[1] Par inadvertance deux erreurs d’écriture se sont glissées dans les motifs accompagnant l’arrêt du 11 septembre 2009 :
1. À la page
8 des Motifs de la juge Bich, à la première ligne du paragraphe [40],
ainsi qu’à la page 48, à la neuvième ligne du paragraphe [146], on aurait dû
lire l’« article
[2] EN CONSÉQUENCE, LA COUR :
[3] RECTIFIE l’arrêt du 11 septembre 2009 afin de substituer à la page 8 des Motifs de la juge Bich, à la première ligne du paragraphe [40], ainsi qu’à la page 48, à la neuvième ligne du paragraphe [146], l’abréviation « C.c.Q. » à l’abréviation « C.p.c. ».
Pépin c. Caisse |
2009 QCCA 1697 |
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COUR D’APPEL |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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GREFFE DE
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MONTRÉAL |
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N° : |
500-09-018536-086 |
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(705-14-003642-076) |
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DATE : |
11 SEPTEMBRE 2009 |
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CORAM : |
LES HONORABLES |
PIERRE J. DALPHOND J.C.A. FRANÇOIS DOYON J.C.A. MARIE-FRANCE BICH J.C.A. |
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MANON PÉPIN |
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APPELANTE / Requérante |
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c. |
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LUCETTE CAISSE |
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MARIETTE CAISSE |
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et |
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GISÈLE CAISSE |
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INTIMÉES / Mises en cause |
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et |
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ROLLANDE BILODEAU |
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MISE EN CAUSE / Mise en cause |
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ARRÊT |
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[1] LA COUR; - Statuant sur l’appel d’un jugement de la Cour supérieure, district de Joliette (l’honorable Lise Matteau), qui, le 28 février 2008, déclare sans effet le legs universel dévolu à l’appelante aux termes du testament olographe de feue Norma McQuenny Caisse;
[2] Après avoir étudié le dossier, entendu les parties et délibéré;
[3] Pour les motifs de la juge Bich, auxquels souscrivent les juges Dalphond et Doyon :
[4] ACCUEILLE l’appel;
[5] INFIRME le jugement de première instance;
[6]
DÉCLARE que le premier alinéa de l'article
[7]
DÉCLARE que le legs dévolu à l’appelante n’est pas inefficace du fait de
l’article
[8] RENVOIE les parties à la Cour supérieure pour qu'elles y reprennent le débat sur la vérification;
[9] LE TOUT, sans frais, tant en première instance qu'en appel.
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PIERRE J. DALPHOND J.C.A. |
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FRANÇOIS DOYON J.C.A. |
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MARIE-FRANCE BICH J.C.A. |
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Me André Laporte |
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Laporte & Lavallée |
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Avocat de l’appelante |
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Me Caroline Drouin |
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Ferland & Bélair |
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Avocate des intimées |
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Date d’audience : |
le 5 septembre 2008 |
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MOTIFS DE LA JUGE BICH |
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A. Contexte
[11] Par testament notarié du 23 octobre 1997, Norma Caisse léguait à la mise en cause Rollande Bilodeau un lot de cimetière ainsi qu'une somme de 1 000 $, laissant le reste de ses biens à ses sœurs, les intimées Lucette, Mariette et Gisèle Caisse et désignant la première comme liquidatrice de la succession.
[12] Le 18 janvier 2007, Mme Caisse, alors hospitalisée en raison d'une chute et d'une fracture de l'épaule droite, aurait cependant rédigé de sa main le testament suivant, sur lequel figure ce qui paraît être sa signature ainsi que celle de deux autres personnes dont l'appelante Manon Pépin :
Hôpital de Joliette
18 janvier 2007
Moi Norma Caisse je laisse a Manon Pepin ma maison et tout mes bien car ses la seul qui ses occupe de moi tout au long de ma maladie et durant toute ses année.
(s) Norma Caisse
(s) Manon Pepin
(s) Michel Lefebvre
[Reproduit textuellement et sans correction.]
[13] Mme Caisse décède le 21 janvier 2007.
[14] En mai 2007, l'appelante institue les procédures nécessaires à la vérification du testament à titre de testament olographe. Les intimées[1] contestent la demande, alléguant que le testament est un faux, qu'il ne peut être de la défunte puisque celle-ci n'était pas dans une condition physique lui permettant d'écrire et qu'au surplus il ne respecte pas les exigences du Code civil du Québec.
[15] Des rapports d'expert et leurs compléments respectifs sont produits par la suite, l'expert de l'appelante concluant à l'authenticité du testament olographe et l'experte des intimées concluant plutôt au faux.
[16] Le processus de vérification testamentaire est cependant interrompu dans les circonstances suivantes.
[17]
Le 6 février 2008, à la veille de l'audience sur la vérification,
audience qui doit se tenir devant la juge Matteau, les avocats des parties se
présentent devant le juge Jean Guibault, coordonnateur du district de Joliette,
« afin de lui exposer la pertinence de faire trancher la question de
l'application de l'article
[18]
Le 7 février, les parties, se fondant sur les articles
Le legs fait à la demanderesse Manon Pépin suivant
le testament olographe versé au dossier sous cote R-2 est-il, suivant
application des dispositions de l'Article
[19] Cet acte de procédure, daté du 7 février 2008, est signé par Me Claude Pouliot, alors avocat de l'appelante, ainsi que par Ferland & Bélair, avocats des intimées. C'est sur cette demande que la juge Matteau accepte de statuer, comme elle l'explique dans son jugement :
[8] Il est donc utile de décider dès à présent de la question de droit ci-avant mentionnée puisque, dépendamment de la conclusion à laquelle le Tribunal en arrivera et vu les dispositions du testament olographe dont il est ici question, telle conclusion est susceptible de disposer du litige qui oppose les parties.
[20] Voici le corps du procès-verbal de l'audience du 7 février, qui confirme la participation active de Me Pouliot à la démarche conjointe des parties :
9 h 28 |
Identification Madame Manon Pépin est présente (requérante) Madame Gisèle Caisse est présente (intimée) Échange entre le Tribunal et les procureurs |
9 h 30 |
Dépôt par Me Pouliot de : « Demande de décision ou déclaration sur un point de droit (art. 448 et ss. et 453 et ss. Cpc) » en date du 7 février 2008. Représentations de Me Pouliot sur sa demande |
9 h 52 |
Représentations de Me Drouin |
10 h 11 |
Réplique de Me Pouliot |
10 h 20 |
Le Tribunal permet à Me Pouliot, s'il l'estime nécessaire qu'il pourra compléter son argumentation d'ici le 15 février 2008 et pour Me Drouin au 22 février 2008 en faisant parvenir les documents au bureau de l'Honorable Juge Matteau. Le dossier sera pris en délibéré le 22 février 2008 sur la « Demande de décision ou déclaration sur un point de droit (art. 448 et ss. et 453 et ss. Cpc) » La Requête en vérification d'un testament (003) et la Requête amendée en vérification d'un testament (007) suivront le sort de la décision : « Demande de décision ou déclaration sur un point de droit (art. 448 et ss. et 453 et ss. Cpc) » |
10 h 21 |
Fin de l'audience |
[Je souligne.]
* *
[21]
Le débat devant la Cour supérieure porte sur l'interprétation de
l'article
760. Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament, s'il agit comme témoin.
[22]
Selon l'appelante, cette disposition ne viserait que le testament
notarié et le testament devant témoins, qui requièrent, de par la loi, la
présence d'un ou deux témoins. Elle ne s'appliquerait toutefois pas au
testament olographe, qui n'a pas à être attesté par un témoin. Les intimées
prétendent au contraire que l'article
[23] Par jugement du 28 février 2008, la juge Matteau donne gain de cause aux intimées :
[20] C'est ainsi que même s'il doit donner plein effet à la volonté clairement exprimée du testateur, le Tribunal ne saurait ignorer que le législateur a prévu que telle volonté ne sera pas suivie si ce dernier a fait un legs à un témoin, et ce, peu importe l'importance du legs et la forme du testament.
[21] Comment en effet expliquer que le législateur aurait, d'une part, adopté une disposition qui tend manifestement à empêcher qu'un témoin exerce une influence indue sur les dernières volontés du testateur en entravant de quelque façon que ce soit sa liberté d'expression et, d'autre part, voulu exclure le testament olographe de l'application de cette disposition alors qu'il est facile d'imaginer que sous cette forme notamment, le testateur n'est certes pas à l'abri de la possibilité de telle influence?
[22] Poser la question, c'est y répondre.
[23] Mais, il y a plus.
[24] Contrairement à ce qui existait sous le Code civil du Bas Canada et qui a certes pu contribuer à susciter une controverse jurisprudentielle sur cette question [renvoi omis], la disposition qui est ici au cœur du présent litige se retrouve à la section IV (De la caducité et de la nullité des legs) du Chapitre 4 (Des dispositions testamentaires et des légataires) du Titre IV (Des testaments).
[25] C'est ainsi qu'après avoir traité, au Chapitre
3 de tel titre, des différentes formes de testaments (soit le testament
notarié, le testament olographe et le testament devant témoins), le législateur
fait état, dans un chapitre distinct (le Chapitre 4), des règles
applicables aux dispositions testamentaires et aux légataires, l'article
[26] Force est de conclure que le législateur a ici clairement exprimé sa volonté d'appliquer cette disposition à toutes les formes de testament, notamment au testament olographe.
[27] Si telle n'avait pas été son intention, vu
la section et le chapitre où se retrouve l'article
[28] Par ailleurs, il apparaît illogique que le législateur ait voulu, d'une part, prévoir la situation où un legs a été dévolu à un témoin en surnombre et, d'autre part, en exclure son application à celui ou celle qui agit à titre de témoin dans le cadre d'un testament olographe et alors que tel témoin est inévitablement en surnombre, puisque non essentiel à sa validité.
[24] Par conséquent, la juge déclare sans effet le legs dévolu à l'appelante.
* *
[25]
L'appelante se pourvoit ou, plus exactement, tente de se pourvoir par la
voie d'une requête pour permission d'appeler formulée en vertu de l'article
26
,
second alinéa, paragr. 1, C.p.c., déposée au greffe de la Cour le 26
mars 2008 et présentée à un de ses juges le 2 mai 2008. Les intimées s'opposent
à la requête et font valoir que l'appel est de plein droit, qu'il aurait dû
être formé par voie d'inscription et qu'étant maintenant hors délai, il est
irrecevable. Le 7 mai 2008, exprimant un avis préliminaire favorable à
l'inscription en appel, et donc à l'appel de plein droit, le juge Yves-Marie
Morissette accueille tout de même de bene esse la requête, suggérant
cependant à l'appelante de présenter à la formation qui entendra le pourvoi une
requête pour permission d'appeler hors délai, en vertu de l'article
[26] Cela étant, il ne sera pas nécessaire de statuer sur la question de savoir si l'appel devait être formé par voie d'inscription, au sens des articles 26 , premier alinéa, et 495 C.p.c., ou par voie de requête pour permission d'appeler, au sens des articles 26, premier alinéa, ou 29, premier alinéa, C.p.c.
