Décision

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Modèle de décision CLP - juin 2011

St-Pierre et Meubles BDM + inc.

2013 QCCLP 4987

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Joliette

16 août 2013

 

Région :

Lanaudière

 

Dossier :

471530-63-1205

 

Dossier CSST :

135555159

 

Commissaire :

Luce Morissette, juge administratif

 

Membres :

Lorraine Patenaude, associations d’employeurs

 

Régis Gagnon, associations syndicales

 

 

Assesseur :

Huguette Dumais, médecin

______________________________________________________________________

 

 

 

Johanne St-Pierre

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Meubles BDM + inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 16 mai 2012, Johanne St-Pierre (la travailleuse) dĂ©pose Ă  la Commission des lĂ©sions professionnelles (le tribunal) une requĂŞte par laquelle elle conteste une dĂ©cision de la Commission de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ© du travail (la CSST) rendue le 30 avril 2012 Ă  la suite d’une rĂ©vision administrative.

[2]           Par cette dĂ©cision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 12 dĂ©cembre 2011. Elle dĂ©clare que la travailleuse n’a pas subi une rĂ©cidive, rechute ou aggravation le 26 aoĂ»t 2011 et qu’elle n’a pas droit aux prestations prĂ©vues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[3]           L’audience s’est tenue le 25 avril 2013 Ă  Joliette en prĂ©sence de la travailleuse et de son reprĂ©sentant. Meubles BDM + inc. (l’employeur) Ă©tait Ă©galement reprĂ©sentĂ© alors que la reprĂ©sentante de la CSST avait informĂ© le tribunal qu’elle serait absente. La cause a Ă©tĂ© mise en dĂ©libĂ©rĂ© le 17 mai 2013 après que des documents rĂ©clamĂ©s par le reprĂ©sentant de la travailleuse aient Ă©tĂ© dĂ©posĂ©s.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]           Le reprĂ©sentant de la travailleuse demande de dĂ©clarer que celle-ci a subi une lĂ©sion professionnelle le 23 aoĂ»t 2011, soit un accident du travail ou une rĂ©cidive, rechute ou aggravation. Il demande Ă©galement l’application de l’article 51 de la loi.

LA PREUVE

[5]           La travailleuse est âgĂ©e de 43 ans et prĂ©posĂ©e Ă  la finition chez l’employeur lorsqu’elle subit le 20 aoĂ»t 2009 une lĂ©sion professionnelle, soit un accident du travail.

[6]           Ă€ cette date, elle subit un trauma Ă  la face dorsale du pouce droit. Les diagnostics retenus en lien avec cet accident sont une rupture du tendon du long extenseur du pouce droit et un syndrome rĂ©gional douloureux complexe de l’avant-bras droit[2].

[7]           La travailleuse a fait l’objet d’un suivi mĂ©dical intense en lien avec ce trauma. Elle subira notamment deux chirurgies Ă  son pouce droit, dont la dernière, le 14 juillet 2010, par le docteur Bou-Merhi. Ce mĂ©decin procède alors Ă  une tĂ©nolyse de l’extenseur droit avec transfert tendineux. Il a assurĂ© une bonne partie du suivi mĂ©dical de la travailleuse.

[8]           Ă€ la demande de l’employeur, la travailleuse est examinĂ©e le 26 janvier 2011 par le docteur Lucie Duclos, chirurgien plasticien. Elle doit se prononcer sur les questions du diagnostic, la consolidation, les soins et traitements, le dĂ©ficit anatomophysiologique et les limitations fonctionnelles.

[9]           Ă€ l’examen, la travailleuse se plaint de diffĂ©rentes douleurs au membre supĂ©rieur droit, soit Ă  l’épaule, Ă  l’épicondyle latĂ©ral, au poignet, au pouce et Ă  l’index droits. L’effleurement de la main droite est douloureux et des engourdissements sont ressentis Ă  trois doigts et Ă  la face palmaire. Enfin, la travailleuse souffre d’une bursite Ă  l’épaule gauche.

[10]        Le docteur Duclos suggère que la travailleuse passe un Ă©lectromyogramme pour Ă©liminer un canal carpien. PrĂ©cisons dès maintenant que cet examen a Ă©tĂ© passĂ© et les rĂ©sultats ont Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©s comme Ă©tant normaux. Le mĂ©decin conclut ainsi son rapport :

[…]

 

Je considère que la lésion est présentement consolidée au niveau du status post-rupture de l’extensor pollicis longus au pouce droit, du status post-rupture du transfert tendineux, de l’ankylose de l’articulation interphalangienne du pouce droit et de l’articulation  interphalangienne distale de l’index droit, et de la neuropathie du nerf radial, dans le sens où madame refuse tout traitement en clinique de la douleur, qui pourrait être aussi simple que l’utilisation d’une médication sous forme de Neurontin. En fait, il n’y a aucun traitement nécessaire au niveau du pouce et de l’index. C’est seulement la neuropathie du nerf radial qui pourrait bénéficier d’un traitement.

 

Quant à la condition personnelle de l’épicondylite latérale au coude droit, une investigation devrait être faite sous forme de résonance magnétique, pour confirmer ce diagnostic, et des traitements devraient être effectués sous forme d’infiltration de cortisone et peut-être une chirurgie.

 

Quant au diagnostic clinique de syndrome du tunnel carpien droit, un électromyogramme devrait être effectué et, selon le résultat, une chirurgie pourrait être nécessaire.

 

[nos soulignements]

 

 

[11]        Ă€ la demande de l’employeur, l’avis d’un membre du Bureau d’évaluation mĂ©dicale (le BEM) est requis sur les questions du diagnostic, de la consolidation, des soins et traitements, de l’atteinte permanente Ă  l'intĂ©gritĂ© physique et des limitations fonctionnelles.

[12]        C’est dans ce contexte que le 20 avril 2011, le docteur Louise Duranceau, chirurgien plasticien, examine la travailleuse.

[13]        Elle rapporte ce qui suit concernant les plaintes de la travailleuse :

ÉTAT ACTUEL :

 

La travailleuse nous dit être en attente d’un rendez-vous avec le docteur Bou-Merhi qui aura lieu le 6 mai. Il est cessé l’évaluer pour une autre chirurgie au niveau de son pouce, pour mettre une tige dans son pouce, pour qu’il reste relevé.

Au point de vue de son état actuel, elle ne travaille pas, elle n’a aucun traitement de physiothérapie ou d’ergothérapie. Elle dit devoir prendre des médicaments sous forme d’Empracet, 2 comprimés aux 6 heures, de façon régulière, pour que ce soit tolérable.

 

Nous lui avons demandé de préciser sur une échelle de 0 à 10, ce que ça représente, mais elle n’a pas répondu à cette précision. Elle dit ressentir des douleurs dans sa main et dans son coude, sous forme de serrement. La douleur est toujours présente et elle doit prendre ses médicaments régulièrement. Elle ne fait jamais une nuit de sommeil complète et elle se réveille d’habitude après que les médicaments anti-douleur cessent de faire effet.

 

Dans ses activités de la vie quotidienne, elle dit que certains qu’elle ne peut pas faire, comme ouvrir un pot, elle a de la difficulté à plier son linge parce qu’elle ne travaille qu’avec le 3e, et 4e doigt. Elle ne peut pas se servir d’un balai ou d’une moppe, parce qu’elle n’a aucune force pour les tenir.

 

Elle a rapporté avoir comme des fourmis au dos de la main droite surtout lorsqu’on touche sa main.

 

[sic]

 

[nos soulignements]

 

 

[14]        Ă€ l’examen objectif, les avant-bras ne dĂ©montrent aucune diffĂ©rence de coloration de la couverture. Il n’y a pas de diffĂ©rence de texture, chaleur, sudation, coloration, des signes vasculaires et il n’y a pas de gonflement anormal. Enfin, le mĂ©decin n’objective aucun signe de dystrophie rĂ©flexe.

[15]        En lien avec le litige qui nous occupe, les propos suivants du docteur Duranceau sont pertinents :

Date ou pĂ©riode prĂ©visible consolidation de la lĂ©sion :

 

Bien que cette travailleuse n’est pas répondu de façon optimale aux différentes tentatives de corrections chirurgicales, nous croyons qu’il faut être très prudent d’aller lui offrir d’autres chirurgies qui, à mon avis, n’apporteront pas beaucoup d’amélioration à sa condition. [sic]

 

Au point de vue de syndrome douloureux, nous croyons qu’il s’agisse de douleurs au point de séquelles cicatricielles de ses chirurgies et je crois que le médecin traitant doit être prudent, quant à escalader une analgésie qui pourrait devenir problématique.

 

Je doute que toute autre intervention chirurgicale puisse améliorer la fonction du pouce droit, telle qu’arthrodèse ou autre geste sur les tissus mous puissent changer la fonction chez cette dame, d’où mon opinion que la consolidation a été atteinte.

 

Nature, nĂ©cessitĂ©, suffisance, durĂ©e des soins ou des traitements administrĂ©s ou prescrits :

 

Je suis d’avis que le seul traitement serait le contrôle de l’analgésie, médication telle qu’anti-inflammatoire plutôt que par analgésie.

Nous utilisons notre pouvoir discrétionnaire pour statuer sur les points 4 et 5.

 

Existence ou pourcentage d’atteinte permanente Ă  l’intĂ©gritĂ© physique ou psychique du travailleur :

 

Nous croyons que l’atteinte permanente se rapporte à un préjudice esthétique pour l’avant-bras et la main. Elle se rapporte aussi à la perte de fonction au niveau des articulations du pouce et de l’index, de même qu’à l’atteinte de la neuropathie du nerf radial.

