Décision

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Julien c. Comspec (9110-9595 Québec inc.)

2016 QCCQ 5754

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

LOCALITÉ DE

QUÉBEC

« Chambre civile »

N° :

200-32-062525-158

 

DATE :

 28 juin 2016

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

ANDRÉ CLOUTIER, J.C.Q.

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HERYK JULIEN et LAURENCE BOUDREAULT, […], Stoneham-et-Tewkesbury, Québec, […]

Demandeurs

c.

 

COMSPEC 9110-9595 QUÉBEC INC., JACQUES MARTEL et JEAN-JACQUES VERREAULT., 3107, Ave des Hôtels, Québec, G1W 4W5

Défendeurs

 

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JUGEMENT

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[1]           Le 12 mai 2011, les demandeurs ont requis les services de M. Jacques Martel et de Comspec 9110-9595 Québec inc. pour l’inspection visuelle préachat d’un immeuble situé au 155, Chemin des Sables à Stoneham.

[2]           Ladite inspection s’est déroulée le jour même et un rapport d’inspection contenant les observations et recommandations de M. Martel a été remis aux demandeurs sous forme de disque compact nécessitant un lecteur de disques pour en prendre connaissance.

[3]           Sur les lieux, au fur et à mesure de l’inspection et à la fin de celle-ci, M. Martel a fait part de ses observations aux demandeurs et à leur agent immobilier M. Martin Leclerc qui les accompagnait.

[4]           Au terme de cette inspection, lorsqu’interrogé par les demandeurs et leur agent d’immeuble M. Martel a déclaré que cet immeuble lui paraissait solide et sein, mis à part les quelques réparations et correctifs qu’il recommandait aux demandeurs de faire effectuer s’ils donnaient suite à la promesse d’achat qu’ils avaient signée.

[5]           Rassurés par ces propos, les demandeurs se sont portés acquéreurs de l’immeuble le 17 juin 2011.

[6]           Or, en janvier 2012, les demandeurs ont observé une infiltration au mur sud de la maison, dans la salle de bain. Cette infiltration d’eau a persisté et s’est aggravée le mois suivant si bien que les demandeurs ont dénoncé le vice à leurs vendeurs et invité Messieurs Martel et Leclerc à venir constater l’état des faits au même moment.

[7]           Ayant retenu les services de l’ingénieur Éric Walsh, le 11 mai 2012 celui-ci indique dans son rapport d’expertise que l’immeuble souffre depuis plusieurs années d’importantes infiltrations d’eau qui affectent la structure de la toiture et des murs extérieurs de la maison.

[8]           C’est à ce moment que les demandeurs réalisent que M. Martel s’était lourdement trompé lorsqu’interrogé par M. Julien, lors de la visite du 12 mai 2011, sur la présence de nombreuses taches sombres sur les murs extérieurs de l’immeuble recouverts de stucco; il avait répondu qu’il s’agissait simplement de taches d’humidité causées par l’humidité du milieu ambiant à raison de l’important couvert forestier et de la présence d’eau à proximité de la maison.

[9]           En réalité, selon le témoignage de M. Éric Walsh, il s’agissait de taches causées par l’exfiltration de l’eau présente à l’intérieur du mur.

[10]        Par la suite, lorsque les demandeurs parcourront le rapport d’inspection des défenderesses, enregistré sur la disquette qui leur fut remise le 12 mai 2011, ils constateront que sa teneur est complètement différente et opposée à l’appréciation verbale que le défendeur Martel leur avait communiquée sur les lieux.

[11]        Pour citer les propos de l’agent immobilier Leclerc, présent le 12 mai 2011, « jamais dans toute sa carrière n’a-t-il vu deux rapports, l’un verbal l’autre écrit, aussi diamétralement opposé de la part d’un inspecteur en bâtiment ».

[12]        Les demandeurs reprochent donc aux défendeurs leur incompétence à diagnostiquer un vice extrêmement important et bien apparent, de les avoir trompé en émettant des opinions verbales non fondées, tout en tentant d’occulter sa responsabilité en passant sous silence les défauts observés sur les murs extérieurs de l’immeuble, notés au rapport sur support électronique, tout comme les recommandations qui y sont contenues, de faire procéder à des analyses plus poussées des murs et de la structure du bâtiment de même que la toiture (qui n’a pas été inspectée) (pièce D-2).

[13]        D’ailleurs, il est important de noter que l’attestation d’inspection décrivant sommairement les éléments ayant fait l’objet de l’inspection du 12 mai 2011, déposée en preuve par M. Martel en pièce D-1, est un document modifié où, par l’usage d’une plume dont la couleur d’encre diffère de celle utilisée à l’origine, on a ajouté une recommandation et tenté d’exclure l’inspection des murs noircis.  À cet égard, il suffit de constater que la copie de ce document, remise aux demandeurs le 12 mai 2011, ne comporte pas ces modifications.

[14]        Enfin, en contestation de la réclamation qui lui est faite, M. Martel n’a jamais nié les opinions et commentaires verbaux qui lui sont attribués par les demandeurs et leurs témoins, il s’est limité à se référer à la transcription de son rapport, enregistré sur support électronique.

[15]        Il ressort de cette preuve que les défendeurs Comspec et Martel n’ont pas agi selon les règles de l’art dans l’exécution du contrat de service qui leur a été confié par les demandeurs (art. 2100 C.c.Q).  Ce faisant, ils ont incité les demandeurs à se porter acquéreurs d’un immeuble tellement endommagé par l’eau, que la toiture et trois des quatre murs extérieurs devaient être reconstruits, selon le témoignage de l’ingénieur Walsh.

[16]        Ayant choisi de ne pas procéder à l’inspection de la toiture et n’ayant pas su reconnaître les traces évidentes d’infiltration d’eau dans les murs extérieurs de l’immeuble, les défendeurs ne sauraient tenter d’occulter leur responsabilité par leurs nombreuses recommandations faites dans le rapport enregistré sur support électronique de faire procéder à des inspections additionnelles (art. 1474 C.c.Q.).

[17]        En acceptant d’agir comme inspecteur en bâtiments, les défendeurs ne pouvaient se décharger de leurs obligations en recommandant aux demandeurs de faire inspecter l’immeuble par d’autres.  Ils devaient, au contraire, reconnaître ce qui était visible et en faire part aux demandeurs dans leurs rapports, tant verbal qu’écrit.  Cela n’a pas été fait.

[18]        Les défendeurs n’ont pas su agir au meilleur des intérêts de leurs clients avec prudence et diligence.  N’ayant pas su reconnaître et dénoncer des signes évidents d’un problème majeur d’infiltrations d’eau, ils ne se sont pas acquittés de leur obligation de résultat (art. 2100 C.c.Q.).

[19]        Ce faisant, ils ont contribué à causer aux demandeurs de très lourdes pertes financières qui dépassent largement les 15 000 $ réclamés.  C’est pourquoi la responsabilité solidaire de Comspec et de Jacques Martel sera retenue.

[20]        Par ailleurs, aucun lien de droit n’a été établi à l’égard de Jean-Jacques Verreault à l’égard de qui la réclamation sera rejetée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

            REJETTE la réclamation faite à Jean-Jacques Verreault;

            CONDAMNE solidairement Comspec et Jacques Martel à payer à Heryk Julien et Laurence Boudreault la somme de 15 000 $ avec intérêts et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter de l’assignation;

            CONDAMNE Comspec et Jacques Martel aux frais de justice fixés à 200 $.

 

 

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ANDRÉ CLOUTIER, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

16 juin 2016

 

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