B. Analyse
[27]
Le pourvoi porte essentiellement sur l'application de l'article
1. Questions procédurales
[28] L'appelante soutient que la juge de première instance a erré en acceptant de statuer sur la question de droit qui lui a été soumise. Ainsi — et je reformule ses prétentions —, elle affirme que :
- La demande d'adjudication ne pouvait être reçue puisqu'elle ne se rattache pas à la demande de vérification dans le cadre de laquelle elle est formulée, la juge s'étant « attribuée erronément compétence pour se prononcer quant à la validité d'un legs dans le cadre d'une requête en vérification de testament »[3].
- La
demande d'adjudication sur un point de droit, présentée en vertu de l'article
- La
demande d'adjudication ne pouvait être reçue puisque les parties ne s'entendent
pas sur les faits, contrairement à ce qu'exige l'article
- La
demande ne peut être reçue davantage au titre de l'article
[30] On doit donner raison aux intimées.
[31]
L'appelante n'a en effet rien soulevé en première instance de ce qu'elle
avance maintenant en appel au sujet de l'illégalité ou de l'inopportunité de la
procédure. Elle le fait aujourd'hui à la suite, vraisemblablement, d'un
changement d'avocat, celui qui la représente maintenant n'étant pas celui qui
l'a représentée devant la Cour supérieure. J'estime cependant que, malgré ce
changement, l'appelante ne peut s'en prendre à une procédure à laquelle elle a
non seulement consenti, mais qu'elle a présentée à la Cour supérieure de
concert avec les intimées. Autrement dit, même si l'on pouvait critiquer les
parties pour avoir soumis, au stade de la vérification du testament, une
demande fondée sur les articles
[32]
Par ailleurs, la démarche conjointe des parties a un certain avantage
car, si le legs consenti à l'appelante est sans effet à cause de l'article
[33]
Bien sûr, il peut paraître curieux, à première vue, qu'on se penche sur
la validité du legs stipulé par un testament dont l'authenticité n'a pas encore
été reconnue. En effet, cela semble donner un caractère hypothétique à
la question soulevée par la demande d'adjudication : si le
testament est vérifié comme testament olographe, l'article
[35]
La procédure aurait-elle néanmoins dû être rejetée, comme le prétend
l'appelante[4], faute
d'être accompagnée d'un affidavit conforme à l'article
[36] La « demande de décision ou déclaration sur un point de droit » que les parties ont soumise à la juge Matteau se contente d'énoncer, au chapitre des faits, un legs fait à l'appelante suivant le testament olographe versé au dossier de vérification. Aucun affidavit n'accompagne cette demande.
[37]
L'article
88. À moins d'une disposition expresse au contraire, une demande en cours d'instance se fait par requête au tribunal, ou à un juge si le tribunal n'est pas en session et qu'il y ait urgence.
La requête doit être appuyée d'un affidavit attestant la vérité des faits allégués dont la preuve n'est pas déjà au dossier, et elle ne peut être contestée qu'oralement, à moins que le tribunal ne permette la contestation écrite dans le délai et aux conditions qu'il détermine.
Lors de l'audition de la demande, toute partie peut présenter une preuve appropriée.
[Je souligne.]
[38]
Or, en application du second alinéa ci-dessus, on doit conclure qu'aucun
affidavit n'était requis ici, les faits pertinents, c'est-à-dire l'existence
d'un document ayant les apparences d'un testament olographe et l’apposition de
la signature de l’appelante sur ce document à titre de « témoin » des
volontés de la défunte, étant déjà attestés par des affidavits produits au
soutien de la requête pour vérification. Le dossier fait ressortir en outre
que, sur ces faits essentiels à la demande et aux fins de celle-ci, les parties
s'entendent (sans que les intimées renoncent pour autant à faire valoir la
fausseté du document advenant que la Cour décide que l'article
2. L'article
[39] L'affaire, comme on pourra le constater, n'est pas facile et même si j'en viens, comme on le constatera également, à une conclusion différente de celle de la juge de première instance, je m'empresse de dire que ce n'est pas à raison d'un défaut dans ses motifs. Deux thèses s'affrontent ici, en effet, qui ont toutes deux leurs mérites : la juge de première instance a choisi l'une de ces thèses, je choisis l'autre, mais il n'y a là qu'un désaccord sur le droit et non l'expression d'un reproche.
* *
[40]
Reprenons le texte de l'article
760. Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament, s'il agit comme témoin.
[41] Le premier alinéa de cette disposition vise-t-il le legs fait au témoin d'un testament olographe?
[42] La question est peu discutée en jurisprudence : outre le jugement de l'espèce, je n'ai trouvé qu'une seule autre affaire se prononçant sur le même sujet et concluant d'ailleurs dans le même sens[5]. La doctrine n'est pas beaucoup plus diserte, qui ne traite pas du sujet[6] ou se contente d'allusions, ici et là[7]. Les remarques les plus détaillées — si l'on peut dire — sont celles que l'on trouve dans Commentaires sur le Code civil du Québec (DCQ) :
Les dispositions de cet article devraient
s'appliquer tant aux testaments notariés que devant témoins [au sujet des
testaments notariés et devant témoins, voir les commentaires relatifs aux art. 716
à 725 et
Bien que la présence d'un témoin ne figure pas parmi
les conditions de validité du testament olographe, il arrive parfois qu'un
testament fait sous cette forme porte la signature d'une autre personne en plus
de celle du testateur [art.
Par contre, dans l'affaire Fraser c. Fraser
[renvoi omis], la Cour supérieure a jugé que cette même règle ne
s'appliquait pas aux testaments olographes puisque la présence d'un témoin ne
figure pas parmi les formalités prescrites pour sa validité. Elle a également
précisé que la signature d'une autre personne, en l'occurrence le fils de la
testatrice, ne permettait pas de qualifier ce dernier de « témoin »
au sens du Code. Ce jugement a été rendu sur la base de l'article
La précision apportée à l'article
[43]
On notera qu'avant l'avènement du Code civil du Québec, les
articles
* *
[44] Devant l'état relativement pauvre de la jurisprudence et de la doctrine, les parties font respectivement valoir des arguments que je me permets de résumer très succinctement :
- prétention
de l'appelante : de par son texte (et notamment l'emploi du mot
« surnombre », qui suppose l'exigence d'au moins un témoin) et son
contexte, l'article
- prétention
des intimées : l'article
* *
[45]
Il peut être utile de rappeler l'état de la situation existant avant
l'entrée en vigueur du Code civil du Québec. L'article
846. Les legs faits aux notaires ou aux témoins, ou aux conjoints des notaires ou des témoins ou à quelqu'un de leurs parents au premier degré, sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament.
L'exécuteur testamentaire qui n'est pas gratifié ni rémunéré par le testament y peut servir de témoin.
853. Dans les testaments faits suivant la même forme, les legs faits aux témoins, à leur conjoint ou à quelqu'un de leurs parents [au premier degré,] sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament.
La capacité de l'exécuteur testamentaire de servir comme témoin suit les mêmes règles que dans le testament sous la forme authentique.
[46] Ces dispositions sont d'origine, en ce qu'elles figuraient depuis 1866 au Code civil du Bas-Canada. Dans leur rapport, les codificateurs de l'époque, en 1865, avaient suggéré ceci :
Proposition relative à ce qui deviendra
l'article
99. Le testament est nul en totalité lorsqu'il y est fait quelque legs aux notaires ou à leurs parents et alliés jusqu'au degré de cousin-germain inclusivement, à moins, quant aux parents et alliés, que le legs à eux fait ne soit d'une valeur minime.
Il y a pareillement nullité pour le tout à cause des legs faits aux témoins en général, et des legs universels ou à titre universel faits aux parents et alliés des témoins jusqu'au même degré inclusivement; mais rien n'empêche que des legs particuliers soient faits aux parents et alliés des témoins.
L'exécuteur testamentaire qui n'est pas gratifié ni rémunéré par le testament peut y servir de témoin.
(Amendement suggéré.)
99a. Les legs faits aux notaires ou aux témoins, et à leurs parents et alliés jusqu'au degré de cousin-germain inclusivement, sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament.
L'exécuteur testamentaire qui n'est pas gratifié ni rémunéré par le testament y peut servir de témoin
C. Canton de Vaud, 655.— Autorités du droit anglais à l'art. 107.
Proposition relative à ce qui deviendra
l'article
107. Dans les testaments faits suivant la même forme, les legs faits aux témoins et à leurs parents et alliés jusqu'au degré de cousin-germain inclusivement, sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament.
La capacité de l'exécuteur testamentaire de servir comme témoin suit les mêmes règles que dans le testament sous la forme authentique.
Stat. Imp. 25 Geo. II, c. 6.— 1 Stephen, 575.— Alnutt, Practice of Wills, 93, 170.— Jarman, on wills, 65 et suiv.— Christie, Precedents of Wills, 153, 171, 173.— Parsons, on Wills, 19.[10]
[47] Le second alinéa de l'article 107 est intéressant en ce qu'il renvoie au dernier alinéa des articles 99 et 99a, laissant sous-entendre que ces derniers visent le testament authentique.
[48] Les codificateurs commentent ainsi les articles 99 et 99a :
L'article 99, à part de ce qui concerne l'exécuteur testamentaire, expose la règle qui veut qu'il y ait nullité absolue de l'acte à cause des legs faits aux notaires, à leurs parents, et aux témoins. Cette règle est trop rigoureuse, injuste envers les légataires, et va au-delà de l'abus qu'on a voulu prévenir. Cependant elle existe indubitablement. L'article en amendement 99a est destiné à la changer en se bornant à déclarer ces sortes de legs nuls sans que le surplus de l'acte en soit affecté. Cette disposition se trouve dans le code civil du Canton de Vaud, qui paraît avoir été rédigé avec bien du soin, Elle est en même temps la règle actuelle des testaments faits suivant la forme anglaise, ainsi qu'il est porté plus loin à l'article 107, la rigueur du droit ayant été aussi en Angleterre modifiée anciennement. Dans le changement de l'un ou l'autre droit requis pour l'uniformité, c'est donc l'ancienne loi du Bas Canada qu'il est sur ce point proposé de changer.[11]
[49] Notons que les articles 99 et 99a se trouvent dans une section portant sur la forme des testaments, qui comporte les articles 91 à 109. Le passage suivant des commentaires des codificateurs est intéressant :
L'article 93e [devenu l'article
L'article 94 [devenu l'article
[suivent ensuite les commentaires sur les articles
94a à 100b, devenus les articles
L'article 104 [devenu l'article
L'article 105 expose les règles du testament suivant la forme anglaise telles qu'elles existaient en Angleterre en 1774, époque de l'introduction de cette forme dans le Bas Canada. Telle doit être encore la loi actuelle.
[…][12]
[Je souligne.]
[50]
Cette partie des commentaires laisserait donc elle aussi entendre que
les articles 99 et 99a, devenus l'article
[51]
Pour ce qui est de l'article 107, devenu l'article
L'article 107 déjà commenté aussi, regarde les legs faits aux témoins et à leurs parents; la loi anglaise est ici conforme à l'amendement suggéré plus haut quant aux testaments authentiques.[13]
[Je souligne.]
