DÉCISION
[1] Le 17 décembre 1999, la travailleuse, madame Sylviane Létourneau, conteste devant la Commission des lésions professionnelles une décision rendue le 23 novembre 1999 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) en révision administrative.
[2] Cette décision maintient les deux décisions initiales de la CSST du 2 mars et du 19 mars 1999 refusant de reconnaître que la travailleuse ait été victime d’une maladie professionnelle et qu’elle ait droit aux frais de médicaments et de déplacements.
[3] À l’audience, la travailleuse est présente et représentée. Il en est de même du Canadien national, l’employeur.
L'OBJET DE LA CONTESTATION
[4] La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision de la Révision administrative et de déclarer qu’elle a été victime d’une maladie professionnelle ayant débuté progressivement à partir de septembre 1998 lui donnant droit au remboursement de frais de déplacements et de médicaments en plus des autres avantages prévus à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) (la loi).
LES FAITS
[5] Les notes cliniques de la docteure Michèle Soucy en date du 6 novembre 1998 font état de douleur à l’épaule droite de la travailleuse « présente depuis deux mois » et qui vont en s’aggravant. Il est question de mouvements au travail : la travailleuse fait six heures par jour avec la souris, elle doit s’étirer le bras pour la rejoindre. Après examen, la docteure Soucy pose un diagnostic de tendinite professionnelle à l’épaule droite. Elle souligne qu’elle a fait une note écrite à l’intention de l’employeur afin de voir à ajuster le poste de travail de la travailleuse. La note énonce ce qui suit : « Tendinite épaule droite probablement d’origine professionnelle. Seule solution : réaménager poste de travail, l’épaule doit être en position physiologique, c’est-à-dire pas maintenue dans les airs pour atteindre la souris. Urgent si on veut éviter arrêt de travail prolongé ».
[6] Ce même 6 novembre 1998, un rapport du comité de santé, sécurité et hygiène signé par la travailleuse et messieurs Savard et Michel Vachon fait état d’une « condition dangereuse » et d’une « suggestion » : « Voir à faire évaluation du pôste de travail par un ergonome du à plusieurs maux de cou et de dos et de tendinite comme le dit le médecin Michèle Soucy. Urgent si on veut éviter arrêt de travail prolongé » (sic).
[7] Le 18 novembre 1998, on retrouve aux notes cliniques de la docteure Soucy, entre autres, « bras va pas du tout. Son poste pas ajusté ». La douleur irradie vers le cou, les anti-inflammatoires sont peu efficaces. Le diagnostic est toujours celui de tendinite de l’épaule droite d’origine professionnelle. L’arrêt de travail est prescrit. Sur l’attestation médicale du même jour, la docteure Soucy inscrit : « tendinite de l’épaule droite, secondaire à posture statique au travail (poste doit être ajusté) » et la médecin rappelle qu’elle a déjà avisé l’employeur par lettre le 6 novembre 1998.
[8] Le 27 novembre 1998, devant le peu d’amélioration, la travailleuse est dirigée en physiothérapie mais la CSST refusera les traitements de physiothérapie. Ils débuteront plus tard à l’hiver après une entente avec l’assurance maladie de la travailleuse, sous réserve d’un remboursement par la CSST, si par la suite la réclamation de la travailleuse devait être acceptée.
[9] Ce même 27 novembre 1998, la travailleuse, alors en début de cinquantaine, remplit son formulaire de réclamation à l’intention de la CSST. La travailleuse décrit ainsi les événements : « En travaillant avec clavier et souris, poste non conforme, avertie le 6 oct. M. Vachon et le 11 oct. M. Panchaud qui ont confirmé qu’effectivement c’était pas approprié (poste de travail) et qu’ils avaient eu les mêmes problèmes. Le 17 oct. poste non modifié » (sic).
[10] Le 18 décembre 1998, la travailleuse remplit une annexe à sa réclamation pour maladie professionnelle. Elle affirme travailler avec clavier et souris de façon continuelle « assise avec bras surélevés étendus dû au grand écran que j’utilisais ». Des photos sont fournies au soutien de son affirmation.
[11] C’est la première fois qu’elle fait une réclamation à la CSST. Dans ses commentaires, elle attribue à sa position au travail et aux contraintes les problèmes qu’elle éprouve. Elle fait référence au fait qu’elle est une petite personne et qu’elle doit baisser le siège « le plus possible » pour avoir les jambes confortables, ce qui l’obligeait à travailler au clavier et à la souris les bras surélevés. Le clavier et la souris sont positionnés sur le bureau, en face, de biais avec l’écran. De plus, elle devait s’éloigner de l’écran car il s’agissait d’un « super écran » lui donnant mal aux yeux et qui la forçait à travailler les bras encore plus étendus « en tout temps ». Enfin, elle fait référence au fait que le poste a été modifié avec trois autres postes de travail où l’on rencontrait différents problèmes d’adaptation.
[12] Ce même 18 décembre, la travailleuse est examinée par le docteur Paul-Émile Renaud, chirurgien orthopédiste, à la demande de l’employeur. Selon un rapport de radiologie que le docteur Renaud a obtenu, il y aurait « un ostéophyte localisé à la partie inférieure de l’acromion qui diminue l’espace situé entre la tête de l’humérus et l’acromion … ». Il n’y a par ailleurs aucune calcification au niveau de la coiffe des rotateurs. De son examen, le docteur Renaud retient comme diagnostic un syndrome d’accrochage à l’épaule droite par ostéophyte « condition essentiellement personnelle ». Et le médecin d’ajouter : « Il est évident que si elle effectue n’importe quel genre de travail en devant maintenir son membre supérieur droit élevé au-dessus du niveau de son épaule, elle est susceptible de ressentir des douleurs ». Le docteur Renaud écarte toute relation avec le travail. Il n’est donc pas question de maladie professionnelle. Il n’y a pas de traitement spécifique, « sauf une intervention chirurgicale par acromioplastie », sinon la travailleuse devra vivre avec ses symptômes. Il n’y a aucune atteinte permanente reliée au travail et aucune limitation fonctionnelle si ce n’est que « il y aurait avantage à ce qu’elle n’ait pas à travailler en devant soulever son membre supérieur droit au-dessus du niveau de son épaule droite, afin d’éviter de causer des symptômes douloureux ».
[13] Le 13 janvier 1999, la docteure Soucy maintient le diagnostic de tendinite de l’épaule droite et les traitements de physiothérapie débutent.
[14] Le 26 janvier 1999, le physiothérapeute écrit à la docteure Pierrette Girard, chirurgienne orthopédiste, lui faisant part du suivi des traitements de physiothérapie donnés à la travailleuse. Depuis le 13 janvier 1999, il y aurait eu quatre séances de physiothérapie. Au départ, le physiothérapeute avait noté de la douleur au niveau de la bourse deltoïdienne et un syndrome d’accrochage. Les traitements jusqu’au 26 janvier 1999 auraient donné « quelques résultats ». La travailleuse protège moins son membre supérieur droit, « elle est un peu plus forte et, par le fait même, se sert plus de son bras ». Enfin, le physiothérapeute demande à la docteure Girard s’il doit continuer les traitements.