 

Existence ou Ă©valuation des limitations fonctionnelles :

 

Les limitations fonctionnelles secondaires à ses atteintes permanentes auront à faire une utilisation de mouvements précis qu’il sera nécessaire à l’utilisation du pouce et de l’index de la main droite.

 

Quant à la neuropathie du nerf radial, je ne crois pas qu’elle cause une limitation fonctionnelle.

 

 

[16]        Le mĂ©decin pose un diagnostic de rupture du tendon extenseur long du pouce droit[3]. Elle fixe la consolidation au 26 janvier 2011 sans autre traitement que la prise d’anti-inflammatoires pour contrĂ´ler la douleur. Une atteinte permanente Ă  l'intĂ©gritĂ© physique de 15,85 % et des limitations fonctionnelles sont octroyĂ©es, soit que la travailleuse ne peut faire un travail prĂ©cis entre le pouce et l’index ou nĂ©cessitant une prĂ©hension soutenue entre le pouce et l’index de la main droite.

[17]        Ă€ l’audience, la travailleuse affirme qu’elle a conservĂ© des douleurs qui irradiaient au coude accompagnĂ©es d'enflure notamment Ă  la main, au pouce et aux doigts.

[18]        Le 25 mai 2011, la CSST entĂ©rine l’avis du membre du BEM par une dĂ©cision qui est maintenant devenue finale[4].

[19]        Le 31 mai 2011, la CSST dĂ©cide que la travailleuse a droit Ă  la rĂ©adaptation. Un emploi de magasinier au tablier de table chez l’employeur est finalement retenu après une visite de poste Ă  l’usine de l’employeur le 22 juin 2011.

 

 

[20]        Aux notes Ă©volutives de la CSST, nous lisons que la travailleuse ne souhaite pas retourner chez l’employeur puisqu’elle prĂ©tend y subir du harcèlement en lien avec son accident du travail. Nous y lisons Ă©galement, qu’elle conservait d’une lĂ©sion professionnelle survenue chez un autre employeur, des limitations fonctionnelles concernant son dos tel qu’elles sont rapportĂ©es aux notes Ă©volutives. L’utilisation d’un banc est prĂ©vue pour respecter l’une de ces limitations fonctionnelles. Un tapis antidĂ©rapant est installĂ© puisque la travailleuse considère que le sol est glissant.

[21]        Le 23 juin 2011, la travailleuse communique avec son agent Ă  la CSST et lui indique qu’elle ne peut faire le poste de magasinier Ă  cause de son Ă©paule droite. L’agent lui rĂ©pond qu’aucune limitation fonctionnelle n’a Ă©tĂ© Ă©mise pour cette condition.

[22]        Toujours aux notes Ă©volutives de la CSST, les tâches de magasinier sont dĂ©crites comme Ă©tant de prendre l’inventaire, vĂ©rifier la qualitĂ© des produits, les sĂ©lectionner avec un bon de commande, prendre les pièces de bois et les apporter Ă  la table de travail. Enfin, la travailleuse doit positionner les pièces afin qu’elles soient assemblĂ©es.

[23]        Lors d’une conversation avec son agent de la CSST, le 7 juillet 2011, la travailleuse rĂ©itère qu’elle ne souhaite pas retourner chez l’employeur au dossier pour des motifs en lien avec son comportement dans la gestion de son dossier d’accident du travail.

[24]        Le tribunal note que l’employeur a en effet dĂ©posĂ© plusieurs contestations des dĂ©cisions rendues dans le dossier, notamment concernant l’aide personnelle Ă  domicile, la reconnaissance de divers diagnostics et mĂŞme le pourcentage d’atteinte permanente Ă  l'intĂ©gritĂ© physique qui reprĂ©sente en l’espèce un montant de 11 002,91 $.  

[25]        Ă€ l’audience, la travailleuse ajoute qu’à son retour au travail l’employeur devait lui fournir une assistance pour le transport des morceaux qui dĂ©passaient 24 pouces de longueur et un poids de cinq kilos. Un collègue de travail qu’elle identifie comme Ă©tant Robert, devait ainsi l’assister alors que Michel Ă©tait son superviseur.

[26]        C’est dans ce contexte que le 11 juillet 2011, la travailleuse est retournĂ©e chez l’employeur pour occuper le poste de magasinier au tablier de table.

[27]        Ă€ l’audience, elle rapporte que le tapis antidĂ©rapant Ă©tait inadĂ©quat et que le banc ou la chaise fournis n’étaient pas ergonomiques.

[28]        Elle dĂ©pose Ă©galement un croquis de l’endroit oĂą elle exerçait ses tâches de magasinier.

[29]        Selon la travailleuse, entre le 11 et le 24 juillet 2011, l’exercice de l’emploi convenable s’est bien dĂ©roulĂ© avec l’assistance de Robert. Elle affirme qu’elle avait toutefois beaucoup de douleurs et qu’elle n’a pas Ă©tĂ© capable de faire une semaine de travail complète Ă  cause des effets secondaires liĂ©s aux antidouleurs qu’elle consommait.

[30]        Également, elle reconnaĂ®t avoir eu des retards au travail. Elle explique qu’elle avait de bonnes raisons liĂ©es Ă  des problèmes de transport ou Ă  sa santĂ©.  

[31]        L’entreprise a par la suite fermĂ© pour les vacances estivales des 24 et 31 juillet 2011. Selon la travailleuse, durant ces deux semaines de congĂ© elle a continuĂ© d’avoir des douleurs et de l’enflure Ă  la main droite. Elle aurait rencontrĂ© un ergothĂ©rapeute qui l’a incitĂ©e Ă  poursuivre ses activitĂ©s. Elle a appliquĂ© du froid et de la chaleur sur son membre supĂ©rieur droit et elle a fait des exercices.

[32]        Au retour des vacances, la travailleuse affirme que Robert n’était plus lĂ  pour l’aider ou alors presque plus parce qu’il Ă©tait requis par d’autres tâches. Elle relate Ă©galement qu’elle devait manipuler des tabliers de table d'un poids supĂ©rieur Ă  11 livres qu’elle devait aller chercher au fond de l’entrepĂ´t. Elle a discutĂ© de la situation avec son superviseur qui l’a quelquefois aidĂ©e. La travailleuse affirme qu’elle Ă©tait de plus en plus appelĂ©e Ă  manipuler les tabliers seule, soit des pièces ayant un poids variant de 10 Ă  20 livres et mesurant entre 36 et 48 pouces. Elle se reporte aux bons de commande que son reprĂ©sentant a dĂ©posĂ©s pour appuyer ses propos.

[33]        Quelquefois, la travailleuse utilisait une Ă©chelle puisque les tabliers Ă©taient rangĂ©s dans le haut d’une Ă©tagère. C’est dans ce contexte qu’elle prĂ©tend s’être blessĂ©e le 23 aoĂ»t 2011, vers 10 h 30, en descendant l’échelle et en tenant avec la main droite un tablier biseautĂ© aux bords coupants.

[34]        La travailleuse tĂ©moigne avoir laissĂ© tombĂ© le tablier qui a glissĂ© dans sa main droite lui causant une lacĂ©ration. La travailleuse affirme que cette lacĂ©ration ne nĂ©cessitait pas de points de suture. Elle a simplement fait un pansement elle-mĂŞme sur les lieux de travail après avoir informĂ© Michel, son superviseur, qu’elle s’était blessĂ©e. Elle dĂ©crit nĂ©anmoins des douleurs importantes et une enflure.

[35]        La travailleuse dĂ©cide alors de quitter avant le dĂ®ner tout en appelant un peu plus tard le docteur Bou-Merhi pour avoir un rendez-vous en urgence. PrĂ©cisons ici que la travailleuse n’est plus retournĂ©e chez l’employeur par la suite.

[36]        Les notes Ă©volutives de la CSST du 23 aoĂ»t 2011 rapportent que ce jour-lĂ , la travailleuse a tentĂ© de joindre son agente d’indemnisation Brigitte Asselin. Elle souhaite savoir quand elle sera payĂ©e pour son atteinte permanente Ă  l'intĂ©gritĂ© physique.

[37]        La lecture des notes nous apprend Ă©galement que la travailleuse est fort mĂ©contente de l’attitude de l’employeur. Elle Ă©voque une dĂ©mission, un recours aux mĂ©dias, etc. Il n’y a aucune mention de l’évĂ©nement allĂ©guĂ© ĂŞtre survenu le matin. InterrogĂ©e par la soussignĂ©e Ă  l’audience sur cette absence de mention, la travailleuse reconnaĂ®t que c’est le cas.

[38]        Le 26 aoĂ»t 2011, la travailleuse rencontre le docteur Bou-Merhi. Elle affirme qu’elle avait de l’œdème sur toute la main droite tant en externe qu’en interne et que cet Ĺ“dème se prolongeait jusqu’au coude et vers l’épaule. Elle dĂ©crit des douleurs diffĂ©rentes de celles ressenties avant son retour au travail le 11 juillet 2011. Les poids et les dimensions des pièces Ă  manipuler seraient la cause de ces nouvelles douleurs. Selon la travailleuse, le docteur Bou-Merhi a vĂ©rifiĂ© son pansement et la plaie Ă  la main droite. Il prescrit pour la première fois du Lyrica.

