Leduc c. Immeubles Jacques Robitaille inc. (Hôtel Québec) |
2015 QCCQ 3716 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-132870-124 |
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DATE : |
8 mai 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE JEAN-F. KEABLE, J.C.Q. |
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BRUNO LEDUC |
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Châteauguay (Québec) |
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Partie demanderesse |
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c. |
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LES IMMEUBLES JACQUES ROBITAILLE INC., faisant affaires sous le nom de L’Hôtel Québec |
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3115, ave des Hôtels, Québec (Québec) G1W 3Z6 |
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et |
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MARLÈNE ROBITAILLE |
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[…], Québec (Québec) […] |
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Parties défenderesses |
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JUGEMENT |
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La réclamation
[1] Le 27 mars 2012, Bruno Leduc poursuit Les Immeubles Jacques Robitaille inc. (Robitaille) pour 7 000 $. Les faits à l’origine de la demande sont décrits à son annexe 1 :
Les parties défenderesses ont retenu mes services pour 2 spectacles les 8-9 octobre 2011 pour un montant total de 1000$ plus 4 nuits individuelles pour 2 personnes (chambre d'hôtel avec 2 lits) incluant les déjeuners pour 2 (le lendemain) à mon choix dans l'hôtel de mon choix de la chaîne Jaro (stationnement inclus) sans limite dans le temps. Ces nuits étaient utilisables hors des jours de spectacles.
Le 1er problème se situe au niveau des conditions pour les 4 nuits. Les parties défenderesses se sont entêtées à ne pas vouloir respecter les conditions du contrat et dans leur dernier courriel elles m'ont confirmé qu'elles ne les respecteraient pas. Valeurs de 4 nuits aux conditions du contrat : 1226,88$.
Le 2e problème est que les parties défenderesses n'ont pas respecté plusieurs clauses du contrat en lien avec les spectacles (heures de test de son, les repas des jours de spectacles et d'autres conditions). Dû à cette façon cavalière de faire, j’ai subi des dommages. Je vous tiens donc responsable de ces dommages au montant de 600$.
Le 3e problème est qu'elles n'ont pas respecté leur engagement pour les spectacles du temps des fêtes. L'entente était que je réalise les 2 spectacles les 8-9 octobre 2011 au tarif très très spécial de 500$/spectacle plus 4 nuits dans vos hôtels pour prendre connaissance de l'intérêt de leur clientèle pour mes spectacles. Advenant un intérêt positif de leur clientèle, ce qui s'est produit fortement, l'entente était qu'elles m'engagent pour 10 à 12 spectacles pour le temps des fêtes 2011 au tarif spécial de 900$/spectacle plus taxes logé dans un de leur hôtel. Elles n'ont jamais honoré cette entente.
Réclamation totale de 12130,13$. Je désire réduire ma réclamation à 7000$ pour faire entendre cette cause à la cour des petites créances.
(reproduction exacte)
(nos soulignements)
[2] Bien qu’habitué à des recours en justice et familier avec la procédure, M. Leduc ne produit pas le « contrat-facture » du 5 octobre 2011 conclu avec Robitaille, dont il était le rédacteur.