[15] Le 28 janvier 1999, dans une note de consultation, la docteure Girard écrit que la travailleuse travaille à la même compagnie depuis 19 ans, qu’elle travaille dans un bureau sur ordinateur, qu’elle travaille avec une souris depuis juillet dans un nouveau travail… Elle conclura son examen par le diagnostic de « tendinite liée poste de travail ». Elle recommande une infiltration, la poursuite des traitements de physiothérapie et une évaluation du poste de travail.
[16] Quelques jours plus tard, le 1er février 1999, la travailleuse est examinée à nouveau et celle fois par l’orthopédiste Morris Duhaime, médecin désigné par la CSST. Dans son historique, le docteur Duhaime remonte le début des douleurs au 6 septembre 1998 : « le tout serait survenu à la suite de l’usage au poste d’informatique avec la souris, alors qu’elle avait toujours travaillé au clavier, sans avoir de problème ». À l’examen clinique, il note que les mouvements des deux membres supérieurs sont complets mais l’élévation est douloureuse à droite ainsi que l’abduction. Le diagnostic retenu est celui de tendinite de l’épaule droite. La date de consolidation est prospective : dans un mois, « à la suite de la prochaine visite à son médecin ». Il n’y a pas de déficit anatomo-physiologique. Par ailleurs, il considère que les traitements de physiothérapie pourraient se continuer de même qu’« elle devrait revoir son médecin pour une nouvelle infiltration … ». Enfin, il considère qu’il n’y a pas de limitation fonctionnelle quant à son travail « parce qu’il y a déjà eu des modifications à son poste de travail ».
[17] Le 26 février 1999, tel qu’il appert des notes évolutives de la CSST, le docteur Jean-Noël Goupil, médecin régional, écrit : « Nous n’acceptons pas la relation du diagnostic de tendinite de l’épaule droite car nous ne croyons pas que le travail de secrétaire qui consiste surtout à entrer des données puisse créer une tendinite de l’épaule. Il n’y a pas de charge à l’épaule droite, il n’y a pas de vibration, il n’y a pas de geste au-dessus des épaules ».
[18] Suite à cet opinion, la CSST rend décision le 2 mars 1999 refusant la réclamation de la travailleuse : « Il ne s’agit pas d’une maladie professionnelle, comme je vous l’ai précisé lors de notre conversation téléphonique. De plus, vous n’avez pas démontré que cette maladie est caractéristique du travail que vous exerciez ou qu’elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail ».
[19] Le 9 mars 1999, la travailleuse demande la révision de cette décision.
[20] Le 12 mars 1999, la docteure Soucy, dans un rapport à l’intention de la compagnie d’assurance maladie de la travailleuse, fait état du fait que la travailleuse est retournée au travail le 24 février 1999, « malheureusement son poste de travail n’est pas modifié tel que nous l’avons recommandé et madame a des douleurs qui augmentent depuis au retour au travail. Le poste devrait être modifié sous peu ».
[21] Deux notes de services relatent des échanges entre la travailleuse et ses employeurs. Le 3 mars, la travailleuse écrit : depuis mon retour au travail, j’ai demandé de modifier mon poste de travail qui supposément avait été modifié lors de mon absence, à ce jour rien n’a été fait. Serait-il possible de voir à faire faire cette modification dans les plus brefs délais, s’il vous plaît ». L’employeur répond qu’un sous-clavier devrait être installé au retour de vacances d’un certain monsieur Martinis. Le 18 mars, la travailleuse mentionne qu’elle a essayé le « bidule en question » mais ça ne règle pas le problème : « selon le physiothérapeute et l’orthopédiste, il faut que mon bras soit le plus près du corps possible de façon que je n’aie pas à bouger l’épaule ou le moins possible ». Elle souligne avoir parlé de la question à monsieur Ernest Panchaud qui lui a répondu « qu’il allait remédier à la situation le plus tôt possible ». Enfin, la travailleuse aurait aimé avoir l’avis d’un ergonome « pour que le poste soit adapté le plus adéquatement possible ».
[22] Le 19 mars 1999, la CSST refuse une demande de remboursement pour frais de déplacements et médicaments compte tenu que la réclamation pour maladie professionnelle avait déjà été refusée.
[23] Le 25 mars 1999, la travailleuse demande la révision de cette décision.
[24] Le 23 novembre 1999, la Révision administrative maintient les deux décisions de mars 1999. Elle s’appuie, d’une part, sur l’opinion du docteur Renaud et celle du médecin régional de la CSST et, d’autre part, sur le fait que « la preuve au dossier fait état d’une variété de tâches à exécuter réduisant ainsi les répétitions de mouvements ou de pressions sur des périodes de temps prolongées » empêchant ainsi l’application de la présomption de l’article 29 de la loi à l’effet que la tendinite puisse être une maladie professionnelle. Enfin, la Révision administrative « ne voit pas comment, selon les données factuelles contenues au dossier, le travail tel que décrit aurait pu générer une telle lésion ».
[25] Le 17 décembre 1999, la travailleuse porte sa contestation devant la Commission des lésions professionnelles.
[26] Le 21 août 2000, la Commission des lésions professionnelles entend les parties. Deux témoins sont entendus : la travailleuse et monsieur Ernest Panchaud.
Madame Sylviane Létourneau, la travailleuse
[27] Elle travaille depuis une vingtaine d’années chez l’employeur comme employée de bureau. En juin 1998, elle a été affectée à un nouveau poste avec écran cathodique et souris, comme commis intermodal au « ramping ». Son écran lui fait face, comme son clavier. La souris est sur sa droite. Il y a également un appareil téléphonique en avant de la souris et sur sa droite.
[28] Son rôle consiste essentiellement à indiquer à des camionneurs à quel endroit sur un train de marchandises ils doivent déposer le contenu de leur remorque (un peu comme les contrôleurs de trafic aérien qui indiquent aux avions à quel endroit sur les différentes pistes ils peuvent atterrir). Tout se fait par ordinateur. La position des différents wagons de train apparaît à l’écran sur des fenêtres différentes. Pour chaque camion ou unité à placer, elle reçoit un appel téléphonique. Elle doit étirer son bras droit pour rejoindre le téléphone chaque fois qu’il sonne, placer le combiné sur son oreille gauche, l’appuyer sur son épaule afin d’avoir les mains libres pour utiliser le clavier et la souris, et faire sa recherche et ses entrées. Ce sont là les trois principaux instruments de travail qu’elle utilise continuellement à son poste : le clavier, la souris et le téléphone. Des photos sont au dossier, photos que la travailleuse avait déposées antérieurement. Elle laisse voir la position qu’elle occupait au travail avant les modifications qui ont eu cours à son poste de travail en décembre et après lesdites modifications.
[29] Comme l’écran de son ordinateur fait une vingtaine de pouces, elle doit se reculer pour éviter d’avoir mal aux yeux. De toute façon, la travailleuse ne pouvait pas avancer sa chaise puisque les bras de celle-ci venaient buter contre le rebord de sa table Elle est donc loin de l’écran et ses bras sont allongés vers l’avant pour rejoindre à la fois le clavier et la souris. Pour rejoindre le téléphone, elle doit faire un effort important sur sa droite en s’étirant le bras droit à la hauteur des épaules. Ce qui ajoute au problème, c’est qu’elle est de petite taille et que son siège ajustable doit être descendu au plus bas pour que ses jambes puissent porter confortablement au sol.