[52]
L'amendement auquel on renvoie ici est celui de l'article 99a,
devenu l'article
[53]
Postérieurement à l'entrée en vigueur du Code civil du Bas-Canada,
d'ailleurs, l'avis général était que l'article
[54]
Ainsi, pour ne prendre que quelques exemples, ni Mignault[14] ni
Roch[15], dans
leurs ouvrages respectifs, n'abordent la question de la validité du legs au
témoin d'un testament olographe et le premier traite de l'article
[55]
En 1972, cependant, dans Dame Brassard-Barrette[17], la
Cour supérieure, malgré que l'affaire ne concerne pas un testament olographe,
affirme de manière lapidaire que « les dispositions de l'article
[56]
En 1988, dans Filion c. Lebrun[18],
on pousse l'analyse plus loin en s'interrogeant notamment sur la situation de
l'article 846 à l'intérieur du Code civil du Bas-Canada. La disposition,
en effet, est insérée dans une section générale (« De la forme des
testaments », articles 840 à 855) traitant, comme son titre l'indique, des
différentes formes de testament et de leurs formalités respectives, ce qui peut
laisser entendre qu'elle vise tous les testaments, peu importe leur forme. Au
sein de cette section, l'article 846 fait cependant partie d'un groupe de
dispositions dévolues au testament authentique (article
Considérant le testament R-1 comme validement fait sous la forme dérivée de la Loi d'Angleterre, il nous faut nécessairement conclure qu'en l'espèce les legs faits aux témoins, Richard Lebrun et Stéphan Delisle, sont nuls en vertu des dispositions de l'article 853 C.civ. :
[…]
C'est ici que se situe la véritable difficulté à laquelle est confronté le requérant : les dispositions de l'article 846 C.civ. s'appliquent-elles aux legs dévolus à un ou des témoins d'un testament olographe?
L'article 846 C.civ. est à l'effet que :
« Art. 846. Les legs faits aux notaires ou aux témoins, ou aux conjoints des notaires ou des témoins ou à quelqu'un de leurs parents au premier degré, sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament. »
Nous sommes d'avis que les dispositions de l'article 846 C.civ. s'appliquent effectivement aux legs dévolus aux témoins d'un testament olographe.
En effet, bien que l'article 846 C.civ. apparaisse être inséré au Code civil parmi les articles traitant plus particulièrement des conditions relatives à la validité des testaments suivant la forme notariée ou authentique, il nous faut aussi considérer qu'il fait partie de la même section du Code civil que l'article 850 C.civ. à savoir la Section II « De la forme des testaments » incluse dans le chapitre III « Des testaments », du titre II « Des donations entre vifs et testamentaires ».
Mais, et surtout, il nous faut bien constater que l'article 846 C.civ. ne contient aucune mention ayant pour effet de restreindre l'application des dispositions qu'il contient au testament fait sous la forme authentique.
D'autre part, pourquoi le législateur, qui tant à l'article 846 C.civ. qu'à l'article 853 C.civ., adopte des dispositions qui tendent manifestement à empêcher que les personnes visées à ces articles puissent exercer une influence sur les dispositions testamentaires en entravant de quelque façon que ce soit la liberté d'expression du testateur, aurait-il voulu exclure le testament sous la forme olographe de l'application de telles dispositions alors qu'on peut facilement imaginer qu'en faisant un testament sous la forme olographe, le testateur n'est certainement pas à l'abri de la possibilité d'influences indues?
Si un testament olographe peut être rédigé par le testateur « sans qu'il soit besoin de notaire ni de témoins » (article 850 C.civ.), l'intervention d'un ou de plusieurs témoins n'est pas pour autant de nature à le rendre invalide et alors, comme en l'espèce, nous sommes d'avis que les dispositions de l'article 846 C.civ. s'appliquent à ce testament en frappant de nullité les legs qui pourraient être consentis aux éventuels témoins. C'est à notre avis ce qui explique pourquoi d'une part le législateur n'a pas restreint l'application des dispositions de l'article 846 C.civ. et d'autre part, pourquoi il n'a pas adopté spécifiquement, immédiatement après l'article 850 C.civ., des dispositions relatives aux legs dévolus aux témoins d'un testament olographe.[19]
Quant à la signature de témoins après celle du testateur, elle n'affecterait pas la validité du testament; on a cependant déclaré nuls des legs particuliers faits à des personnes qui avaient signé comme témoins.[20]
[58] Le second membre de ce passage est assorti de la note infrapaginale 304a, qui énonce :
Filion c. Lebrun,
[59] Un peu plus loin dans le même ouvrage, revenant sur le sujet, Brière écrit :
La question de valeur d'un legs fait à un témoin ne devrait pas se poser pour le testament olographe. Il arrive cependant qu'une personne faisant son testament sous cette forme pense bien faire en obtenant la signature d'un ou deux témoins. Or on a jugé que le legs fait à l'un de ces témoins était nul [une note infrapaginale 6a renvoie à l'affaire Filion c. Lebrun].[22]
[60] Par la suite, en 1995, revirement : dans Fraser c. Fraser[23], où il s'agit d'un testament olographe, la Cour supérieure, saisie d'une affaire régie par le droit antérieur au Code civil du Québec, conclut que :
Les demandeurs prétendent que les legs
qui étaient consentis au défendeur par le testament doivent être annulés
puisqu'il a agi comme témoin au testament et que, ce faisant, il était
assujetti aux dispositions de l'article
« Les legs faits aux notaires ou aux témoins, ou aux conjoints des notaires ou des témoins ou à quelqu'un de leurs parents au premier degré, sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament.
L'exécuteur testamentaire qui n'est pas gratifié ni rémunéré par le testament y peut servir de témoin. »
Il est indéniable que les legs consentis
à un témoin, dans le cas d'un testament authentique (art.
La présence d'un témoin n'était
aucunement nécessaire pour rendre valide ce testament, et la signature du
défendeur ne peut le qualifier comme « témoin » au sens que lui
reconnaissent les articles
Les demandeurs appuient leurs
prétentions sur la décision de cette Cour rendue dans l'affaire Filion c.
Lebrun et als. [renvoi omis]. Il est vrai que cette décision suggère que
l'on doive appliquer aux testaments olographes les mêmes règles strictes
qu'imposaient les articles
Par ailleurs et avec beaucoup de respect pour l'opinion contraire, le soussigné est plutôt d'avis que les dispositions des articles 846 et 853 ne peuvent être étendues à l'article 850. Si le législateur avait voulu appliquer cette prohibition au testament olographe, il l'aurait sûrement codifié puisqu'il avait pris soin de le faire dans le cas du testament authentique et dans celui du testament en la forme dérivée de la loi d'Angleterre.
La demande relative à l'annulation des legs consentis au défendeur doit donc être rejetée.
Il m'apparaît que ce jugement est bien
fondé. L'article
La signature d'Alain Fraser, sous celle de Rita Fraser, sa mère, ne peut être considérée comme celle d'un témoin puisque la présence d'un témoin n'est aucunement nécessaire pour rendre valide un testament olographe.
Il arrive, hélas!, bien souvent que des personnes mélangent les genres, confondent les sortes de testaments. Sous l'ancien Code (art. 842) comme sous le nouveau (art. 712), il n'y a en a que trois. Se pourrait-il qu'il y en ait une quatrième qui serait le testament judiciaire?
Fort de ce jugement, j'ai soumis pour
vérification à la Cour un testament olographe qui avait été écrit entièrement
de la main du testateur et signé par lui (art.
[62] Dans un autre ordre d'idées, signalons que, selon ce que je puis voir de la jurisprudence et de la doctrine antérieures à l'avènement du Code civil du Québec, le testament olographe n'est pas nul du fait d'être attesté par un ou des témoins[25].
[63]
Par ailleurs, tel qu'indiqué plus haut, les articles
Question :
Dans un testament authentique, reçu devant un notaire et deux témoins, l'un des témoins est parent au premier degré avec le légataire universel. Pour corriger cette situation, j'ai tendance à croire que le testament en question, nul comme testament authentique, peut servir comme testament sous la forme anglaise.
En effet, si nous référons à la Revue du
Notariat volume 39, avril 1937 à la page 439, nous voyons une opinion favorable
à la validité d'un tel testament : « d'après le deuxième alinéa de
Dans la Revue du Notariat encore volume 48 page 359 un autre article se réfère à notre cas.
Réponse :
Je n'endosse pas l'opinion exprimée. En
effet, malgré les termes employés par notre correspondant, le testament n'est
pas nul comme testament authentique. Ce testament, au contraire, est pleinement
valide car il ne contrevient à aucun des articles
Or l'article 855 affirme que le testament fait apparemment sous une forme et nul comme tel à cause de l'inobservation de quelque formalité, peut être valide comme fait sous une autre forme.
Donc ce dernier article ne s'applique pas, car le testament, dont il est question, n'est pas nul sous la forme authentique à cause de l'inobservation de quelque formalité.
De plus, même si l'on voulait considérer
ce testament comme fait sous la forme anglaise, le legs universel serait encore
nul. Car les règles qui concernent l'efficacité des legs en rapport avec les
témoins sont les mêmes que pour le testament authentique selon l'article
Cette deuxième raison n'est donnée qu'à titre supplétif pour réfuter des opinions déjà émises à ce sujet dans la Revue. La première raison suffit pour permettre au notaire de refuser de se départir de son original et au protonotaire pour refuser la vérification.[26]
[64] En 1973, l'auteur Belzile renchérit :
À l'arrière-plan de cette requête se profile une théorie boiteuse et qui a la vie dure, que j'appellerais la théorie de l'élimination du témoin gênant.
Cette théorie a déjà été exposée dans une question adressée à La revue du Notariat et Me Jean-Guy Cardinal y a apporté une réfutation péremptoire [renvoi omis].
En face de la difficulté que leur
créait, dans un testament en forme authentique, la nullité d'un legs fait à
l'encontre des dispositions de l'article
Par exemple, ils font le raisonnement suivant : Le testament a été signé devant un notaire et deux témoins dont l'un est légataire de tous les immeubles de la succession. Le testament est valide, mais le legs des immeubles au témoin est nul. Pour faire revivre le legs, il suffit de considérer le testament comme fait suivant la forme dérivée de la Loi d'Angleterre. Alors nous devenons en présence d'un testament signé par trois témoins. Deux témoins suffisent à la validité du testament. Le troisième témoin devient superflu et peut être considéré comme inexistant. Évidemment, le témoin superflu qu'on éliminera sera le légataire des immeubles.
Faut-il dire qu'on n'élimine pas ainsi un témoin à un acte. Le témoin demeure témoin même si son témoignage ne peut servir à renforcer la preuve.
[…]
À propos de la validité des legs, il
faut enfin souligner que l'article
[65]
Ce point de vue reflète la jurisprudence dominante. Ainsi, dans Denault
c. Belouin[28], où il
s'agit d'un testament authentique que l'on essaie de valider comme testament de
forme anglaise, la Cour du Banc du Roi, sous la plume des juges Tellier et Hall
rejette la thèse que l'on puisse exclure le témoin en surnombre afin de valider
le legs qui lui est fait. La Cour d'appel la rejette encore dans Hamel c.
