Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Yamaska

LONGUEUIL, le 19 décembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

129696-62B-0001-R

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Ginette Godin

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

M. Robert Dumais

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

M. Daniel Robert

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

115764888

AUDIENCE PRÉVUE LE :

7 novembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Saint-Hyacinthe

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 429.5 6 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (L.R.Q., chapitre A-3.001)

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MONIQUE CÔTÉ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

INTERBALLAST INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 31 mai 2000, madame Monique Côté (la travailleuse), dépose auprès de la Commission des lésions professionnelles une requête en révision ou en révocation à l’encontre d’une décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 10 mai 2000.

[2]               La décision dont révision ou révocation est demandée déclare que la travailleuse ne fut pas victime d’une lésion professionnelle le 23 novembre 1998.

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[3]               La travailleuse et Interballast inc. (l’employeur) bien que dûment convoqués sont absents à l’audience de la requête dont est saisie la Commission des lésions professionnelles.

[4]               La travailleuse précise par écrit, au soutien de sa requête, que la Commission des lésions professionnelles a commis des erreurs de faits et de droit de nature à invalider la décision attaquée.

[5]               La Commission des lésions professionnelles procède à rendre une décision sur dossier comme le lui permet l’article 429.57 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles [L.R.Q., chapitre A-3.001] (la Loi).

LES FAITS

[6]               La décision attaquée relate que le 23 novembre 1998, la travailleuse est assignée à un travail inhabituel consistant à dénuder plus de 600 fils.

[7]               Après environ quatre heures de travail, alors que la travailleuse tire sur le bout d’une gaine qu’elle vient de couper, elle ressent une violente douleur soudaine au coude droit.

[8]               Dans les minutes qui suivent cette douleur, tout le membre supérieur droit de la travailleuse enfle.

[9]               Le lendemain, la travailleuse reprend son travail chez l’employeur et après dix minutes, l’œdème au bras droit s’amplifie.

[10]           La travailleuse consulte alors un médecin lequel pose un diagnostic de tendinite bicipitale droite et d’épicondylite droite.

[11]           Dans sa décision du 10 mai 2000, la Commission des lésions professionnelles refuse de reconnaître que la travailleuse fut victime d’une lésion professionnelle le 23 novembre 1998 pour les motifs suivants :

[…]

 

«[21]    La Commission des lésions professionnelles doit décider si le 23 novembre 1998, la travailleuse est victime d’un accident du travail. Celle-ci est catégorique à l’audience, les douleurs apparaissent soudainement à l’occasion de son travail. Il n’est nullement question de l’apparition progressive de douleurs à la suite de mouvements répétitifs.

 

[22]      La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] définit ainsi un accident du travail :

 

            « accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle ;

 

[23]      La travailleuse décrit l’apparition soudaine d’une douleur alors qu’elle exécute une nouvelle tâche à son travail. Elle serre une pince et tire vers la droite avec son bras droit; ces mouvements n’exigent pas de véritable effort selon la travailleuse. Après avoir accompli ces mêmes gestes des centaines de fois sans aucun problème, elle ressent soudainement une importante douleur en tirant pour la deuxième fois sur la gaine d’un fil qu’elle vient de couper.

 

[24]      L’apparition soudaine d’une blessure au travail ne constitue pas un accident du travail. L’accident doit être la cause de la lésion qui cause l’apparition de la douleur, tout comme une chute cause une fracture qui cause une douleur; l’accident est la chute. La cause de la douleur sera un accident du travail si et seulement si il s’agit d’un événement imprévu et soudain, évidemment survenu au travail ou à l’occasion du travail.

 

[25]      La travailleuse ne décrit pas un tel événement qui soit la cause de la douleur ressentie. Il s’agit plutôt de l’apparition soudaine d’une douleur à l’occasion d’un geste posé parmi des centaines d’autres.

 

[26]      De plus, rien dans la preuve ne permet de conclure que les mouvements de serrer et tirer mettent sous tension les épicondyliens et biceps droits et peuvent causer soudainement une épicondylite et une tendinite bicipitale droites.

 

[27]      La Commission des lésions professionnelles conclut donc que l’événement décrit par la travailleuse n’est pas un accident du travail car l’événement décrit n’est pas imprévu ni soudain et la preuve ne permet pas de conclure que les lésions diagnostiquées sont causées par cet événement.