[30] À part une pause d’une demi-heure et une demi-heure pour le lunch, elle passe la grande majorité de son temps à l’écran avec la souris et le clavier. Quand un camionneur téléphone pour savoir où placer le contenu de sa remorque, elle doit d’abord allonger le bras droit pour aller rejoindre le téléphone. Par la suite, tout se passe à son écran. Elle peut travailler avec cinq ou six tableaux ou même plus en fonction du lieu de destination de la marchandise, du type de marchandise, de la grosseur, poids, longueur, etc. Elle est droitière et c’est avec sa main droite qu’elle opère la souris. Pour chaque camion, elle prend environ une minute et durant cette minute, son bras droit est à peu près immobile, allongé, à cliquer la souris. L’ordinateur envoi le message à l’opérateur de cour. Les données sont, par la suite, entrées au clavier en utilisant les deux mains pour finaliser le rapport. L’opération se répète durant tout le quart de travail. À la fin de soirée, c’est davantage le clavier qu’elle utilise pour faire son bilan.
[31] Même si elle travaille chez l’employeur depuis un peu plus de 20 ans, elle n’a commencé à travailler avec la souris qu’en juin 1998. Elle a commencé à éprouver une légère douleur quelques trois semaines après avoir commencé à son nouveau poste. Vers le début de septembre, la douleur devenait plus importante. Elle a pris trois semaines de vacances croyant qu’au retour elle irait mieux. Effectivement, après ses vacances elle allait mieux; mais, quelques semaines plus tard, la douleur reprend, si bien que, au début de novembre, elle avait de la difficulté à dormir. Elle a été voir la docteure Soucy, son médecin de famille, qui a relié ses problèmes au travail et a demandé des modifications à son poste de travail.
[32] Elle a parlé à monsieur Vachon, un supérieur, qui lui a affirmé avoir eu le même problème avant les modifications à son propre poste de travail notamment l’addition d’une tablette en dessous de la table de travail pour poser le clavier. Elle a appris en même temps que monsieur Panchaud, responsable de la santé et de la sécurité à son lieu de travail, avait eu lui aussi le même problème et que son problème s’était résorbé avec l’addition de la tablette rétractable pour le clavier. Elle a fait son rapport écrit demandant qu’on modifie son poste de travail, mais le 19 novembre, rien n’avait encore était fait et elle ne pouvait plus supporter la douleur. La docteure Soucy l’a donc mise en arrêt de travail en attendant de voir l’orthopédiste, la docteure Girard, qui a procédé à une infiltration. Cette infiltration l’a beaucoup aidée. La docteure Girard lui a confirmé que son problème de tendinite à l’épaule droite était relié à son travail. Elle est revenue au travail à la fin de février. On était alors sensé avoir modifié son poste, mais les modifications n’étaient pas les bonnes et la douleur est rapidement revenue.
[33] Elle a pu reprendre son travail régulier le 31 mars avec cette fois de nouvelles modifications : la tablette amovible pour soutenir le clavier et la souris était plus basse lui évitant dorénavant d’avoir les bras allongés pour travailler. On a également rapproché le téléphone pour éviter les mouvements d’extension du bras et de l’épaule.
[34] Différents médecins l’ont examinée dont le docteur Renaud qui contrairement à la docteure Girard lui avait dit que sa condition n’était pas reliée au travail mais à une condition personnelle. Le docteur Renaud est le seul à ne pas faire de relation avec son travail; même le docteur Duhaime, médecin désigné par la CSST, lui a dit que sa condition était reliée à son travail.
[35] Elle n’a jamais eu de problème aux épaules antérieurement; personne non plus dans sa famille. Elle a été traitée avec des anti-inflammatoires, de la physiothérapie et des infiltrations. Depuis le 31 mars 1999, les dernières modifications à son poste complétées, elle a repris son travail régulier et n’a plus eu de problème avec son épaule. À partir de juin 1999 toutefois, elle a obtenu par affichage un nouveau poste.
[36] À titre d’information complémentaire, la travailleuse dépose copie de photos qui étaient déjà au dossier, mais plus claires, la montrant à son poste de travail, avant les modifications, assise, le bras gauche allongé vers l’avant pour rejoindre son clavier et le bras droit également allongé mais en abduction, c’est-à-dire éloigné de son corps et en flexion antérieure pour avoir accès à la souris. Le clavier et la souris sont sur sa table de travail. Après les modifications, le clavier rétractable est sous la table de travail, beaucoup plus près du corps de la travailleuse. Ceci lui permet de rejoindre le clavier et la souris en maintenant ses bras le long de son corps sans avoir à les allonger vers l’avant.
[37] La travailleuse dépose également une lettre écrite par monsieur Jean Savard, vice-président syndical du comité de santé sécurité, un des signataires du formulaire du 6 novembre 1998 émanant justement du comité de santé et de sécurité. Il est question de l’accident ou de la maladie professionnelle que la travailleuse a subi au cours de l’année 1998. Il écrit : « Mme Létourneau m’a demandé le 6 novembre 1998 de constater par moi-même son lieu de travail. Elle avait un mal constant à l’épaule droite et semblait souffrir à chaque mouvement qu’elle devait effectuer dans l’exécution de ses tâches. Il est aussi à noter qu’elle avait consulté son médecin, le Dr Soucy, et avait en main une demande de modification de poste signée par son médecin » (sic). Monsieur Savard relate avoir demandé à la travailleuse de remplir le formulaire et de le remettre au département de la santé et de la sécurité et de le faire signer préalablement par un superviseur en devoir à ce moment-là. C’est monsieur Michel Vachon, présent alors, à qui il a été demandé de constater les faits et de signer : « Il a dit en regardant le poste de travail que lui aussi avait eu des difficultés à l’épaule avant modification de son poste. Il a dit que c’était dû à l’utilisation de la souris et qu’après avoir fait installé une tablette en dessous de son bureau, il avait aussitôt ressenti un confort » (sic). Monsieur Vachon aurait également ajouté qu’il comprenait la situation et verrait à faire modifier le poste de travail le plus tôt possible. Il a signé le formulaire et a quitté.
[38] Une lettre, celle-là datée du 19 août 2000, est déposée par la travailleuse et signée par monsieur Claude Béchard. Celui-ci affirme que le 11 novembre 1999, alors qu’il s’occupait de santé et sécurité, il a rencontré monsieur Ernest Panchaud qui s’occupait également de santé et sécurité. Monsieur Panchaud lui aurait dit avoir rencontré madame Létourneau et que cette dernière avait un problème de tendinite à l’épaule droite. Il lui aurait dit « qu’il avait eu le même problème, mais depuis qu’il avait une tablette pour son clavier et sa souris d’ordinateur, son mal était disparu »
Monsieur Ernest Panchaud
[39] De juin à novembre 1998, il était agent en santé et sécurité chez l’employeur et coprésident du comité santé et sécurité. Il est maintenant directeur des activités au Port de Montréal, toujours pour l’employeur.
