Décision

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Gabarit test Cour supérieure V12 - FR (2020-12-07)

Droit de la famille — 21964

2021 QCCS 2172

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

laval

 

No :

540-12-022530-182

 

 

 

DATE :

Le 17 mai 2021

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

stéphane lacoste, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

S... A...

Partie demanderesse

 

c.

 

A... AT...

Partie défenderesse

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT rectifié

______________________________________________________________________

 

 

APERÇU

[1]           Madame demande le divorce, le partage de certains biens, une pension alimentaire pour les enfants des parties et des dommages et intérêts pour la violence familiale dont elle est victime durant le mariage. 

[2]           Certains des faits reprochés à ce dernier égard se seraient produits dans le pays d’origine des parties, avant leur immigration au Québec en février 2011.

[3]           Le Tribunal doit démêler tout ça et déterminer les faits prouvés par prépondérance de preuve.

ANALYSE

1.      La demande de divorce

[4]           Les conditions légales sont réunies (les parties cessent de faire vie commune le 17 août 2017) et les parties consentent au divorce.

[5]           Le Tribunal fera droit à la demande.

2.      LE TEMPS PARENTAL

[6]           Les parties ont quatre enfants, dont trois sont toujours mineurs :

6.1.        X, née le [...] 2000;

6.2.        Y, née le [...] 2004;

6.3.        Z, né le [...] 2010;

6.4.        A, né le [...] 2012.

3.      LA pension alimentaire pour enfants

[7]           Afin de procéder au calcul de la pension alimentaire pour enfants, le Tribunal doit commencer par déterminer le revenu des parents au sens du Règlement sur la fixation des pensions alimentaires pour enfants[1]

[8]           Madame demande au Tribunal d’imputer un revenu plus élevé à Monsieur que celui qu’il admet. C’est elle qui supporte le fardeau de preuve.

[9]           Une longue preuve est présentée du train de vie et du travail des parties en Égypte jusqu’à leur immigration au Canada. Madame témoigne de sa compréhension des revenus de Monsieur, mais n’en a pas connaissance directe personnelle. Pire encore, son témoignage, quant à ses propres revenus d’emploi, laisse le Tribunal songeur, car elle semble avoir gagné beaucoup d’argent avant d’immigrer au Canada.

[10]        La preuve est lacunaire quant au niveau de vie en Égypte et même quant au taux de change. D’ailleurs, le simple taux de change ne permet pas d’évaluer la véritable valeur des revenus et actifs des parties en Égypte. Il faut plutôt tenir compte du coût de la vie là-bas, et de ses variations dans le temps. 

[11]        Il demeure que les revenus d’emploi actuels de Monsieur ne sont pas contestés.  Madame demande plutôt de tenir compte des placements de Monsieur en Égypte.

[12]        Madame soulève des doutes importants quant aux véritables actifs de Monsieur, mais cela ne suffit pas à écarter sa version à lui.

[13]        En l’absence d’une preuve d’expert quant au coût de la vie en Égypte et de preuve de faits convaincante (Madame ne fait pas témoigner de représentant des banques ou même des proches ou le père de Monsieur, alors qu’elle aurait pu le faire, puisque le Tribunal peut procéder à l’audition de témoins par moyen technologique), le Tribunal doit retenir les chiffres présentés par Monsieur.

[14]        Il demeure que la preuve démontre que Monsieur détient des sommes importantes à son nom ou au nom de l’un ou l’autre des enfants, comme le permettrait, semble-t-il, le droit égyptien.

[15]        Monsieur avoue que ces placements portent de haut taux d’intérêts, mais la preuve est imprécise et insatisfaisante à cet égard.

[16]        Le Tribunal doit tenir compte des revenus d’intérêts générés par les placements de Monsieur. Face à une preuve imprécise, le Tribunal doit user de sa discrétion pour déterminer, en application de l’article 446 C.p.c., un revenu qui soit le plus près possible de ce que la preuve révèle, en particulier le témoignage de Monsieur.

[17]        Il y a lieu d’ajouter au salaire de Monsieur une somme de 10 000.00 $, annuellement, pour refléter ses revenus de placements.