Hamel[29], où il
est question d'un testament de forme anglaise attesté par trois témoins dont
l'un est en outre légataire, et de même dans Dion c. Dion[30],
où, sur la foi d'une abondante jurisprudence anglaise, on affirme que « si
le testament porte un nombre de témoins surnuméraires suffisant pour en
attester la validité, cela ne peut donner de capacité aux témoins légataires, à
moins d'une preuve légale établissant qu'en fait ils n'ont pas agi comme
témoins ». Il semble que, malgré ces arrêts, et tel qu'en font foi les
auteurs cités ci-dessus, le débat ait continué sur la possibilité de la
validation du legs fait au témoin surnuméraire. C'est ainsi que le professeur
Brière, dans l'édition 1994 de son ouvrage sur Les successions, écrit
ceci à propos du nouvel article
Il est précisé que le legs est sans effet même si le témoin gratifié est en surnombre. Cette précision avait été proposée par l'O.R.C.C. qui avait constaté qu'il y avait controverse en la matière. Cette proposition n'était, cependant, faite qu'au sujet du testament notarié.[31]
[Je souligne.]
The Court of Appeal declares that, on the face of things, the defendant has signed as a witness, and, while it may be possible for him to establish that he did not sign in that capacity, he has the burden of proof and he cannot, by his own unsupported evidence, destroy that part of the will which does not suit his purpose and say that he signed in a capacity other than that disclosed by the will. […].[32]
[67] Cette façon de voir a été reprise par la jurisprudence plus récente. Ainsi, dans Gervais c. Brais[33], où il s'agit d'un testament fait suivant la forme dérivée de la loi d'Angleterre et régi par les dispositions du Code civil du Bas-Canada, notre Cour confirme le jugement de première instance reconnaissant la validité du legs à la personne qui a démontré n'avoir pas signé le testament à titre de témoin.
* *
[69]
C'est donc sur cette toile de fond que s'inscrit l'article
[70] Dans son rapport sur les successions, en 1976, le Comité du droit des successions de l'Office de révision du Code civil propose de remplacer les articles 846 et 853, premier alinéa, C.c.B.-C. par les dispositions suivantes respectivement :
Article 236, disposition inscrite dans la section réservée au testament authentique (§ 1 « Du testament authentique », articles 232 à 241)
Les legs faits au notaire, à l'un de ses parents au premier degré, à son conjoint ou aux témoins sont nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament.
Il en est ainsi, même s'il se trouve des témoins surnuméraires.
Le legs en faveur de l'exécuteur testamentaire ou du fiduciaire qui agit comme témoin est pareillement nul pour la partie qui excède sa rémunération.
Commentaires
L'article 236 remplace l'article
Le deuxième alinéa de l'article 236 est nouveau. Il ajoute au droit actuel la précision que la règle du premier alinéa vaut à l'égard de tous les témoins, même s'ils ne sont pas tous requis pour la validité du testament. Cette question est controversée en droit actuel.
Le troisième alinéa correspond au
deuxième alinéa de l'article
Le premier alinéa de l'article 236 précise que la nullité du legs n'affecte pas la validité du testament lui-même. Cette règle est conforme au droit actuel. Il s'agit d'une nullité relative.
Les présentes dispositions sont semblables à celles soumises par la Chambre des notaires.
Article 245, disposition inscrite dans la section réservée au testament devant témoins (§ 3 « Du testament devant témoins », articles 232 à 241)
Les legs faits aux témoins, à leur conjoint ou à l'un de leurs parents au premier degré son nuls, mais ne rendent pas nulles les autres dispositions du testament devant témoins.
Commentaires
L'article 245 reproduit la règle de
l'article
[71] Ces dispositions projetées ne visent — et cela est clair — que le testament authentique ou devant témoins. Le rapport du Comité ne mentionne d'ailleurs pas la question du témoin signant le testament olographe, situation qui ne paraît pas avoir été envisagée.
302. Dans le testament authentique, le legs fait au notaire, à l'un de ses parents au premier degré, à son conjoint ou aux témoins est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est ainsi, même s'il se trouve des témoins surnuméraires.
Le legs en faveur de l'exécuteur testamentaire ou du fiduciaire qui agit comme témoin est pareillement sans effet pour la partie qui excède sa rémunération.
303. Dans le testament devant témoins, le legs fait aux témoins, leur conjoint ou à l'un de leurs parents au premier degré est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.[35]
Commentaires sur l'article 302
Cet article remplace l'article
Le deuxième alinéa de l'article est nouveau. Il ajoute au droit actuel la précision que la règle du premier alinéa vaut à l'égard de tous les témoins, même s'ils ne sont pas tous requis pour la validité du testament. Cette question est controversée en droit actuel.
Le troisième alinéa correspond au
deuxième alinéa de l'article
Le premier alinéa de l'article précise que la nullité du legs n'affecte pas la validité du testament lui-même. Cette règle est conforme au droit actuel.
Commentaires sur l'article 303
Cet article reproduit la règle de
l'article
[74]
Soit dit en passant, le fait d'affirmer que l'article 302, dont
l'application est clairement limitée au testament notarié, remplace l'article
802. Dans le testament notarié, le legs fait au notaire, à l'un de ses parents au premier degré, à son conjoint ou au témoin est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament. Il en est ainsi même s'il se trouve des témoins en surnombre.
804. Dans le testament devant témoins, le legs fait aux témoins, même en surnombre, est sans effet mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
[76] Le cas du liquidateur est réglé pour sa part par l'article 803, qui ne vise que le testament notarié :
803. Dans un testament notarié, le legs fait en faveur du liquidateur désigné ou du fiduciaire, pour la partie qui excède sa rémunération, est sans effet lorsqu'ils agissent comme témoin.
[77] Ce projet de loi mourra au feuilleton.
[78] Lui succédera le Projet de loi 20, intitulé « Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens », présenté le 20 décembre 1984 et dont le principe sera adopté le 26 mars 1985. L'article 812 de ce projet fait partie de la section IV (« De la caducité et de la nullité des legs ») du chapitre quatrième (« Des dispositions testamentaires et des légataires » du titre quatrième (« Des testaments ») du livre troisième (« Des successions ») du futur code. Il dispose ainsi :
812. Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament s'il agit comme témoin.
[79] Comme on le constate, le texte de l'article 812 ne contient plus les mentions du testament notarié ou devant témoins qui figuraient dans les articles 802 à 804 du Projet de loi no 107. Comment expliquer ce changement et quel sens lui donner?
En premier lieu, la sous-commission se dit favorable aux principes énoncés aux articles 802, 803 et 804 du projet de loi.
Ceci dit, en lisant ces trois articles, on se rend compte que, dans tous les cas, le legs fait à un témoin est nul. Cette règle peut aussi s'appliquer au testament olographe, le témoin étant alors considéré comme un témoin en surnombre.
Par ailleurs, la sous-commission estime que la règle applicable au liquidateur et au fiduciaire (803) devrait s'étendre à toutes les formes de testament. Le même raisonnement qu'au paragraphe précédent prévaut pour le testament olographe.[38]
[81] On trouve le commentaire suivant au Journal des débats, à propos de l'article 812 :
[lecture de l'article 812, qui suit l'adoption de
l'article 811, ancêtre de l'actuel article
Le Président (M. Gagnon) : Commentaire?
M. Cossette : Cet article, comme le précédent, veut permettre d'éviter les situations de conflits d'intérêts tout en préservant l'expression des volontés du testateur.
Le premier alinéa annule le legs fait au
témoin, même si la présence de tous n'était pas requise pour la validité du
testament, en précisant toutefois que les autres dispositions du testament
demeurent valides Il ne reprend pas, suivant en cela les propositions de
l'Office de révision du Code civil à l'article 302, la règle actuelle énoncée à
l'article
Le second alinéa étend la règle du premier au legs fait au profit du liquidateur ou d'un autre administrateur désigné qui agit comme témoin pour la partie du legs qui excède sa rémunération.
Le Président (M. Gagnon) : Y a-t-il d'autres commentaires?
M. Leduc (Saint-Laurent) : Non, cela va.
Le Président (M. Gagnon) : Cela va? M. le député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent) : Cela va pour l'article 812. Il y a un amendement, un ajouté, 812.1.
[…][39]
[82] Ce commentaire ne révèle pas grand-chose de l'intention du législateur au sujet de l'application de l'article 812 au testament olographe. Peut-on néanmoins conclure de cette disposition, qui regroupe les articles 802, 803 et 804 du Projet de loi no 107 et en supprime toute mention du testament notarié et devant témoins, que le législateur a effectivement voulu que soit sans effet le legs consenti au témoin du testament olographe, tout comme il l'est dans le cas du testament notarié ou devant témoins? Cela pourrait sembler plausible, et d'autant que l'article 812, tel qu'indiqué plus haut, se trouve dans une section qui s'applique au testament sous toutes ses formes. Par exception, l'article 811 du projet prévoit explicitement que le legs fait au « notaire qui reçoit le testament » ou au conjoint de ce notaire ou à l'un de ses parents au premier degré est sans effet[40] : manifestement, cela ne vise que le testament notarié.
[83] Le Projet de loi 20 mourra lui aussi au feuilleton, pour être suivi d'un second Projet de loi 20, cette fois présenté le 19 décembre 1985, qui reprend largement le premier et qui sera finalement sanctionné le 15 avril 1987[41].
[84] Ce second Projet de loi 20 contient les dispositions suivantes, qui répètent avec une numérotation nouvelle les articles 811 et 812 du premier Projet de loi 20 :
796. Le legs fait au notaire qui reçoit le testament est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même du legs fait au conjoint du notaire ou à l'un de ses parents au premier degré.
797. Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament, s'il agit comme témoin.
[85] Dans le Projet de loi 125, intitulé Code civil du Québec, présenté le 18 décembre 1990, les deux articles ci-dessus deviendront les articles 758 et 759, dont le texte diffère un peu, mais la substance demeure :
758. Le legs fait au notaire qui reçoit le testament ou celui fait au conjoint du notaire ou à l'un de ses parents au premier degré est sans effet; les autres dispositions du testament subsistent.
759. Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament, s'il agit comme témoin.
[86] Ces deux dispositions se trouvent à la section IV (« De la caducité et de la nullité des legs ») du chapitre quatrième (« Des dispositions testamentaires et des légataires ») du titre quatrième (« Des testaments ») du livre troisième (« Des successions ») de ce qui deviendra le Code civil du Québec. Dans la version définitive du Projet de loi 125 tel qu'adopté et sanctionné le 18 décembre 1991, elles deviendront toutefois les articles 759 et 760, dont le texte est identique, puis les articles 759 et 760 de l'actuel Code civil du Québec :
759. Le legs fait au notaire qui reçoit le testament ou celui fait au conjoint du notaire ou à l'un de ses parents au premier degré est sans effet; les autres dispositions du testament subsistent.
760. Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament, s'il agit comme témoin.