[40] Il reconnaît avoir eu des problèmes d’ordre musculo-squelettique avec son poste de travail, des problèmes d’inconfort; toutefois son poste était différent de celui de la travailleuse. L’addition d’un sous-clavier a permis de régler ses problèmes. Cependant, lorsque la travailleuse a fait état de ses propres problèmes en novembre 1998, il l’a bien comprise et lui a fait essayer deux autres postes de travail où il y avait une tablette avec clavier amovible pour tenter d’améliorer la situation.
[41] Parlant du poste de travail de la travailleuse, il rapporte que les fauteuils sont des fauteuils ergonomiques. L’écran est un grand écran de 19 pouces. Le travail avec la souris au poste de la travailleuse a pour objet d’assigner des unités (camions) à des wagons. Une centaine d’unités par soirée ou quart de travail doivent être assignées. Certains soirs, on peut parler de 130 et 140 unités surtout vers la fin de la semaine. D’autres soirs, il y en a moins d’une centaine d’où une moyenne approximative d’une centaine par quart de travail.
[42] Le travail se fait effectivement surtout à l’écran et avec l’aide de la souris. Pour chaque camion qui attend son assignation, il y a au moins « cinq ou six cliques » avec la souris et peut-être plus s’il y a quelques problèmes avec le chargement, quelques particularités.
[43] Lors de la rencontre avec la travailleuse, le 6 novembre 1998, c’est davantage la souris dont il a été question plus que du téléphone. Les modifications ont donc été apportées en fonction surtout de la souris puisque la travailleuse n’avait mal qu’à une seule épaule, la droite, et c’est avec le bras droit qu’elle travaillait avec la souris. Il n’y avait pas lieu de modifier la chaise puisqu’elle était ajustable. Il admet que cela a pris un certain temps avant d’avoir la tablette ou le sous-clavier et même qu’il y a eu des problèmes lorsqu’ils ont installé le sous-clavier parce que certains travailleurs qui utilisaient le même poste de travail que la travailleuse se plaignaient de s’accrocher les genoux sur la nouvelle tablette trop basse.
[44] Parlant de monsieur Béchard dont il est question dans une des lettres déposées par la travailleuse, il se souvient que monsieur Béchard, délégué syndical, était présent en novembre au comité de santé et sécurité quand il a été question de trouver une solution acceptable pour soulager les douleurs de la travailleuse et pour modifier son poste de travail.
[45] Par ailleurs, il ne sait pas comment les questions de modifications du poste ont été réglées finalement puisqu’à partir de janvier 1999, il avait obtenu un autre poste ailleurs.
[46] À l’occasion du témoignage de monsieur Panchaud, l’employeur a déposé une série de photos montrant le poste de travail de la travailleuse avec fauteuil, clavier, souris, écran et la position des différents outils de travail.
[47] L’employeur a également déposé une copie du rapport radiologique demandé par le docteur Renaud le 18 décembre 1998. On peut y lire : « Il y a légère arthrose à l’articulation acromio-claviculaire et il y a légère irrégularité de la surface de la grosse tubbérosité de l’humérus indiquant des changements dégénératifs. Il y a aussi proéminance de la portion inférieure de l’acromion » (sic).
L'AVIS DES MEMBRES
[48] Le membre issu des associations d’employeurs considère que nous ne sommes pas ici en présence de mouvements répétitifs sur des périodes de temps prolongées permettant d’enclencher la présomption prévue à la loi. Nous sommes plutôt en présence d’une variété de mouvements non concentrés sur la seule utilisation de la souris. Comme ces mouvements sont variés, on ne peut vraiment parler de position statique pouvant constituer une position contraignante. Au surplus, le médecin désigné par l’employeur ne parle pas de tendinite, mais bien d’un syndrome d’accrochage, diagnostic que reprend d’ailleurs le médecin traitant de la travailleuse. Il y a donc un problème avec le diagnostic, il y a absence de mouvements répétitifs et absence de positions contraignantes; dans un tel contexte, on ne peut conclure de façon prépondérante à l’existence d’une maladie professionnelle.
[49] Le membre issu des associations de travailleurs est du même avis quant à la non application de la présomption puisqu’il n’y a pas comme tel de mouvements répétitifs sur des périodes de temps prolongées. Par ailleurs, la preuve est, selon lui, claire quant aux contraintes exercées sur le membre supérieur droit de la travailleuse à cause des positions non ergonomiques qu’elle droit prendre, et ce, avant qu’on procède aux modifications de son poste de travail. Il y a peu de période où la travailleuse n’est pas dans une position contraignante, que ce soit pour aller chercher le téléphone, pour utiliser la souris ou le clavier, elle a toujours les bras tendus; dans chaque cas, ce sont donc toujours les mêmes structures qui sont sollicitées. Nous sommes en présence ici d’un risque particulier lié au travail et la preuve a démontré que, lorsqu’on corrige la situation, la travailleuse n’a plus de mal et peut exécuter son travail sans problème. La tendinite à l’épaule droite de la travailleuse doit donc être considérée comme une lésion professionnelle.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[50] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si, à partir du début de septembre 1998 jusqu’à l’arrêt de travail du 19 novembre 1998 et par la suite jusqu’à la reprise de son travail, de façon régulière fin mars 1999, la travailleuse a été victime d’une lésion professionnelle sous la forme d’une maladie professionnelle ou autre.
[51] La lésion professionnelle est ainsi définie à l’article 2 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) (la loi) :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation.
[52] La maladie professionnelle est également définie au même article :
« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail.
[53] Dans la présente cause, le débat a porté non pas sur la survenance d’un accident du travail mais bien sur l’existence d’une maladie professionnelle affectant l’épaule droite de la travailleuse, une maladie qui se serait manifestée au travail, de façon progressive jusqu’à nécessiter un arrêt complet par la suite.
La question du diagnostic
[54] À l’exception du docteur Paul-Émile Renaud, la médecin traitant, la docteure Soucy, de même que les deux autres spécialistes, la docteure Girard et le docteur Duhaime (pour la CSST) ont confirmé le diagnostic de tendinite à l’épaule droite. Le docteur Renaud pose un diagnostic de syndrome d’accrochage et n’explique pas pourquoi il écarte le diagnostic de tendinite. Au surplus, le syndrome d’accrochage pourrait être occasionné par la tendinite elle-même. C’est d’ailleurs ce qu’écrit à quelques reprises la docteure Soucy dans ses déclarations de médecin traitant à la compagnie d’assurance de la travailleuse : « tendinite épaule droite avec syndrome d’accrochage ».
[55] La Commission des lésions professionnelles retient donc le diagnostic de tendinite de l’épaule droite parce que c’est le diagnostic retenu par la médecin qui a charge de la travailleuse et deux autres spécialistes dont un désigné par la CSST (docteur Duhaime).
La tendinite est-elle en relation avec le travail ?
[56] Les médecins qui ont traité ou examiné et suivi la travailleuse, les docteures Soucy et Girard sont affirmatives quant à la relation entre la tendinite et le travail. La docteure Soucy écrit même à l’employeur pour lui dire que la tendinite à l’épaule droite de la travailleuse est « probablement d’origine professionnelle » et que la « seule solution » consiste à réaménager le poste de travail. Elle le répétera dans son attestation médicale du 18 novembre 1998 concluant que la tendinite à l’épaule droite est « secondaire à posture statique au travail ». Elle affirmera à nouveau que « le poste doit être ajusté ».