[18]        Ainsi, les revenus des parties sont les suivants :

 

Madame

Monsieur

2018

72 368.00 $

29 118,74 $

2019

88 747,27 $

42 885,00 $

2020

82 935,36 $

46 365,43 $

2021

82 935,36 $

46 365,43 $

 

[19]        La fille ainée est d’âge majeur, mais demeure à charge de ses parents parce qu’elle est toujours aux études, à temps plein. Il est toutefois approprié de tenir compte de ses revenus d’emploi afin qu’elle participe elle-même à combler ses besoins de base.

[20]        Selon la preuve, elle travaille, à temps partiel, en 2018 et 2019, et une partie de 2020. Après quoi, elle touche la Prestation canadienne d’urgence. Elle ne travaille présentement pas, préférant se consacrer, à temps plein, à ses études.

[21]        En l’absence d’une preuve qu’il lui est impossible de travailler ou que ses études lui imposent ce chômage, le Tribunal lui impute pour 2021 le même revenu que celui de 2020. Le Tribunal retient qu’elle a les revenus suivants :

 

2018

13 785,90 $

2019

6 912.00 $

2020

6 300.00 $

2021

6 300.00 $

 

[22]        Le Tribunal estime juste de retenir le tiers de ces revenus pour les fins de calculs de la pension alimentaire payable.

[23]        La pension alimentaire mensuelle, payable par Monsieur, pour les enfants, est donc de 326,80 $ pour 2018, de 549,09 $ pour 2019, de 622,07 $ pour 2020, et de 623,83 $ pour 2021.

[24]        Madame demande d’augmenter de 20% le montant de la pension alimentaire, pour tenir compte de difficultés excessives. Elle ne fait toutefois pas la preuve de telles difficultés.

[25]        Le législateur a mis en place un processus de détermination des pensions alimentaires pour enfants qui est présumé suffire à assurer leurs besoins de base.

[26]        Il appartient au parent qui demande au Tribunal d’exercer sa dicrétion pour augmenter ou réduire le montant déterminé en application de ce processus de démontrer l’existence de difficultés excessives, et non pas de simples difficultés.  Madame ne se décharge pas de son fardeau. 

[27]        Les sommes déterminées au paragraphe 13 suffisent à combler les besoins de base des enfants. Le Tribunal tient aussi compte du fait que Monsieur paie, et s’engage à continuer de payer, les frais de téléphone cellulaire des enfants.

[28]        Quant aux frais particuliers, ils doivent être partagés selon les pourcentages établis aux annexes 1 retenues par le Tribunal. 

[29]        Monsieur ne conteste pas le tableau P-16, préparé par Madame, qui établit les sommes payées au titre des frais particulier. 

[30]        Le Tribunal retient donc ces sommes et leur applique les pourcentages retenus et fixe les sommes dues à Madame comme suit :

 

2018

1 818,54.00 $

2019

3 072,70 $

2020

4 628,07 $

2021

58,44 $

TOTAL

9 577,75 $

 

4.      LE régime enregistré d’épargne-étudeS

[31]        Madame détient un régime enregistré d’épargne-études pour le bénéfice des enfants. Elle y contribue 100,00 $ par mois. Elle demande que le Tribunal ordonne à Monsieur de lui rembourser la moitié de cette somme.

[32]        Monsieur ne s’oppose pas à cette demande et il y sera fait droit pour l’avenir seulement, considérant la pièce P-16, la réclamation et l’équité.

5.      Le partage du patrimoine familial et du régime matrimonial

[33]        Les parties sont mariées selon le régime de la séparation de biens égyptien.  Elles avouent que cela est le régime qui s’applique à elles. Le Tribunal n’a aucune preuve que ce régime soit identique à notre régime de la séparation de biens[2]. Vu l’aveu des parties, et puisque le droit étranger est une question de fait, le Tribunal ne remet pas en cause cette détermination[3].

[34]        Il demeure que les parties sont soumises au partage du patrimoine familial parce qu’elles sont domiciliées au Québec au moment de la rupture[4]. En l’espèce, les parties procèdent elles-mêmes à ce partage, à leur satisfaction mutuelle, sauf quant à la question de la résidence familiale. Il faut ordonner le partage des gains inscrits auprès de Retraite Québec dont les parties s’accordent qu’il soient partagés.  Madame détient aussi un fonds de pension auprès du régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP) qui devra être partagé suivant les règles habituelles.