Les contestations
[3] Pour répondre à la demande, Robitaille a dû produire une contestation détaillée le 15 avril 2012, appuyée de nombreux documents. Il y a lieu de la reproduire :
1- La partie défenderesse est une entreprise qui oeuvre dans le domaine de l'hôtellerie avec services, le tout tel qu'il appert d'une copie de l’état des informations du Registraire des entreprises produite comme étant la pièce C-1;
2- La partie défenderesse fait partie de la chaine hôtelière « Les Hotels Jaro » qui possède sept (7) hôtels dans la région de Québec offrant différents services;
3- Plus particulièrement, la partie défenderesse, en plus d'offrir des chambres et des services divers, se spécialise dans Ies services destinées aux enfants et aux familles dans le cadre de ses opérations (piscine, spectacles de magie, mascotte, animaux, etc.);
4- C'est dans ce contexte qu'est intervenu, le ou vers le 5 octobre 2011, un contrat entre la partie défenderesse et la partie demanderesse aux termes duquel Ia partie demanderesse s'engageait à offrir ses services d'hypnotiseurs-humoriste les 8 et 9 octobre 2011, le tout tel qu'il appert d'une copie du contrat-facture produite comme étant la pièce C-2;
5- Aux termes de ce contrat-facture C-2, les parties se sont respectivement engagées à respecter les obligations suivantes:
Partie demanderesse
- Donner deux (2) spectacles d'hypnotiseur-humoriste d'une durée d’une (1) heure chacun, les 8 et 9 octobre 2011;
Partie défenderesse
- Donner quatre (4) nuitées individuelles pour deux (2) personnes, incluant le déjeuner pour deux (2) personnes, au choix de la partie demanderesse dans l'hôtel de son choix de la chaine hôtelière Jaro, incluant le stationnement, sans limite dans le temps;
- Payer une somme de 1 000,00 $ (500,00 $ par spectacle);
- Mettre à la disposition de la partie demanderesse certains équipements techniques et selon les modalités plus amplement contenus au contrat-facture C-2;
- Fournir, les soirs de spectacles, les éléments suivants : un (1) souper complet pour deux (2) personnes, un (1) déjeuner pour deux (2) personnes, un (1) diner pour deux (2) personnes ainsi qu'une chambre avec un (1) lit;
6- La partie défenderesse soumet à cette Cour que les parties ont tous deux respecté l’ensemble des engagements contenus au contrat-facture C-2;
7- Le ou vers le 29 décembre 2011, la partie demanderesse a transmis une mise en demeure à la partie défenderesse, le tout tel qu'il appert d'une copie de cette mise en demeure produite comme étant la pièce C-3;
8- Aux termes de cette mise en demeure C-3 (qui contient les mêmes allégations que celles contenues à la demande de Ia partie demanderesse dans le cadre de la présente instance), la partie demanderesse allègue que la partie défenderesse n'a pas respecté les engagements contenues au contrat-facture C-2 en ce que :
- La partie défenderesse aurait indiqué une limite de temps au certificat pour les quatre (4) nuitées individuelles alors que le contrat-facture C-2 prévoit que l'utilisation de ces nuitées est illimité dans le temps (réclamation : 1 226,88 $);
- La partie défenderesse n'aurait pas respecté plusieurs clauses du contrat en lien avec le spectacle (heures de test de son, les repas des jours de spectacles et d'autres conditions) faisant en sorte que la partie demanderesse aurait subit des dommages, sans toutefois indiqué le détail du non respect et/ou des dommages subis (réclamation : 600,00 $);
- La partie défenderesse n'aurait pas respecté un engagement qu'elle aurait pris pour des spectacles du temps des fêtes, soit dix (10) ou douze (12) spectacles au tarif de 900,00 $ plus taxes par spectacle avec une nuitée incluse le soir de chaque spectacle (réclamation : 9 000,00 plus taxes);
9- La partie défenderesse est en droit de refuser de payer les sommes réclamées par la partie demanderesse, et ce, pour les motifs suivants, à savoir :
Non respect quant à la limite de temps des certificats cadeaux
10- Le ou vers le 10 octobre 2011, la partie défenderesse a remis à la partie demanderesse les certificats aux termes desquels ce dernier avait droit a des nuitées dans Ies établissements de la partie défenderesse, le tout tel qu'il appert d'une copie de ces certificats produites comme étant la pièce C-4;
11- Au deuxième (2ième) paragraphe de ces certificats C-4 il est indiqué que « ce certificat est valide pour jusqu'au 10 octobre 2013 » faisant en sorte qu'il y a apparence qu'une limite dans le temps a été ajouté en contravention du contrat-facture C-2;
12- Pourtant, Ia partie demanderesse a été avisé a plusieurs reprises, dont notamment le 3 janvier 2012, que la date indique aux certificats C-4 était obligatoire en raison d'une exigence du système informatique de la partie défenderesse, le tout tel qu'il appert d'une copie de la réponse a ía mise en demeure C-3 produite comme étant la pièce 0-5;
13- Aux termes de cette Iettre C-5, la partie défenderesse indiquait à la partie demanderesse que les certificats pouvaient très simplement être renouvelés après la date limite du 10 octobre 2013 en communiquant avec une représente de la partie défenderesse afin de faire émettre des nouveaux certificats valides pour une nouvelle période de deux (2) ans;