[57] La docteure Girard, pour sa part, dans son évaluation du 28 janvier 1999, affirme sans hésitation qu’il s’agit d’une « tendinite liée au poste de travail ».
[58] Le docteur Duhaime, quant à lui, a examiné la travailleuse à la demande de la CSST et n’a aucunement remis en cause la relation entre la tendinite et le travail. En fait, après avoir décrit le travail exécuté par la travailleuse et l’évolution des symptômes depuis septembre 1998, il confirme le diagnostic retenu par les docteures Soucy et Girard. Même plus, il écarte l’existence de limitations fonctionnelles au travail parce que, comme l’avait recommandé les docteures Soucy et Girard, « il y a déjà eu des modifications à son poste de travail ».
[59] Seul parmi les médecins ayant examiné la travailleuse, le docteur Renaud, médecin désigné par l’employeur, écarte le diagnostic de tendinite pour celui de syndrome d’accrochage de l’épaule droite qu’il attribue à une condition « essentiellement » personnelle, sans relation aucune avec le travail.
[60] Il est à noter que le docteur Renaud, si l’on se fie à son historique des événements, semble peu au courant du type de travail pratiqué par la travailleuse ni des rencontres et du débat en cours quant à la modification du poste de travail pour éliminer les contraintes physiologiques.
[61] Enfin, reste le médecin régional de la CSST qui n’a pas examiné la travailleuse et dont le refus de reconnaître la relation démontre qu’il ne parle absolument pas des mêmes problèmes dont ont discuté les docteurs Soucy, Girard et Duhaime. En effet, il parle d’un poste de travail de secrétaire sans référence au travail précis que la travailleuse devait faire et il conclut « il n’y a pas de charge à l’épaule droite, il n’y a pas de vibration, il n’y a pas de geste au-dessus des épaules ». Ce n’est aucunement à partir d’éléments semblables que les docteurs Soucy, Girard et Duhaime ont retenu la relation entre le travail et la tendinite de l’épaule droite de la travailleuse.
[62] Sans aller plus loin, on pourrait déjà conclure que la relation entre la tendinite de l’épaule droite de la travailleuse et le travail est, sur le plan médical, prépondérante. Cependant, compte tenu de la suite du débat sur l’utilisation de la souris et des contraintes physiologiques occasionnées par des postures liées à l’aménagement du poste de travail, le tribunal considère important de poursuivre l’analyse de la preuve et des dispositions de la loi.
Que dit la loi ?
[63] L’article 29 de la loi établit une présomption quant à l’existence d’une maladie professionnelle s’il est établi que le travailleur est atteint d’une maladie visée dans l’annexe I et qu’il a exercé un travail du genre à pouvoir provoquer cette maladie d’après la description faite à l’annexe I.
29. Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.
Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.
________
1985, c. 6, a. 29.
[64] Or, la tendinite fait partie des maladies comprises à la section IV de l’annexe I. Cependant, pour que la présomption s’applique, il faut que cette tendinite soit survenue suite « à un travail impliquant des répétitions de mouvements ou de pressions sur des périodes de temps prolongées ».
[65] Dans la présente affaire, les médecins parlent plutôt de position statique (donc d’absence de répétions de mouvements) et de mauvais aménagement du poste de travail entraînant des contraintes physiologiques. Il n’y a donc pas lieu ici d’appliquer la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29 : la tendinite de la travailleuse ne correspond pas à celle de l’annexe I.
[66] Cependant, puisque ce n’est pas de ce genre de tendinite qu’il s’agit, l’article 30 de la loi prévoit « qu’un travailleur atteint d’une maladie non prévue par l’annexe 1, contractée par le fait ou à l’occasion du travail et qui ne résulte pas d’un accident du travail ni d’une blessure ou d’une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d’une maladie professionnelle s’il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d’un travail qu’il a exercé ou qu’elle est reliée directement au risque particulier de ce travail ».
[67] Ce sont les risques particuliers de son travail que la travailleuse a justement plaidé.
La littérature
[68] Au soutient de son argumentation, la travailleuse a déposé deux documents relatifs à l’utilisation de la souris d’ordinateur. L’un émanant de l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur « Administration provinciale »; l’autre qui s’intitule Revue de littérature et avis d’experts sur les troubles musculo-squelettiques associés à la souris d’ordinateur, étude financée par l’Institut de recherche en santé et sécurité au travail (IRSST) et effectuée, selon les données qui y apparaissent, en 1998.
[69] Le premier document intitulé Souris, tu m’inquiètes qui s’attarde davantage à donner quelques conseils sur l’utilisation de la souris est un ouvrage de vulgarisation. Il n’a pas la rigueur scientifique du deuxième, cependant, il éclaire sur le fait que « malgré son aspect inoffensif, l’utilisation de cet outil (la souris) entraîne parfois l’apparition d’inconfort au cou, aux membres supérieurs (épaules, bras, mains) ou dans le haut du dos. En fait, trop souvent on néglige d’adapter les méthodes ou d’ajuster le poste de travail en conséquence ».
[70] En parlant de l’aménagement du poste, l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur « Administration provinciale » écrit : « Pour favoriser votre confort, placez la souris de façon à pouvoir la déplacer en gardant le plus possible le bras le long du corps et en maintenant la main à hauteur du coude. La place de la souris est donc à côté du clavier, sur la tablette porte-clavier … ».
[71] L’étude financée par l’Institut de recherche en santé et sécurité du travail n’a pas le côté vulgarisateur de la première, mais elle est beaucoup plus étayée en terme d’analyse ergonomique et des implications physiologiques pour les membres supérieurs lors de l’utilisation de la souris d’ordinateur. L’étude est faite à partir d’une revue de la littérature et d’une consultation d’experts sur les troubles musculo-squelettiques associés à la souris d’ordinateur.
[72] Ainsi, on apprend que : « Même si les forces en jeu sont minimes, plusieurs facteurs peuvent être à l’origine de troubles musculo-squelettiques reliés à l’utilisation de la souris (déploiement de forces excessives, maintien prolongé statique de contractions musculaires, postures extrêmes, contraintes organisationnelles et psychosociales, etc.) ». On y apprend également que les réclamations liées à l’utilisation de la souris d’ordinateur augmentent d’ailleurs rapidement et « des études démontrent clairement l’association entre l’utilisation fréquente de la souris et les troubles aux épaules, au cou, ainsi qu’aux membres supérieurs ».
[73] La revue de la littérature scientifique a porté sur « le savoir des chercheurs à l’échelle internationale ». Quant aux experts consultés, il s’agit d’experts dans les milieux de travail au Québec. Les experts dont il est question sont des membres titulaires de l’Association canadienne d’ergonomie et quelques intervenants dans les associations paritaires et les milieux universitaires.
[74] Ainsi, sur les 48 experts qui ont répondu au questionnaire, 69 % « disent avoir effectué des interventions en bureautique où la souris d’ordinateur était utilisée ». Quant aux personnes qui ne sont jamais intervenus à ce niveau, ce sont principalement des chercheurs ou des membres du corps professoral universitaire. Les statistiques présentées dans l’étude sont en relation avec le nombre de personnes ayant répondu avoir fait des interventions sur les lieux de travail. Parmi les personnes ayant fait des interventions en bureautique, certaines sont intervenues pour des centaines de postes de travail : « ces réponses démontrent que les ergonomes en consultation sont fréquemment appelés à intervenir dans des situations de travail où l’ordinateur et la souris sont utilisés ».