[35]        En conséquence, le Tribunal ordonnera le transfert à Monsieur de 50% de la valeur des droits à la retraite accumulée par la Madame dans ce fonds.

[36]        La vente de la résidence familiale (tenue en co-propriété indivise égale par les parties), au cœur du litige lors de l’audience au fond est maintenant réglée, comme le Tribunal le constate dans son ordonnance du 1er avril  2021 ordonnant aux parties de se conformer à leur consentement écrit du 31 mars 2021.

[37]        Elles ne règlent cependant pas le partage du produit net de la vente de la résidence familiale.

[38]        En effet, un litige subsiste quant au droit de Monsieur de déduire une somme de 97 000.00 $ qu’il plaide avoir contribué à l’achat de la résidence à même un don personnel de son père.

[39]        Madame plaide que ce don est fait au bénéfice de la famille et qu’aucune déduction ne doit être faite. 

[40]        Il revient à Monsieur de prouver que ce don est fait pour lui seulement. Il ne s’en décharge pas.

[41]        Le Tribunal ne peut écarter le témoignage de Madame, surtout que la preuve écrite du transfert d’argent est toute aussi compatible avec l’une ou l’autre version et que le donateur n’est pas appelé à témoigner.

[42]        Aucune déduction ne doit être faite et le produit net de la vente de la résidence familiale doit être partagé à parts égales.

[43]        Il sera fait droit à la demande de Madame d’ordonner à Monsieur de lui rembourser la moitié des taxes municipales et scolaires et des paiements hypothécaires, pour la période du 1er mars 2018 au 1er mars 2021, soit un total de 22 826,80 $. Ces dépenses sont engagées pour le maintien de la résidence, à l’avantage des deux parties copropriétaires de l’immeuble.  Monsieur demande qu’il soit ordonné à Madame de lui payer 32 400$ à titre d’ « indemnité locative ». Cette demande est rejetée car Madame occupe la résidence à titre de copropriétaire et qu’au surplus elle y loge aussi les enfants du couple.  Le logement des enfants fait partie de leurs besoins de base et le Tribunal use de sa discrétion pour ne pas indemniser Monsieur à cet égard de quelle que façon que ce soit.

[44]        Madame demande un partage inégal du patrimoine familial.

[45]        L’article 422 C.c.Q. permet au Tribunal d’ordonner une telle chose, lorsque du partage égal résulterait une injustice :

422. Le tribunal peut, sur demande, déroger au principe du partage égal et, quant aux gains inscrits en vertu de la Loi sur le régime de rentes du Québec (chapitre R-9) ou de programmes équivalents, décider qu’il n’y aura aucun partage de ces gains, lorsqu’il en résulterait une injustice compte tenu, notamment, de la brève durée du mariage, de la dilapidation de certains biens par l’un des époux ou encore de la mauvaise foi de l’un d’eux.

[46]        Cette énumération n’est pas exhaustive.

[47]        Il appartient à Madame de prouver, par prépondérance, une injustice causée par Monsieur, c’est-à-dire une faute, un comportement qui violent ses « obligations fondamentales de contribuer à la formation et au maintien du patrimoine familial »[5].

[48]        La preuve révèle plutôt que Monsieur remplit ses obligations à cet égard : tous ses revenus d’emploi gagnés, depuis son arrivée au Canada, sont dépensés pour la famille.

[49]        Les économies que Monsieur détient dans des instuments financiers en Égypte (une valeur totale de près de 200 000.00 $) sont accumulées avant son arrivée au Canada (sauf quant aux intérêts qui continuent de s’ajouter), voir même avant son mariage, à l’extérieur du patrimoine familial.

[50]        Monsieur ne commet aucune faute en gardant ces économies dans de tels instruments et en dehors du patrimoine familial. Le législateur impose un partage seulement pour certains actifs et ne remplace pas complètement le régime matrimonial des époux.

[51]        Le Tribunal n’ordonnera pas un partage inégal.

6.      L’autorisation de voyager

[52]        Madame demande qu’il lui soit permis de voyager avec les enfants mineurs sans l’autorisation de Monsieur. Cette demande ne s’appuie sur aucun fait particulier.

