Décision

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Lajoie et Entreprises DF

2011 QCCLP 7313

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Trois-Rivières

14 novembre 2011

 

Région :

Mauricie-Centre-du-Québec

 

Dossier :

428240-04-1101

 

Dossier CSST :

132302563

 

Commissaire :

J. André Tremblay, juge administratif

 

Membres :

René Pépin, associations d’employeurs

 

Serge Saint-Pierre, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Gaétan Lajoie

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Entreprises D.F.

 

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 11 janvier 2011, M. Gaétan Lajoie, le travailleur, dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 1er décembre 2010 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme trois décisions qu’elle a rendues initialement. Une première du 30 août 2010, par laquelle elle déclare que le travailleur conserve une atteinte permanente de 5,55 % et qu’il a droit à une indemnité pour préjudice corporel de 3 631,64 $. Une seconde décision du 26 octobre 2010, par laquelle elle déclare que le travailleur n’a pas droit à l’adaptation du véhicule « en ce qui concerne un quadriporteur ».  Enfin, la CSST confirme une troisième décision du 8 novembre 2010 par laquelle elle déclare que le travailleur n’a pas droit à une allocation pour aide personnelle à domicile.

[3]           Dans une lettre du 17 janvier 2011, le travailleur avise la Commission des lésions professionnelles qu’il ne conteste pas la partie de la décision de la révision administrative du 1er décembre 2010 qui concerne son atteinte permanente, mais précise qu’il maintient ses contestations de la décision refusant l’adaptation de son véhicule et concernant le refus du versement d’une allocation pour aide personnelle à domicile.

[4]           Une audience s’est tenue le 20 juillet 2011 à Trois-Rivières en présence du travailleur qui est représenté. La représentante de l’employeur, Entreprises D.F., a avisé le tribunal le 8 avril 2011 de son absence et de celle de l’employeur à l’audience.

[5]           La CSST, qui conformément à l’article 429.16 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) est intervenue, a informé le tribunal qu’elle ne serait pas présente à l’audience.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[6]           Le travailleur demande d’infirmer en partie la décision de la CSST rendue en révision administrative le 1er décembre 2010, et de déclarer qu’il a droit à l’adaptation de son véhicule pour le transport d’un quadriporteur. Il demande également d’infirmer cette décision et de déclarer qu’il a droit à l’allocation pour une aide personnelle à domicile.

LES FAITS

[7]           À l’époque pertinente, le travailleur occupe un emploi de peintre chez l’employeur.

[8]           Le 16 octobre 2007, le travailleur subit un accident du travail, alors qu’il fait une chute face première d’une plateforme élévatrice et tombe sur le dos.

[9]           Le 8 novembre 2007, la CSST accepte la réclamation du travailleur à titre d’accident du travail survenu le 16 octobre 2007 dont le diagnostic est une lombalgie traumatique. Cette décision est confirmée par la CSST en révision administrative le 22 février 2008. Cette décision est devenue finale en raison d’un désistement produit par l’employeur à la Commission des lésions professionnelles[2].

[10]        Le 16 avril 2008, la CSST accepte une relation entre un nouveau diagnostic de contusion radiculaire S1 droite sur pachyméningite et l’événement du 16 octobre 2007. L’employeur a demandé la révision de cette décision.

[11]        Le 17 juillet 2008, la CSST en révision administrative confirme la décision rendue initialement le 16 avril 2008. L’employeur a contesté cette décision devant la Commission des lésions professionnelles[3] et un désistement a été produit par l’employeur le 21 mai 2010.

[12]        À la suite de l’obtention par l’employeur d’un rapport qui infirme les conclusions du  médecin qui a charge, le dossier est soumis au Bureau d’évaluation médicale. Dans un avis du 11 décembre 2008, le Dr Guy Bouvier, neurochirurgien et membre du Bureau d’évaluation médicale, a rendu un avis. Il retient en conclusion, les diagnostics de status post-trois interventions au niveau du rachis lombaire, pachyméningite lombaire et contusion radiculaire des racines L5 et S1 droites à la suite de la chute. Il indique que les lésions sont non consolidées et recommandent une évaluation en neuropsychologie, une suppression progressive et totale des narcotiques avant la mise en place d’un éventuel neurostimulateur et la possibilité d’un neurostimulateur.