[75] Il est intéressant de noter que dans 76 % des cas, « l’intervention s’effectue en relation avec des utilisateurs présentant déjà des problèmes ».
[76] Revenant à la revue de littérature, « Une étude suédoise portant sur 542 sujets rapporte que l’utilisation d’une souris mal positionnée ou l’utilisation d’une souris plus de 5,6 heures par semaine serait (sic) de forts déterminants des symptômes accrus dans l’épaule, le coude et le poignet » (page 6). Plus loin, toujours selon la littérature, on apprend que « le lien entre les lésions musculo-squelettiques et le maintien prolongé de postures statiques associées à une charge importante ou l’adoption de posture inadéquate a été observé depuis plusieurs décades. Mais ce n’est que récemment que l’on a commencé à comprendre que le maintien des postures statiques apparemment inoffensives (comme lors de l’utilisation de la souris d’ordinateur où les charges musculaires sont faibles et les postures ne sont pas nécessairement inadéquates) peuvent entraîner des désordres musculo-squelettiques. L’exécution de travaux légers et sédentaires peut donc surcharger le système musculo-squelettique et mener à des conditions douloureuses et mêmes incapacitantes ». (page 9)
[77] Selon la littérature, la nature multi-factorielle des troubles musculo-squelettiques liés au travail est de plus en plus reconnue. Ainsi, à titre d’exemple, la hauteur de positionnement de la souris « aura un impact important sur la posture des divers segments du membre supérieur et sur les gestes devant être effectués pour l’atteindre. Ainsi plus la souris est élevée plus on peut s’attendre à ce que la posture de l’épaule et de la ceinture scapulaire soit contrainte … ». (page 12)
[78] Sans entrer dans les détails techniques, il apparaît quand même clair que « l’aménagement du poste de travail et les ameublements utilisés dicteront du moins en partie les postures adoptées par les utilisateurs et les mouvements devant être effectués pour utiliser la souris. Un bon consensus se retrouve parmi les auteurs afin de favoriser un positionnement visant à se rapprocher au maximum des postures physiologiques (amplitudes minimales et charges musculaires minimales). L’aménagement du poste de travail devra donc favoriser un bon positionnement de la souris et offrir du support au niveau du membre supérieur permettant ainsi de diminuer la charge musculaire ». Entre autres, « Il est recommandé de placer la souris directement à côté et au même niveau que le clavier, dans une zone d’atteinte facile de façon à éviter d’étendre le membre supérieur (Wells, 1996) ou d’être dans l’obligation de se pencher ou de s’étirer pour utiliser la souris (Armstrong et al., 1994) … ». (page 16)
[79] La partie de l’étude qui fait référence à la consultation des experts est essentiellement plus pratique et démontre, pour la plus grande partie, le type d’intervention pratiquée par les ergonomes membres de l’Association canadienne d’ergonomie, eu égard à la souris. Ainsi, 88 % des consultants ont été appelés à intervenir dans des situations de réaménagement de postes déjà existants. Ils peuvent alors procéder à une analyse complète de la situation de travail et/ou « à dispenser de la formation-information aux utilisateurs ». Trois fois sur quatre, « l’intervention s’effectue en relation avec des utilisateurs présentant déjà des problèmes ». (page 27)[1]
[80] Quant à l’identification des problèmes musculo-squelettiques associés à l’utilisation de la souris, « les ergonomes rapportent avoir associé (du moins en partie) l’utilisation de la souris d’ordinateur aux symptômes de troubles musculo-squelettiques rapportés par les utilisateurs dans 94 % des cas ». Il est important de noter toutefois, comme on le retrouve dans la littérature, « qu’il est souvent difficile d’identifier exactement les causes et que plusieurs autres éléments du poste de travail étaient aussi en cause. Dans certains autres cas, la situation leur apparaissait très claire ». (page 28)
[81] Les sites les plus fréquemment touchés par les utilisateurs de la souris, selon les experts, sont dans l’ordre, l’épaule et la ceinture scapulaire (88 %), le poignet (70 %) et le coude (51 %). Ces données rejoignent, entre autres, celles de l’étude Wells (1996) dont nous avons déjà parlé et qui portaient sur 542 sujets. D’une façon importante également, la main et les doigts, la colonne cervicale de même que l’avant-bras sont touchés, soit dans l’ordre, 45 %, 42 % et 33 %. Les bras et la colonne dorsale sont également mentionnés environ une fois sur quatre et, dans une proportion moindre, la colonne lombaire.
[82] Les auteurs de l’étude rapprochent ces résultats à ceux identifiés dans la littérature internationale, « ces résultats supportent le peu de données disponibles dans la littérature, c’est-à-dire que les problèmes liés à l’utilisation de la souris affectent principalement les membres supérieurs … ». Quant à savoir les déterminants à l’origine des problèmes musculo-squelettiques associés à l’utilisation de la souris, « la synthèse des résultats obtenus à ce niveau permet de constater que la plupart des répondants relèvent principalement la conception et l’aménagement du poste de travail comme étant à l’origine des troubles musculo-squelettiques rapportés par les utilisateurs (94 %). En effet, le positionnement de la souris qui est trop haute ou trop éloignée de l’utilisateur est la principale cause rapportée. Toutefois, la posture et le mode opératoire de l’utilisateur (67 %) ainsi que le manque de variété dans les tâches (58 %) sont aussi souvent pointés du doigt ». (page 29)
[83] La conception même de la souris, selon plus du tiers des ergonomes, « peut être à l’origine des problèmes musculo-squelettiques ». D’autres facteurs sont également avancés mais de façon moins importante. De toute façon, autant les experts que la littérature internationale parlent de déterminants multi-factoriels.
[84] Cependant, l’aménagement du poste de travail est capital. « Même si les recommandations émises par les experts touchent les différentes composantes de la situation de travail, les aménagements physiques des lieux de travail constituent encore des interventions privilégiées par les intervenants. C’est d’ailleurs à ce sujet que les consensus sont les meilleurs. Cette constatation n’est d’ailleurs pas surprenante. Les experts s’appuient généralement sur la littérature scientifique pour identifier les pistes de solutions et c’est dans le domaine des contraintes physiques liées à l’aménagement du poste de travail que la littérature est la plus abondante … » (pages 47 et 48)
[85] Il importe peu ici de savoir quels sont les solutions recommandées aux différents problèmes musculo-squelettiques qui découlent de l’utilisation de la souris puisque l’objet de la présente décision consiste à déterminer si la tendinite à l’épaule droite de la travailleuse est en relation ou non avec l’utilisation de la souris dans le contexte de travail mis en preuve.
[86] Par ailleurs, il n’est pas inutile de mentionner que « ces études et recommandations font souvent appel aux principes généraux des contraintes physiques, principes connus et bien documenté depuis longtemps en ergonomie ». (page 46)
Le cas de la travailleuse : les contraintes
[87] Quand on regarde les faits dans la présente cause à la lumière des données de l’étude de l’IRSST, la revue de littérature et l’avis d’experts que l’étude comporte, on ne peut écarter l’idée que le poste de travail au « ramping », avant les modifications, présentait des risques particuliers importants pouvant occasionner des problèmes musculo-squelettiques tels que ceux vécus par la travailleuse.