14- Cette situation a été dénoncé à plusieurs reprises à la partie demanderesse par Ia partie défenderesse avant la transmission de la Iettre C-5;
15- Ainsi, la partie demanderesse est mal fondée de prétendre que la partie défenderesse n'a pas respecté ses engagements et la partie défenderesse est en droit de refuser de payer quelque somme que ce soit a la partie demanderesse, précisant par ailleurs que ces certificats C-4 sont toujours valides;
Non respect de plusieurs clauses du contrat-facture C-2 par la partie défenderesse
16- La partie défenderesse conteste vigoureusement toute allégation à I'effet qu'elle n'aurait pas respecté les engagements contenues au contrat-facture C-2;
17- En effet, la partie défenderesse a respecté en tout point le contrat-facture C-2 et a mis à Ia disposition de Ia partie demanderesse I'ensemble des éléments nécessaires pour qu'iI donne ses spectacles aux clients de la partie défenderesse, y incluant notamment employés, fournitures, nourritures et temps;
18- Par ailleurs, alors que la partie défenderesse avait prévu que la partie demanderesse souperait à même le buffet offert dans son restaurant, la partie défenderesse a accepté que la partie demanderesse choisisse un menu à la carte, et ce, malgré que c'est plutôt le buffet qui était disponible Iors de la présence de Ia partie demanderesse a son établissement;
19- La partie demanderesse savait ou devait savoir que la partie défenderesse n'avait pas une salle de spectacles mais plutôt une salle se trouvant dans son établissement hôtelier de sorte qu'il était évident que certains ajustements devraient être effectués dans le cadre du spectacle de Ia partie demanderesse et notamment au niveau son et Iumière;
20- D'ailleurs, le représentant de la partie défenderesse a discuté Ionguement avec la partie demanderesse des éléments techniques, tel que convenu au paragraphe 4 du contrat-facture C-2 jusqu'à ce qu'une entente finale intervienne à la satisfaction totale des deux (2) parties;
21- Par ailleurs et nonobstant ce qui précède, le contrat-facture C-2 (paragraphes 4 et 5) prévoit qu’en cas de problèmes au niveau technique, la partie demanderesse se réservait le droit de faire, interrompre ou refuser de faire son spectacle;
22- Or et tel que confirmé aux termes de la demande de la partie demanderesse, la partie demanderesse a présenté les deux spectacles qu'il devait fournir aux termes du contrat-facture C-2 sans aucune interruption de sorte que ce dernier ne peut aujourd'hui tenter d'obtenir compensation pour des défectuosités diverses, qui sont par ailleurs non admise mais plutôt vivement contesté par la partie défenderesse;
23- Ainsi, la partie demanderesse est mal fondée de prétendre que la partie défenderesse n'a pas respecté ses engagements et la partie défenderesse est en droit de refuser de payer quelque somme que ce soit a la partie demanderesse;
Non-respect d'un engagement pour d’autres spectacles
24- La partie défenderesse nie qu'une telle entente ait existé entre elle et la partie demanderesse;
25- En effet, le contrat-facture C-2 prévoyait uniquement les spectacles des 8 et 9 octobre 2011 sans aucune mention quant aux allégations contenues a la mise en demeure C-3 et à Ia demande de la partie demanderesse;
26- La partie défenderesse n'avait aucune obligation de retenir les services de la partie demanderesse pour des spectacles au courant du temps des fêtes 2011 ou à tout autre moment autre que les deux spectacles précités;
27- En effet, la partie défenderesse avait une discrétion totale quant aux spectacles qu'elle offre dans ses établissements hôteliers et n’a jamais confirmé à la partie demanderesse qu'elle continuerait a retenir ses services dans le futur;
28- D'ailleurs, ce n’est qu'après les spectacles des 8 et 9 octobre 2011 que la partie demanderesse a transmis à la partie défenderesse une proposition de prix pour des spectacles qu'il pourrait offrir, le tout tel qu'il appert d'une copie du courriel produit comme étant la pièce C-6;
29- Le fait que la proposition C-6 est postérieure aux spectacles des 8 et 9 octobre 2011 démontre avec éloquence qu'aucune entente sur des spectacles futures n’est intervenue et que la prétention de Ia partie demanderesse est sans fondement
30- La partie défenderesse était en droit de refuser la proposition de la partie demanderesse pour quelque raison que ce soit, à savoir le prix, Ia qualité des spectacles, les commentaires de son personnel et des clients, etc.;
31- Ainsi, la partie défenderesse a décidé de ne pas retenir Ies services de la partie demanderesse suivant les spectacles des 8 et 9 octobre 2011, ce que la partie défenderesse était en droit de faire;
32- En raison de ce qui précède, la partie défenderesse conteste vigoureusement les allégations contenues à la demande de la partie demanderesse et est en droit de refuser de payer quelque somme que ce soit a la partie demanderesse;
[…]
(reproduction exacte)
(nos soulignements)
[4] Marlène Robitaille dépose aussi une contestation le 15 avril 2012 pour indiquer que son rôle se limite à représenter Robitaille lors de la signature du contrat et qu’il n’y a aucun lien de droit entre la demande et elle-même.