[87] Dans ses Commentaires, le ministre indique ceci :
Commentaire sur l'article
L'article 759 reprend, en partie, le premier alinéa
de l'article
Commentaire sur l'article
Cet article, comme le précédent, veut permettre d'éviter les situations de conflits d'intérêts, tout en préservant l'expression des volontés du testateur. La précision relative aux témoins surnuméraires qu'il comporte est nouvelle, et elle vise à trancher une question controversée du droit antérieur.
Il ne reprend pas la règle actuelle énoncée à
l'article
* *
[88]
Cette revue de l'état du droit antérieur et de l'historique législatif
particulier de l'article
53 Comme l’a précisé le juge Philippon de la
Cour d’appel, l’importance de l’historique législatif est bien reconnue en
matière d’interprétation : « […] les textes antérieurs sont de nature
à jeter de la lumière sur l’intention qu’avait le législateur en les abrogeant,
les modifiant, les remplaçant ou y ajoutant »: Gravel c. Cité de
St-Léonard,
[89]
On verra de même les arrêts Ciment du Saint-Laurent inc. c. Barrette[44], où la
Cour suprême examine l'historique législatif de l'article
[90]
À première vue, le contexte d'adoption et l'historique législatif de
l'article
[91]
Tout d'abord, il est intéressant de souligner qu'au moment où la
Commission du droit des successions de l'Office de révision du Code civil, puis
l'Office lui-même et enfin le législateur proposent ce qui deviendra finalement
l'article
[92]
Devant cette situation, la Commission sur le droit des successions et
l'Office de révision, dont on peut certainement penser qu'elle connaissait
l'état de la jurisprudence contemporaine à ses travaux (et donc l'arrêt Dame
Brassard-Barrette), choisit de faire des propositions excluant clairement
le cas du testament olographe et réservant la nullité ou l'inefficacité du legs
aux cas du légataire témoin d'un testament authentique ou devant témoins. Dans
un premier temps (Projet de loi no 107), le législateur suit
la même voie, réservant la sanction d'inefficacité du legs au témoin du
testament notarié ou devant témoins, expressément mentionnés. Dans un second
temps, toutefois, à la suite d'une intervention du Barreau du Québec (ou
peut-être de manière simplement concomitante avec elle), il supprime la mention
des testaments notariés et devant témoins, préférant un langage plus général,
moins précis en tout cas, qui semble devoir inclure le testament olographe. Or,
au moment où il agit ainsi, c'est-à-dire à l'occasion de la présentation du
premier Projet de loi 20, en décembre 1984, la jurisprudence — qu'il est
censé connaître — n'a pas changé et affirme la nullité du legs fait au témoin
du testament olographe, proposition qui sera reprise en 1988 dans Filion c.
Lebrun. De même, au moment de l'adoption du Projet de loi 125, qui
deviendra le Code civil du Québec et avant l'entrée en vigueur de ce
dernier, la jurisprudence est toujours celle des affaires Dame
Brassard-Barrette et Filion c. Lebrun. Il faut en effet souligner
que le jugement rendu dans Fraser c. Fraser[51],
qui affirme le contraire, est postérieur à l'entrée en vigueur de
l'article
[93] Lors de l'entrée en vigueur de cet article, cependant, la controverse existe toujours quant au témoin en surnombre dans le cas des testaments notariés et devant témoins, malgré la jurisprudence dominante, d'où le commentaire du ministre (et avant lui de l'Office) à ce sujet.
[94]
Donc, dès le Projet de loi 20 de décembre 1984 et de même par la
suite, le législateur s'écarte des propositions de l'Office de révision et
préfère un texte refondu qui ne sépare plus, quant au témoin, les règles
applicables au testament notarié de celles applicables au testament devant
témoins et qui ne contient par ailleurs aucune mention de ces types de
testament, adoptant plutôt un langage général. En conjuguant l'intervention du
Barreau[52], la
suppression des mentions du testament notarié ou devant témoins et l'état de la
jurisprudence à l'époque, ne devrait-on pas conclure que le législateur a voulu
étendre au testament olographe l'application de ce qui deviendra l'article
[95]
C'est en ce sens qu'a jugé la Cour supérieure dans Gendron c. Gendron[53],
en 1999. Dans cette affaire régie par le Code civil du Bas-Canada, le
testament, rédigé de la main de la testatrice, avait été vérifié et reconnu à
la fois comme testament fait sous la forme dérivée de la loi d'Angleterre et
comme testament olographe. La testatrice y léguait ses biens à l'un de ses
fils, celui-ci ayant par ailleurs signé le testament à titre de témoin. Si l'on
considérait le testament comme fait en vertu de la loi d'Angleterre, alors le
legs était sans effet en raison de l'article
Dans Filion c. Lebrun [renvoi omis], le juge Viens de la Cour supérieure a tranché la même question sous l'empire du Code civil du Bas Canada. Un testament avait été reconnu valide comme testament olographe ainsi que sous la forme dérivée des lois d'Angleterre. Le juge a conclu que même si le testament devait être considéré comme olographe, le legs fait à un témoin était nul.
Le législateur à l'article 760 paraît avoir retenu cette thèse en statuant que le legs fait à un témoin « même en surnombre » est nul. La validité du testament demeure. Comme le souligne le Ministre dans ses commentaires [renvoi omis], l'objet de cette disposition est d'éviter toute situation de conflit d'intérêt. Cette politique législative paraît d'ordre public et elle existait sous l'ancien droit. La Cour estime donc qu'on l'on ne saurait préserver la validité d'un legs nul en ignorant le fait que le légataire était présent lors de la signature du testament et qu'il a attesté la signature de la testatrice.
Le nouveau droit, il est vrai, institue la primauté de la volonté du testateur. Même si le tribunal doit tenter de donner effet à la volonté clairement exprimée par un testateur, le législateur a prévu que cette volonté, même clairement exprimée, ne sera pas suivie si le testateur fait un legs à un témoin, et ce quelle que soit l'importance du legs.[54]
[96]
Il est d'autant plus tentant de conclure ainsi que l'article
[97]
Bref, l'état de la jurisprudence à l'époque de l'adoption et de l'entrée
en vigueur de l'article
* *
[98] Cela dit, si le contexte d'adoption, l'historique législatif et le positionnement de l'article 760 au sein du Code civil du Québec semblent favoriser son application au testament olographe, d'autres arguments, non moins sérieux, militent en sens contraire.
[100] La
proposition, retenue par ces jugements, selon laquelle l'article
[101] Ensuite,
la question se pose de savoir pourquoi le législateur aurait voulu prévoir
l'inefficacité du legs au témoin d'un testament qui, au contraire des deux
autres formes testamentaires, n'en requiert pas la présence. Pour répondre à
cette question, il faut en premier lieu se demander pourquoi le législateur
exige une telle présence dans le cas du testament notarié et du testament devant
témoins, présence qui est elle-même (sous réserve des articles
[102] Essentiellement, la présence du témoin a pour objet d'attester l'accomplissement des formalités qui conditionnent la validité du testament[58] et assurent ainsi que la volonté constatée par cet écrit est bien celle du testateur. Le législateur a donc jugé important que le témoin du testament notarié ou devant témoins soit indépendant et neutre, afin qu'il puisse persuasivement attester de cet accomplissement desdites formalités et, par conséquent, de la validité du testament. On comprend que le législateur, pour assurer cette indépendance et cette neutralité, ait prévu l'inefficacité du legs au témoin puisqu'autrement, en tant que légataire, ce dernier serait en conflit d'intérêts, ayant objectivement avantage à témoigner d'une manière qui permette de valider le testament, préservant ainsi son legs.
[103] Le droit français a choisi une autre méthode d'assurer la neutralité et l'indépendance du témoin, en promulguant que le légataire, dans le cas du testament notarié, ne peut pas être témoin[59]; s'il l'est, le testament est en principe nul dans son entier[60].
[104] En common law, la situation est résumée ainsi par l'Alberta Law Reform Institute :
[342] The witness-beneficiary rule has a long history in English law. Wills dealing with real property were required by the Statute of Frauds, 1677 to be witnessed by three “credible witnesses”. At that time there was a rule of evidence that no person could give evidence in any cause in which that person had a financial interest. Receiving a gift under the will made the witness financially interested in the estate and therefore disqualified the witness as a credible witness — the witness could not give evidence to prove the will in probate. As a result, the entire will would fail. Instead of changing this rule of evidence, the English solution was to legislatively deprive the witness of the gift so that the witness could then be a competent witness to the will's validity and the will could be saved. This solution was carried forward to the Wills Act, 1837. In addition, the Act addressed a remaining problem by also depriving the witness's spouse of any gift under the will. Because the law at that time considered a husband and wife to be one person, a gift to the witness's spouse also served to disqualify the witness.
[343] So the original purpose of the witness-beneficiary rule was simply to circumvent a particular evidentiary rule. The rule of evidence was ultimately repealed in England during its major reform of the law of evidence in the mid-1800s but, ironically, the provision designed to circumvent that rule continues unabated to the current day in wills legislation in England, Canada and much of the Commonwealth. The reason it continues is because a new purpose was devised to justify its existence.
[344] The modern rationale for the witness-beneficiary rule is that it protects testators from undue influence, duress or fraudulent conduct by witnesses. Requiring the witnesses and their spouses to have no personal interest in the distribution of an estate ensures that the witnesses “have no incentive to misrepresent the circumstances of execution”. […][61]
[105] Les
lois en vigueur dans les autres provinces canadiennes comportent pour la
plupart des dispositions visant à faire exception à la common law et
annulant le legs en vue de préserver la compétence du témoin et la validité
générale du testament, ce qui permet aussi de maximiser le respect des volontés
du testateur[62] :
plutôt que d'imposer la nullité du testament, qui est la sanction la moins
respectueuse des volontés du testateur, on n'impose que l'inefficacité ou la
nullité du legs fait au témoin, ce qui laisse intactes les autres volontés du
testateur. C'est de ce principe que s'inspiraient aussi les articles 846 et 853
C.c.B.-C.[63] (par
contraste avec le droit antérieur à 1866[64]) et
dont l'article
[106] Pour revenir au témoin, il s'agit donc, dans ce contexte, d'assurer son indépendance et sa neutralité, bref son impartialité. Ce n'est qu'à cette condition que le témoin peut attester de l'accomplissement des formalités qui garantissent la validité des testaments notariés et devant témoins et leur fidélité à la volonté du testateur, dont l'identité doit par ailleurs être établie sans conteste. Car c'est bien parce que le testament notarié ou devant témoins n'est pas de la main du testateur que ces garanties sont nécessaires.
[107] Or,
le testament olographe garantit cette validité et cette fidélité, sans parler
de l'identité, parce qu'il est, justement, écrit et signé par le testateur
lui-même, sans recours à un moyen technique (article
[108] L'objectif d'impartialité recherché par le législateur dans le cas du témoin du testament notarié ou devant témoins n'est pas congruent au testament olographe, qui est dépouillé des formalités que les témoins des deux autres types de testament sont chargés d'attester. La raison qui commande, dans le cas de ces derniers, que l'on ne respecte pas la volonté du testateur qui a fait d'un témoin son légataire (ou d'un légataire son témoin) ne joue donc pas dans le cas du testament olographe. Le législateur impose la présence d'un ou de deux témoins dans le cas du testament notarié et du testament olographe afin d'assurer le respect de formalités sans lesquelles le testament est nul, formalités qui, je le répète, n'existent pas dans le cas du testament olographe.