[39]        Les notes de ce mĂ©decin concernant cette visite sont au dossier. Nous y lisons ce qui suit :

Suivi trauma main d

Illisible multiple chirurgie

Rupture transfert tendineux très symptomatique depuis RAT

ArrĂŞt de travail

Lyrica

Rv 6 semaines

 

 

[40]        Le docteur Bou-Merhi rĂ©dige Ă©galement un rapport mĂ©dical Ă  l’intention de la CSST ce mĂŞme jour dans lequel il reprend les mĂŞmes informations. Le tribunal constate qu’il n’est fait aucune mention d’une lacĂ©ration et le mĂ©decin inscrit comme date de rĂ©fĂ©rence celle de l’évĂ©nement d’origine.

[41]        Le 26 aoĂ»t 2011, les notes Ă©volutives de la CSST indiquent que la travailleuse a appelĂ© son agente pour l'informer qu’elle est en arrĂŞt de travail complet Ă  cause des douleurs.

[42]        Le reprĂ©sentant de la travailleuse a produit Ă  l’audience un document datĂ© du 1er septembre 2011, soit une dĂ©claration d’accident de travail version de l’employĂ© (F1) (document F-1). Il est rĂ©digĂ© par la travailleuse et signĂ© par elle. Nous y lisons ce qui suit :

J’ai recommencé à travaillé le 11 juillet 2011, dès la 1ère journée j’ai ressentis des brulures aux niveau de mon pouce et index et au bout de quelques jours de travaille, les douleurs ont accentués durant le 2 semaines de vacance, j’ai été rencontré M. Pierre Girard ergo pour m’informé et selon lui, c’était normal et je devais m’y faire, mai voila depuis le début je n’ai pas été en mesure de faire mes semaines pleines dû aux  douleur occasionnés et à (illisible) ma main ne fonctionnait pas comme elle le devait, j’échape souvent mes planches et je me fais souvent mal, à d’autres endroits soit des bleus ou même de bonnes éraflures. Je me suis même ouvert ma main blessé avec un tablier de table 09 qui en très coupant, il m’a glissé des mains.

 

J’avais beaucoup d’enflure et de douleur, c’est pourquoi j’ai pris r.d.v. et vu le dr Bou-Merhi à Notre-Dame en urgence parce que les douleurs vont jusque dans mon épaule il m’a mis en arrêt de travail pour aggravation et m’a prescrit du Lyrica je dois le revoir le 7 octobre 2011.

 

[sic]

 

[notre soulignement]

 

 

[43]        Ă€ la question du formulaire concernant le genre de blessure, la travailleuse indique un retour des douleurs extrĂŞmes. La partie du corps blessĂ©e ou atteinte est les mains et le bras droit. L’abandon du travail s’est produit le 23 aoĂ»t 2011 Ă  midi.

[44]        Ă€ l’endroit du formulaire oĂą la date de dĂ©claration de l’évĂ©nement doit ĂŞtre indiquĂ©e nous lisons celle du 26 aoĂ»t 2011. La signature du contremaĂ®tre est laissĂ©e en blanc.

[45]        Lors du contre-interrogatoire, la travailleuse prĂ©cise que la date du 26 aoĂ»t 2011 qui apparaĂ®t Ă  cette dĂ©claration correspond Ă  celle de son rendez-vous chez le docteur Bou-Merhi. Elle prĂ©tend qu’elle a ainsi datĂ© la rĂ©clamation Ă  la suggestion d’un tiers.   

[46]        Le 7 septembre 2011, l’agente de la CSST communique avec HĂ©lène Lapointe qui est adjointe des Mutuelles de prĂ©vention et de la gestion de l’indemnisation. Elle s’occupe notamment des dossiers de l’employeur.

[47]        Celle-ci informe l’agent que l’envoi de l’avis de l’employeur et demande de remboursement tarde parce que l’employeur s’oppose Ă  la rĂ©clamation de la travailleuse. Il souhaite qu’elle soit expertisĂ©e, mais la veille la travailleuse s’est prĂ©sentĂ©e au rendez-vous mĂ©dical avec 40 minutes de retard et l’examen n’a pu se faire. Un autre rendez-vous a Ă©tĂ© fixĂ© au 13 septembre 2011.

[48]        L’agente ajoute aux notes qu’à cette date, la CSST n’a reçu ni la rĂ©clamation de la travailleuse ni une attestation mĂ©dicale ou un rapport mĂ©dical du mĂ©decin en lien avec un nouvel Ă©vĂ©nement.

[49]        Le 13 septembre 2011, Ă  la demande de l’employeur, la travailleuse est examinĂ©e par le docteur Lucie Duclos. Il s’agit du deuxième examen de la travailleuse par ce mĂ©decin.

[50]        Cet examen est demandĂ© afin que le mĂ©decin se prononce sur les questions du diagnostic, la consolidation, les soins et les sĂ©quelles. Il doit Ă©galement donner son avis sur la capacitĂ© de la travailleuse Ă  occuper une assignation temporaire.

[51]        D’emblĂ©e, le docteur Duclos indique que le 26 aoĂ»t 2011, une dĂ©claration d’accident du travail a Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e par la travailleuse.

[52]        Il rapporte ce qui suit concernant son Ă©tat au moment de l’examen :

ÉTAT ACTUEL

 

Madame mentionne qu’elle a repris son travail au mois de juillet. Elle a été incapable de reprendre le travail à temps plein, puisqu’elle avait tendance à échapper des objets. Elle mentionne qu’elle n’a plus de sensation au niveau de la pulpe de l’index et qu’elle ressent des douleurs à la paume de la main, qui irradient dans l’épaule. Elle ressent également des douleurs continuelles, de plus en plus situées à la face dorsale de l’index, jusqu’à la moitié du métacarpe et jusqu’à l’articulation interphalangienne, sur le dessus de la main. Elle a l’impression que l’index est cassé et elle ressent des coups de couteau, tellement les douleurs sont importantes.

 

Elle mentionne avoir cessé de travailler le 23 août à midi, en raison des douleurs. Elle mentionne avoir appliqué de la glace, mais ceci n’occasionne pas tellement de soulagement.

 

Elle mentionne avoir comme médication du Lyrica à 75 mg 2 fois par jour, de l’Empracet qu’elle prend à raison de 2 à 4 comprimés par jour et du Naprosyn qu’elle prend à raison de 2 à 3 comprimés par jour.

 

Elle mentionne avoir de la difficulté à dormir en raison d’un engourdissement situé au niveau de la face palmaire du pouce, de l’index et du majeur. Elle mentionne qu’elle est incapable de tenir le téléphone avec sa main droite, puisque des engourdissements surviennent, avec des douleurs qui peuvent aller jusqu’à l’épaule. Elle mentionne qu’elle est incapable de tenir le volant de son véhicule avec la main droite pour les mêmes raisons que pour le téléphone. Elle est incapable de maintenir une revue ou un livre durant une longue période parce que des engourdissements surviennent. Si elle échappe des objets, c’est parce qu’elle ne sent pas bien ce qu’elle a dans sa main.

 

[notre soulignement]

 

 

[53]        Un examen exhaustif de la main droite de la travailleuse est fait. Nulle part, une lacĂ©ration ou sa trace n’est mentionnĂ©e.

[54]        Le docteur Duclos retient les mĂŞmes diagnostics que ceux Ă©mis le 26 janvier 2011. Elle indique qu’il y a absence de rechute, mais que la travailleuse pourrait souffrir d’un syndrome du canal carpien droit qui mĂ©rite d’être investiguĂ©. Elle suggère des limitations fonctionnelles en lien avec ce syndrome qu’elle qualifie toutefois de condition personnelle.

[55]        Le 7 octobre 2011, le docteur Bou-Merhi revoit la travailleuse toujours pour un suivi du trauma Ă  la main droite. Ă€ ses notes mĂ©dicales, il indique que la travailleuse se plaint encore de douleurs et qu’un changement de travail est Ă  recommander. Ă€ son rapport datĂ© du mĂŞme jour, il indique que la travailleuse est incapable de faire son travail habituel.

[56]        Ă€ l’audience, la travailleuse indique qu’elle n’a pas eu d’autre suivi avec ce mĂ©decin sinon qu’elle l’a revu au mois de mars 2013. Le mĂ©decin lui a signifiĂ© qu’il n’a plus de traitement Ă  lui offrir. Lors du contre-interrogatoire, elle affirme qu’elle n’a plus de suivi mĂ©dical sauf avec son mĂ©decin de famille pour d’autres pathologies.

[57]        PrĂ©cisons immĂ©diatement que le reprĂ©sentant de la travailleuse a produit des notes du docteur Bou-Merhi toutes deux datĂ©es du 17 avril 2013 et qui lui Ă©taient adressĂ©es. La première note a Ă©tĂ© dĂ©posĂ©e le jour mĂŞme de sa rĂ©daction. Nous y lisons ce qui suit :

Objet : Demande de renseignements pour le dossier de Mme Johanne St-Pierre 

 

Maître,

 

Ă€ la suite de votre demande de citation Ă  comparaĂ®tre pour le 25 avril 2013, concernant le dossier de Mme Johanne St Pierre, je vous informe que je serai dans l’impossibilitĂ© d’être prĂ©sent Ă©tant en salle d’opĂ©ration toute la journĂ©e.

 

Mme St-Pierre a Ă©tĂ© revue par moi en suivi en date du 26 aoĂ»t 2011, après la reprise de son travail habituel.

 

À ce moment-là, on avait prescrit un arrêt de travail, car la patiente est redevenue très symptomatique depuis son retour au travail, incluant de la douleur et de l’oedème du membre supérieur droit, avec prescription de Lyrica. Un rendez-vous lui a été donné dans les 6 semaines suivantes.