[13]        Le 16 décembre 2008, la CSST rend une décision à la suite de l’avis émis par le membre du Bureau d’évaluation médicale. Cette décision n’a pas fait l’objet d’une demande de révision.

[14]        Le 30 septembre 2009, le médecin qui a charge prescrit un lit orthopédique avec matelas au travailleur.

[15]        Le 22 octobre 2009, la CSST refuse de payer au travailleur un lit orthopédique et le travailleur demande la révision de cette décision.

[16]        Le 14 janvier 2010, la CSST confirme la décision rendue le 22 octobre 2009 et déclare qu’elle est justifiée de refuser de payer au travailleur les aides techniques suivantes :  « un lit et un matelas orthopédique ».

[17]        Le 29 janvier 2010, un contrat est accordé à la Clinique d’ergothérapie Jasmin Belhumeur, afin d’évaluer les besoins d’adaptation du domicile du travailleur et d’évaluer les moyens afin d’aider le travailleur à accomplir ses activités de la vie quotidienne.

[18]        Le 5 février 2010, le Dr Alain Bilocq neurochirurgien, qui traite le travailleur depuis octobre 2007, rédige une prescription par laquelle il lui prescrit un quadriporteur, ainsi qu’un lit d’hôpital.

[19]        Le 18 février 2010, M. Jasmin Belhumeur transmet à Mme Aucoin de la CSST un rapport de sa visite à domicile. Il conclut quant à l’entretien ménager :

Monsieur ne peut pas faire ménage, le nettoyage ou passer l’aspirateur. Actuellement, c’est la mère de M. Lajoie qui le fait, car monsieur n’a pas la force, l’amplitude ni l’endurance pour exécuter ses tâches. C’est également sa mère qui fait le lavage. [sic]

 

 

[20]        M. Belhumeur indique toutefois :

Il faudra prévoir de l’aide à domicile si sa mère venait à ne plus être capable d’entretenir la maison. [sic]

 

 

[21]        Le 9 avril 2010, le Dr Bilocq rédige un rapport final par lequel il consolide la lésion à cette date. Il indique que la lésion entraîne des limitations fonctionnelles, ainsi qu’une atteinte permanente. Il parle dans son attestation d’une invalidité totale permanente et indique qu’une expertise est à faire.

[22]        Le 12 avril 2010, la CSST informe le travailleur qu’il a l’autorisation pour louer un fauteuil roulant motorisé. Cette décision n’a pas fait l’objet d’une demande de révision.

[23]        Le 12 mai 2010, M. Belhumeur a rédigé un rapport de suivi suite aux recommandations émises dans son rapport du 8 février 2010. Relativement à l’entretien ménager, il confirme que le travailleur ne peut pas faire le ménage, le nettoyage et passer l’aspirateur et maintient la remarque qu’il faudra prévoir de l’aide à domicile si la mère du travailleur devenait incapable d’entretenir la maison.

[24]        Le 5 juillet 2010, à la demande de la CSST, le travailleur est examiné par le DJacques Francoeur, neurochirurgien. Le Dr Francoeur après examen confirme les diagnostics retenus par le Dr Bouvier du Bureau d’évaluation médicale, de même que la date de consolidation du Dr Bilocq à savoir le 9 avril 2010. Il conclut à l’existence d’une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique totale de 24 % à laquelle il faut soustraire des séquelles antérieures de 20 %. Enfin, le Dr Francoeur conclut, puisque le travailleur a été opéré à trois reprises à la région lombaire au niveau L5-S1, qu’il a présenté une récidive de lombosciatalgie droite et a nécessité la mise en place d’un neurostimulateur, que sa condition n’a pas été améliorée et que le travailleur nécessite l’utilisation d’une canne, d’une marchette ou d’un quadriporteur pour ses activités quotidiennes, à la présence de limitations de classe 4 de l’IRSST et il indique :

Le caractère continu de la douleur et son effet sur le comportement et sur la capacité de concentration sont incompatibles avec tout travail régulier. On peut toutefois envisager une activité dont l’individu peut contrôler lui-même le rythme et l’horaire.  [sic]

 

 

[25]        Dans une Information médicale complémentaire écrite du 28 juillet 2010, le Dr Bilocq écrit qu’il est d’accord avec les conclusions du Dr Francoeur quant à l’atteinte permanente sévère. Il se dit également en accord avec les limitations fonctionnelles émises par ce dernier.

