Décision

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Jacques c. Pétroles Therrien inc.

2015 QCCS 6071

 

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

 

 

Nº :

200-06-000102-080

 

 

DATE :

17 décembre 2015

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

BERNARD GODBOUT, j.c.s.

______________________________________________________________________

 

 

SIMON JACQUES

MARCEL LAFONTAINE

ASSOCIATION POUR LA PROTECTION AUTOMOBILE

 

Demandeurs

 

c.

 

LES PÉTROLES THERRIEN INC. ET AL

 

Défendeurs

 

 

 

JUGEMENT SUR UNE REQUÊTE POUR SCISSION DE L’INSTANCE

______________________________________________________________________

 

[1]      

JG 1744

 
Se prévalant de l’article 273.1[1] du Code de procédure civile, les défendeurs présentent une requête pour scission de l’instance afin que le montant des dommages soit déterminé avant même que soit décidée la question de la responsabilité.

Le contexte

[2]       Le 30 novembre 2009, notre Cour, alors présidée par Mme la juge Dominique Bélanger (maintenant à la Cour d’appel du Québec), autorisait l’exercice du présent recours collectif.

[3]       Les demandeurs, MM. Simon Jacques, Marcel Lafontaine et l’Association pour la protection automobile, produisaient au greffe de la Cour le 12 février 2010 et signifiaient aux défendeurs une requête introductive d’instance qu’ils ont par la suite amendée les 15 juin et 1er décembre 2010, ainsi que le 6 octobre 2014.

[4]       Les demandeurs reprochent essentiellement aux défendeurs de s’être livrés à des activités anticoncurrentielles telles que prohibées par l’article 45 de la Loi sur la concurrence (L.R.C., 1985, ch. c-34) (« la Loi »), ouvrant ainsi la voie à un recours pour manquement à leur devoir prévu à l’article 1457 du Code civil du Québec (« C.c.Q.») et en recouvrement « d’une somme égale au montant de la perte ou des dommages (qu’ils sont) reconnu(s) avoir subis », tel que le précise l’article 36 de la Loi.

[5]       Cinquante-six (56) des défendeurs ont individuellement déposé au dossier de la Cour une défense. Elles portent toutes la date du 28 octobre 2011.

[6]       Certains de ces défendeurs présentent maintenant une requête pour scission de l’instance dont les conclusions visent à ce que soient déterminés, préalablement à la présentation de la preuve sur la responsabilité :

« […] les données et la méthodologie appropriée pour le calcul des dommages, et ainsi trancher les divergences des experts à ce sujet;

[…] le quantum des dommages en ¢ / litre pour chacun des marchés de Sherbrooke, Magog, Thetford Mines et Victoriaville »

[7]       Les experts de l’une et l’autre des parties ont complété leur rapport. À la suite d’une ordonnance de la Cour prononcée le 10 avril 2015, rectifiée le 28 avril 2015, ces experts se sont rencontrés les 29 et 30 juillet 2015, rencontre au terme de laquelle ils ont complété un « joint expert report » qui porte la date du 9 octobre 2015[2].

[8]       Les rapports des experts considérés aux fins de la présente analyse sont les suivants [3] :

-       L’expert des demandeurs (« C ») a complété un premier rapport d’expertise le 30 mars 2012;

-       L’expert des défendeurs (« S ») a également complété un premier rapport d’expertise le 31 octobre 2012;

-       L’expert des demandeurs (« C ») a répondu au rapport de l’expert des défendeurs (« S ») le 15 octobre 2013;

-       L’expert des défendeurs (« S ») a répliqué à la réponse de l’expert des demandeurs (« C ») le 11 novembre 2014;

-       Un second expert mandaté par les défendeurs (« X ») a commenté les rapports de l’expert des demandeurs (« C ») et ceux de l’expert des défendeurs (« S »). Le rapport de ce deuxième expert des défendeurs (« X ») porte la date du 12 novembre 2014;