[53]        Il est normal que les détenteurs de l’autorité parentale puissent décider d’autoriser ou non un tel voyage. Il appartient au parent qui demande une dispense à cet égard de convaincre le Tribunal qu’il existe des circonstances particulières qui le justifient.

[54]        En l’absence d’une telle preuve, la demande sera rejetée.

7.      Les dommages pour la violence familiale

[55]        Cette affaire a ceci de rare que Madame réclame des dommages à Monsieur pour les actes et paroles de violence familiale dont elle est victime de sa part durant le mariage. Il est peu fréquent que le Tribunal soit saisi de telles réclamations, malgré l’importance de la violence familiale dans notre société.

[56]         Madame fait remonter sa réclamation à des faits survenus alors que les parties habitent l’Égypte. Monsieur nie avoir commis quelle que faute que ce soit en Égypte. La preuve ne convainc pas le Tribunal de la survenance des fautes que Madame allègue avoir été commises en Égypte. Sa version est contredite par Monsieur. De plus, elle ne présente aucun témoin alors même qu’elle affirme qu’il y en a, au moins pour un des incidents allégués, soit celui lors duquel Monsieur l’aurait embarrée dans une pièce. Le Tribunal n’a aucune raison d’écarter le témoignage de Monsieur quant aux événements qui se seraient déroulés en Égypte.

[57]        Lorsqu’elles habitent en Égypte, les parties vivent séparées l’une de l’autre durant la semaine. Madame habite alors chez sa mère. Les parties ne passent ensemble que les fins de semaine et quelques vacances annuelles. Cette situation réduit d’autant les occasions de tension, chicanes et actes ou paroles violents.

[58]        Ceci rend plus probable le témoignage de Monsieur selon qui les choses se passent bien avant l’arrivée au Canada et que c’est ici, alors que les parties font vie commune à temps plein, que commence la violence verbale, puis physique.

[59]        La présente décision ne tranche pas les questions du droit et de la prescription applicable puisqu’il est inutile de le faire et que le Tribunal n’a pas pour rôle de donner des opinions juridiques.

[60]        Il reste les événements qui surviennent au Québec, après l’immigration des parties. Monsieur avoue des fautes commises au Québec et a d’ailleurs plaidé coupable à des accusations criminelles à cet égard.

[61]        Madame et la fille ainée du couple témoignent d’un événement particulier (elles en donnent d’ailleurs des versions divergentes sur des points de peu d’importance).

[62]        Elles affirment toutes les deux que Monsieur crie tout le temps après Madame.  Cette affirmation est une exagération du vocabulaire qui n’est pas soutenue par la preuve et est improbable. Il est toutefois clair que Monsieur crie après Madame, à l’occasion, et l’insulte alors. Il s’agit d’un comportement fautif.

[63]        Madame fait le même genre d’exagération lorsqu’elle allègue dans sa DII que Monsieur l’oblige toujours à dormir sur le plancher. C’est une affirmation grave que Madame nuance en témoignage, pour plutôt affirmer que Monsieur la force à dormir sur le divan du salon pendant une courte période, ce qui est d’ailleurs confirmé par le témoignage de la fille ainée.

[64]        De telles exagérations sont malheureuses, car elles affectent la crédibilité de Madame.

[65]        Le dernier événement de violence survient le 17 août 2018. La police est appelée sur les lieux et arrête Monsieur. Des accusations criminelles sont portées contre Monsieur qui plaide coupable à plusieurs d’entre-elles.

[66]        Monsieur ne nie pas avoir été violent verbalement et physiquement envers Madame à plusieurs reprises. Il cherche toutefois à diminuer la gravité de ses actes.

[67]        La faute est établie. Monsieur insulte Madame, lui crie après et se livre à des voies de fait à au moins trois occasions (poussage, coups, égratignures) et lui lance une assiette à une autre occasion.

[68]        Madame se plaint aussi que Monsieur lui fait mauvaise réputation dans la communauté chrétienne égyptienne. Elle n’en fait toutefois pas la preuve. Il n’est pas possible de conclure que le fait que des gens ne lui parlent pas, jettent sur elle un regard méprisant ou lui tiennent des propos blessants ou dénigrants résulte d’une faute de Monsieur.

