs pas le droit d’exercer ! On l’oblige tout simplement à produire au service d’enquête de l’Autorité une copie de l’ensemble de tous ses dossiers clients actifs et à collaborer avec l’organisme.
Le tribunal reconnaît la coopération de M. Mizrahi mais celle-ci ne peut entièrement effacer la gravité des gestes posés par celui-ci. Sa conduite abusive passée et son manque de compétence dans le présent dossier font craindre une conduite ultérieure susceptible de nuire à l’intégrité des marchés et à la confiance des investisseurs.
Ceux qui seraient tentés d’imiter la conduite de M. Mizrahi pourraient voir dans l’entente que peu importe le préjudice subi par les investisseurs, si l’on se fait prendre, on n’aura qu’à avouer nos fautes et à collaborer avec les autorités réglementaire. Il s’agit à mon avis d’un dangereux message à lancer.
Par conséquent, en vertu de l’article 265 de la Loi sur les valeurs mobilières prenant en considération les motifs déjà exprimés et après avoir délibéré, le Bureau maintient l’ordonnance d’interdiction d’opération sur valeurs qui a été prononcée le 24 janvier 2008 jusqu’au 31 décembre 2012. Il modifie cependant l’ordonnance afin d’exclure les opérations sur valeurs effectuées par l’intimé à des fins strictement personnelles.
(Références omises)
Analyse de la décision du 12 mai 2008
[27] La mission de l'Autorité, ses objectifs, ses pouvoirs d'enquête et les mesures conservatoires qu'elle peut solliciter militent en faveur d'une très grande déférence du Bureau vis-à-vis les suggestions de sanctions auxquelles concourt l'Autorité dans son appréciation de l'intérêt public qu'elle cherche à protéger.
[28] Le rôle du Bureau se limite à une fonction quasi judiciaire de contrôle des demandes d'ordonnance de blocage sollicitées par l'Autorité.
[29] Le Bureau statue au cas par cas, sans posséder toute la vision d'ensemble des enquêtes de l'Autorité. Le champ d'action de l'Autorité est plus grand que celui du syndic d'un ordre professionnel et il s'apparente, à plusieurs égards, à celui d'un substitut du Procureur général, sans posséder toutefois le même statut juridique, ni la possibilité de soutien des moyens d'enquête que l'État fournit par les services policiers.
[30] Les fraudes visées par les ordonnances de blocage des 21 décembre 2007 et 24 janvier 2008 sont au cœur d'une enquête majeure de l'Autorité. Les ordonnances de blocage sont toujours en vigueur et l'avocat de l'Autorité informe le Tribunal que la collaboration de David Mizrahi est toujours appréciée.
[31] Compte tenu des moyens d'enquête restreints de l'Autorité par rapport à ceux des corps policiers, il est essentiel de respecter son appréciation de l'intérêt public lorsqu'elle estime que la collaboration d'une personne peut lui permettre de comprendre le fonctionnement d'un système sophistiqué pouvant avoir entre autres des ramifications dans des paradis fiscaux.
[32] Il faut prendre en considération la complexité des enquêtes nécessaires pour démasquer des présumés fraudeurs qui, habilement, tout au long de leur route, dissimulent les traces de leurs méfaits. Le Bureau a omis de considérer que David Mizrahi était en mesure de collaborer à la progression d'enquêtes touchant plusieurs personnes et 'entités (notamment Themistoklis Papadopoulos, Mario Bright, Anna Papathanasiou, Joseph Jekkel, Franco Mignacca, Triglobal Central Capital Management Inc., PNB Management Inc. et Focus Management Inc.) ciblées par l'ordonnance de blocage du 21 décembre 2007 qui ne le touchait pas personnellement.
[33] La décision du Bureau du 12 mai 2008 est déraisonnable. Elle ne respecte pas la considération qui doit être accordée aux recommandations communes sur sanction et n'apporte aucune explication du peu de poids qu'elle attribue à l'aide que David Mizrahi pouvait apporter à une enquête parallèle à celle qui l'avait amené à être visé par une ordonnance de blocage, le 24 janvier 2008. Bref, le Bureau n'a pas accordé à l'intérêt public toute l'importance que l'Autorité lui accordait en fonction des informations plus complètes qu'elle possédait. Le Bureau a exercé incorrectement la discrétion que la Loi lui accordait alors en fonction de l'intérêt public:
Intérêt public.