[26]        Il appert d’une note évolutive du 17 septembre 2010 que le travailleur a été rencontré à son domicile par Mme Julie Aucoin, conseillère en réadaptation à la CSST, afin de discuter notamment des demandes d’adaptation reçues par ce dernier. Mme  Aucoin écrit relativement au quadriporteur :

En ce moment, le T a un quadriporteur autorisé en location. Suite à ses L.F. concernant les vibrations, des recommandations avaient été effectuées pour un autre modèle avec suspension avant et arrière indépendante.

Nous avons convenu avec le Centre Orthopro de louer le modèle Vita S12 pour 1 mois afin de voir si ce dernier est approprié. Ensuite, nous pourrons procéder à l’achat de ce dernier.

Le fournisseur reprendra l’ancien et livrera le nouveau. [sic]

 

 

[27]        Le 26 octobre 2010, la CSST à la suite de la demande du travailleur informe ce dernier qu’elle ne peut payer l’adaptation d’un véhicule pour un quadriporteur. Elle indique que cette adaptation n’est pas remboursable.

[28]        Le 8 novembre 2010, la CSST à la suite de la demande du travailleur l’informe qu’aucune allocation d’aide personnelle à domicile ne peut lui être versée puisqu’une telle aide n’est pas nécessaire à son maintien à domicile.           

[29]        Le 9 novembre 2010, le travailleur demande la révision de la décision rendue le 26 octobre 2010 et le 15 novembre 2010, le travailleur demande la révision de la décision rendue le 8 novembre 2010.

[30]        Le 1er décembre 2010, la CSST confirme ces deux décisions, d’où le présent litige.

[31]        Des informations se trouvant au dossier, le tribunal retient que le travailleur a subi trois interventions chirurgicales au niveau L5-S1. Les deux premières sont d’origine personnelle (lésion préexistante) et la dernière, pour lyse de pachyméningite laquelle découle d’un accident du travail survenu le 16 février 2000. À la suite d’un avis rendu par un membre du Bureau d’évaluation médicale, il a été établi que la lésion préexistante entraîne un déficit anatomo-physiologique de 10 % tandis que la lésion professionnelle du 16 février 2000 entraîne un déficit anatomo-physiologique de 13 %.

[32]        Le 12 janvier 2002, la CSST détermine que la lésion professionnelle du 16 février 2000 entraîne une atteinte permanente de 4,10 %. Cette décision est confirmée en révision administrative.

[33]        À l’audience, le travailleur a témoigné. D’abord, il explique qu’il demeure à côté d’un boisé le long d’une route de campagne, laquelle ne dispose pas de trottoirs. Le travailleur précise que l’accotement de la route est en gravier et que la route elle-même est en asphalte, mais dans un mauvais état.

[34]        Les voisins les plus proches de chez lui se situent à environ 700 pieds à l’arrière de sa maison et à sa gauche et à sa droite à environ 150 pieds.

[35]        Le dépanneur le plus proche de la résidence du travailleur se situe à environ 3,5 kilomètres et l’épicerie la plus proche est à 6 kilomètres.

[36]        Le travailleur mentionne qu’il n’a pas d’endurance à la marche et qu’il ne peut en conséquence s’y rendre à pied. Il peut toutefois s’y déplacer en quadriporteur lorsque la température le lui permet.

[37]        Après avoir fait un résumé des diverses chirurgies qu’il a subies depuis 1998 jusqu’à 2002, le travailleur explique les circonstances de son accident du travail.

[38]        Il souligne que depuis l’installation d’un neurostimulateur, il est plus agressif et impatient. Il mentionne que les limitations fonctionnelles de classe IV qui lui ont été accordées le rendent pour ainsi dire invalide.