[109] Autrement
dit, les formalités imposées par le législateur dans le cas du testament
notarié ou devant témoins ont pour fonction d'assurer l'identité du testateur
ainsi que l'intégrité de son consentement et de l'expression de celui-ci, les
témoins ont pour fonction d'assurer l'exécution de ces formalités et la règle
de l'article
[110]
Le texte même de l'article
[111] Il
est vrai cependant que le testament olographe présente une certaine
fragilité : il peut être détruit (notamment par l'héritier qui le trouve
et n'est pas satisfait de son contenu); il peut être falsifié; un tiers peut
tenter de le modifier[66]. Pour
se prémunir contre cela, le testateur qui rédige un testament olographe peut
décider de le faire devant un témoin, au sens plus commun du terme, et demander
à celui-ci de signer à ce titre, et ce, en vue de donner une certaine publicité
à ses dernières volontés[67] ou
encore en vue de faciliter les procédures de vérification. Mais cette prudence,
qui a surtout des vertus probatoires, ne dote pas la personne ainsi choisie de
la mission particulière qui échoit aux témoins des testaments notariés ou
devant témoins et n'en fait pas un témoin au sens de l'article
[112] Il
y a donc ici à la fois un argument de fond et un argument de texte : 1°
d'une part, l'article
[113] On
fait parfois valoir, pour expliquer l'article
Encore ici, c'est la crainte de la captation qui explique la sévérité du législateur : il faut éviter qu'un témoin profite de sa position avantageuse pour obtenir les bonnes grâces du testateur : sanatio in radice.[69]
[114] Si
c'est le cas, on pourrait être porté à croire que le testament olographe mérite
cette protection contre la captation tout autant que le testament notarié ou le
testament devant témoin : après tout, « [l]aissé à lui-même, le
testateur n'est pas sérieusement protégé contre les pressions qui pourraient
s'exercer contre lui »[70]. On
peut douter cependant que la nullité du legs soit en pareil cas un mode de
protection adéquat, tant il est facile pour le témoin-captateur de contourner
la sanction en se contentant d'être présent à la signature par le testateur,
mais en ne signant pas lui-même le testament olographe. Je ne crois donc pas
qu'on puisse dans cette perspective faire de la protection contre la captation
un principe qui permettrait de conclure de manière déterminante que l'article
[115] En
somme, si le contexte jurisprudentiel, dans une certaine mesure, et
l'historique législatif de l'article
* *
[116] Il faut enfin revenir sur l'argument tiré de l'inefficacité du legs consenti au témoin « en surnombre » et aborder l'argument relatif à l'interdiction des pactes sur succession future.
[117] L'argument
rattaché au témoin en surnombre. L'article
[118] On
peut soutenir en effet — et c'est ce que font les intimées — que l'inefficacité
du legs au témoin en surnombre montre l'intention qu'aurait le législateur
d'imposer cette sanction à un témoin dont la présence n'est pas requise, ce qui
permettrait d'étendre la portée de l'article
[119] Examinons ces deux arguments, tels que présentés par les parties.
[120] Le testament notarié requiert, on le sait, un témoin, parfois deux; le testament devant témoins requiert deux témoins. S'il y a plus que le nombre de témoins requis, pourquoi le législateur, dont le livre sur les testaments est imprégné de l'intention de faire primer les volontés du testateur, n'a-t-il pas choisi la solution préconisée par certains et qui consisterait à ne pas tenir compte du témoin-légataire s'il y a par ailleurs un nombre suffisant de témoins non légataires? C'est là, signalons-le au passage, la solution retenue par plusieurs provinces canadiennes[72].
[121] Or, si la solution consistant à valider ainsi le legs dévolu au témoin « superflu » a même été considérée (ce qui n'est pas clair), elle n'a assurément pas été retenue par le législateur québécois, qui a plutôt choisi, à l'opposé, de promulguer l'inefficacité du legs fait au témoin « même en surnombre ». Ce faisant, il a choisi (réglant ainsi la controverse antérieure dont j'ai parlé plus tôt dans le cas des testaments notariés et devant témoins) de faire primer le principe de l'impartialité des témoins, même lorsqu'il y a surnombre, sur l'expression de la volonté particulière du testateur désireux d'avantager son témoin. Il n'a pas voulu non plus qu'on s'engage dans un débat qui aurait visé à déterminer lequel des témoins serait en surnombre ou aurait pu, s'il y a un ou deux autres témoins impartiaux, être considéré comme n'ayant pas qualité ou office de témoin.
[122] Bref, cela signifie qu'au Québec le témoin inutile (parce qu'en surplus) du testament notarié ou devant témoins est sanctionné au même titre que les autres, peu importe qu'il y ait par ailleurs un nombre suffisant de témoins désintéressés : tout legs fait à l'un ou à l'autre est inefficace. Sur ce plan, le rapprochement que suggèrent les intimés, peut être fait avec le « témoin » du testament olographe, qui est lui aussi inutile et lui aussi en surnombre, c'est-à-dire en trop[73] : il n'y aurait donc pas lieu d'être plus clément envers le « témoin » d'un tel testament qu'on l'est envers le témoin inutile du testament notarié ou devant témoins.
[123] L'appelante
réplique que le « surnombre » renvoie à l'idée d'un excédent par
rapport au nombre un, ce qui ferait en sorte que l'article
[124] La
locution « en surnombre » désignant simplement ce qui est « en
trop »[74],
cependant, cette prétention n'est pas entièrement convaincante, même s'il n'est
pas faux de prétendre que l'expression est souvent utilisée pour désigner une
situation où l'on se trouve en excédent d'un nombre égal ou supérieur à un ou
en excédent d'une situation où tout est complet et à laquelle s'ajoute
néanmoins un élément. L'argument sémantique est d'autant moins fort que le
terme « nombre », dans son acception ordinaire autant que
mathématique, inclut le nombre zéro[75]. La
version anglaise de l'article
[125] Par
ailleurs, il est vrai que plusieurs provinces et territoires canadiens ont
choisi de valider par une disposition législative expresse le legs fait au
témoin du testament olographe, qui ne requiert l'attestation d'aucun témoin[77].
Cela n'est cependant pas de nature à influer sur l'interprétation à donner à
l'article
[126] Je
note aussi que trois provinces canadiennes[78]
permettent au juge, malgré la règle générale d'invalidité, de confirmer le legs
fait au témoin si celui-ci se décharge du fardeau de prouver qu'il n'a exercé
aucune influence indue sur le testateur. Ce n'est pas non plus la voie qu'a
choisie le législateur québécois, qui décrète une inefficacité sans exception.
L'état du droit sur ce point dans les trois provinces canadiennes qui ont
adopté ce modèle ne permet en rien d'interpréter l'article
[127] Finalement,
tout bien considéré, l'argument tiré de la mention du témoin « en
surnombre » dans l'article
[128] L'argument relatif à l'interdiction des pactes sur succession future. Dans un article de 1974, commentant l'arrêt Dame Brassard-Barrette[80] et la controverse du témoin en surnombre dans le cas du testament authentique ou de forme anglaise, la professeure Castelli signale que :
[…] À moins d'avoir affaire à une signature postérieure à la rédaction du testament et apposée à l'insu du testateur, à quel titre le signataire a-t-il pu valablement intervenir à l'acte si ce n'est pas en qualité de témoin? Il semble, en effet, que dans un autre cas le testament tomberait sous l'interdiction des pactes sur succession future (art. 1061 — 989) que le legs soit fait au signataire ou à un parent de ce dernier — le « pacte » consistant alors en une stipulation pour autrui.
Indépendamment de la protection de l'impartialité des témoins, la nullité d'un legs fait à un témoin ou à un parent semble en effet être une mesure de prudence quant à la nature du testament : la personne intéressée au legs aurait-elle signé comme témoin ou comme cocontractant? Même si le terme « témoin » est employé expressément il n'en reste pas moins une ambiguïté dangereuse pour le testateur lui-même. Aussi la signature d'une personne sur un acte de disposition à cause de mort à un titre autre que celui de témoins nous semble devoir entraîner la nullité de cet acte comme pacte par succession future.[81]
[129] Ce
passage envisage deux cas de figure, apparemment. Tout d'abord, on y précise
que la nullité ou l'inefficacité du legs fait au témoin serait, au moins dans
le cas des testaments notariés et devant témoins, une mesure destinée non seulement
à garantir l'impartialité du témoin, mais aussi à prévenir les pactes sur
succession future, prohibés à l'époque par l'article
[130] Cela
dit, même si le propos de la professeure Castelli est intéressant, je ne suis
pas certaine qu'il corresponde à l'intention véritable que le législateur
exprime à l'article
[131] De
plus, et c'est le second cas de figure envisagé par la professeure Castelli, si
un tiers prétend avoir apposé sa signature sur un testament à un titre autre
que celui de témoin, on devrait selon elle en conclure aussi, surtout si cette
personne est légataire, que cela ne peut être qu'en vertu d'un pacte sur
succession future : le legs serait donc nul en raison de la prohibition de
telles ententes par l'article
* *
[132] Au
bout du compte, on doit constater que l'examen de l'argument du surnombre et de
l'argument de la prohibition du pacte successoral ne permet pas de résoudre de
façon convaincante le dilemme interprétatif posé par l'article
* *
[133] Examinant tout ce qui précède (contexte, historique législatif, arguments de texte et arguments téléologiques), nous nous retrouvons donc devant deux visions en apparence valables, étayées par des raisons qui ne le sont pas moins et devant un problème d'interprétation qui n'est pas facilement résolu. Comment trancher?
[134] J'estime
qu'en définitive, la seule façon de résoudre le problème est de donner à
l'article
[135] La
primauté de la volonté du testateur est assurée par plusieurs dispositions
législatives, dont les articles 703 et
703. Toute personne ayant la capacité requise peut, par testament, régler autrement que ne le fait la loi la dévolution, à sa mort, de tout ou partie de ses biens.
713. Les formalités auxquelles les divers testaments sont assujettis doivent être observées, à peine de nullité.
Néanmoins, le testament fait sous une forme donnée et qui ne satisfait pas aux exigences de cette forme vaut comme testament fait sous une autre forme, s'il en respecte les conditions de validité.
714. Le testament olographe ou devant témoins qui ne satisfait pas pleinement aux conditions requises par sa forme vaut néanmoins s'il y satisfait pour l'essentiel et s'il contient de façon certaine et non équivoque les dernières volontés du défunt.