-       L’expert des demandeurs (« C ») a répondu au rapport du deuxième expert des défendeurs (« X ») le 18 juin 2015;

-       Le premier expert des défendeurs (« S ») a produit une réponse à ce dernier rapport du 18 juin 2015 de l’expert des demandeurs (« C »), le 20 juillet 2015;

-       Le deuxième expert des défendeurs (« X ») a répliqué à la réponse de l’expert des demandeurs (« C »), également le 20 juillet 2015;

-       Enfin, à la suite de leur rencontre les 29 et 30 juillet 2015, les trois experts (« C »), (« S ») et (« X ») ont communiqué, à la demande du tribunal, un rapport conjoint le 9 octobre 2015;

Représentations des parties

[9]       Selon les défendeurs qui présentent la requête pour scission de l’instance, malgré que l’unicité du procès soit la règle, celle-ci n’a plus le caractère exceptionnel et limité qu’on lui prêtait avant les amendements apportés au Code de procédure civile en 2003.

[10]    L’article 273.1 C.p.c. doit se lire en corrélation avec l’article 4.2 C.p.c.[4] qui fait de la règle de la proportionnalité un principe directeur de la procédure.

[11]    En matière de recours collectif, l’article 1045 C.p.c.[5] poursuit le même objectif.

[12]    Dans le présent cas, la décision sur le montant des dommages revêt une importance particulière car d’une part, elle peut devenir un facteur déterminant à l’occasion de l’évaluation des démarches ultérieures eu égard au principe de la proportionnalité et d’autre part, elle peut changer les perspectives du dossier favorisant même, le cas échéant, son règlement.

[13]    Les demandeurs contestent cette requête pour plusieurs motifs.

[14]    Selon eux, la preuve sur la responsabilité et celle sur le montant des dommages sont étroitement reliées, cette dernière étant, dans les circonstances particulières du présent dossier, tributaire de l’ensemble des faits mis en preuve.

[15]    La seule analyse technique qui découle des rapports d’experts n’est pas suffisante en soi pour établir le montant des dommages. L’analyse des faits qu’on entend mettre en preuve dans le contexte de la recherche de la responsabilité contribuera à identifier la méthode de calcul de ce montant, sujet de désaccord entre les experts. Les demandeurs entendent ainsi démontrer, par prépondérance des probabilités, l’ampleur des dommages.

[16]    Bref, selon les demandeurs, scinder l’instance les priverait de leur droit de présenter une preuve factuelle et complémentaire aux expertises, visant à établir le réel montant des dommages. Un éventuel jugement sur ce montant, basé sur la seule analyse technique de la preuve d’experts, ne disposerait pas de cette question de façon complète et satisfaisante.

[17]    Une preuve complémentaire, que les demandeurs ne sont pas en mesure de présenter à ce moment-ci, est donc nécessaire pour établir la réclamation.

[18]    Dans ce contexte, scinder l’instance n’est certes pas une décision qui s’inscrit dans la poursuite de la recherche de la vérité, caractérisée par le principe de la proportionnalité. D’autant plus que selon les demandeurs, la seule possibilité de règlement suggérée par les défendeurs n’est évidemment réaliste que si la thèse de leur expert (« S ») est retenue.

Analyse

[19]    L’unicité du procès est toujours et doit demeurer la règle. Toutefois, n’étant plus une mesure exceptionnelle, la scission de l’instance pourra être appropriée si elle permet d’accélérer le processus judiciaire tout en diminuant les coûts, sans qu’il y ait la présence d’un risque démesuré d’un chevauchement de la preuve d’une étape à l’autre.

[20]    Dans un tel contexte et si elle est adéquatement gérée avec la collaboration des parties et de leurs procureurs, la scission de l’instance devrait respecter la règle de la proportionnalité, favorisant par le fait même l’accès à la justice.