Les désistements conditionnels ou partiels
[5] Le 26 mars 2015, M. Leduc avise le greffe qu’il désire se désister de son recours contre Mme Robitaille « à la condition que cela soit sans frais ».
[6] Pour procéder avec célérité à l’audience, le Tribunal n’a pas permis que l’on discute longuement des conditions de ce désistement car M. Leduc savait que Mme Robitaille était la représentante de Robitaille, avec qui il avait discuté, uniquement d’ailleurs à ce titre.
[7] La contestation de Mme Robitaille du 15 avril 2012 lui rappelait ce qu’il connaissait déjà à cet égard. C’est pourquoi il devra rembourser les frais judiciaires de contestation de 152 $.
[8] À l’audience, M. Leduc déclare aussi se désister de la partie la plus importante de sa réclamation, soit une réclamation d’environ 9 000 $ à 10 800 $ (réduite à 7 000 $) pour non-respect d’une entente lui garantissant la présentation de 10 à 12 spectacles additionnels.
[9] Il explique ce désistement par les fruits d’une consultation juridique récente l’informant de la précarité de son recours.
[10] Il s’agit ici d’une reconnaissance tardive d’un droit qui n’avait jamais existé selon le contrat du 5 octobre 2011. La preuve démontre simplement une offre de présentation de spectacles additionnels formulée par M. Leduc dans un courriel du 24 octobre 2011 qui n’a jamais eu de suite[1] :
De : Bruno Leduc
Envoyé : 24 octobre 2011 18:08
À : Marlene Robitaille
Objet : Soumission Bruno Leduc
Bonjour Marlène.
Voici ma proposition :
Pour 7 show on parle de 950$ par show et pour 14 shows on parle de 900$ par show (repas non inclus, chambre d’hôtel incluse)
Appelle moi pour en discuter ou si tu préfère que je te contact, dis moi le meilleurs moment.
Merci et au plaisir.
Bruno Leduc
Hypnotiseur-Humoriste
[…]
(reproduction exacte)
Les questions en litige
[11] Les questions en litige sont au nombre de trois : les quatre nuitées non accordées d’une valeur de 1 226,88 $, et des dommages de 600 $ pour non-respect des conditions du contrat et l’existence de procédures abusives.
Les quatre nuitées
[12] Pour appuyer sa réclamation, M. Leduc réfère à un courriel du 26 mars 2015, qu’il a fait parvenir au greffe le 31 mars 2015. Dans ce courriel, Mme Robitaille répond ainsi à une demande de réservation :
Subject : Demande de réservation
From : Marlene Robitaille […]
To : Brunoleduc[…];
Cc : mrobitaille[…];
Date : Thursday, March 26, 2015 10:49 AM
M. Leduc,
Dans les circonstances découlant du litige qui sera présenté aux petites créances le 10 avril prochain soit dans deux semaines, je vous informe que votre demande de réservation d’un forfait ne sera pas accepté. Le tout devra donc se régler devant M. le Juge lors du procès.
Merci.
Marlène Robitaille
Hôtel Jaro
(reproduction exacte)
[13] La réponse de Mme Robitaille doit être examinée à la lumière de l’ensemble des circonstances pertinentes :
· M. Leduc soulève la question pour la première fois dans sa mise en demeure du 29 décembre 2011 :
[…]
Vous avez retenu mes services pour 2 spectacles les 8-9 octobre 2011 pour un montant total de 1000$ plus 4 nuits individuelles pour 2 personnes (chambre d’hôtel avec 2 lits) incluant les déjeuners pour 2 (le lendemain) à mon choix dans l’hôtel de mon choix de la chaîne Jaro (stationnement inclus) sans limite dans le temps. Ces nuits étaient utilisables hors des jours de spectacles.