 

Mme St-Pierre a Ă©tĂ© revue en suivi le 7 octobre 2011, date Ă  laquelle la patiente avait dĂ©jĂ  eu son expertise finale. Ă€ ce stade, il n’y avait plus rien Ă  offrir comme traitement et un changement de type de travail lui a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©. Par la suite, elle a eu son congĂ© le 29 juin 2012, avec des sĂ©quelles consolidĂ©es.

 

[nos soulignements]

 

 

[58]        Ă€ l’audience, le reprĂ©sentant de la travailleuse a produit une deuxième note du docteur Bou-Merhi[5], toujours datĂ©e du 17 avril 2013, et qui lui est aussi adressĂ©e. Elle se lit ainsi :

Objet : Demande de renseignements pour le dossier de Mme Johanne St-Pierre 

 

Maître,

 

Ă€ la suite de votre demande de citation Ă  comparaĂ®tre pour le 25 avril 2013,concernant le dossier de Mme Johanne St Pierre, je vous informe que je serai dans l’impossibilitĂ© d’être prĂ©sent Ă©tant en salle d’opĂ©ration toute la journĂ©e.

 

 

Mme St-Pierre a Ă©tĂ© revue par moi en suivi en date du 26 aoĂ»t 2011, après la reprise de son travail habituel.

 

À ce moment-là, on avait prescrit un arrêt de travail, car la patiente est redevenue très symptomatique depuis son retour au travail, incluant de la douleur et de l’oedème du membre supérieur droit, avec une coupure dans la paume de la main du côté du pouce droit avec prescription de Lyrica à 25 milligrammes. Un rendez-vous lui a été donné dans les 6 semaines suivantes.

 

Mme St-Pierre a Ă©tĂ© revue en suivi le 7 octobre 2011, date Ă  laquelle la patiente avait dĂ©jĂ  eu son expertise finale. Ă€ ce stade, il n’y avait plus rien Ă  offrir comme traitement et un changement de type de travail lui a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©. Par la suite, elle a eu son congĂ© le 29 juin 2012, avec des sĂ©quelles consolidĂ©es.

 

[nos soulignements]

 

 

[59]        Ni la travailleuse ni son reprĂ©sentant n’ont fourni d’explication concernant ces versions diffĂ©rentes signĂ©es par le mĂŞme mĂ©decin Ă  la mĂŞme date.

[60]        Pour revenir au dĂ©roulement du dossier, le 20 septembre 2011, l’agente de la CSST reçoit un appel de la travailleuse qui s’informe de sa rĂ©cidive, rechute ou aggravation du 26 aoĂ»t 2011. L’agente inscrit qu’elle demande Ă  la travailleuse de produire sa rĂ©clamation et l’attestation mĂ©dicale afin que l’analyse de la demande puisse commencer.

[61]        L’avis de l’employeur et demande de remboursement au dossier concernant l’évĂ©nement du 26 aoĂ»t 2011 est datĂ© du 23 septembre 2011[6] et il aurait Ă©tĂ© reçu par la CSST le 6 octobre suivant. Nous y lisons que la travailleuse aurait dĂ©clarĂ© l’évĂ©nement le 29 aoĂ»t 2011 alors que le dernier jour travaillĂ© apparaĂ®t ĂŞtre le 23 aoĂ»t 2011.

[62]        Le reprĂ©sentant de la travailleuse a produit une rĂ©clamation du travailleur datĂ©e du 27 septembre 2011. Elle a Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e et signĂ©e par madame St-Pierre, mais aucune signature de l’employeur n’y apparaĂ®t ni aucune estampille selon laquelle elle aurait Ă©tĂ© expĂ©diĂ©e Ă  la CSST. Nous y lisons ce qui suit :

 

J’ai eu mon acc. le 20-08-09, eu trois opération à la main droite (tendon extenseur du pouce sectionné) 1 16-09-09 2-14-7 2010 illisible 27- illisible-2010 puis consolidé au mois de janvier 2011; j’ai recommencé le 11 juillet 20 illisible à mon nouveau poste, et dès le début j’ai ressenti brûlure, douleur, enflure et le 23-08-11 j’ai quitté et appelé le dr. que j’ai rencontré le 26-08-11 et il m’a arrêté.

 

 

[63]        La date de la rĂ©cidive, rechute ou aggravation apparaĂ®t ĂŞtre le 23 aoĂ»t 2011.

[64]        Lors du contre-interrogatoire, la travailleuse reconnaĂ®t avoir communiquĂ© avec le service des ressources humaines chez l’employeur le 23 aoĂ»t 2011, mais elle ne sait plus trop avec qui elle a parlĂ©. Elle admet avoir discutĂ© des diverses contestations de l’employeur au dossier, qu’elle se sentait agressĂ©e mais qu’en aucun cas elle a parlĂ© de l’évĂ©nement du matin. Elle rĂ©itère toutefois qu’elle en a discutĂ© avec son superviseur Michel. Les jours suivants, elle est demeurĂ©e Ă  la maison et elle ne se souvient plus si elle a communiquĂ© avec l’employeur. 

[65]        Le 31 octobre 2011, l’agente communique avec la travailleuse pour l’informer qu’elle n’a pas reçu les documents demandĂ©s au CHUM. Le 16 novembre suivant, il appert que les documents auraient Ă©tĂ© postĂ©s le 10 novembre 2011, mais au mauvais endroit ce qui, selon l’agent, explique le dĂ©lai inhabituel.

[66]        Le 16 novembre 2011, une cueillette d’informations concernant la demande de rĂ©cidive, rechute ou aggravation est entamĂ©e par l’agent de la CSST, Simon LĂ©vesque, auprès de la travailleuse.

[67]        Ă€ titre de dĂ©claration d’un nouvel Ă©vĂ©nement, la travailleuse rapporte que lors d’un quart de travail, elle ne se souvient plus de la date, un morceau de bois a glissĂ© de ses mains et elle a eu une lacĂ©ration. Elle aurait rapportĂ© l’évĂ©nement Ă  son assembleur, dĂ©sinfectĂ© la plaie et mis un pansement tout en reprenant le travail. Lors du contre-interrogatoire, la travailleuse prĂ©cise qu’elle a travaillĂ© seulement la matinĂ©e et qu’elle s’est rappelĂ© la date par la suite.

[68]        Elle rapporte Ă©galement Ă  l’agent qu’elle a toujours eu des douleurs Ă  la main droite du pouce au majeur. Depuis son retour au travail, ces douleurs se sont accentuĂ©es de manière importante.

[69]        Le 16 dĂ©cembre 2011, le docteur Claude Morel, mĂ©decin-conseil Ă  la CSST, Ă©crit qu’il y a absence d’aggravation au 26 aoĂ»t 2011. Il s’agit plutĂ´t d’une variation de la douleur Ă  la suite d’une mobilisation sans aucun signe clinique ou changement. Le docteur Morel indique Ă©galement que les symptĂ´mes Ă©taient dĂ©jĂ  importants lors de l’examen au BEM, mais aucun nouveau traitement par le mĂ©decin qui a charge n’a Ă©tĂ© recommandĂ©.

[70]        La CSST analyse la rĂ©clamation de la travailleuse et la rejette en indiquant notamment que le diagnostic Ă©mis par le docteur Bou-Merhi, soit un trauma Ă  la main droite, ne correspond pas Ă  une blessure. Le mĂ©decin se reporte plutĂ´t au suivi pour un trauma Ă  la main droite Ă  la suite des chirurgies, d’autant que la travailleuse ne rapporte aucun nouvel Ă©vĂ©nement de nature traumatique. Il n’y a donc pas eu d’accident du travail le 26 aoĂ»t 2011.

[71]        L’analyse de la rĂ©clamation sous l’angle d’une rĂ©cidive, rechute ou aggravation conduit Ă©galement Ă  un refus puisqu’il y a absence de preuve de signes objectifs d’une dĂ©tĂ©rioration de l’état de santĂ© de la travailleuse.

[72]        Le 12 dĂ©cembre 2011, la CSST rend une dĂ©cision de refus de la rĂ©clamation de la travailleuse, refus maintenu en rĂ©vision administrative, d’oĂą le litige dont le tribunal, est saisi. La soussignĂ©e note qu’en rĂ©vision administrative la CSST retient un diagnostic de lacĂ©ration Ă  la main et une reprise de douleur post retour au travail.

[73]        Il convient de rapporter le contenu de la contestation de la travailleuse en rĂ©vision administrative :

[…]

 

Je conteste la décision de refus, suite à mon aggravation pour ma main le 23 août 2011.

 

Depuis ce temps, ma main ne fonctionne presque plus, enfle, brule jusqu’a l’épaule, n’a pratiquement plus de force, mon dos qui n était pas dans le fait original des faits de mon accident arriv originalement le 20 août 2009, a recommencé a bloqué et a m’empecher de bien fonctionner. Les mouvement repetitifs et a bout de bras, on malheureusement reactivé des douleurs desquelles je ne tenais pas du tout le retrour. Depuis je vis des fatigues qui arrive de nulle part et j’ai de la difficulté a remonté la pente, pour ses raisons je demande a la csst de bien vouloir reviser sa decision de refus. [sic]

 

 

[74]        Comme il a Ă©tĂ© dit, la travailleuse n’a pas repris ses tâches chez l’employeur. Elle serait en recherche d’emploi après avoir fait un retour aux Ă©tudes Ă  l’automne 2012 en comptabilitĂ©.

[75]        De son cĂ´tĂ©, le reprĂ©sentant de l’employeur a fait tĂ©moigner Chantal Charbonneau qui est directrice des ressources humaines chez l’employeur[7]. Elle s’occupe notamment des dossiers CSST. Elle a suivi le dossier de la travailleuse notamment le processus de dĂ©termination de l’emploi convenable.