715. Nul ne peut soumettre la validité de son testament à des formalités que la loi ne prévoit pas.
[136] Le
testament demeure certes un acte formaliste; il ne peut être fait que par écrit
et doit répondre à certaines exigences qui sont autant de conditions de
validité (article 713, premier alinéa), mais ce formalisme est fortement
tempéré par le législateur. Celui-ci met en effet en oeuvre tout ce qui est
nécessaire pour assurer d'une part la liberté du testateur, consacrée à
l'article
[137] Les dispositions relatives aux conditions de validité des testaments et des legs devant être interprétées libéralement, il s'ensuit que les restrictions à la liberté de tester ou à la réalisation des volontés du testateur doivent normalement être interprétées de façon limitative, afin de ne pas contrecarrer ces mêmes volontés.
[138] On
note par ailleurs au Code civil du Québec, par rapport à la situation
qui existait sous l'empire du Code civil du Bas-Canada, une
simplification ou un allégement de certaines conditions testamentaires :
règle générale, un seul témoin est désormais requis dans le cas du testament
notarié (par exception, deux témoins seront requis, mais dans des cas bien
circonscrits par le législateur); on a réduit les causes d'inhabilité des
témoins et l'on a réduit de même les motifs d'inefficacité des legs aux
témoins. Ainsi, dans ce dernier cas, alors que les articles
[139] Peut-on,
dans ces circonstances, compte tenu du principe interprétatif applicable,
conclure que le législateur, qui a voulu d'un côté alléger les exigences
relatives aux témoins, a voulu de l'autre, par l'article
[140] Comme
on l'a vu précédemment, si l'inefficacité du legs aux témoins du testament
notarié ou devant témoins se justifie pleinement par la mission particulière
dont sont investies ces personnes en vue d'assurer que l'écrit, qui n'est pas
de la main du testateur, reflète bien les volontés de celui-ci, elle s'explique
beaucoup moins bien dans le cas du « témoin » du testament olographe,
témoin auquel aucune mission d'attestation n'est confiée et dont la présence
n'est nullement requise. La logique qui préside à l'inefficacité du legs au
témoin du testament notarié ou devant témoins ne vaut pas pour le
« témoin » du testament olographe. Assujettir celui-ci à l'article
[141] On
ne peut nier que l'historique législatif semble à certains égards militer en
faveur de l'application de l'article
[142] Dans le cas de l'historique législatif, toutefois, il faut bien reconnaître que la situation est sans doute plus compliquée et confuse qu'il n'y paraît. Bien sûr, il y a l'évolution des textes : on est passé de ceux de l'Office de révision du Code civil, clairement applicables aux seuls testaments notariés et devant témoins, à des textes qui, à la faveur de la succession des projets de loi, ont été réunis dans une disposition générale ne faisant plus mention du testament notarié ou devant témoins, absence dont on pourrait inférer une application au testament olographe qui, n'étant pas exclu, doit être inclus. En outre, il y a l'intervention du Barreau, qui suggérait l'élargissement de la sanction d'inefficacité au testament olographe (sans motiver cette suggestion, toutefois).
[143] Mais en réalité, et pour dire les choses franchement, l'affaire semble être en quelque sorte passée sous le radar législatif, ne donnant lieu à aucun commentaire particulier, à aucune explication officielle. Et cela sans compter le problème de l'état du droit antérieur à l'adoption du Code civil du Québec, problème évoqué plus haut.
[144] Ainsi
qu'on l'a vu, jusqu'en 1972, la doctrine semblait traiter comme une évidence le
fait que l'article
[145] Quant à l'affaire Filion c. Lebrun, qui date de 1988, elle est postérieure à l'adoption et à la sanction du second Projet de loi 20 (présenté en 1985 et sanctionné en 1987) et n'a pu avoir d'influence sur un texte qui n'a pas changé par la suite, sur un sujet qui n'a jamais été rediscuté. Du reste, cette décision était fort critiquable, comme le montrera par la suite l'affaire Fraser c. Fraser[89], et on ne peut penser que le législateur aurait été insensible à ces critiques.
[146] Pour
le reste, chaque argument favorable à l'application de l'article
[147] Reste
aussi l'argument de la captation ou de la fraude : l'article
[148] Finalement, je reprends les deux thèses qui émergent de toute cette discussion :
- la
première veut que l'article
- la
seconde veut que l'article
[149] Cela
étant, compte tenu de la primauté de la volonté du testateur comme principe
interprétatif prééminent des dispositions du titre des testaments, je conclus
que c'est la seconde thèse qui doit l'emporter : l'article
[150] Une
dernière chose : je n'ai guère parlé ici du second alinéa de l'article
* *
[151] Par
conséquent, le legs dévolu à l'appelante par le testament olographe de feue
Norma Caisse n'est pas assujetti à l'article
* * *
[152] Je
recommande en conséquence d'accueillir l'appel, d'infirmer le jugement de
première instance et de déclarer que le legs dévolu à l'appelante n'est pas
inefficace du fait de l'article
[153] Vu la nature du débat et le caractère conjoint de la procédure en première instance, je suggère que le tout soit sans frais.
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MARIE-FRANCE BICH J.C.A. |
[1] La mise en cause Rollande Bilodeau n'a pas comparu en première instance et pas davantage en appel.
[2] Plan d'argumentation des intimées, p. 1.
[3] Plan d'argumentation de l'appelante, p. 1.
[4] Plan d'argumentation de l'appelante, p. 3 in fine et 4.
[5] Gendron
c. Gendron,
[6] Voir par exemple : Jacques BEAULNE, « Les successions (ouverture, transmission, dévolution, testaments), dans La Réforme du Code civil, Ste-Foy : Les Presses de l'Université Laval, 1993, 241-353, p. 326, paragr. 253; Roger COMTOIS, Les testaments, mis à jour par Jacques BEAULNE, Montréal : Wilson & Lafleur ltée, 2004, p. 34, paragr. 153 et 154; Marilyn PICCINI ROY, « Les dispositions testamentaires et les legs », dans École du Barreau, Personnes, famille et successions, coll. de droit 2008-2009, vol. 3, Cowansville : Les Éditions Yvon Blais inc., 2008, p. 475.
[7] Voir
par exemple : Germain BRIÈRE, Les successions, Cowansville :
Les Éditions Yvon Blais inc., 1994, p. 626, note infrapaginale 515-6
(« Voir Filion c. Lebrun,
[8] EYB2001DCQ232,
Commentaire sur l'article
[9] Voir
par exemple : Denault c. Belouin, [1933] 55 B.R. 192; Dion c.
Dion, [1951] C.S. 416; Hamel c. Hamel, [1953] B.R. 571; Jean-Guy
CARDINAL, « Testament authentique - Témoin parent avec le légataire
universel — Vérification sous la forme anglaise », [1957] 59 R. du N.
504; Yves BELZILE, « Validité du legs fait au frère du témoin au
testament », [1973] 75 R. du N. 408; Comité du droit des
successions (Office de révision du Code civil), Rapport sur les successions,
Montréal, 1976, p. 298 et 300, à propos de l'article 236 destiné à remplacer
l'article
[10] Commissaires chargés de codifier les lois du Bas Canada, en matières civiles, Code civil du Bas-Canada — Quatrième et Cinquième Rapports, vol. 2, Québec, Georges Desbarats, 1865, p. 344 et 346 (art. 99 et 99a) et p. 350 (art. 107).
[11] Ibid., p. 174.
[12] Ibid., p. 172 et 176.
[13] Ibid., p. 176.
[14] Pierre-Basile MIGNAULT, Le droit civil canadien, t. 4, Montréal : C. Théorêt, éditeur, 1890, p. 288 et s.
[15] Hervé ROCH, Donations, testaments, legs, exécuteurs testamentaires, dans Traité de droit civil du Québec, t. 5, Montréal : Wilson & Lafleur (limitée), 1953, p. 313-314 et 341-342.
[16] Germain BRIÈRE, Les libéralités, Ottawa : Éditions de l'Université d'Ottawa, 1982, p. 162, paragr. 288 et 289.
[17] [1972] R.P. 296 (C.S.), p. 296.
[18] J.E. 88-799 (C.S.).
[19] Ibid., p. 7 à 10.
[20] Germain
BRIÈRE,
[21] Germain
BRIÈRE, Précis du droit des successions, précité, note 20 p. 241.
On trouve la même observation et la même note infrapaginale 304a dans la
troisième édition du même ouvrage : Germain BRIÈRE,
[22] Germain BRIÈRE, Précis du droit des successions, 2e éd., voir supra, note 20, p. 288, paragr. 411. On trouve exactement la même observation dans la troisième édition de l'ouvrage : Germain BRIÈRE, op. cit., voir supra, note 21, p. 292, paragr. 411.
[23] J.E. 95-399 (C.S.).
[24] Jean MARTINEAU, « Le carnet d'un praticien », (1994-1995) 97 R. du N., 495, p. 497.
[25] Dans Demers c. Vallée, [1951] C.S. 424 , p. 428 et 429, la Cour supérieure, à propos de la validité de codicilles olographes attestés par deux témoins, écrit que :
Dans le cas du codicille du 24 octobre 1941 et des parties en date du 11 avril (sans mention d'année) et du 6 août 1943 du codicille en trois parties où il y a une écriture étrangère, cette écriture ne forme pas partie du codicille et n'y ajoute rien, car avant la signature des témoins, lesdits codicilles ou parties de codicille étaient déjà parfaits comme codicilles olographes. Les signatures des témoins, qui se trouvent toujours après la signature de la testatrice, ne sont pas dans le codicille et, dans l'opinion du Tribunal, n'affectent pas la validité des codicilles. La partie en date du 20 janvier 1942 du codicille en trois parties ne contient que l'écriture de la testatrice.
[…]
L'opinion
du Tribunal est confirmée là-dessus par l'article
[…]
C'est-à-dire qu'un testament nul sous l'une des trois formes peut valoir comme fait sous l'une ou l'autre des deux autres formes. Ainsi, un testament qui n'est pas valide comme testament dans la forme anglaise peut tout de même valoir comme testament olographe, pourvu toutefois que le corps du testament soit entièrement écrit et que le testament soit signé de la main du testateur. Pour donner un effet quelconque à l'article 855 quand il s'agit d'un testament supposé être dans la forme anglaise, mais qui n'est pas dans la forme requise, il faudrait, il me semble, admettre la validité d'un codicille comme les codicilles présentement devant la Cour, autrement, il est difficile d'imaginer le cas où un testament supposé rédigé dans la forme anglaise, mais nul pour défaut d'observation des formes requises, puisse être valide comme testament olographe.
Voir, citant ce jugement : Germain BRIÈRE, Les
successions, voir supra, note 20, p. 506, paragr. 421 in fine et note infrapaginale 421-2, et la deuxième édition du même ouvrage (1994),
op. cit., voir supra, note 7, p. 534, paragr. 423 in fine et note infrapaginale 423-2. Le même auteur confirme son propos dans Le
nouveau droit des successions, 2e éd., Montréal : Wilson
& Lafleur ltée, 1997, p. 249, paragr. 333 in fine et note infrapaginale 389. Voir par ailleurs : Murnaghan c. Alie,
Le document du 17
avril 1979 est écrit en entier de la main de la défunte et signé par
elle. Il rencontre les exigences de l'article
[26] Jean-Guy CARDINAL, loc. cit., voir supra, note 9, p. 504-505.