Le 1er problème se situe au niveau des conditions pour les 4 nuits. Vous vous entêtez à ne pas vouloir respecter les conditions du contrat et dans votre dernier courriel vous m’avez confirmé que vous ne les respecterez pas. Valeurs de 4 nuits aux conditions du contrat : 1226,88$.
[…]
(reproduction exacte)
(nos soulignements)
· Le 3 janvier 2012, Mme Robitaille explique clairement à M. Leduc les contraintes du système informatique et les modalités à respecter pour bénéficier des certificats de nuitées :
[…]
J’accuse réception de votre mise en demeure du 29 décembre 2011.
Premièrement, vous affirmez que vos certificats ne sont pas conformes aux ententes intervenues et que les conditions des nuitées vous ayant été remises ne sont pas respectées, ce qui est inexacte. Vous trouverez ci-joint 4 certificats qui ont une date d’expiration au 10 octobre 2013 comme ceux qui vous ont déjà été remis.
Nous n'avons pas le choix de placer une date d'expiration sur nos certificats cadeau car, après deux ans, les certificats sont automatiquement effacés dans notre système informatique. S’il advenait que, d'ici le 10 octobre 2013, vous n'ayez toujours pas utilisé ceux-ci, vous pourrez contactez Mme Gaétane Savard au 658-5624 poste 6123 et celle-ci sera en mesure de les prolonger pour encore deux ans.
En ce qui attrait au stationnement, tous les hôtels Jaro mise a part le Palace Royal offrent le stationnement sans frais. Une note est inscrite sur les certificats ci-joints afin de préciser que, si vous choisissez le Palace Royal, vous ne devrez pas débourser le 12$ de stationnement.
En ce qui attrait au déjeuners, ceux-ci sont toujours offerts dans les hôtels Jaro et rien ne stipulait au contrat que ceux-ci ne devaient avoir aucune limite. Dans le contrat, 3 certificats étaient sur disponibilité des hôtels seulement et un était à votre convenance, c'est donc ainsi que nous vous les retournons.
[…]
(reproduction exacte)
(nos soulignements)
· Le Tribunal apprend à l’audience que M. Leduc n’a jamais tenté de se prévaloir de ces certificats avant sa demande de réservation formulée vers le 26 mars 2015.
[14] Au regard de l’utilisation des nuitées, il ne fait aucun doute que le comportement de M. Leduc est aux antipodes des exigences des articles 6, 7 et 1375 du Code civil du Québec (CcQ) :
6. Toute personne est tenue d'exercer ses droits civils selon les exigences de la bonne foi.
1991, c. 64, a. 6.
7. Aucun droit ne peut être exercé en vue de nuire à autrui ou d'une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l'encontre des exigences de la bonne foi.
1991, c. 64, a. 7.
1375. La bonne foi doit gouverner la conduite des parties, tant au moment de la naissance de l'obligation qu'à celui de son exécution ou de son extinction.
1991, c. 64, a. 1375.
[15] Les quatre nuitées lui sont accordées le 5 octobre 2011; M. Leduc ne tient pas compte des explications de Mme Robitaille du 3 janvier 2012 et ne se prévaut pas de l’offre de Robitaille avant le 26 mars 2015, soit 41 mois plus tard et à 15 jours de l’audience, le 10 avril 2015. Manifestement, il s’agit d’un stratagème…À cet égard, le Tribunal appliquera dans l’une des ses conclusions les règles de la compensation selon les articles 1672 et 1673 CcQ :
1672. Lorsque deux personnes se trouvent réciproquement débitrices et créancières l'une de l'autre, les dettes auxquelles elles sont tenues s'éteignent par compensation jusqu'à concurrence de la moindre.
La compensation ne peut être invoquée contre l'État, mais celui-ci peut s'en prévaloir.
1991, c. 64, a. 1672.
1673. La compensation s'opère de plein droit dès que coexistent des dettes qui sont l'une et l'autre certaines, liquides et exigibles et qui ont pour objet une somme d'argent ou une certaine quantité de biens fongibles de même espèce.