[88] D’une part, avant les modifications, la travailleuse était placée dans une position contraignante pour ses deux membres supérieurs. À cause de la grandeur de l’écran de son ordinateur, pour protéger ses yeux, elle s’éloignait de l’écran et par le fait même de son clavier. À cause de sa petite taille, elle ajustait son siège au plus bas pour permettre à ses pieds de prendre appui au sol. Pour ces raisons, la souris devenait trop haute et trop éloignée, il en était de même du clavier; elle se voyait forcer de travailler les bras vers l’avant avec les épaules en flexion antérieure alors que son bras droit, pour rejoindre la souris, devait être allongé et éloigné du corps (en abduction et en flexion antérieure).
[89] En plus, donc, de la position statique du bras droit lorsque la travailleuse utilise la souris, et ce, plusieurs heures par quart de travail, il y a les contraintes liées à la posture qu’elle doit adopter pour utiliser les divers instruments nécessaires à l’accomplissement de son travail.
[90] Même si les opérations effectuées par la travailleuse semblent variées (l’utilisation du clavier, de la souris, du téléphone), elles ont en commun qu’elles sollicitent à peu près toujours les mêmes muscles du membre supérieur droit.
[91] La travailleuse doit en effet étirer, une centaine de fois par quart de travail, son bras droit vers la droite pour prendre les appels des camionneurs qui attendent de se faire indiquer à quel endroit sur le convoi ferroviaire ils vont placer leur marchandise. Son bras demeure dans la même position (flexion antérieure et abduction) lorsqu’elle utilise la souris. Il demeure dans la même position encore lorsqu’elle entre les données au clavier (seul l’angle d’abduction varie). Encore une fois, bien que ces gestes apparaissent variés, ils n’en sollicitent pas moins les mêmes structures, et ce, dans un contexte de contraintes.
Réaction de l’employeur et ses représentants
[92] Ajoutons à cela le témoignage de la travailleuse qui fait état des problèmes similaires éprouvés par son supérieur, monsieur Vachon, et le responsable du comité de santé et sécurité, monsieur Panchaud. Problèmes qui se seraient résorbés avec la modification de leurs postes de travail. Ajoutons que le comité de santé et sécurité de l’employeur à partir du 6 novembre, (le témoignage de monsieur Panchaud le confirme) a pris au sérieux la plainte de la travailleuse et que personne n’a mis en doute la relation qu’il pouvait y avoir à ce moment, ni après, entre les problèmes à l’épaule droite de la travailleuse et son poste de travail, notamment et surtout à cause de l’utilisation de la souris comme le mentionnait monsieur Panchaud dans son témoignage.
[93] Nous sommes donc en présence de faits qui confirment que l’utilisation, par la travailleuse, de la souris plusieurs heures par jour, dans des positions contraignantes sur le plan physiologique constitue des risques particuliers liés au travail.
La relation temporelle
[94] La relation temporelle est ici particulièrement frappante.
[95] En effet, dès le début de sa nouvelle affectation, en juin 1998, la travailleuse a commencé à éprouver des problèmes à l’utilisation de la souris; puis au début de septembre 1998, les douleurs ont augmenté à son épaule droite. Elle a pris trois semaines de vacances et la douleur s’est atténuée de beaucoup. Lorsqu’elle a repris son travail, la douleur est revenue au point où empêchée de dormir, elle a fait une réclamation pour modification de son poste et a rapporté son problème après avoir consulté la docteure Soucy (6 novembre 1998). Malgré les promesses, après trois semaines, le poste de travail n’avait pas été modifié. Elle a été mise en arrêt de travail. Anti-inflammatoires, physiothérapie et infiltration ont ramené la travailleuse à son travail de façon régulière. La douleur était pratiquement disparue. Mais, comme le souligne la docteure Soucy, dans son rapport du 12 mars 1999, la travailleuse est retournée au travail le 24 février 1999, « malheureusement son poste de travail n’est pas modifié tel que nous l’avons recommandé et madame a des douleurs qui augmentent depuis retour au travail. Le poste devrait être modifié sous peu ». Quand finalement le poste est modifié, fin mars 1999, selon les recommandations, la travailleuse peut désormais faire son travail régulier et n’a plus de problème par la suite. L’ajout d’une tablette amovible sous la table avec le clavier qu’elle peut approcher d’elle, à la bonne hauteur; la souris qu’elle peut manipuler avec l’avant bras sans contrainte ont minimisé, de façon probante, les risques de son travail.
Conclusion
[96] Les différents indices utilisés dans la présente pour établir l’existence de risques particuliers directement reliés au travail exécuté par la travailleuse convergent :
1. Les opinions médiales sont prépondérantes quant à la relation entre la tendinite et le travail;
2. La littérature récente et les opinions d’experts retrouvées dans l’étude financée par l’Institut de recherche en santé, sécurité au travail (IRSST) confirment les risques du travail avec la souris;
3. Les contraintes exercées sur la structure anatomique de l’épaule et du membre supérieur droit de la travailleuse à cause principalement d’un mauvais aménagement du poste de travail, témoignent de la plausibilité bio-mécanique de la relation entre le travail et la lésion;
4. La réaction de l’employeur et de ses représentants a contribué à corriger le problème plutôt que le nier, et ce, par des modifications au poste de travail;
5. Enfin, la relation temporelle entre l’apparition des symptômes et les gestes exécutés au travail est très claire.
[97] Quant aux décisions rendues par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) ou la Commission des lésions professionnelles sur la question, elles sont plutôt récentes et variées, déterminées surtout par la preuve présentée dans chaque cas. Nous retrouvons près d’une quarantaine de décisions.
[98] Des quelque 38 décisions[2] rendues par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles et la Commission des lésions professionnelles, une douzaine ont reconnu les risques particuliers occasionnés par l’utilisation de la souris au travail.
[99] Les principaux éléments de preuve retenus dans ces cas sont :
- les conclusions des médecins;
- un poste de travail non adéquat entraînant des positions contraignantes pour les membres supérieurs;
- la relation temporelle entre l’apparition des symptômes et les gestes reliés au travail;
- l’incidence de la lésion chez les travailleurs exerçant les mêmes tâches;
- à ces éléments s’ajoutent, lorsque disponibles, la littérature médicale et les rapports ergonomiques pertinents.
[100] Il n’est pas nécessaire que tous ces éléments soient regroupés dans une même preuve. Si l’on ne retrouve que certains d’entre eux toutefois, ils doivent être d’importance suffisante pour pouvoir conclure à une relation prépondérante.