 

[76]        Ainsi, elle a participĂ© avec la CSST au plan de rĂ©adaptation en visitant notamment le poste de travail de la travailleuse en usine. Un emploi de magasinière au tablier de table a Ă©tĂ© retenu. Il a Ă©tĂ© aussi convenu qu’une limite de poids devait ĂŞtre respectĂ©e dans cet emploi. Elle a Ă©galement constatĂ© que des bandes antidĂ©rapantes et le banc avaient Ă©tĂ© installĂ©s.

[77]        Lors du retour au travail, au mois de juillet 2011, il avait Ă©tĂ© convenu que la travailleuse aurait l’aide d’un collègue. Selon madame Charbonneau, elle s’est assurĂ© auprès du directeur de production, Anthony Bergeron, que cet Ă©lĂ©ment Ă©tait respectĂ© et elle s’est fait rĂ©pondre que c’était le cas, que tout allait bien. Elle a rĂ©itĂ©rĂ© cette vĂ©rification aux deux ou trois jours par la suite, mais Ă  son avis la travailleuse se plaignait de douleurs bien avant d’occuper l’emploi. Elle n’a pas fait ce type de vĂ©rifications au mois d’aoĂ»t 2011.

[78]        Lors du contre-interrogatoire, le tĂ©moin indique que monsieur Bergeron ne travaille pas spĂ©cifiquement dans le dĂ©partement de la travailleuse. Il est le directeur de production pour l’ensemble de l’usine, mais elle assure qu’il s’y dĂ©place partout notamment dans le dĂ©partement de la travailleuse. Elle prĂ©cise que Michel Drainville est le travailleur responsable des tabliers de table et qu’il n’a aucune responsabilitĂ© en matière de santĂ© sĂ©curitĂ© au travail.  

[79]        Le tĂ©moin affirme Ă©galement avoir reçu un appel le 23 aoĂ»t 2011, en matinĂ©e, de la part de la travailleuse. Celle-ci tenait alors des propos menaçants liĂ©s Ă  la conduite de l’employeur et son dossier d’accident. La travailleuse a allĂ©guĂ© un problème de sinusite pour s’absenter en après-midi. Par la suite, Chantal Charbonneau n’a pas eu d’autre communication avec elle.

[80]        Un courriel de Chantal Charbonneau Ă  HĂ©lène Lapointe[8], datĂ© du 6 septembre 2011, a Ă©tĂ© produit. Nous y voyons la liste des absences ou retards de la travailleuse entre le 13 juillet et le 23 aoĂ»t 2011. Entre le 15 et le 22 aoĂ»t 2011, la travailleuse s’est absentĂ©e deux journĂ©es complètes et une demi-journĂ©e.

[81]        Ce courriel rapporte Ă©galement la conversation tĂ©lĂ©phonique que madame Charbonneau aurait eue avec la travailleuse le 23 aoĂ»t 2011 vers 10 h 30. Enfin, nous y lisons que le 25 aoĂ»t 2011 la travailleuse aurait laissĂ© un message pour aviser que ses douleurs au bras Ă©taient rĂ©apparues et qu’elle s’absentait.

[82]        InterrogĂ©e par le reprĂ©sentant de la travailleuse sur le fait qu’elle savait Ă  l’époque de la rĂ©daction de ce courriel que la travailleuse avait fait une rĂ©clamation Ă  la CSST, le tĂ©moin Charbonneau rĂ©pond que cela est fort possible puisqu’elle indique dans le courriel une reprise des douleurs au bras. Toutefois, elle ne se souvient pas des circonstances dans lesquelles elle l’a appris.

[83]        Concernant la dĂ©claration de l’employĂ© (F1), elle ne sait pas dans quelles circonstances elle a Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e ni quand elle a Ă©tĂ© reçue.

[84]        Enfin, elle ne sait pas Ă  quoi rĂ©fère la mention d’un document qui serait joint Ă  l’avis de l’employeur et demande de remboursement. Elle prĂ©cise qu’il a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par quelqu’un d’autre, mais signĂ© par elle.  

L’ARGUMENTATION DES PARTIES

[85]        Le reprĂ©sentant de la travailleuse prĂ©tend ce qui suit :

·        Le diagnostic qui doit ĂŞtre retenu pour dĂ©cider de la contestation est celui de lacĂ©ration; interrogĂ© expressĂ©ment par le tribunal Ă  quel endroit nous retrouvons ce diagnostic au dossier, le reprĂ©sentant rĂ©pond qu’on le retrouve dans le tĂ©moignage de la travailleuse, aux notes Ă©volutives de la CSST et dans les notes du docteur Bou-Merhi; selon lui, quand ce mĂ©decin Ă©crit que la travailleuse a subi un trauma il faut comprendre qu’il rĂ©fère Ă  une lacĂ©ration Ă  la main droite;

·        Il demande de retenir la date du 23 aoĂ»t 2011 comme Ă©tant celle oĂą la travailleuse aurait subi une lĂ©sion professionnelle;

·        Ă€ cette date, une blessure s’est produite au travail au moment oĂą la travailleuse exerçait ses tâches; la prĂ©somption prĂ©vue Ă  l’article 28 de la loi s’applique;

·        Subsidiairement, si le tribunal ne retient pas une telle demande, il allègue qu’un Ă©vĂ©nement imprĂ©vu et soudain est survenu quand la travailleuse manipulait un tablier de table et qu’elle a subi une lacĂ©ration Ă  la main droite; cet accident a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© de manière contemporaine au superviseur de la travailleuse et la preuve mĂ©dicale au dossier confirme sa survenance;

·        Enfin, le reprĂ©sentant de la travailleuse prĂ©tend, toujours de manière subsidiaire, que la travailleuse a subi une rĂ©cidive, rechute ou aggravation le 23 aoĂ»t 2011 quand ses douleurs Ă  la main droite ont augmentĂ© au point oĂą elle a dĂ» consulter un ergothĂ©rapeute; il souligne le non-respect des limitations fonctionnelles, le fait que la travailleuse conservait une atteinte permanente Ă  l'intĂ©gritĂ© physique importante, qu’elle a continuĂ© d’éprouver des douleurs qui Ă©taient dues Ă  la lĂ©sion professionnelle d’origine et Ă  la reprise du travail;

·        Au mois d’aoĂ»t 2011, la condition de la travailleuse a changĂ© quand les douleurs ont augmentĂ© accompagnĂ©es d'enflure et de l’œdème; il souligne le court dĂ©lai entre la date de consolidation retenue et l’apparition de ces symptĂ´mes qui se trouvent au mĂŞme site lĂ©sionnel;

·        Ainsi, la preuve a Ă©tĂ© faite par le tĂ©moignage de la travailleuse et les notes du docteur Bou-Merhi d’une dĂ©tĂ©rioration objective de l’état de santĂ© de la travailleuse;

·        Concernant l’application de l’article 51 de la loi, le reprĂ©sentant de la travailleuse se rĂ©fère Ă  l’opinion du docteur Bou-Merhi selon laquelle la travailleuse est incapable de refaire son travail habituel; l’analyse complète de l’emploi en question n’est pas nĂ©cessaire pour conclure Ă  l’application de l’article 51 de la loi.

[86]        De son cĂ´tĂ©, le reprĂ©sentant de l’employeur prĂ©tend ce qui suit :

·        Au mois de juillet 2011, la travailleuse ne souhaitait pas retourner chez l’employeur; les notes Ă©volutives de la CSST confirment ce propos; elle a peu collaborĂ© Ă  son retour au travail et ses absences en sont une preuve; elle a aussi admis qu’elle n’a pas fait des semaines complètes de travail;  

·        La prĂ©somption prĂ©vue Ă  l’article 28 de la loi ne s’applique pas puisqu’il y a absence de preuve de la survenance d’une blessure sur les lieux du travail; entre autres, le diagnostic de lacĂ©ration n’a jamais Ă©tĂ© retenu; le reprĂ©sentant ajoute que la travailleuse n’a pas subi non plus une lĂ©sion professionnelle sous l’angle d’un accident du travail;

·        Quand le docteur Bou-Merhi indique qu’il voit la travailleuse pour un trauma, il est clair que la date de l’évĂ©nement auquel il se rĂ©fère est celle de l’évĂ©nement d’origine soit le 20 aoĂ»t 2009; le trauma en question ne rĂ©fère pas Ă  une prĂ©tendue lacĂ©ration;

·        La dĂ©claration de l’accident du travail a Ă©tĂ© faite uniquement le 1er septembre 2011 et elle n’est pas signĂ©e par l’employeur; si un accident est survenu le 23 aoĂ»t 2011, il est incomprĂ©hensible que la travailleuse ait attendu aussi longtemps avant de rĂ©diger les documents pour le dĂ©clarer;

·        Le reprĂ©sentant de l’employeur souligne que le 23 aoĂ»t 2011, alors que la travailleuse communique avec son agent Ă  la CSST, elle ne mentionne pas la survenance d’un accident qui serait pourtant survenu le matin mĂŞme; la mĂŞme conclusion vaut concernant la conversation qu’elle aurait eue avec HĂ©lène Charbonneau le mĂŞme jour;

·        S’il est vrai que le 16 novembre 2011, la travailleuse mentionne Ă  l’agent de la CSST avoir subi une lacĂ©ration Ă  la main droite force est de constater qu’à cette Ă©poque elle est incapable de prĂ©ciser la date Ă  laquelle l’accident serait survenu;

·        La travailleuse n’a pas subi le 23 aoĂ»t 2011 une rĂ©cidive, rechute ou aggravation;