Une partie peut demander la liquidation judiciaire d'une dette afin de l'opposer en compensation.
1991, c. 64, a. 1673.
Les dommages contractuels et extracontractuels
[16] M. Leduc réclame des dommages contractuels et extracontractuels. Il prétend avoir subi beaucoup de stress et d’inconvénients en raison des mauvaises conditions qui prévalaient lors de la présentation de son spectacle d’hypnose humoristique.
[17] Comme le souligne Robitaille dans sa contestation (voir notamment les paragraphes 21, 22 et 23)[2], cette prétention est invraisemblable et non fondée, compte tenu de la clause suivante du contrat-facture du 5 octobre 2011 rédigé par M. Leduc :
Advenant l’impossibilité d’effectuer les tests de sons à la satisfaction du fournisseur et ou un technicien non qualifié pour ce type de spectacle, ou absent et ou qu’un ou plusieurs des équipements sont défectueux ou fonctionnent en partis le fournisseur aura l’entière liberté de faire, interrompre ou de refuser de faire le spectacle.
[18] En outre, si les dommages relatés à l’audience par M. Leduc avaient réellement existé, il les aurait sûrement signalés au cours du spectacle, ou peu après. Or, bien au contraire, le 24 octobre 2011, il proposait de nouveau ses services pour des spectacles additionnels[3].
L’abus de droit
[19] Mme Robitaille soutient que l’entreprise Robitaille et elle-même ont été dérangées par les demandes incessantes de M. Leduc et par son harcèlement à son endroit et à l’égard du personnel. À titre d’exemple, elle explique qu’elle avait l’impression d’avoir été arnaquée et de devoir consacrer beaucoup de temps pour tenter de répondre aux plaintes continuelles de M. Leduc sur différents sujets. La lecture du jugement rendu par Mme la juge Diane Quennevillle 15 novembre 2013[4] lui a rappelé qu’elle avait elle-même vécu des situations similaires à celles décrites par Mme la juge Quenneville :
[…]
[52] Il se dégage de l'analyse des recours entrepris par Leduc, du moins dans les dossiers où un jugement a été rendu, que Leduc invente un scénario, créé une situation de toute pièce ou monte un stratagème dont il profite pour adresser des reproches à la partie adverse et ainsi poursuivre cette dernière en dommages.
[…]
[58] Tout d'abord, ses recours sont très souvent dirigés contre une personne morale, sociétés publiques ou parapubliques, municipalités ou sociétés à but non lucratif. En de nombreuses occasions, Leduc implique, sans fondement juridique, les employés ou représentants de ces sociétés personnellement comme défendeurs.
[…]
[67] Or, depuis au moins 2004, Leduc vit de prestations d'aide sociale. En plus de ses prestations, Leduc reçoit des cachets pour les spectacles d'hypnose qu'il donne.
[…]
[69] L'objectif recherché par Leduc est simple. Dans presque tous les cas, l'action qu'il entreprend ne découle pas d'un dommage réel subi ou d'une perte d'argent. Ses recours visent plutôt un gain potentiel.
[…]
[78] Étant prestataire de l'aide sociale, Leduc n’assume aucun coût pour le timbre judiciaire de son action. En contrepartie, dans les dossiers répertoriés à ce jour, les défendeurs ont dû payer au-delà de 11 000 $ en timbres judiciaires pour contester les actions intentées par Leduc.
[…]
[80] Le Tribunal n’a aucune hésitation à conclure que Leduc abuse du système judiciaire. Il n’a aucun égard pour les justiciables qu’il poursuit. Ni sur les conséquences pour eux à la suite des poursuites qu’il entreprend. Le stress vécu en attente du procès qui se solde par un désistement de sa part, souvent lors de la journée même de l’audition.
[81] Leduc tient en otage les justiciables qui doivent investir temps et argent dans la contestation de recours voués à l’échec.
[…][5]
(nos soulignements)
[20] Dès la réception de la contestation de Robitaille, toute personne raisonnable aurait réalisé la futilité du recours et décidé d’y mettre fin. La poursuite du litige à ce moment constitue un autre exemple d’abus du système judiciaire et une tentative de soutirer des bénéfices monétaires en créant des embarras.