323.5. Sous réserve du troisième alinéa de l'article 93 de la Loi sur l’autorité des marchés financiers (chapitre A-33.2), le Bureau exerce la discrétion qui lui est conférée en fonction de l'intérêt public.
2002, c. 45, a. 682; D. 1366-2003, a. 8; 2004, c. 37, a. 90.
(Nos soulignements)
[34] L'article 93 de la Loi sur l'autorité des marchés financiers se lisait ainsi le 12 mai 2008:
Pouvoirs.
93. Le Bureau exerce, à la demande de l'Autorité ou de toute personne intéressée, les pouvoirs prévus à la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1) relativement:
1° au retrait, à la suspension ou à la restriction des droits conférés par l'inscription d'un courtier ou d'un conseiller en valeurs en vertu de l'article 152 de cette loi;
2° à une ordonnance concernant la conduite à tenir à l'égard d'une personne morale, société ou entité exerçant l'activité de bourse ou de compensation de valeurs en vertu de l'article 172 de cette loi;
2.1° à une ordonnance dans le cadre d'une offre publique d'achat ou de rachat en vertu de l'article 233.2 de cette loi ;
3° à une ordonnance de blocage selon le titre neuvième de cette loi;
4° à la recommandation au ministre pour la nomination d'un administrateur provisoire, pour la liquidation des biens d'une personne ou pour la liquidation d'une société en vertu des articles 257 et suivants de cette loi;
5° au refus du bénéfice d'une dispense en vertu de l'article 264 de cette loi;
6° à l'interdiction d'une activité visant une opération sur valeurs en vertu de l'article 265 de cette loi, sauf dans le cas d'une omission de déposer ou de fournir, conformément aux conditions et modalités déterminées par règlement, l'information périodique au sujet de l'activité et des affaires internes d'un émetteur ou toute autre information réglementaire requise d'un émetteur ou d'une autre personne ;
7° à l'interdiction à une personne d'exercer l'activité de conseiller en valeurs en vertu de l'article 266 de cette loi;
8° à l'interdiction ou à la restriction du démarchage sur une valeur déterminée en vertu de l'article 270 de cette loi;
9° à une ordonnance de blâme en vertu de l'article 273 de cette loi;
10° à l'imposition d'une pénalité administrative, au remboursement des frais d'enquête et à l'interdiction d'agir comme administrateur et dirigeant en vertu des articles 273.1 à 273.3 de cette loi.
Pouvoir de révision.
Le Bureau exerce également les pouvoirs de révision des décisions visées à l'article 322 de cette loi.
Appréciation des faits.
Le Bureau ne peut, lorsqu'il apprécie les faits ou le droit aux fins du deuxième alinéa, substituer son appréciation de l'intérêt public à celle que l'Autorité en avait faite pour prendre sa décision.
2002, c. 45, a. 93; 2004, c. 37, a. 90; 2006, c. 50, a. 117.
(Nos soulignements)
[35] Cet article 93 de la Loi sur l'autorité des marchés financiers est maintenant fort différent depuis les amendements apportés après le 12 mai 2008 par le Projet de loi no 64 (2008, chapitre 7, article 11), sanctionné le 28 mai 2008, Loi modifiant la Loi sur l'autorité des marchés financiers et d'autres dispositions législatives, et, surtout, par le Projet de loi no 77 (2008, chapitre 24, article 192), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés:
Fonctions et pouvoirs.
93. Le Bureau exerce, à la demande de l'Autorité ou de toute personne intéressée, les fonctions et pouvoirs prévus par la Loi sur les instruments dérivés (chapitre I-14.01) et la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1).
Appréciation de l'intérêt public.
Le Bureau ne peut, lorsqu'il apprécie les faits ou le droit pour l'application de ces lois, substituer son appréciation de l'intérêt public à celle que l'Autorité en avait faite pour prendre sa décision.