[69]        Aucune de ces tierces personnes ne témoigne.

[70]        Cette réclamation se fonde seulement sur la conviction qu’a Madame que Monsieur doit bien avoir dit quelque chose de mal à son sujet. Comme Monsieur le nie et que son témoignage n’est pas contredit, le Tribunal doit rejeter cette réclamation.

[71]        Dans notre droit, la preuve d’une faute ne suffit pas à condamner un défendeur à payer des dommages et intérêts. La victime doit aussi prouver l’existence et l’étendue des dommages subis et le lien de causalité entre les fautes et ces dommages[6], même dans le cas de violence familiale.

[72]        Madame ne présente aucune preuve d’expert médical ou psychologique. Son témoignage ne suffit pas à prouver une atteinte grave ou permanente à sa santé physique ou psychologique. D’autant plus que son témoignage est vague et imprécis.

[73]        Tout au plus, est-il prouvé que Madame subit de la douleur et des ecchymoses et erraflures légères. Le Tribunal ne doute pas que Madame ressente de la douleur et de l’humiliation des fautes de Monsieur, mais ces dommages sont limités, fort heureusement.

[74]        Le Tribunal doit s’en tenir aux dommages réellement subis par Madame, tel que le révèle la preuve prépondérante, et non pas sur la culpabilité morale de Monsieur[7], toute aussi grave soit-elle, sauf quant à la question des dommages exemplaires.

[75]        Il y a peu de jurisprudence portant sur la question de la détermination de dommages et intérêts compensatoires et moraux pour des actes de violence familiale.  La décision la plus utile est celle rendue par la Cour d’appel dans O'Brien c. M.H.[8]. La Cour d’appel y tient compte des faits de l’affaire, des dommages réellement subis par la victime et de la jurisprudence pertinente[9]

[76]        L’examen de ces autorités et de celles soumises par les parties convainc le Tribunal que les fautes de Monsieur envers Madame ne lui causent que des dommages limités.

[77]        Une compensation de 2 000.00 $, à titre de dommages compensatoires, et de 5 000.00 $, à titre de dommages moraux, suffira à la compenser adéquatement.

[78]        À cette somme, il faut ajouter 10 000.00 $ de dommages exemplaires pour la violation des droits fondamentaux (sécurité, intégrité, honneur et dignité) de Madame.

[79]        Cette somme tient compte de la jurisprudence pertinente[10], de la capacité de payer de Monsieur[11], du caractère intentionnel des fautes commises, de leur gravité et de leur répétition. Elle tient aussi compte du fait que Monsieur a plaidé coupable aux accusations criminelles et qu’il comprend mieux maintenant les limites à respecter envers une conjointe[12].

8.            L’Exécution provisoire nonobstant appel

[80]        Madame demande au Tribunal d’ordonner l’exécution provisoire du jugement, nonobstant appel. Elle ne fait toutefois valoir aucun motif sérieux justifiant au Tribunal d’exercer ainsi sa discrétion.

[81]        Le Tribunal estime préférable de laisser découler les conséquences normales d’un éventuel appel. 

[82]        Cette demande sera rejetée.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[83]        ACCUEILLE partiellement la demande de S... A...;

[84]        PRONONCE le divorce des parties dont le mariage a été célébré le 22 août 1999;

[85]        ATTRIBUE à S... A... la majorité du temps parental pour les enfants mineurs Y, Z et A;

[86]        ACCORDE à A... At... du temps parental avec les enfants mineurs Y, Z et A, selon leur demande;

[87]        FIXE la pension alimentaire payable à S... A... par A... At..., au bénéfice des enfants X, Y, Z et A à 326,80 $ par mois, pour la période du 19 septembre 2018 au 31 décembre 2018, à 549,09 $ par mois pour l’année 2019, à 622,07 $ pour l’année 2020, et à 623,83 $ à compter du 1er janvier 2021; et ORDONNE à A... At... de payer ces sommes, sujet à compensation pour les sommes déjà payées, comme le calculera le percepteur des pensions alimentaires;

[88]        PRENDS ACTE de l’engagement de A... At... de continuer à payer les frais de téléphonie cellulaire des enfants, tant qu’ils demeurent à charge;