·        Le reprĂ©sentant de l’employeur souligne Ă  ce titre, l’absence de suivi mĂ©dical depuis la consolidation de la lĂ©sion d’origine;

·        Cette consolidation a Ă©tĂ© fixĂ©e par plateau thĂ©rapeutique et non par guĂ©rison; la travailleuse conserve de sa lĂ©sion professionnelle d’origine des sĂ©quelles; il n’est donc pas Ă©tonnant qu’elle continue d’avoir des douleurs qui peuvent ĂŞtre contrĂ´lĂ©es par la prise d’inflammatoires; il y a toutefois absence de rĂ©cidive, rechute ou aggravation;

·        Quand le docteur Duclos mentionne des limitations fonctionnelles « ajoutĂ©es Â», elle rĂ©fère Ă  un diagnostic qui n’a jamais Ă©tĂ© retenu en l’espèce; il n’y a donc pas lieu de conclure Ă  une aggravation de la condition de la travailleuse Ă  partir de cet avis;

·        La travailleuse indique avoir reçu une prescription de Lyrica, mais nulle part elle n’indique pour quelle raison;

·        Concernant l’application de l’article 51 de la loi, le docteur Bou-Merhi n’a donnĂ© aucun avis justifiant que la travailleuse ne peut faire l’emploi convenable dĂ©terminĂ©; d’ailleurs, quand il Ă©crit que celle-ci n’est pas en mesure de faire son travail habituel cette mention est vague et ne permet pas de conclure comme le reprĂ©sentant de la travailleuse le souhaite.

[87]        Après l’argumentation du reprĂ©sentant de l’employeur, celui de la travailleuse a exigĂ© que ce dernier dĂ©pose une rĂ©clamation d’accident du travail de la travailleuse signĂ©e par un reprĂ©sentant de l’employeur ainsi que la formule F1 qui aurait Ă©galement Ă©tĂ© signĂ©e par l’employeur. Le tribunal a alors demandĂ© au reprĂ©sentant de l’employeur de vĂ©rifier si ces documents existaient en lui donnant un dĂ©lai de 15 jours pour les produire le cas Ă©chĂ©ant.

[88]        Entretemps, le 30 avril 2013, le greffe du tribunal accusait rĂ©ception d’un document envoyĂ© par la travailleuse et Ă©manant de la CSST. Il s’agissait de la rĂ©clamation de la travailleuse pour l’évĂ©nement d’origine du 26 octobre 2009.

[89]        Le 1er mai 2013, la soussignĂ©e Ă©crit au reprĂ©sentant de la travailleuse pour connaĂ®tre ses intentions Ă  l’égard du dĂ©pĂ´t de cette rĂ©clamation.

[90]        Le 7 mai 2013, le reprĂ©sentant de l’employeur Ă©crit Ă  la soussignĂ©e Ă  propos des dĂ©marches entreprises pour trouver les documents rĂ©clamĂ©s. Il affirme que les seuls que l’employeur a en sa possession sont ceux qui ont Ă©tĂ© produits par le reprĂ©sentant de la travailleuse.

[91]        Le 14 mai 2013, le reprĂ©sentant de la travailleuse s’adresse au tribunal concernant la lettre du 1er mai 2013 et la rĂ©ponse du reprĂ©sentant de l’employeur. Il Ă©crit ce qui suit :

Nous avons pris connaissance de votre lettre du 1er mai 2013 ainsi que de l’envoi de Me Latulippe prĂ©tendant que la dĂ©claration d’accident de travail version de l’employĂ©e n’a jamais Ă©tĂ© signĂ©e par un reprĂ©sentant de l’employeur.

 

Notre cliente a fait les démarches auprès de la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour obtenir l’original des documents qui avaient été produits par l’employeur auprès de la CSST. D’ailleurs, sur le premier document, réclamation du travailleur, vous retrouvez la date de réception du 6 novembre 2009 .CSST. Or, ces documents ne se retrouvaient pas au dossier de madame puisqu’ils ont été expédiés à Mauricie-Centre-du-Québec par l’employeur. Vous trouverez qu’effectivement ce document était déjà connu de l’employeur puisque la signature de Jacques Doucet, contremaître, y est apposée en date du 14 septembre 2009.

 

Ces documents vous ont été envoyés directement par la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour contrer les propos de l’employeur.

 

Espérant le tout conforme, nous vous prions d’agréer, Madame, l’expression de nos salutations distinguées.

 

 

[92]        Le 15 mai 2013, le reprĂ©sentant de l’employeur Ă©crit Ă  la soussignĂ©e que le document dĂ©posĂ© par la travailleuse le 30 avril 2013 n’est pas le mĂŞme que celui dĂ©posĂ© Ă  l’audience par son reprĂ©sentant. En effet, le document en question concerne l’évĂ©nement d’origine et non celui qui nous occupe. Il maintient qu’il faisait rĂ©fĂ©rence dans son argumentation Ă  la dĂ©claration d’accident version de l’employĂ©e (F1) remplie par la travailleuse le 1er septembre 2011. Il rĂ©itère ainsi que l’employeur n’a jamais reçu de formulaire signĂ© en lien avec la rĂ©clamation pour une rĂ©cidive, rechute ou aggravation. Le dossier a par la suite Ă©tĂ© mis en dĂ©libĂ©rĂ©.

L’AVIS DES MEMBRES

[93]        Le membre issu des associations d'employeurs et le membre issu des associations syndicales ont le mĂŞme avis, soit de rejeter la requĂŞte de la travailleuse.

[94]        Ils retiennent que la prĂ©somption prĂ©vue Ă  l’article 28 de la loi ne s’applique pas en l’espèce. Il y a absence de preuve probante que la travailleuse s’est infligĂ© une blessure le 23 aoĂ»t 2011. 

[95]        La reconnaissance d’un accident du travail sous l’angle de l’article 2 de la loi n’est pas possible non plus puisque les membres retiennent qu’il y a absence de preuve qu’un Ă©vĂ©nement imprĂ©vu et soudain est survenu au travail le 23 aoĂ»t 2011 et qu’il aurait causĂ© une quelconque blessure.

[96]        La preuve d’une rĂ©cidive, rechute ou aggravation n’a pas Ă©tĂ© faite. En effet, la preuve montre plutĂ´t que la travailleuse se plaint des mĂŞmes douleurs et symptĂ´mes qu’au moment de la consolidation. Il y a absence de preuve d’une dĂ©tĂ©rioration quelconque. Notamment, les notes et rapports du docteur Bou-Merhi Ă©voquent l’existence de douleurs, problème qu’il lie aux sĂ©quelles de la lĂ©sion professionnelle d’origine.

[97]        Enfin, il y a absence de preuve qu’en l’espèce l’article 51 de la loi s’applique.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[98]        La Commission des lĂ©sions professionnelles doit dĂ©cider si la travailleuse a subi le 23 aoĂ»t 2011 une lĂ©sion professionnelle. Elle doit Ă©galement dĂ©cider si l’article 51 de la loi s’applique. Commençons par la question de savoir si une lĂ©sion professionnelle est survenue.

[99]        La loi dĂ©finit Ă  l’article 2 la notion de lĂ©sion professionnelle ainsi :

« lĂ©sion professionnelle Â» : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou Ă  l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la rĂ©cidive, la rechute ou l'aggravation;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.

 

 

[100]     Afin de faciliter la preuve de l’existence d’une telle lĂ©sion, la loi prĂ©voit une prĂ©somption Ă  l’article 28 qui se lit ainsi :

28.  Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est Ă  son travail est prĂ©sumĂ©e une lĂ©sion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 28.

 

 

[101]     Le travailleur qui souhaite bĂ©nĂ©ficier de cette prĂ©somption doit prouver qu’il a subi une blessure, qui est arrivĂ©e sur les lieux du travail alors qu’il Ă©tait au travail. Autrement, il devra prouver qu’il a subi un accident du travail selon la dĂ©finition prĂ©vue Ă  l’article 2 de la loi soit :

« accident du travail Â» : un Ă©vĂ©nement imprĂ©vu et soudain attribuable Ă  toute cause, survenant Ă  une personne par le fait ou Ă  l'occasion de son travail et qui entraĂ®ne pour elle une lĂ©sion professionnelle;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

[102]     Dans une dĂ©cision rendue par un banc de trois juges administratifs[9], le tribunal a eu l’occasion de revoir de manière exhaustive l’application de la prĂ©somption, ses effets et son mode de renversement. La soussignĂ©e partage ces enseignements qu’il convient de rappeler ici brièvement.

·        La prĂ©somption prĂ©vue Ă  l’article 28 de la loi prĂ©voit uniquement trois conditions soit la preuve de l’existence d’une blessure qui est arrivĂ©e sur les lieux du travail alors que le travailleur s’y trouvait;

·        Les questions du dĂ©lai Ă  dĂ©noncer un Ă©vĂ©nement ou Ă  consulter un mĂ©decin sont des Ă©lĂ©ments factuels qui peuvent aider Ă  dĂ©cider si une blessure est survenue au travail, mais il ne s’agit pas de conditions supplĂ©mentaires Ă  l’application de la prĂ©somption;

·        Une fois les trois conditions satisfaites, l’existence d’une lĂ©sion professionnelle est prĂ©sumĂ©e;

·        Il s’agit d’une prĂ©somption simple qui peut ĂŞtre renversĂ©e par la preuve d’une absence de relation entre la blessure et l’évĂ©nement tel que rapportĂ©.

[103]     Commençons par dĂ©cider si la travailleuse a subi une blessure le 23 aoĂ»t 2011. La soussignĂ©e est d’avis que cette preuve n’a pas Ă©tĂ© faite, privant ainsi la travailleuse de l’application de la prĂ©somption.  