2002, c. 45, a. 93; 2004, c. 37, a. 90; 2006, c. 50, a. 117; 2008, c. 7, a. 11; 2008, c. 24, a. 192
(Nos soulignements)
[36] De toute évidence, le législateur a voulu restreindre pour l'avenir la possibilité de contrôle du Bureau sur les appréciations de l'Autorité en matière d'intérêt public.
Les autres moyens soulevés par l'Appelant
[37] Dans son avis d'appel, David Mizrahi formule aussi d'autres moyens d'appel d'ordre procédural ou juridictionnel. L'Autorité conteste ces motifs subsidiaires. Comme le Tribunal en a informé les parties à l'audience, il n'est pas nécessaire de disposer de ces autres moyens d'appel dans la mesure où le Tribunal accepte les prétentions non contestées de l'appelant sur son moyen principal.
La norme de contrôle
[38] En ne suivant pas les prescriptions jurisprudentielles pertinentes, le Bureau a rendu une décision qui ne répond pas aux exigences de la motivation en matière disciplinaire pour écarter des recommandations communes sur sanction.
[39]
En rejetant la demande de levée d'opération sur valeurs, le Bureau ne
s'est pas acquitté correctement de ses devoirs imposés par l'article 24 de la Charte
des droits et
libertés de la personne[34]
et l'article
323.9
de la Loi sur les valeurs mobilières[35].
Cette question en est une de droit qui ne nécessite aucune déférence comme le
Tribunal en a longuement traité dans Culmer c. Autorité des marchés
financiers[36].
[40] Comme le signale le Tribunal des professions dans Pépin c. Avocats[37], l'accroc procédural ou la violation de l'équité procédurale exige l'application de la norme de la décision correcte sans qu'il ne soit nécessaire de procéder à une analyse détaillée relative à la norme de contrôle applicable:
[…]
[31] De l’avis du Tribunal, la question soulevée par l’appelant vise la façon de procéder du Comité, qui, sans en informer les parties, écarte la recommandation conjointe et appuie sa décision d’imposer une amende sur la preuve faite préalablement à l’enregistrement du plaidoyer de culpabilité. Par voie de conséquence, le Comité prive les parties de la possibilité d’être entendues à l’égard des motifs de scepticisme qu’il entretient.
[32] Il s’agit d’un accroc à l’équité procédurale et il y a lieu, dans un premier temps, de déterminer s’il faut recourir à l’analyse relative à la norme de contrôle.
[33] Dans l’affaire Rivest[38] la Cour d’appel, par les motifs du Juge Chamberland, a décidé ce qui suit :
« [18] L'intimée plaide au contraire que la question de la norme de contrôle ne se pose pas véritablement puisque le premier volet du recours en révision judiciaire ne vise pas l'interprétation de la LATMP, ou encore l'appréciation de la preuve, mais plutôt la manière dont la CLP a mené le débat, celle-ci n'ayant pas, selon elle, respecté les exigences minimales d'équité procédurale et ayant violé la règle audi alteram partem.
[19] À mon avis, l'intimée a raison sur ce point. La question de l'identification de la norme de contrôle appropriée, selon l'analyse pragmatique et fonctionnelle, ne se pose pas en l'espèce. Le premier volet du recours en révision judiciaire concerne exclusivement la manière dont la CLP a mené le débat. »
[34] Cette décision réfère à l’affaire Moreau-Bérubé[39] où la Juge Arbour traite ainsi de la question de la norme de révision judiciaire applicable lorsqu’il s’agit d’équité procédurale :
« 74 La troisième question n’exige pas qu’on détermine la norme de révision judiciaire applicable. Pour vérifier si un tribunal administratif a respecté l’équité procédurale ou l’obligation d’équité, il faut établir quelles sont les procédures et les garanties requises dans un cas particulier. (Voir de façon générale Knight c. Indian Head School Division No. 19, [1990] 1 R.C.S. 653 , et Baker, précité.)