[21] Selon le témoignage de Mme Robitaille, l’entreprise et elle-même ont été victimes de procédures abusives qui ont causé des inconvénients et entraîné des dépenses pour contrer la demande de M. Leduc. Le Tribunal peut alors imposer une sanction comme le permettent les articles 54.1 et 54.4 du Code de procédure civile :
54.1. Les tribunaux peuvent à tout moment, sur demande et même d'office après avoir entendu les parties sur le point, déclarer qu'une demande en justice ou un autre acte de procédure est abusif et prononcer une sanction contre la partie qui agit de manière abusive.
L'abus peut résulter d'une demande en justice ou d'un acte de procédure manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire, ou d'un comportement vexatoire ou quérulent. Il peut aussi résulter de la mauvaise foi, de l'utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou de manière à nuire à autrui ou encore du détournement des fins de la justice, notamment si cela a pour effet de limiter la liberté d'expression d'autrui dans le contexte de débats publics.
2009, c. 12, a. 2.
54.4. Le tribunal peut, en se prononçant sur le caractère abusif d'une demande en justice ou d'un acte de procédure, ordonner, le cas échéant, le remboursement de la provision versée pour les frais de l'instance, condamner une partie à payer, outre les dépens, des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par une autre partie, notamment pour compenser les honoraires et débours extrajudiciaires que celle-ci a engagés ou, si les circonstances le justifient, attribuer des dommages-intérêts punitifs.
Si le montant des dommages-intérêts n'est pas admis ou ne peut être établi aisément au moment de la déclaration d'abus, il peut en décider sommairement dans le délai et sous les conditions qu'il détermine.
2009, c. 12, a. 2.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
REJETTE la demande contre Les Immeubles Jacques Robitaille inc.;
CONDAMNE Bruno Leduc à rembourser à Les Immeubles Jacques Robitaille inc. les frais judiciaires de contestation de 199 $;
REJETTE la demande contre Marlène Robitaille;
CONDAMNE Bruno Leduc à rembourser à Marlène Robitaille les frais judiciaires de contestation de 152 $;
DÉCLARE abusive la demande en justice de Bruno Leduc du 27 mars 2012, dirigée contre Les Immeubles Jacques Robitaille inc. et Marlène Robitaille parce que manifestement mal fondée et inspirée par la recherche d’un gain potentiel en nuisant à autrui;
CONDAMNE Bruno Leduc à payer à Les Immeubles Jacques Robitaille inc. des dommages-intérêts de 1 565,19 $ pour compenser les honoraires et déboursés extrajudiciaires[6], somme réduite par compensation judiciaire de 1 226,88 $, laissant un solde de 338,31 $, avec l’intérêt au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue par l’article 1619 CcQ, depuis la date de ce jugement;
CONDAMNE Bruno Leduc à verser à Marlène Robitaille des dommages compensatoires moraux de 250 $ pour troubles et inconvénients, avec l’intérêt au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue par l’article 1619 CcQ, depuis la date de ce jugement;
CONDAMNE Bruno Leduc à verser à Les Immeubles Jacques Robitaille inc. et à Marlène Robitaille des dommages-intérêts punitifs symboliques de 10 $ chacun, en tenant compte des critères de l’article 1621 CcQ, notamment la situation patrimoniale du débiteur;
1621. Lorsque la loi prévoit l'attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.
Ils s'apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l'étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.
1991, c. 64, a. 1621.
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JEAN-F. KEABLE, J.C.Q.
Date d’audience : 10 avril 2015
[1] C-6.
[2] Voir le paragr. 3 du jugement.
[3] Voir le paragr. 10 du jugement.
[4] C-7, Leduc c. Québec (Procureur général), 2013 QCCQ 12686.
[5] Les soulignements du Tribunal mettent en évidence le « vécu » de Mme Robitaille.
[6] Le Tribunal retient la facture 16653 du 4 mars 2012 pour 258,69 $, de même qu’une partie de la facture 17779 du 28 décembre 2012 évaluée à 1 150 $, plus taxes, pour les services professionnels du 11 avril 2012 au 17 avril 2012 et des déboursés de 156,50 $ pour la même période. Ces documents ont été transmis à M. Leduc le 5 mai 2015 afin qu’il les commente.
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