[39]        Relativement à l’aide personnelle à domicile, le travailleur mentionne que c’est la Dre Line Jacques qui lui a prescrit cette aide et que dans le rapport du 18 février 2010, l’ergothérapeute, M. Belhumeur, n’a pas recommandé le remboursement pour de l’aide personnelle à domicile puisqu’il estimait que la mère du travailleur pouvait effectuer ce travail. Or, le travailleur mentionne qu’en février 2010, sa mère souffrait d’un début de la maladie d’Alzheimer et que depuis un an sa maladie a augmenté beaucoup. Cette maladie ne permet plus à sa mère d’effectuer des travaux domestiques.

[40]        Selon le travailleur, il ne peut faire le ménage lui-même. À cet effet, il réfère au rapport de M. Belhumeur qui confirme ce fait.

[41]        Quant au quadriporteur, le travailleur explique à l’aide d’une soumission et de photos les modifications qu’il veut faire effectuer sur son véhicule et faire rembourser par la CSST. Il s’agit d’une modification à son véhicule moteur afin d’y installer à l’arrière une plateforme mesurant 28 x 60 pouces munie d’un treuil électrique sur lequel il peut faire monter son quadriporteur.  Il explique qu’il a besoin du quadriporteur pour se déplacer et que conséquemment il a besoin de son véhicule pour pouvoir transporter le quadriporteur dans les endroits où il veut utiliser ce dernier appareil.

L’AVIS DES MEMBRES

[42]        Le membre issu des associations syndicales est d’avis qu’il y a lieu d’accueillir la requête du travailleur en application des articles 1 et 151 de la loi.

[43]        Il estime que la CSST devrait rembourser l’adaptation du véhicule du travailleur conformément aux documents décrits à l’audience.

[44]        Quant à l’aide personnelle à domicile, puisque la mère du travailleur n’est plus en mesure d’entretenir la maison et vu le témoignage non contredit du travailleur, le membre est d’avis qu’il y a lieu d’infirmer la décision de la CSST et d’accorder une allocation d’aide personnelle à domicile pour le travailleur.

[45]        Le membre issu des associations d’employeurs est pour sa part d’avis d’accueillir partiellement la demande du travailleur.

[46]        Quant à la demande d’adaptation du véhicule, il estime que les conditions de l’article 155 de la loi visant l’adaptation de véhicule ne peuvent trouver application en l’espèce. Il estime qu’il s’agit d’une disposition spécifique à l’adaptation de véhicule et qu’elle doit être interprétée restrictivement.

[47]        Par ailleurs, quant à l’aide personnelle à domicile, le membre issu des associations d’employeurs est comme le membre issu des associations syndicales d’avis de faire droit à la demande du travailleur, puisque la preuve prépondérante démontre que la mère du travailleur n’est plus en mesure d’effectuer l’entretien du domicile de ce dernier et que ce dernier n’est pas en mesure lui-même d’effectuer l’entretien, vu ses limitations fonctionnelles très importantes.

 

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[48]        La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a droit à l’adaptation de son véhicule et par ailleurs elle doit décider si le travailleur a droit à une allocation pour aide personnelle à domicile.

[49]        Le tribunal rappelle qu’une disposition spécifique de la loi vise l’adaptation du véhicule. Il s’agit de l’article 155 qui stipule :

155.  L'adaptation du véhicule principal du travailleur peut être faite si ce travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique et si cette adaptation est nécessaire, du fait de sa lésion professionnelle, pour le rendre capable de conduire lui-même ce véhicule ou pour lui permettre d'y avoir accès.

__________

1985, c. 6, a. 155.

 

 

[50]        Comme mentionné par le membre issu des associations d’employeurs, cette disposition est spécifique et vise les adaptations nécessaires « pour rendre le travailleur capable de conduire lui-même ce véhicule ou pour lui permettre d’y avoir accès ».

[51]        À ce sujet, le tribunal fait siens les propos suivants faits dans l’affaire Duhaime et Lalavum S.E.C (Faillite)[4] :

[76]      L’article 155 de la loi permet l’adaptation d’un véhicule afin de rendre le travailleur « capable de conduire lui-même le véhicule ou pour lui permettre d’y avoir accès ».

 

[77]      De l’avis du tribunal, l’adaptation d’un véhicule peut consister par exemple, à l’installation d’une transmission automatique sur un véhicule muni d’une transmission manuelle ou encore de l’installation de différents aides à la conduite qui permettent au travailleur, malgré son handicap, de conduire son véhicule.