[101] Quant aux 26 décisions qui ne reconnaissent pas que l’utilisation de la souris puisse produire une lésion professionnelle, c’est, de façon générale, faute de preuve prépondérante. En particulier, le refus de reconnaître étaient liés, entre autres :
- « à l’absence de gestes répétitifs sur des périodes de temps prolongées »;
- à la notion même de blessure;
- à l’existence d’une condition personnelle déterminante…
PAR CES MOTIFS, LA
COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la contestation de la travailleuse, madame Sylviane Létourneau;
INFIRME la décision de la Révision administrative du 23 novembre 1999;
DÉCLARE que la travailleuse a subi le ou vers le 6 septembre 1998 une lésion professionnelle sous la forme d’une maladie professionnelle la rendant incapable d’exercer son travail à partir du 19 novembre 1998;
DÉCLARE que la travailleuse avait dès lors droit à tous les avantages prévus par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles y compris le remboursement pour ses frais de déplacement et de médicament dans la mesure prévue par la loi et les règlements;
RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour qu’il lui soit donné suite selon les prescriptions de la loi.
|
|
|
Gilles
Robichaud |
|
Commissaire |
|
|
|
|
MONSIEUR MICHEL
AUCLAIR 21, rue Dufour Saint-Mathias
(Québec) J3L 6B7 |
|
|
|
Représentant de la partie requérante |
|
|
|
|
|
|
|
Me
Carmen Poulin 4635, rue
Garnier Montréal
(Québec) H2J 3S6 |
|
|
|
Représentante de la partie intéressée |
|
|
|
|
COMMISSION D’APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES
APPELS ACCUEILLIS
OU RECONNAISSANCE DE LÉSION PROFESSIONNELLE
-
Pellicano et C.T. Serv. politiques santé-sécurité et Ministère de la justice, CALP,
71519-60-9507, 11 novembre 1997, Bertrand Roy, commissaire;
- Rowan et Communauté urbaine de Montréal, CALP, 65519-60-9412, 28 mars 1996, Santina Di Pasquale, commissaire;
- Laverrière et Hydro-Québec, CALP, 77658-62-9603, 9 janvier 1997, Michel Renaud, commissaire;
- Bégin et Hydro-Québec, CALP, 77826-62-9603, 9 janvier 1997, Michel Renaud, commissaire;
- Hydro-Québec et Parson, CALP 77709-60-9603, 6 juin 1997, Gilles Robichaud, commissaire;
COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES
CONTESTATIONS ACCUEILLIES
OU RECONNAISSANCE DE LÉSION PROFESSIONNELLE
- Anne Brassard et D.R.H.C. Direction du travail, CLP, 128806-07-9912, 19 mai 2000, Simon Lemire, commissaire;
- Lucie Charlebois et D.R.H.C. Direction du travail, CLP, 124792-07-9910, 11 avril 2000, Simon Lemire, commissaire;
- Lucienne Veilleux et Collège douanes Rigaud, CLP, 114951-62C-9904, 22 septembre 1999, Richard Hudon, commissaire;
- Hydro-Québec et Diane Quesnel, CLP, 84285-62-9612 et 92673-62-9711, 6 juillet 1999, Suzanne Mathieu, commissaire;
- Linda Boudreau et Vidéotron ltée, CLP, 101039-62-9805, 11 juin 1999, Bertrand Roy, commissaire;
- Pierlucio Pellissier et Cegep St-Laurent, CLP, 94437-73-9802, Jeffrey-David Kushner, commissaire.
COMMISSION D’APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES
APPELS REJETÉS
- Blouin et C.L.S.C. Rosemont, CALP, 89046-60-9706, 21 janvier 1998, Bernard Lemay, commissaire;
- Brouillette et Ministère Énergie & Ressources, CALP 27623-03-9104, 23 mars 1993, Ginette Godin, commissaire;
- Mircevska et Marconi Canada inc., CALP, 52469-60-9303, 5 décembre 1994, Bernard Lemay, commissaire;
- Pruneau et Hydro-Québec, CALP, 85459-63-9701, 4 décembre 1997, Michèle Carignan, commissaire;
- Ruelland et Société immobilière du Québec, CALP, 70137-03-9506, 22 juillet 1997, Marie Beaudoin, commissaire;
- Rousseau et Industries d’acier Spectra, CALP 81687-62-9608, 25 juin 1997, Sylvie Moreau, commissaire;
- Gazil et Hydro-Québec, CALP, 81034-62-9607, 15 mai 1997, Claude Bérubé, commissaire;
- Lebeau et Hôpital Sainte-Justine et CSST; CALP, 77539-61-9603, 14 mars 1997, Santina Di Pasquale, commissaire;
- Marcotte et Collège Régina Assumpta, CALP, 78794-60-9604, 4 février 1997, Guy Perreault, commissaire;
- Hôpital Sainte-Justine et Blais, CALP, 79698-63-9605, 4 avril 1997, Michel Denis, commissaire;
COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES
CONTESTATIONS REJETÉES
- Lynne Létourneau et Régie de l’assurance automobile du Québec, CLP, 119736-31-9906, 20 juillet 2000, Hélène Thibault, commissaire;
- Ginette Tanguay et Revenu Canada, CLP, 121062-03B-9907, 7 février 2000, Geneviève Marquis, commissaire;
- Hydro-Québec et Francine Couture, CLP, 120895-64-9907, 1er février 2000, Neuville Lacroix, commissaire;
- Francine Mayer et Bell Canada, CLP, 83467-64-9610, 17 décembre 1999, Micheline Bélanger, commissaire;
- Nicole Pinault et Régie INTM Police Chaud./Etchemin, CLP, 112421-03B-9903, 17 août 1999, Marielle Cusson, commissaire;
- Jenny Walosik Philbert et Guy Bernard Court. Assurance et CSST Outaouais, CLP, 109707-07-9901, 8 juin 1999, Yolande Lemire, commissaire;
- Hydro-Québec et Suzanne Gagnon, CLP, 86836-63-9703, 3 mars 1999, Diane Beauregard, commissaire;
- France Cholette et Communauté urbaine de Montréal, CLP, 102027-61-9806, 23 février 1999, Jean-Yves Desjardins, commissaire;
- U.A.P. inc. et Sonia Caron, CLP, 81651-62B-9608, 3 février 1999, Jean-Marc Dubois, commissaire;
- Louise Chamberland et Université Laval, CLP, 82691-03-9609, 9 septembre 1999, Ginette Godin, commissaire;
- Renée Messier et Hydro-Québec (St-Laurent), CLP, 90573-60C-9708, 21 août 1998, Pauline Perron, commissaire;
- Broderie d’art poinçonnage BF inc. et Jaqui Michaels, CLP, 87028-60D-9703 et 87166-60D-9703, 15 mai 1998, Joëlle L’Heureux, commissaire;
- Carole Doyon et Gazoduc Trans-Québec & Maritimes inc., CLP, 100294-73-9804, 15 mai 2000, Jean-Claude Danis, commissaire;
- Susan Maureen Nagy et Service Telste ltée, CLP, 129831-71-0001, 7 juin 2000, Robert Langlois, commissaire;
- Julie Pelchat et Vidéotron ltée, CLP, 126184-62B-9911, 16 juin 2000; Nicole Blanchard, commissaire;
- Manon Beaudry et Emploi et Immigration Canada, CLP, 125604-73-9910, 22 juin 2000, Diane Taillon, commissaire;
- Josée Giasson et Hydro-Québec, CLP, 116745-07-9905, 26 juillet 2000, Réal Brassard, commissaire;
- Julie Rocheleau et Santé Canada, CLP 121936-31-9908, 28 juillet 2000, Hélène Thériault, commissaire;
- Michel Rioux et Shell Canada ltée, CLP, 123058-63-9909, 4 juillet 2000, Doris Lévesque, commissaire.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.