 

[28]      La Commission des lésions professionnelles reconnaît la crédibilité de la travailleuse mais faute de preuve de la survenance d’un événement imprévu et soudain et de la relation entre l’événement décrit et les lésions diagnostiquées, il ne peut être question d’un accident du travail au sens de la loi.»

 

L'AVIS DES MEMBRES

[12]           Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs sont d’avis de révoquer la décision attaquée parce que le décideur initial n’a pas qualifié la nature de la lésion de la travailleuse (blessure ou maladie) et qu’il a omis de se prononcer sur l’application de la présomption de lésion professionnelle prévue par l’article 28 de la Loi.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[13]           L’article 429.56 permet à la Commission des lésions professionnelles de réviser ou révoquer une de ses décisions si une des causes énumérées à cet article est rencontrée. Voici la teneur de cet article :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

  lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

  lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

  lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[14]           À la lecture des motifs de la décision attaquée, il est facile de constater que le décideur initial ne qualifie d’aucune façon la nature des lésions dont souffre la travailleuse.

[15]           Ces lésions sont doubles : une tendinite bicipitale droite et une épicondylite droite selon les diagnostics retenus par le médecin ayant charge de la travailleuse.

[16]           Bien que de façon générale, la jurisprudence de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles et de la Commission des lésions professionnelles assimile les diagnostics de tendinite et d’épicondylite à une maladie, de tels diagnostics peuvent cependant être qualifiés de blessure si la preuve offerte le permet.

[17]           Or, au paragraphe 21 des motifs de sa décision, le décideur initial précise que les douleurs de la travailleuse sont apparues soudainement à l’occasion de son travail, ce qui constitue un indice militant en faveur d’une blessure.

[18]           Dès lors, la travailleuse pouvait bénéficier d’un moyen de preuve légale, soit la présomption prévue par l’article 28 de la Loi dont le but est de lui faciliter le fardeau de preuve pour fins de reconnaissance d’une lésion professionnelle. Cet article se lit ainsi :

28. Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.

________

1985, c. 6, a. 28.

 

 

[19]           Le décideur initial ne s’attarde pas à l’applicabilité de cette présomption, et ce faisant, a exigé de la travailleuse un fardeau de preuve supérieure à celui légalement requis.

[20]           Qui plus est, au paragraphe 24 des motifs énumérés dans la décision attaquée, le décideur initial écrit clairement que «l’apparition soudaine d’une blessure ne constitue pas un accident du travail».

[21]           Au contraire, selon le libellé de l’article 28 précité, l’apparition d’une blessure lorsque la preuve démontre que cette blessure survient au travail alors que la travailleuse exécute son travail est présumée être une lésion professionnelle.

[22]           L’omission de se prononcer sur l’applicabilité d’une règle de droit, en l’occurrence l’article 28 de la Loi, constitue une erreur de droit manifeste assimilable à un vice de fond de nature à invalider une décision selon la jurisprudence unanime de la Commission des lésions professionnelles.

[23]           La soussignée pourrait remédier à cette lacune en révisant la décision attaquée et en rendant la décision qui aurait dû être rendue à la lumière de la preuve offerte et des argumentations de chacune des parties.

[24]           Cependant, pour agir ainsi, l’écoute de l’enregistrement de l’audience était nécessaire pour s’assurer que la partie requérante a bien démontré l’existence des critères d’application de la présomption de l’article 28 de la Loi et que la partie intéressée a pu faire valoir sa preuve et ses prétentions sur le renversement de cette présomption, le cas échéant.

[25]           Or, l’enregistrement de l’audience est inaudible.

[26]           Compte tenu de ce fait et du respect des règles de justice naturelle, la soussignée croit opportun de limiter son intervention à la révocation de la décision de la Commission des lésions professionnelles du 10 mai 2000.

[27]           Par conséquent, une nouvelle audience devra être tenue à laquelle seront convoquées les parties intéressées au litige.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de la travailleuse, madame Monique Côté;

RÉVOQUE la décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 10 mai 2000;

ORDONNE la tenue d’une nouvelle audience, à laquelle seront convoquées les parties intéressées par la requête de la travailleuse.

 

 

 

 

Me Ginette Godin

 

Commissaire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1]          L.R.Q. c.A-3.002

 

[…]

AVIS :
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