Décision

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Gabarit EDJ

Lamontagne c. Transat Tours Canada inc.

2021 QCCQ 200

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

RIMOUSKI

LOCALITÉ DE

RIMOUSKI

« Chambre civile »

N° :

100-32-700270-201

 

DATE :

8 février 2021

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

MONSIEUR LE JUGE

DENIS PARADIS, C.Q.

______________________________________________________________________

 

Éric Lamontagne

et

Cathy Landry

Demandeurs

c.

Transat Tours Canada inc.

et

Air Transat

et

Voyage Vasco Rimouski

Défendeurs

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT RECTIFIÉ

______________________________________________________________________

 

 

La rectification du jugement daté du 21 janvier 2021 est nécessaire dans le but d’y apporter une correction au paragraphe 18.

 

[1]           Monsieur Éric Lamontagne et madame Cathy Landry réclament des trois défendeurs, solidairement, la somme de 4 868,00 $, ce qui représente le coût de leur voyage prévu en République dominicaine, lequel est annulé en raison de la pandémie qui sévit partout sur la planète.

[2]           Voyage Vasco, représenté par monsieur Simon Pinault, plaide qu’il est un simple intermédiaire dans la réservation du voyage, et qu’il ne peut être tenu responsable de quoi que ce soit.

[3]           Madame Louise Delaney s’exprime au nom de Transat Tours Canada inc. et Air Transat. Elle allègue essentiellement qu’il s’agit d’un cas de force majeure et que forcer Transat Tours et Air Transat à rembourser le coût du voyage lui causerait un préjudice sérieux. Elle soulève les articles 1699 et 1700 du Code civil du Québec et le règlement sur la protection des passagers aériens[1]. Madame Delaney ajoute qu’un crédit-voyage est offert aux demandeurs, sans limite de temps, et transférable à quiconque.

LES FAITS

[4]           Monsieur Lamontagne fait affaire avec Voyage Vasco pour la réservation de son voyage. Cependant, les paiements[2] sont effectués par carte de crédit à Air Transat (318,00 $) et Transat Tours Canada inc. (200,00 $ et 3 700,00 $).

[5]           À la suite de l’avis émis par le gouvernement canadien le 13 mars 2020 de ne pas voyager à l’extérieur du pays si ce n’est pas essentiel, monsieur Lamontagne annule sa réservation le 19 mars, dit-il.

[6]           Au cours des jours suivants son annulation de voyage, la République dominicaine ferme ses frontières, affirme madame Delaney, de sorte que le vol prévu n’a pas lieu.

ANALYSE ET DÉCISION

[7]           Les questions en litige :

A.   Est-ce que le vol annulé vers la République dominicaine est lié à un cas de force majeure ?

B.   Si oui, est-ce que Transat Tours Canada et Air Transat doivent rembourser les demandeurs, ou si les bons d’échange ou le crédit-voyage équivalent à un remboursement ?

C.   Quelle est la responsabilité de Voyage Vasco ?

[8]           À n’en pas douter, la pandémie qui a cours en mars 2020 constitue un cas de force majeure.

[9]           L’article 1470 du Code civil du Québec définit la force majeure comme « un évènement imprévisible et irrésistible. » C’est le cas ici.

[10]        Si Air Transat annule le vol prévu pour la République dominicaine, il ne peut lui en être tenu rigueur. Air Transat est dans l’impossibilité absolue d’exécuter son obligation et elle en est libérée suivant l’article 1693 du Code civil du Québec.

[11]        Là, entre en jeu le principe général de la restitution, édicté à l’article 1694 du Code civil du Québec, lequel il est à propos de citer en entier :

Article 1694

Restitution :

« Le débiteur ainsi libéré ne peut exiger l’exécution corrélative du créancier; si elle a été exécutée, il y a lieu à restitution.

Obligation du créancier.

