Décision

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A.B. c. Robillard

2022 QCCA 1279

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

 :

500-09-700042-211

(500-17-117012-214)

 

DATE :

 22 septembre 2022

 

 

DEVANT

L'HONORABLE

GUY COURNOYER, J.C.A.

 

 

A.B.

FONDATION A.B.

REQUÉRANTS – demandeurs

c.

 

JEAN-FRANÇOIS ROBILLARD

DIS SON NOM

DELPHINE BERGERON

A.A.

INTIMÉS – défendeurs

et

SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LE DEVOIR

INTIMÉS – intervenants

 

 

JUGEMENT

 

 

[1]                Dans l’arrêt A.B. c. Robillard[1], la Cour rejette l’appel des requérants qui souhaitaient exercer un recours en diffamation contre les intimés tout en préservant leur anonymat.

[2]                Jusqu’à l’arrêt rectificatif de la Cour rendu le 1 septembre 2022 et dont les parties n’ont été informées que le 7 septembre 2022, l’identité des requérants ne pouvait être révélée.

[3]                Ils demandent maintenant selon le paragraphe 65.1(2) de la Loi sur la Cour suprême qu’un sursis d’exécution de l’arrêt de la Cour soit accordé afin de préserver leur anonymat jusqu’à ce que la Cour suprême ait tranché leur demande d’autorisation d’appel ou, le cas échéant, l’appel lui-même.

[4]                Le juge Moore résume les principes entourant une telle demande dans Awanda c. AMBC Ventures Inc.[2] :

[2]         Cette requête est régie par l’article 65.1 de la Loi sur la Cour suprême et l’article 390 alinéa 2 du Code de procédure civile. L’objectif de cet article est de « permettre au juge d’appel de rendre une ordonnance de sursis efficace qui permettra à son tour à la Cour suprême de rendre une décision qui ne sera pas dénuée de sens et d’efficacité ». Les critères sont bien établis et se résument ainsi :

1)   L’appel qu’entend porter le requérant soulève-t-il des questions sérieuses?

2)   L’exécution immédiate de l’arrêt de la Cour d’appel est-elle susceptible de causer un préjudice sérieux ou irréparable?

3)   La prépondérance des inconvénients favorise-t-elle le maintien du statu quo jusqu’au jugement de la Cour suprême?

[5]                Les exceptions au caractère public des débats judiciaires sont rares. La jurisprudence en dessine le pourtour progressivement. Sans me prononcer sur les chances de succès, je ne puis convenir que les questions soulevées par les requérants ne sont pas sérieuses, et ce, même si leur appel a été rejeté par la Cour.

[6]                L’anonymat des requérants a été préservé jusqu’à l’arrêt rectificatif de notre Cour. Il est vrai que depuis celui-ci aucune ordonnance n’empêchait que l’identité des requérants ne soit révélée. Cela dit, même si les requérants n’avaient pas présenté les requêtes nécessaires afin de préserver leur anonymat, les mis en cause ont accepté avec élévation de ne pas le faire, un choix qui mérite d’être noté.

[7]                Dans les circonstances, la nature de la question débattue – le droit des requérants d’intenter un recours judiciaire anonymement – exige de préserver leur anonymat durant le processus d’obtention d’une autorisation d’appel à la Cour suprême ou, le cas échéant, jusqu’à une décision finale soit rendue par la Cour suprême sur le fond du pourvoi.

[8]                Les mis en cause rappellent avec justesse l’importance du principe de la contemporanéité de l’examen des débats judiciaires reconnus dans l’arrêt Guay c. Gesca ltée[3].

[9]                Cependant, dans les circonstances particulières de ce dossier où il a été interdit de révéler l’identité des requérants durant tout le processus judiciaire jusqu’à l’arrêt rectifié de la Cour, je ne vois aucune raison de refuser la demande des requérants même s’il faut admettre que pendant quelques jours il aurait été possible de publier leur identité. En effet, toute autre décision rendrait illusoire le recours des requérants devant la Cour suprême qui vise justement à faire reconnaître leur droit d’ester en justice de manière anonyme.

[10]           Il va de soi que les requérants doivent procéder avec diligence à la signification et au dépôt de l’avis de demande d’autorisation d’appel.

POUR CES MOTIFS, LE SOUSSIGNÉ :

[11]           ACCUEILLE la requête pour sursis;

[12]           SURSEOIT à l'exécution de l'arrêt de la Cour rendu le 31 août 2022 (rectifié le 1 septembre 2022), et ce, jusqu'au jugement de la Cour suprême rejetant la demande d'autorisation de pourvoi ou, si l’autorisation est accordée, jusqu’au jugement de la Cour suprême sur le pourvoi;

[13]           INTERDIT la publication de l’identité des requérants et de toute information permettant de les identifier jusqu'au jugement de la Cour suprême rejetant la demande d'autorisation de pourvoi ou, si l’autorisation est accordée, jusqu’au jugement de la Cour suprême sur le pourvoi;

[14]           LE TOUT, avec les frais de justice.

 

 

 

 

GUY COURNOYER, J.C.A.

 


Me Josée Therrien

VERREAU DUFRESNE VÉZINA

Pour les requérants

 

Me Justin Wee

Me Imane Melab

ARSENEAULT, DUFRESNE, WEE AVOCATS

Pour les intimés Jean-François Robillard, Dis son nom, Delphine Bergeron et A.A.

 

Me Christian Leblanc

FASKEN MARTINEAU DUMOULIN

Pour les intimés Société Radio-Canada et Le Devoir

 

Date d’audience :

14 septembre 2022

 


[1]  A.B. c. Robillard, 2022 QCCA 959.

[2]  2022 QCCA 1222.

[3]  Guay c. Gesca ltée, 2013 QCCA 343, paragr. 115.

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