[21]    La requête introductive d’instance précise que le présent recours collectif  comporte quatre groupes, soit : « toutes les personnes… qui ont acheté de l’essence à au moins une reprise entre le 1er janvier 2001 et le 30 juin 2006 sur le territoire de la  ville de » (1) Victoriaville, (2) Thetford Mines, (3) Sherbrooke et (4) Magog.

[22]    La période visée est donc du 1er janvier 2001 au 30 juin 2006, pour chacune des quatre villes concernées.

[23]    Par ailleurs, le recours est basé sur les articles 1457 C.c.Q. et 36 de la Loi sur la concurrence qui réfère à l’article 45 de cette Loi.

[24]    Ces articles sont rédigés comme suit :

1457. Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s'imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.

Elle est, lorsqu'elle est douée de raison et qu'elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu'elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu'il soit corporel, moral ou matériel.

Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d'une autre personne ou par le fait des biens qu'elle a sous sa garde.

      36. (1) Toute personne qui a subi une perte ou des dommages par suite :

a) soit d’un comportement allant à l’encontre d’une disposition de la partie VI;

[…]

peut, devant tout tribunal compétent, réclamer et recouvrer de la personne qui a eu un tel comportement […] une somme égale au montant de la perte ou des dommages qu’elle est reconnue avoir subis, ainsi que toute somme supplémentaire que le tribunal peut fixer et qui n’excède pas le coût total, pour elle, de toute enquête relativement à l’affaire et des procédures engagées en vertu du présent article.

(2) Dans toute action intentée contre une personne en vertu du paragraphe (1), les procès-verbaux relatifs aux procédures engagées devant tout tribunal qui a déclaré cette personne coupable d’une infraction visée à la partie VI [...] constituent, sauf preuve contraire, la preuve que la personne contre laquelle l’action est intentée a eu un comportement allant à l’encontre d’une disposition de la partie VI […] et toute preuve fournie lors de ces procédures quant à l’effet de ces actes ou omissions sur la personne qui intente l’action constitue une preuve de cet effet dans l’action.

[…]

Commet une infraction quiconque, avec une personne qui est son concurrent à l’égard d’un produit, complote ou conclut un accord ou un arrangement :

a) soit pour fixer, maintenir, augmenter ou contrôler le prix de la fourniture du produit;

[…]

(2) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) est coupable d’un acte criminel et encourt un emprisonnement maximal de quatorze ans et une amende maximale de 25 000 000 $, ou l’une de ces peines.

[25]    Enfin, les critères d’analyse d’une requête pour scission de l’instance proposés par la jurisprudence[6] se résument essentiellement à répondre aux questions suivantes :

§  Les questions en litige lors de la première étape sont-elles simples ou complexes?

§  Les questions en litige lors de la première étape sont-elles distinctes de celles qui seront traitées à la deuxième étape ou étroitement liées à celles-ci?

§  La décision qui sera rendue à l’issue de la première étape est-elle susceptible de mettre fin au litige, de limiter la portée des questions à débattre à la seconde étape ou d’augmenter sensiblement les chances d’en arriver à un règlement du dossier?

§  Quelles sont les ressources que les parties ont déjà consacrées à l’une ou l’autre des questions en litige ou à l’ensemble de celles-ci?

§  Quels avantages la scission de l’instance est-elle susceptible de procurer aux parties par rapport aux risques ou aux inconvénients qu’elle pourrait leur faire subir?

[26]    La scission de l’instance que proposent les défendeurs, soit d’établir au cours d’une première étape le montant des dommages avant de disposer de la responsabilité, assure-t-elle, dans le contexte du présent dossier, le respect de la règle de proportionnalité? Favorise-t-elle l’accès à la justice? Bref, s’inscrit-elle dans le cadre d’une saine administration de la justice?

[27]    Voilà essentiellement les questions auxquelles l’application des critères aux faits du présent dossier devrait répondre.

Le caractère simple ou complexe des questions en litige

[28]    De toute évidence, la détermination du montant des dommages dans le présent dossier s’avère une question complexe.