Lorsque le débiteur a exécuté son obligation en partie, le créancier demeure tenu d’exécuter la sienne jusqu’à concurrence de son enrichissement. »

[12]        Ce que soumet Air Transat et Transat Tours Canada, c’est que la restitution en nature, c’est-à-dire en argent, ne peut s’opérer dans leur cas. Elles invoquent l’inconvénient sérieux dont traite l’article 1700 du Code civil du Québec.

[13]        En outre, en soulevant la disposition prévue à l’article 1699 du Code civil du Québec, elles avancent que le tribunal peut refuser la restitution parce qu’elle aurait pour effet d’accorder un avantage indu à monsieur Lamontagne et madame Landry.

[14]        Dans leur traité sur les obligations, les auteurs Pierre-Gabriel Jobin et Nathalie Vézina écrivent que « la restitution doit en règle générale se faire en nature (c’est-à-dire par la remise du bien ou de la somme d’argent reçue). Elle se fait plutôt par équivalent uniquement lorsque la restitution en nature est impossible ou présente un inconvénient sérieux[3]. »

[15]        Or, le Tribunal n’a aucune preuve de l’impossibilité pour Air Transat et Transat Tours Canada de rembourser les demandeurs.

[16]        Le Tribunal n’a encore aucune preuve que ce remboursement leur causerait un inconvénient sérieux. Dans la même veine, aucun avantage indu ne ressort de la preuve qui favoriserait monsieur Lamontagne et sa conjointe.

[17]        Ni l’article 1699 ni l’article 1700 du Code civil du Québec ne viennent à la rescousse d’Air Transat et Transat Tours Canada.

[18]        Le règlement sur la protection des passagers aériens prévoit que lorsque l’annulation d’un vol est attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur, il doit fournir des « arrangements de voyage alternatifs[4]. »

[19]        Dans le cas des demandeurs, l’article 18 (1) a) ii) prévoit que cet arrangement est une réservation confirmée pour un vol exploité par tout transporteur suivant toute route aérienne raisonnable vers la destination indiquée sur le titre de transport initial du passager.

[20]        Plus d’un an après l’annulation, il n’y a toujours pas de « réservation confirmée pour un vol ». Ces dispositions ne peuvent venir en aide non plus à Air Transat et Transat Tours Canada.

[21]        De toute façon, pour mettre en application cette disposition, il faudrait qu’il y ait cette preuve d’une impossibilité ou d’un inconvénient sérieux, ce que le tribunal n’a pas.

[22]        D’autre part, le Tribunal ne peut trouver dans la preuve un fondement à la responsabilité de Voyage Vasco. Il ne reçoit pas le paiement pour le voyage et son contrat avec les demandeurs est exécuté. En fait, il ne devait que relayer ses clients à Transat Tours Canada, ce qu’il fait.

[23]        L’obligation solidaire, telle que définie à l’article 1523 du Code civil du Québec, ne peut s’appliquer à voyage Vasco. Cependant, dans d’autres circonstances, même souvent, l’agence de voyages sera emportée par le principe de la solidarité.

[24]        Les dommages punitifs ne sont pas accordés. Une somme de 150,00 $ pour troubles et ennuis est raisonnable.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[25]        ACCUEILLE la demande;

[26]        CONDAMNE solidairement Air Transat et Transat Tours Canada inc. à verser aux demandeurs, madame Cathy Landry et monsieur Éric Lamontagne, la somme de 4 368,00 $, avec intérêts au taux légal, plus l’indemnité additionnelle prévue au Code civil du Québec, et ce, à compter du 1er juin 2020, date de la mise en demeure.

[27]        REJETTE la demande contre Voyage Vasco;

[28]        AVEC LES FRAIS DE JUSTICE contre Air Transat et Transat Tours Canada inc. mais sans frais pour Voyage Vasco.

 

 

 

 

__________________________________

Denis Paradis, J.C.Q.

 

Date d’audience :

18 janvier 2021

 



[1]     Dors/201-150.

[2]     Pièce P-2.

[3]     Pierre-Gabriel JOBIN et Nathalie VÉZINA, Les obligations, 7e édition, Les Éditions Yvon Blais, 2013, Cowansville, paragraphe 923.

[4]     Article 10 du Règlement.

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