[27] Yves
BELZILE, loc. cit., voir supra, note 9, p. 409-410. Voir
aussi : Mireille D. CASTELLI, « L’article 855 du C.c. et la nullité d’un
legs »,
[28] Voir supra, note 9, p. 193 (j. Tellier) et p. 193-195 (j. Hall).
[29] Voir supra, note 9.
[30] Ibid., p. 419.
[31] Germain BRIÈRE, op. cit., note 7, p. 626, paragr. 515.
[32] Hamel c. Hamel, voir supra, note 9, p. 571. Dans le même sens : Dion c. Dion, voir supra, note 9, p. 419 et 420-421.
[33] J.E. 96-1082 (C.A.).
[34] Comité du droit des successions (Office de révision du Code civil), op. cit. note 9, p. 298 et 300 (art. 236) et p. 312 (art. 245).
[35] Office de révision du Code civil, Projet de Code civil, vol. 1 du Rapport sur le Code civil du Québec, Québec : Éditeur officiel du Québec, 1977, p. 181-182.
[36] Office de révision du Code civil, Commentaires, vol. 2 du Rapport sur le Code civil du Québec, t. 1, Québec : Éditeur officiel du Québec, 1977, p. 307.
[37] Voir supra, note 18.
[38] Mémoire de la Sous-commission du Barreau du Québec sur le droit des successions présenté à la Commission parlementaire des 12, 13 et 14 avril 1983 sur le projet de loi 107. Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des successions, mars 1983, 142p., p. 74-75.
[39] « Étude détaillée du projet de loi 20 — Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens (12) », Journal des débats, Sous-commission des institutions, 13 juin 1985 — No 12, p. S-CI-528.
[40] Voici le texte intégral de l'article 811 :
811. Le legs fait au notaire qui reçoit le testament est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament.
Il en est de même du legs fait au conjoint du notaire ou à l'un de ses parents au premier degré.
[41] Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens, L.Q. 1987, c. 18.
[42] Commentaires du ministre de la Justice, t. 1, Québec : Les Publications du Québec, 1993, p. 449 et 450.
[43]
[44] 2008 csc 64 .
[45] [2007] 2 R.C.S. 801 .
[46] Voir supra, note 17.
[47] Voir supra, note 18.
[48] Voir supra, note 9.
[49] Voir supra, note 9.
[50] Voir supra, note 9.
[51] Voir supra, note 23 ainsi que les paragr. [60] et [61] des présents motifs.
[52] Voir supra, paragr. [80] des présents motifs.
[53] Voir supra, note 5.
[54] Ibid., p. 549.
[55] La Cour suprême, dans l'arrêt Dell Computer Corp. c. Union des consommateurs, voir supra, note 45, paragr. 14 et 15, rappelle que l'ordonnancement et l'organisation des normes dans le Code civil du Québec est un élément à considérer, ce qu'elle confirme dans l'arrêt Ciment Saint-Laurent inc., voir supra, note 44, paragr. 72 et s.
[56] Les trois autres sections du chapitre quatrième traitent respectivement des espèces de legs (universel, à titre universel et particulier), des légataires et des effets des legs (incluant la représentation). Elles ne font pas de distinctions entre les diverses formes de testament.
[57] Voir supra, paragr. [57] à [59].
[58] Dans
le cas du testament notarié, ces conditions de validité sont celles des
articles
[59] L'article
Ne pourront être pris pour témoins du testament par acte public, ni les légataires, à quelque titre qu'ils soient, ni leurs parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni les clercs des notaires par lesquels les actes seront reçus.
[60] Voir par exemple : François TERRÉ et Yves LEQUETTE, Les successions. Les libéralités., Paris : Dalloz, 1983, p. 348. Cependant, par exception, « lorsqu'il a été appelé à un testament un plus grand nombre de témoins que celui qui est exigé par la loi, l'incapacité de l'un ou de plusieurs d'entre eux ne vicie pas le testament, s'il reste par ailleurs des témoins capables en nombre suffisant » (AUBRY et RAU, Droit civil, 6e éd. par Paul ESMEIN, t. 10, Paris : Librairies Techniques, 1954, p. 590).
[61] Alberta Law Reform Institute, The Creation of Wills, Report for Discussion No. 20, September 2007, p. 123-124. Dans le même sens, voir aussi : Pierre-Basile MIGNAULT, op. cit., voir supra, note 14, p. 306. Voir aussi : Thomas FEENEY, Feeney's Canadian Law of Wills, 4th ed. by James MacKenzie, Markham : Butterworths, 2000, p. 4.15.2, paragr. 4.32 (“The general rule of the wills legislation is that a gift to either a witness of the will or to the spouse of a witness is void.”).
[62] Comme on le verra plus loin [voir infra, note infrapaginale 72], ce principe connaît lui-même des exceptions législatives pour le témoin en surnombre ou dont la présence n'est pas requise.
[63] Encore
que le libellé de l'article
[64] Antérieurement
à 1866, était nul le testament signé par un témoin-légataire. Dans son ouvrage
précité (voir supra, note 14, p. 289), Mignault, à propos de l'article
Cette disposition est de droit nouveau.
Avant le code un testament était nul en totalité lorsqu'il y était fait quelque legs aux notaires ou à leurs parents et alliés jusqu'au degré de cousin germain inclusivement, à moins, quant aux parents et alliés, que le legs à eux fait fût d'une valeur minime. Et il y avait pareillement nullité pour le tout à cause des legs faits aux témoins en général, et des legs universels ou à titre universel faits aux parents et alliés des témoins jusqu'au même degré inclusivement; mais rien n'empêchait que des legs particuliers ne fussent faits aux parents et alliés des témoins (art. 99 du projet).
Les codificateurs avaient proposé que les legs faits aux notaires ou aux témoins, et à leurs parents et alliés jusqu'au degré de cousin germain inclusivement, fussent nuls, mais ne rendissent pas nulles les autres dispositions du testament (art. 99a du projet).
Le législateur, cependant, tout en acceptant le principe que la nullité du legs n'affecterait pas la validité du testament, étendit la cause de nullité aux legs fait à la femme du notaire ou des témoins, mais, quant à la parenté, la restreignit au premier degré. […]
Dans le même sens, voir la p. 291 et, pour le testament fait selon la forme dérivée de la loi d'Angleterre, les p. 305 et 306.
[65] Voir :
Pierre-André CÔTÉ,
[66] Sur les inconvénients associés au testament olographe, voir par exemple : Germain BRIÈRE, op. cit., voir supra, note 7, p. 535, paragr. 426.
[67] Non pas la publicité du contenu, mais celle de l'existence même de l'acte testamentaire.
[68] C'est aussi une raison qu'on invoque en droit anglais et canadien. Voir : Alberta Law Reform Institute, op. cit., voir supra, note 61, p. 124.
[69] Germain BRIÈRE, op. cit., voir supra, note 7, p. 625 in fine, paragr. 515.
[70] Ibid., p. 535, paragr. 426.
[71] Voir supra, note 5 et paragr. [95].
[72] À titre purement comparatif, on pourra ainsi consulter les lois suivantes : Wills Act, R.S.B.C. 1996, c. 489, art. 11, paragr. 2; Wills Act, R.S.N.S. 1989, c. 505 (consolidated August 18, 2008), art. 12; Wills Act, R.S.A. c. 2000, c. W-12, art. 13, paragr. 2; Loi portant réforme du droit des successions, L.R.O. 1990, c. S.26, art. 12, paragr. 4; Loi sur les testaments, L.R.N.-B., c. W-9, art. 12, paragr. 2; Wills Act, C.C.S.M., c. W150, art. 12, paragr. 2; Wills Act 1996, S.S. 1996, c. W-14.1, art. 13, paragr. 4; Consolidation of Wills Act, R.S.N.W.T. 1988, c. W-5, art. 10, paragr. 2; R.S.Y. 2002, c. 230, art. 9, paragr. 2. Voir aussi le Wills Act, R.S.N.L. 1990, c, W-10, art. 7.
[73] Le Grand Robert de la langue française, édition électronique correspondant à l'édition en 6 volumes de l'ouvrage, 2001, « surnombre » : « ¨ Rare. Quantité qui dépasse un nombre fixé, donné. — Loc., cour. En surnombre : en excédent*, en trop. | Être en surnombre (→ Surnuméraire). »
À l'entrée « Surnuméraire », on trouve ce qui suit à la définition 1, seule pertinente ici : « Qui est en surnombre, en trop. | Arbres surnuméraires, dans une coupe. | Doigt surnuméraire (→ Polydactylie), organes surnuméraires (en tératologie). »
[74] Comme le confirme d'ailleurs l'extrait de Le Petit Larousse illustré, Paris : Larousse, 2004, p. 1-23, auquel l'appelante renvoie elle-même : « surnombre n.m. Nombre supérieur au nombre prévu et permis. ◊ En surnombre : en excédent, en trop. »
[75] Le Grand Robert de la langue française, voir supra, note 73, « nombre ».
[76] Canadian Oxford Dictionary, Don Mills, Ont. : Oxford University Press Canada, 2004, p. 1562 : «[…] ● adjective 1 in excess of the normal number; extra. 2 (of a person) engaged for extra work. 3 (of an actor) Appearing on stage but not speaking. ● noun (pl. -ies) 1 am extra or unwanted person or thing 2 a supernumerary actor. 3 a person engaged for extra work. [Late Latin supernumerarius (soldier) added to a legion already complete, from Latin super numerum beyond the number].».
[77] Voir les lois de l'Alberta, Saskatchewan, Manitoba, Ontario, Nouveau-Brunswick, Yukon, Nunavut, précitées, note 72.
[78] Ontario (article 12, paragr. 3, de la Loi portant réforme du droit des successions, voir supra, note 72), Manitoba (article 12, paragr. 3, du Wills Act, voir supra, note 72), Saskatchewan (article 13, paragr. 5, du Wills Act 1996, voir supra, note 72).
[79] Voir le paragr. [110] des présents motifs, supra.
[80] Voir supra, note 17 et paragr. [55].
[81] Mireille D. Castelli, loc. cit., voir supra, note 27 p. 205-206.
[82] Voir les paragr. [66] et [67] , supra, et les affaires Hamel c. Hamel, voir supra, note 9, Dion c. Dion, voir supra, note 9 et Gervais c. Brais, voir supra, note 33.
[83] Ainsi que l'écrit le professeur Ciotola :
La liberté absolue de disposer de ses biens par donation ou testament est la règle et pour y déroger, il faut une expression claire de la volonté du donateur ou du testateur ou une disposition de la loi.
(Pierre CIOTOLA,
« Des principes usuels d'interprétation des testaments et les décisions
rendues en 2007 »,
La liberté de tester et la primauté qui doit
être accordée aux volontés du testateur ont été rappelées récemment par la Cour
dans Parent c. Stocola (Succession de),
[84] Voir
par exemple : Paradis c. Jones,
[85] Voir supra, paragr. [72] et [73].
[86] Voir supra, paragr. [75].
[87] Voir supra, note 17.
[88] Voir supra, note 18.
[89] Voir supra, note 23.
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