[104]     En effet, le tribunal retient qu’au moment oĂą le docteur Bou-Merhi voit la travailleuse, le 26 aoĂ»t 2011, il s’agit d’un suivi pour un trauma Ă  la main droite. Nulle part, ce mĂ©decin n’indique, Ă  une date pourtant rapprochĂ©e de l’évĂ©nement allĂ©guĂ©, la prĂ©sence d’une lacĂ©ration. Nulle part, le mĂ©decin note de l’enflure ou de l’œdème.

[105]     Il est vrai que dans l’une des versions de la note du 17 avril 2013 le mĂ©decin ajoute la prĂ©sence d’une coupure, mais le tribunal privilĂ©gie les notes contemporaines du docteur Bou-Merhi puisqu’elles apparaissent plus fiables dans les circonstances.

[106]     Le tribunal est confortĂ© dans ce choix, en reprenant le tĂ©moignage de la travailleuse selon lequel la coupure allĂ©guĂ©e semblait somme toute bĂ©nigne puisqu’elle n’a pas jugĂ© nĂ©cessaire de consulter un mĂ©decin immĂ©diatement. Un simple pansement a suffi. Également, il n’est pas contestĂ© qu’elle a poursuivi son travail tout au moins jusqu’à l’heure du midi. Ces faits ne traduisent pas la survenance d’une blessure de la nature que le reprĂ©sentant de la travailleuse ou elle-mĂŞme dĂ©crit.

[107]     Le fait que la travailleuse s’est Ă©galement entretenue avec un agent de la CSST le 23 aoĂ»t 2011 sans lui mentionner l’accident ou la lacĂ©ration permet de douter fortement de sa crĂ©dibilitĂ©. D’autant que la travailleuse avait eu l’occasion d’expĂ©rimenter le processus de rĂ©clamation Ă  la CSST Ă  au moins deux reprises et que de l’avis de la soussignĂ©e elle savait pertinemment comment faire pour dĂ©clarer un accident du travail.

[108]     De mĂŞme, le tĂ©moignage de HĂ©lène Charbonneau n’a pas Ă©tĂ© contredit quand elle affirme avoir parlĂ© avec la travailleuse le 23 aoĂ»t 2011 sans que celle-ci mentionne la lacĂ©ration Ă  la main droite ni d’ailleurs tout autre dĂ©tail concernant ce qui s’était prĂ©tendument produit quelques heures plus tĂ´t.

[109]     La copie de la rĂ©clamation de la travailleuse Ă  la CSST qui a Ă©tĂ© dĂ©posĂ©e par son reprĂ©sentant n’est pas plus convaincante alors que sa lecture permet de voir qu’en nulle part la lacĂ©ration n’est mentionnĂ©e. De plus, la travailleuse qualifie l’évĂ©nement du 23 aoĂ»t 2011 comme Ă©tant une rĂ©cidive, rechute ou aggravation en allĂ©guant une reprise de douleurs.

[110]     Il est vrai que dans le formulaire F1 signĂ© le 1er septembre 2011 elle mentionne s’être « ouvert Â» la main, mais cette information apparaĂ®t parmi d’autres comme la survenance d’éraflures ou de bleus. Rien dans cette Ă©numĂ©ration ne ressemble Ă  la description de l’évĂ©nement que la travailleuse a faite Ă  l’audience. C’est parce qu’elle avait de l’enflure et de la douleur que la travailleuse a pris rendez-vous avec le docteur Bou-Merhi qui Ă©voque alors une aggravation de sa condition. Encore une fois, la survenance d’une lacĂ©ration n’est nullement Ă©voquĂ©e.

[111]     Cette absence de description d’une lacĂ©ration se retrouve Ă©galement au rapport du docteur Duclos qui a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© peu de temps après les Ă©vĂ©nements allĂ©guĂ©s. Encore une fois, nulle part ce mĂ©decin ne rapporte une blessure de la nature dĂ©crite Ă  l’audience. Elle rapporte des douleurs en lien avec l’exĂ©cution des tâches, mais nullement un Ă©vĂ©nement prĂ©cis et encore moins une lacĂ©ration. Son examen objectif ne rapporte aucune trace ou cicatrice d’une lacĂ©ration rĂ©cente.

 

[112]     En fait, ce sera uniquement le 16 novembre 2011, trois mois après la survenance de l’évĂ©nement allĂ©guĂ©, que la travailleuse mentionne Ă  son agent Ă  la CSST qu’elle aurait subi une lacĂ©ration. La travailleuse a oubliĂ© la date exacte de l’accident, mais elle mentionne alors avoir Ă©tĂ© capable de poursuivre ses tâches. Le manque de contemporanĂ©itĂ© de cette dĂ©claration et son caractère vague ne permet pas de conclure Ă  l’existence d’une blessure.

[113]     Enfin, la lecture mĂŞme de la contestation de la travailleuse en rĂ©vision administrative est rĂ©vĂ©latrice de ses vĂ©ritables intentions, soit rĂ©clamer pour une rĂ©cidive, rechute ou aggravation et non la survenance d’un nouvel accident du travail. En effet, dans cette contestation elle discute de mouvements rĂ©pĂ©titifs, d’augmentation ou de rĂ©activation des douleurs, mais jamais d’une lacĂ©ration.

[114]     Bref, le tribunal conclut Ă  l’absence d’une blessure. Un Ă©lĂ©ment de la prĂ©somption n’étant pas rencontrĂ©, il est inutile de poursuivre l’analyse de l’application de la prĂ©somption prĂ©vue Ă  l’article 28 de la loi.

[115]     Pour les mĂŞmes motifs, la soussignĂ©e est Ă©galement d’avis qu’aucun Ă©vĂ©nement imprĂ©vu et soudain de la nature dĂ©crite par la travailleuse n’est survenu le 23 aoĂ»t 2011. La travailleuse n’a donc pas subi un accident du travail Ă  cette date. Il reste Ă  dĂ©cider si la travailleuse a subi une rĂ©cidive, rechute ou aggravation.

[116]     L’article 2 de la loi prĂ©voit la notion de lĂ©sion professionnelle en y incluant celle de rĂ©cidive, rechute ou aggravation sans la dĂ©finir autrement.

[117]     La jurisprudence[10] de la Commission des lĂ©sions professionnelles Ă©tablit pour sa part que la notion de rĂ©cidive, rechute ou aggravation doit ĂŞtre interprĂ©tĂ©e dans son sens courant; il peut s’agir d’une reprise Ă©volutive, d’une rĂ©apparition ou de la recrudescence d’une lĂ©sion.

[118]     Un travailleur doit prouver d’une manière prĂ©pondĂ©rante qu’il existe d’une part un changement dans sa condition physique. La simple persistance du tableau clinique d’origine ne suffit pas[11] Ă  faire reconnaĂ®tre l’existence d’une rĂ©cidive, rechute ou aggravation ni d’ailleurs la chronicitĂ© d’une condition[12].

[119]     Ă€ ce sujet, le tribunal partage les propos suivants tirĂ©s de l’affaire BĂ©langer et Commission scolaire des Rives du Saguenay[13] :

[16] Concernant cette dernière exigence, la jurisprudence du tribunal est constante4. Même si la reconnaissance d’une récidive, rechute ou aggravation ne requiert pas obligatoirement la preuve d’une nette détérioration de la condition médicale du travailleur, la simple persistance du tableau clinique tel qu’existant au moment de la consolidation de la lésion initiale ne permet pas de conclure à l’existence de ce type de lésion professionnelle. La preuve doit nécessairement démontrer l’existence d’un changement significatif de la condition médicale du travailleur eu égard à celle constatée au moment où il a été décidé qu’un plateau thérapeutique était atteint

_______________

4       Voir notamment : Leblanc et Boutros & Pratte Experts conseils inc., C.L.P. 302103-01B-0610, 20 fĂ©vrier 2008, N. Michaud; St-Laurent et Poissonnerie les MĂ©chins, C.L.P. 286018-01A-0604, 20 fĂ©vrier 2008, M. Lamarre; Fontaine et Knirps Canada inc., C.L.P. 263575-61-0506, 10 janvier 2007, S. Di Pasquale; Lelièvre et Maxtech MĂ©tallurgie des poudres, C.L.P. 29197631-0606, 6 novembre 2007, J.-L. Rivard

 

 

[120]     D’autre part, un lien entre la rĂ©cidive, rechute ou aggravation allĂ©guĂ©e et la lĂ©sion d’origine doit ĂŞtre prouvĂ©. Ă€ ce titre, le seul tĂ©moignage d’un travailleur est insuffisant et une preuve mĂ©dicale est nĂ©cessaire pour Ă©tablir le lien en question. La jurisprudence a dĂ©veloppĂ© des critères permettant d’établir si ce lien existe ou non. 

[121]     Ces critères ont Ă©tĂ© Ă©noncĂ©s dans la dĂ©cision Boisvert et Halco[14], en 1995. Depuis ce temps, ils ont Ă©tĂ© citĂ©s Ă  maintes reprises et sont toujours utiles pour rĂ©soudre le prĂ©sent litige. Il s’agit des critères suivants : la gravitĂ© de la lĂ©sion initiale; la compatibilitĂ© ou la similitude des sites de lĂ©sion; la continuitĂ© des symptĂ´mes; l’existence ou non d’un suivi mĂ©dical; le retour au travail avec ou sans limitations fonctionnelles; la prĂ©sence ou l’absence d’une atteinte permanente Ă  l’intĂ©gritĂ© physique ou psychique; la prĂ©sence ou l’absence de conditions personnelles; la compatibilitĂ© des symptĂ´mes allĂ©guĂ©s lors de la rĂ©cidive, rechute ou aggravation avec la nature de la lĂ©sion initiale et finalement, le dĂ©lai entre la rĂ©cidive, rechute ou aggravation et la lĂ©sion d’origine. Aucun de ces critères n’est en soi dĂ©cisif, mais ils peuvent aider Ă  dĂ©cider du bien-fondĂ© d’une rĂ©clamation pour une rĂ©cidive, rechute ou aggravation.