[29]    En effet, malgré que les experts des demandeurs et ceux des défendeurs adoptent une même méthodologie d’analyse visant à quantifier le montant des dommages, six (6) sujets demeurent l’objet de discussion, dont certains revêtent un caractère fondamental à l’évaluation de ce montant.

[30]    La complexité du sujet, le fait que les rapports d’experts soient maintenant complétés et que les experts se sont rencontrés favorisent, à première vue, la scission de l’instance.

Les questions en litige distinctes ou étroitement liées à celle de la deuxième étape

[31]    C’est précisément l’objection que soulèvent les demandeurs qui essentiellement plaident que la preuve qu’ils entendent présenter sur la responsabilité participera à l’évaluation du montant des dommages.

[32]    Le présent recours collectif est basé sur l’article 1457 C.c.Q. qui requiert la preuve d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité entre celui-ci et la faute.

[33]    Par ailleurs, le recours est aussi basé sur l’article 36 de la Loi sur la concurrence qui crée un droit de poursuite visant à « réclamer et recouvrer de la personne qui a eu un tel comportement […] une somme égale au montant de la perte ou des dommages qu’elle est reconnue avoir subis ».

[34]    C’est précisément de la preuve des dommages dont il serait question à l’occasion d’une première étape. Et cette preuve devrait couvrir la période du 1er janvier 2001 au 30 juin 2006 pour chacune des villes de Victoriaville, Thetford Mines, Sherbrooke et Magog.

[35]    Dans la mesure où les rapports des experts prennent en considération cette particularité du recours, et les représentations des procureurs portent à croire que tel est le cas, la preuve sur la responsabilité, si elle devait avoir une influence sur le volet des dommages, ne devrait peut-être pas être aussi déterminante qu’on veut bien le laisser croire à ce moment-ci, d’autant plus si les expertises sont complètes et donnent les informations nécessaires à tout autre calcul visant à établir le montant des dommages.

[36]    Généralement, les questions en litige portant sur l’évaluation des dommages sont distinctes de celles relatives à la responsabilité. Mais, ces questions sont-elles ici à ce point si étroitement liées qu’elles ne peuvent être traitées séparément? Rien ne démontre que tel est précisément le cas.

[37]    Bien au contraire, les experts de part et d’autre, semblent disposer de toute l’information qui leur a permis de se faire une opinion sur la méthodologie à utiliser pour évaluer les dommages. Toutefois, ils ne s’entendent pas sur les données ou informations de base qu’ils doivent utiliser dans la mise en application de la méthodologie convenue.

[38]    Malgré cette divergence, les travaux que les experts ont été en mesure de compléter à ce jour ne laissent pas croire que les questions en litige à l’une et l’autre des étapes soient si étroitement liées. Ce constat milite en faveur de la scission de l’instance.

Mettre fin au litige, limiter le débat ou augmenter les chances de règlement

[39]    Unanimement, les défendeurs plaident que la quantification des dommages aura certes une influence déterminante sur la poursuite du présent recours collectif.

[40]    Plusieurs défendeurs déclarent, sans réserve, qu’un tel jugement pourrait, le cas échéant, favoriser un règlement du litige ou, à tout le moins, limiter la portée des questions à débattre lors de la seconde étape.

[41]    Il est vrai que les demandeurs plaident que la seule possibilité réaliste de règlement que suggèrent les défendeurs est liée à l’éventualité que la thèse de leur expert (« S ») soit retenue.

[42]    Cela est possible. Toutefois, même si tel était le cas, la scission d’une instance ne vise pas nécessairement à mettre fin à un litige ou augmenter les chances de règlement, elle poursuit uniquement un objectif de saine administration de la justice.

[43]    Dans le présent cas, la scission de l’instance pourrait à tout le moins, avoir une influence, espérons-la déterminante, sur la poursuite du présent recours collectif.

Les ressources consacrées à l’une ou l’autre des questions

[44]    La mise en contexte ci-dessus résume les efforts déployés de part et d’autre en ce qui a trait à l’évaluation et la quantification des dommages dans le présent dossier.