[89]        ORDONNE    à A... At... de payer à S... A... la somme de 9 577,75 $, à titre d’arrérages de sa part des frais particuliers;

[90]        ORDONNE    aux parties de s’informer, par écrit, de tout changement important dans leur situation financière, y compris tout changement dans leur situation d’emploi, et de fournir alors aussi le nom et l’adresse du nouvel employeur, le taux horaire, le nombre d’heures normalement travaillées dans la semaine depuis le changement;

[91]        ORDONNE    aux parties de se transmettre, au plus tard le 30 juin de chaque année, copie de leurs déclarations de revenus pour l’année précédente ainsi que de tout avis de cotisation reçu des autorités fiscales provinciale et fédérale ou autre;

[92]        ORDONNE    à A... At... de payer 50.00 $ par mois dans le régime enregistré d’épargne-étude des enfants;

[93]        ORDONNE à A... At... de payer à S... A... la somme de 22 826,80 $, à titre d’arrérages de sa part, de l’hypothèque et des taxes municipales et scolaires rattachées à la résidence familiale;

[94]        ORDONNE    le partage égal des gains inscrits auprès de Retraite Québec jusqu’au 19 septembre 2018;

[95]        ORDONNE le transfert à A... At... de 50% de la valeur des droits à la retraite accumulée par S... A... auprès du Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP) jusqu’au 19 septembre 2018;

[96]        PREND ACTE que les parties ont procédé au partage des autres composantes du patrimoine familial et au régime matrimonial;

[97]        ORDONNE à A... At... de payer à S... A... la somme de 17 000.00 $, à titre de dommages pour les violences familiales physique et psychologique qu’il a commises à son égard; avec les intérêts et l’indemnité additionnelle, à compter du présent jugement;

[98]        SANS FRAIS DE JUSTICE

 

 

 

 

 

stéphane lacoste, j.c.s.

 

Me Sherif Hanna

SHERIF HANNA

Procureur de S... A...

 

Me Rania Bouabdo

BOUADO AVOCATE

Procureure de A... At...

 

Dates d’audience :

18 et 19 février 2021

 

 

 



[1] RLRQ, c. C-25.01, r. 0.4.

[2] Le rapport d’expert D-19 est silencieux sur cette question.

[3] H.O. c. C.B., J.E. 2001-2177 (C.A.); Droit de la famille — 201114, 2020 QCCA 1054; Droit de la famille — 1983, 2019 QCCA 120.

[4] Idem; voir aussi L.P. c. F.B., J.E. 2003-2081 (C.S.).

[5] Droit de la famille — 21130, 2021 QCCS 362; voir aussi Droit de la famille — 21122, 2021 QCCA 207 et, en particulier, Droit de la famille — 2142, 2021 QCCA 93.

[6] Droit de la famille — 182316, 2018 QCCS 4749.

[7] O'Brien c. M.H., 2020 QCCA 1157.

[8] Précité note 3.

[9] Hamel c. J.C., 2008 QCCA 1889; Marcoux c. Légaré, J.E. 2000-960 (C.S.); H.N. v. C.B., [2005]

R.J.Q. 17317 (C.S.); J.S. c. A.A., 2007 QCCS 4435; C.P. c. Deslile, 2008 QCCS 4624; L.L. c.

Tsagatakis, 2009 QCCS 4279; G.W. et R.O., 2010 QCCS 7029; I.L. c. Fotohinia, 2014 QCCS 129.

S.M. c. G.G., 2017 QCCS 2716; N.C. c. F.T., 2018 QCCS 3939; Graveline c. Devost,

2015 QCCQ 3642.

[10] Dans O'Brien c. M.H., précitée note 3, la Cour d’appel explique les principes applicables et fixe à 25 000.00 $ les dommages punitifs.

[11] À cet égard, le Tribunal tient compte de la preuve faite, de la situation financière de Monsieur, ainsi que des autres conclusions du présent jugement.

[12] À ce dernier égard, le Tribunal ne tient pas compte du fait que le droit et la culture égyptienne permettraient, selon Monsieur, la commission des actes reprochés. Le droit québécois et le droit canadien s’appliquent également à tous lorsqu’ils se trouvent sur le territoire québécois.

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