[122]     Ces choses Ă©tant dites, qu’en est-il du prĂ©sent dossier?

[123]     Commençons par la question du changement dans la condition physique de la travailleuse au moment oĂą elle produit sa rĂ©clamation. Le tribunal retient qu’elle se plaint principalement d’une augmentation des douleurs qu’elle associe Ă  son retour au travail. Elle se plaint aussi d’enflure, d’œdème.

[124]     Or, il y a lieu de rappeler que la lĂ©sion professionnelle a Ă©tĂ© consolidĂ©e avec une atteinte permanente Ă  l'intĂ©gritĂ© physique et des limitations fonctionnelles alors que le docteur Duranceau, membre du BEM, prĂ©cise qu’un syndrome douloureux persiste. Ce mĂ©decin Ă©tait alors d’avis qu’il pouvait ĂŞtre traitĂ© par des mĂ©dicaments.

[125]     C’est ce qui s’est produit le 26 aoĂ»t 2011 quand la travailleuse s’est prĂ©sentĂ©e chez le docteur Bou-Merhi. Il lui a simplement prescrit des mĂ©dicaments pour soulager des douleurs qui Ă©taient prĂ©sentes depuis longtemps comme cela peut ĂŞtre constatĂ© Ă  la lecture du suivi mĂ©dical. Rappelons Ă  ce titre qu’un simple effleurement de la main droite provoquait une douleur tel que rapportĂ© par le docteur Duclos Ă  la suite de son examen qui a eu lieu quelques mois avant la consolidation.

[126]     Rappelons Ă©galement que la travailleuse consommait dĂ©jĂ  de l’Empracet. Le fait qu’il y ait eu un changement dans la mĂ©dication, sans explication quant Ă  leur utilitĂ©, sinon le soulagement de la douleur, ne permet pas de conclure Ă  une rĂ©cidive, rechute ou aggravation.

[127]     L’opinion du docteur Morel, mĂ©decin-conseil Ă  la CSST, est retenue quand il indique que la travailleuse a prĂ©sentĂ© une variation de la douleur Ă  la suite d’une mobilisation. Il n’y a toutefois pas de signe clinique probant d’un changement dans sa condition. Le mĂ©decin souligne, avec raison, que la travailleuse se plaignait dĂ©jĂ  Ă  la date de consolidation de symptĂ´mes importants et qu’elle rapporte sensiblement les mĂŞmes au moment oĂą elle cesse Ă  nouveau de travailler.

[128]     Le tribunal remarque par ailleurs que les symptĂ´mes de la travailleuse tels l’œdème, l’enflure ne sont pas repris Ă  la suite des examens objectifs des mĂ©decins qui l’ont examinĂ©e de manière contemporaine Ă  l’évĂ©nement du 23 aoĂ»t 2011.

[129]     En effet, comme il a Ă©tĂ© dit, le 26 aoĂ»t 2011, le docteur Bou-Merhi note simplement que la rupture du transfert tendineux est très symptomatique depuis le retour au travail. Il n’y a aucune note concernant de l’enflure ou de l’œdème. L’examen du docteur Duclos est aussi muet Ă  ce sujet.

[130]     Le tribunal comprend que la travailleuse ait pu associer ses problèmes physiques Ă  l’évĂ©nement d’origine. Mais, cela ne suffit pas Ă  Ă©tablir la relation puisqu’aucune preuve mĂ©dicale probante ne supporte cette hypothèse.

[131]     Le reprĂ©sentant de la travailleuse a voulu Ă©tablir un lien entre les constats du docteur Duclos Ă  propos d’un hypothĂ©tique canal carpien qui aurait entraĂ®nĂ© de nouvelles limitations et la reconnaissance d’une rĂ©cidive, rechute ou aggravation. La soussignĂ©e ne retient pas un tel argument.

[132]     En effet, la preuve au dossier montre que la travailleuse ne souffre pas d’un canal carpien. En consĂ©quence, les conclusions du docteur Duclos concernant ce seul diagnostic ne permettent pas d’en tirer d’autres notamment concernant l’existence d’une rĂ©cidive, rechute ou aggravation.

[133]     Enfin, rappelons que ce diagnostic de canal carpien n’a jamais Ă©tĂ© reconnu comme Ă©tant en lien avec l’évĂ©nement d’origine.

[134]     La rĂ©vision du dossier permet Ă©galement de voir que la travailleuse a exercĂ© l’emploi convenable retenu très peu de temps. En effet, le tribunal a calculĂ© qu’elle a travaillĂ© tout au plus une vingtaine de jours entre le 11 juillet 2011 et l’arrĂŞt du 23 aoĂ»t suivant. Cela paraĂ®t bien peu pour conclure comme la travailleuse le souhaite, soit que la reprise du travail aurait causĂ© l’aggravation invoquĂ©e.   

[135]     Ainsi, il y a absence de preuve de l’aggravation ou d’un changement dans la condition de la travailleuse. Sa requĂŞte Ă  ce sujet doit Ă©galement ĂŞtre rejetĂ©e. Il reste la question de l’application de l’article 51 de la loi qui se lit ainsi :

51.  Le travailleur qui occupe Ă  plein temps un emploi convenable et qui, dans les deux ans suivant la date oĂą il a commencĂ© Ă  l'exercer, doit abandonner cet emploi selon l'avis du mĂ©decin qui en a charge rĂ©cupère son droit Ă  l'indemnitĂ© de remplacement du revenu prĂ©vue par l'article 45 et aux autres prestations prĂ©vues par la prĂ©sente loi.

 

Le premier alinéa ne s'applique que si le médecin qui a charge du travailleur est d'avis que celui-ci n'est pas raisonnablement en mesure d'occuper cet emploi convenable ou que cet emploi convenable comporte un danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur.

__________

1985, c. 6, a. 51.

 

 

[136]     D’emblĂ©e, le tribunal constate que la CSST ne s’est jamais prononcĂ©e sur cette question. En consĂ©quence, en vertu de l’article 377 de la loi, il n’y a pas lieu pour le tribunal d’en disposer.

[137]     MĂŞme s’il l’avait pu, le tribunal aurait rejetĂ© cette demande du reprĂ©sentant de la travailleuse. En effet, la lecture des rapports du docteur Bou-Merhi ne permet pas de savoir de quel emploi il discute quand il se rĂ©fère Ă  « l’emploi habituel Â» de la travailleuse. Parle-t-il de l’emploi convenable de magasiner ou de l’emploi prĂ©lĂ©sionnel? Aucune rĂ©ponse n’a Ă©tĂ© apportĂ©e Ă  ce questionnement. La demande du reprĂ©sentant de la travailleuse s’appuie ainsi sur un rapport incomplet qui ne permet pas de conclure comme il le souhaite.

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requĂŞte de Johanne St-Pierre, la travailleuse;

CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 30 avril 2012, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas subi le 23 août 2011 ou le 26 août 2011 une lésion professionnelle.

 

 

__________________________________

 

Luce Morissette

 

 

 

 

Me André Laporte

LAPORTE & LAVALLÉE

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Éric Latulippe

LANGLOIS KRONSTRĂ–M DESJARDINS

Représentant de la partie intéressée

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Le tribunal se reporte Ă  la dĂ©cision rendue le 30 novembre 2010 par le juge administratif M. Montplaisir, Groupe Bermex inc. et St-Pierre, C.L.P. 414440-63-1007.

[3]           La Commission des lĂ©sions professionnelles a Ă©galement retenu un diagnostic de syndrome rĂ©gional douloureux complexe voir : prĂ©citĂ©e note 2.

[4]           Voir la dĂ©cision de la Commission des lĂ©sions professionnelles rendue par la juge administratif G. Moffet, 2012 QCCLP 2417.

[5]           Le représentant de la travailleuse a indiqué avoir envoyé le document au greffe le 24 avril 2013 de manière urgente et ceci n’est pas remis en question, mais le document n’était pas au dossier du tribunal. Il a donc été déposé à l’audience.

[6]           La date est difficile à lire, mais le tribunal est d’avis qu’il s’agit du 23 septembre 2011.

[7]           Madame Charbonneau a expliqué que Meubles BDM est une filiale de Bermex Inc. mais qu’elle s’occupe de l’ensemble des établissements de l’employeur.

[8]           Hélène Lapointe est directrice adjointe d’une Mutuelle de prévention.

[9]           Boies et C.S.S.S. Québec-Nord, 2011 QCCLP 2775.

[10]         Voir entre autres : Lapointe et Compagnie minière QuĂ©bec Cartier, [1989] C.A.L.P. 38.

[11]         Voir notamment : BĂ©langer et Commission. Scolaire des Rives-Du-Saguenay, C.L.P. 325045-02-0708, 10 mars 2008, G. Morin.

[12]         Voir : Fontaine et Knirps Canada inc., C.L.P. 263575-61-0506, 10 janvier 2007, S. Di Pasquale; Rancourt et Pointe-Nor inc., C.L.P. 301952-08-0610, 3 juin 2009, P. PrĂ©gent.

[13]         Précitée note 11. 

[14]         Boisvert et Halco inc. [1995] C.A.L.P. 19.

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