[45]    Tel qu’il a été mentionné précédemment, à la suite d’une ordonnance prononcée le 10 avril 2015, rectifiée le 28 avril 2015, les experts se sont rencontrés les 29 et 30 juillet 2015, rencontre au terme de laquelle ils ont complété et communiqué un « joint expert report » qui porte la date du 9 octobre 2015. Ce travail est donc complété.

[46]    Par ailleurs, essentiellement basée sur l’article 36 de la Loi sur la concurrence, la preuve que les demandeurs entendent présenter quant à la responsabilité est grandement tributaire de la preuve présentée dans les poursuites pénales instituées aux termes de l’article 45 de cette loi.

[47]    Il semblerait que l’exercice de communication entrepris à la suite de l’arrêt Pétrolière impériale c. Jacques, 2014 CSC 66 est depuis peu complété.

[48]    Dans un jugement sur une requête pour permission d’interroger l’enquêteur chef du Bureau de la concurrence prononcée le 8 avril 2015 dans le présent dossier, le soussigné écrivait :

[15] […] il est à ce moment-ci dans l’intérêt des membres du groupe qu’une analyse approfondie des éléments de preuve que leurs procureurs ont et auront incessamment en leur possession soit effectuée eu égard au fardeau de preuve qu’ils doivent rencontrer, soit une preuve prépondérante, avant que ne soient effectuées d’autres démarches préalables s’inscrivant dans le cadre des procédures spéciales d’administration de la preuve prévues au Code de procédure civile.[7]

[49]    Cela est toujours vrai et démontre bien que le travail qui doit être effectué de part et d’autre en vue de la présentation d’une preuve portant sur la responsabilité est loin d’être terminé.

[50]    D’ailleurs, il est à prévoir que dans le contexte du présent recours, d’éventuels litiges à cet égard devront à nouveau être tranchés.

[51]    Les ressources de toute nature que l’une et l’autre des parties ont à ce jour consacrées à l’évaluation et à la quantification des dommages militent donc en faveur de la scission de l’instance.

Avantages, risques ou inconvénients

[52]    Ce qui précède démontre assez clairement les avantages de la scission d’instance.

[53]    Quant aux risques ou inconvénients réels ou appréhendés, il convient de rappeler que la scission de l’instance n’est rien d’autre qu’une mesure procédurale qui, en principe, ne peut avoir pour effet de faire perdre des droits à l’une ou l’autre des parties.

[54]    L’article 2 du Code de procédure civile prend soin de préciser que «  Les règles de procédure édictées par ce code sont destinées à faire apparaître le droit et en assurer la sanction […] ». Ce principe est d’ailleurs repris à l’article 25 du Code de procédure civile qui entrera en vigueur le 1er janvier 2016, à savoir que : « Les règles du Code sont destinées à favoriser le règlement des différends et des litiges, à faire apparaître le droit et à en assurer la sanction. »

[55]    Dans ce contexte, la scission de l’instance ne devrait pas avoir pour effet de priver de quelque manière que ce soit l’une ou l’autre des parties du droit à une défense pleine et entière, quelle que soit l’étape de l’instruction.

* * *

[56]    En conclusion, la scission de l’instance dans le contexte du présent recours collectif apparaît une mesure susceptible d’accélérer le déroulement de l’instance et de simplifier la preuve, sans que cela ne porte préjudice à une partie ou aux membres, mesure qui par ailleurs respecte le principe de la proportionnalité et qui s’inscrit dans la poursuite de la recherche de la vérité et d’une saine administration de la justice.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[57]    ACCUEILLE la requête pour scission de l’instance;

[58]    ORDONNE la scission de la présente instance de façon à ce que la preuve portant sur l’évaluation et la détermination du montant des dommages soit présentée dans une première étape de l’instruction qui précédera l’audition de la preuve sur la responsabilité qui elle, sera exposée lors d’une deuxième étape;