75 L’obligation de se conformer aux règles de justice naturelle et à celles de l’équité procédurale s’étend à tous les organismes administratifs qui agissent en vertu de la loi (voir Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311 ; Cardinal c. Directeur de l’établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643 , p. 653; Baker, précité, par. 20; Therrien, précité, par. 81). Ces règles comportent l’obligation d’agir équitablement, notamment d'accorder aux parties le droit d’être entendu (la règle audi alteram partem). (…) »
[35] Plus récemment, dans l’affaire Corriveau[40], notre Tribunal reprend ce principe et décide qu’il n’y a pas lieu d’effectuer l’analyse pragmatique et fonctionnelle en vue de déterminer la norme d’intervention appropriée dans la mesure où la question en litige relève non pas de l’appréciation de la preuve ou de l’interprétation de la loi, mais bien « de la manière dont l’instance décisionnelle s’y prend pour arriver à la décision dont appel »[41].
[36] Référant à l’affaire Québec (Procureur général) c. Germain Blanchard Ltée de la Cour d’appel et l’affaire Ellis-Don Limited de la Cour suprême[42], notre Tribunal conclut que c’est la norme de la décision correcte qui trouve application en cas de contravention à l’équité procédurale.
[37] En raison de ce qui précède, le Tribunal peut rendre la décision qui lui apparaît appropriée sans faire preuve d’un degré élevé de déférence.
[…]
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
ACCUEILLE l'appel;
INFIRME les conclusions de la décision du Bureau de Décision et de Révision en Valeurs Mobilières du 12 mai 2008[43] se lisant:
« Par conséquent, en vertu de l’article 265 de la Loi sur les valeurs mobilières prenant en considération les motifs déjà exprimés et après avoir délibéré, le Bureau maintient l’ordonnance d’interdiction d’opération sur valeurs qui a été prononcée le 24 janvier 2008 jusqu’au 31 décembre 2012. Il modifie cependant l’ordonnance afin d’exclure les opérations sur valeurs effectuées par l’intimé à des fins strictement personnelles. »
ET en considération des engagements contenus dans la lettre du 6 mai 2008, communiqués au Bureau de Décision et de Révision en Valeurs Mobilières le 7 mai 2008:
INTERDIT à David Mizrahi toute activité en vue d’effectuer une opération sur valeurs sur toutes formes d’investissements visés par la Loi sur les valeurs mobilières, autrement qu’en conformité avec son inscription de représentant en assurance de personnes, en assurance collective de personnes, en planification financière et en courtage en épargne collective;
Avec dépens.
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__________________________________ Jean-F. Keable, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
6 octobre 2009 |
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[1] Autorité des marchés financiers c. Papadopoulos, 2008, QCBDRVM 1.
[2] Autorité des marchés financiers c. Mizrahi, 2008, QCBDRVM 22.
[3] 329. L'appel ne suspend pas l'exécution de la décision attaquée, à moins que le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières ou un juge de la Cour du Québec n'en décide autrement.
[4] Selon les représentations de l'avocat de l'Autorité lors de l'audience du 6 octobre 2009.
[5] Autorité des marchés financiers c. Gestion de capital Triglobal inc., 2007, QCBDRVM 59.
[6] Supra note 1.
[7] L'article 4 a été modifié par le Projet de loi no 77 (2008, chapitre 24, article 182), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés.
[8] L.R.Q., c. A-33.2 (ci-après : Loi sur l’autorité des marchés financiers).
[9] L'article 237 a été modifié par le Projet de loi no 64 (2008, chapitre 7, article 156), sanctionné le 28 mai 2008, Loi modifiant la Loi sur l'autorité des marchés financiers et d'autres dispositions législatives, et par le Projet de loi no 77 (2008, chapitre 24, article 212), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés.
[10] L'article 239 a été modifié par le Projet de loi no 64 (2008, chapitre 7, article 157), sanctionné le 28 mai 2008, Loi modifiant la Loi sur l'autorité des marchés financiers et d'autres dispositions législatives.
[11] Cette période est maintenant de 120 jours depuis les modifications apportées par le Projet de loi n° 77 (2008, chapitre 24, article 213), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés.
[12] Voir le paragraphe 9 du présent jugement et l'article 244 de la Loi sur les valeurs mobilières.
[13] L'article 93 a été modifié par le Projet de loi no 77 (2008, chapitre 24, article 192), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés.