[59]    CONVOQUE les procureurs de toutes les parties à une conférence préparatoire, dont la date sera fixée à la plus proche convenance, afin que soient discutées :

-       Toutes questions relatives à cette première étape de l’instruction portant notamment, mais non limitativement sur :

§  Les amendements prévisibles aux procédures;

§  Les interrogatoires préalables;

§  Les admissions;

§  La communication des pièces;

§  L’identification des témoins et la durée de leur interrogatoire et contre-interrogatoire;

§  Le matériel nécessaire à la présentation de la preuve;

§  Les plaidoiries;

§  La durée d’audition de la première étape de l’instruction;

§  Les dates retenues pour cette première étape de l’instruction;

-       Toutes autres questions que pourrait soumettre l’une ou l’autre des parties visant à faciliter l’instruction et préserver leurs droits.

[60]    Frais à suivre.

 

 

__________________________________

BERNARD GODBOUT, j.c.s.

 

Pour les demandeurs

Me Claudia Lalancette

Me Nicolas Guimond

Bernier Beaudry

 

Me Guy Paquette

Me Élaine Yi

M. William St-Cyr, stagiaire

Paquette Gadler inc.

 

Pour les défendeurs

Me Louis P. Bélanger

Stikeman Elliott

et en représentations pour Arnault, Thibault Cléroux et Me Roxane Hardy

 

Me Pascale Cloutier

Miller Thomson

 

Me Billy Katelanos

Gowlings Lafleur

 

Me Élizabeth Meloche

Me Sylvain Lussier

Olser Hoskin & Hartcourt

et en représentations pour Me Donald Béchard (DeBlois avocats)

 

Me Éric Vallières

McMillan S.E.N.C.R.L.

 

Me Anne Merminod

Borden Ladner Gervais

 

Me Julie Chenette

Chenette, boutique de litige inc.

 

Me Louis-Martin O’Neill

Me Pierre-Luc Cloutier

Davies Ward Phillips & Vineberg

et en représentations pour les avocats Morin & Associés inc., Pateras & Iezzoni inc. et Me Louis Belleau

 

Me Daniel O’Brien

Me Jean-François Paré

O’Brien

 

Me Sébastien Caron

LCM Avocats inc.

 

Me Michel C. Chabot

Gravel Bernier Vaillancourt

 

Me Jo-Anne Demers

Clyde & Cie Canada

 

 



[1]     273.1 Le tribunal peut, sur demande, en tout état de cause et en toute matière, scinder l'instance. L'instruction de la demande ainsi scindée se déroule devant un même juge, sauf décision contraire du juge en chef.

[2]     413.1 Lorsque les parties ont chacune communiqué un rapport d'expertise, le tribunal peut, en tout état de cause, même d'office, ordonner aux experts qui ont préparé des rapports contradictoires de se réunir, en présence des parties ou des procureurs qui souhaitent y participer, afin de concilier leurs opinions, de déterminer les points qui les opposent et de lui faire rapport ainsi qu'aux parties dans le délai qu'il fixe.

[3]     Étant donné l’ordonnance de confidentialité, les noms des experts ne sont pas mentionnés.

[4]     4.2 Dans toute instance, les parties doivent s'assurer que les actes de procédure choisis sont, eu égard aux coûts et au temps exigés, proportionnés à la nature et à la finalité de la demande et à la complexité du litige; le juge doit faire de même à l'égard des actes de procédure qu'il autorise ou ordonne.

[5]     1045.  Le tribunal peut, en tout temps au cours de la procédure relative à un recours collectif, prescrire des mesures susceptibles d'accélérer son déroulement et de simplifier la preuve si elles ne portent pas préjudice à une partie ou aux membres; il peut également ordonner la publication d'un avis aux membres lorsqu'il l'estime nécessaire pour la préservation de leurs droits.

[6]     Realsearch inc. c. Valon Kone Brunette, 2003 CFPI 669

[7] Jacques c. Pétroles Therrien inc. 2015 QCCS 1431

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