[14] L'article 94 a été modifié par le Projet de loi no 77 (2008, chapitre 24, article 193), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés.
[15] L'article 323.8 a été modifié par le Projet de loi no 64 (2008, chapitre 7, article 166), sanctionné le 28 mai 2008, Loi modifiant la Loi sur l'autorité des marchés financiers et d'autres dispositions législatives.
L'article 323.8.1, apportant des modifications importantes, a été ajouté par le Projet de loi no 77 (2008, chapitre 24, article 192), sanctionné le 20 juin 2008, Loi sur les instruments dérivés.
[16] Voir le paragraphe 10 du présent jugement.
[17] Voir le paragraphe 14 du présent jugement.
[18] Supra note 1.
[19] Supra note 5.
[20] Supra note 1 et voir le paragraphe 17 du présent jugement, et plus particulièrement à la fin de l'ordonnance no 1.
[21] Supra note 5.
[22] Supra note 1.
[23] Autorité des marchés financiers c. Papadopoulos, 2009, QCBDRVM 33.
[24] Autorité des marchés financiers c. Gestion de Capital Triglobal inc., 2009, QCBDRVM 28.
[25] Boucher-Gagnon c. R., 2006 QCCA 903 .
[26] Verdi-Douglas c. R., (2002) 162 C.C.C. (3d) 37 aux paragr. 42-43 (Qué. C.A.). Voir aussi R. c. Cerasuolo, (2001) 151 C.C.C. (3d) 445 (C.A. Ont); R. c. Martel (12 août 2005), Québec 200-10-001747-059, J.E. 2005-1528 (C.A.); Méthot c. La Reine (9 décembre 2005), Montréal 500-10-002578-035, J.E. 2006-105 (C.A.); R. c. Guignard, (2005) 195 C.C.C. (3d) 145 (N.B. C.A.).
[27] Verdi-Douglas c. R., ibid.
[28] R. v. Tkachuk, (2001) 159 C.C.C. (3d) 434 (Alta. C.A.); R. v. Sinclair, (2004) 185 C.C.C. (3d) 569 (Man. C.A.).
[29] Dubuc c. R., (1998) 131 C.C.C. (3d) 250 (Qué. C.A.); R. v. Bezdan, (2001) 154 B.C.A.C. 122; R. v. Sinclair, (2004) 185 C.C.C. (3d) 569 (Man. C.A.); Leclaire c. R. (3 avril 2006), Montréal 500-10-003305-057, B.E. 2006BE-496 (C.A.).
[30] R. v. Sinclair, ibid.; R. v. McNeil, [2006] O.J. no 1561 (C.A.) (QL).
[31] Pépin c. Avocats (Ordre professionnel des), 2008 QCTP, p. 152, paras. 38 à 45.
[32] Vanchestein (E), «Le Top Ten» 2008 du Tribunal des professions, EYB 2009 DEV 1550.
[33] Rankin (Re), 2008, LNONOSC 175.
[34] L.R.Q., c. 12.
Motifs de privation de liberté:
24. Nul ne peut être privé de sa liberté ou de ses droits, sauf pour les motifs prévus par la loi et suivant la procédure prescrite.
[35] Décision motivée.
323.9. Le Bureau est tenu de motiver la décision qui affecte défavorablement les droits d'une personne.
[36] Culmer c. Autorité des marchés financiers, 2008, QCCQ 2804, paras. 7 à 50.
[37] Supra note 31.
[38] Rivest c. Bombardier inc. (centre de finition), 2007 QCCA 622 .
[39] Moreau-Bérubé c. Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), [2002] 1 R.C.S. 249 .
[40] Corriveau c. Avocats (Ordre professionnel des), 2008 QCTP 46 .
[41] Id., page 13.
[42] Ellis-Don Limited c. Ontario (Commission des relations de travail), AZ-50082587 , 2001 CSC 4 , J.E. 2001-315 , D.T.E. 2001T-138 , [2001] 1 R.C.S. 221 ; Québec (Procureur général) c. Germain Blanchard Ltée, 2005 QCCA 605 .
[43] Autorité des marchés financiers c. Mizrahi, QCBDRVM 22.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.