 

[78]      C’est ainsi que la jurisprudence a reconnu les demandes de travailleurs, en fonction de leurs handicaps respectifs, à l’installation de divers aides à la conduite ou de modification aux systèmes existants, tels :

 

-           un mécanisme de démarrage à distance, un mécanisme de motorisation des glaces et la relocalisation de ce système4;

 

-           une barre d’appui et un marchepied5;

 

-           un toit de fibre de verre et d'un système permettant de soulever ce toit pour sortir le fauteuil électrique ou le triporteur du camion6;

 

-           un siège orthopédique pivotant7.

 

[79]      Bien que le travailleur ait le droit à des mesures qui lui procurent un véhicule adapté à sa capacité résiduelle, au terme de l’article 152 (2°) de la loi, encore faut-il qu’il y ait « adaptation » dudit véhicule.

 

[80]      La loi ne définit pas le sens à donner à l’expression « adaptation ». Le dictionnaire Petit Robert8, donne les définitions suivantes :

 

Adaptation : n.f.  1° Action d’adapter ou de s’adapter, modification qui en résulte.

 

Adapter : v.tr. 1° Réunir, appliquer après ajustement. […] 2° Fig. Approprier, mettre en harmonie avec.

 

 

[81]      Le Petit Larousse illustré9 propose les définitions suivantes :

 

Adaptation : n.f. 1. Action d’adapter, fait de s’adapter ; état qui en résulte.

 

Adapter : v.t. 1. Appliquer, ajuster ; mettre en accord ; approprier. Adapter un robinet à un tuyau.

 

 

[82]      L’article 155 de la loi parle de l’adaptation du véhicule. Les articles 156 et 157 de la loi spécifient les conditions d’autorisation et de la prise en charge par la CSST du coût « des travaux d’adaptation du domicile ou du véhicule ».

 

[83]      De l’avis du tribunal, pour qu’il y ait adaptation du véhicule au sens de ces articles, il doit y avoir des travaux de cette nature sur les composantes initiales d’un véhicule, pour en changer les attributs, et faire en sorte de respecter la capacité fonctionnelle du travailleur.

_____________________

 

4.             Morin et Lefèvre et Frères ltée. C.L.P. 130982-63-0001, 22 janvier 2001, M.-R. Pelletier

5.             Comtois et Garderie éducative Mimi Pinson inc., C.L.P.188255-62-0207, 29 septembre 2003, révision rejetée 3 août 2004, B. Roy ; Coulombe et Construction F.A.K. inc., C.L.P. 251972 62B 0412, 30 mars 2006, M.-D. Lampron

6.             Desnoyers et Laurier Desnoyers (fermé), C.L.P. 309524-64-0702, 2 mars 2007, M. Montplaisir

7.             Vézina et R.D.H.C.C. - Direction Travail, C.L.P. 296892-04B-0608, 19 décembre 2007, révision rejetée 10 juillet 2008, A. Suicco

8.             Le petit Robert 1 : dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, Le Robert, 1977, 2173 p.

9.             Le petit Larousse illustré 2000, Paris, Larousse, 1999, 1787 p.

 

[le soulignement est du présent tribunal]

 

 

[52]        En l’espèce, ce n’est pas pour rendre le travailleur capable de conduire lui-même son véhicule ou pour lui permettre d’y avoir accès que la demande est faite, mais plutôt pour qu’on installe une plateforme à son véhicule principal pour transporter le quadriporteur dans les endroits où le travailleur voudrait utiliser ce dernier appareil.

[53]        La demande du travailleur ne vise donc pas de le rendre capable de conduire son véhicule principal ou d’y avoir accès, ce qui est déjà le cas en l’espèce, mais à modifier ce véhicule pour lui permettre de transporter son quadriporteur.

[54]        À l’évidence, l’article 155 ne vise pas ce type de demande et conséquemment la CSST était en droit de refuser la demande du travailleur sur cette base.

[55]        Sur la question du remboursement des frais de modification d’un véhicule pour le transport d’un quadriporteur, le représentant du travailleur a soumis l’affaire Lahaie Lebrun et CHSLD Chevalier de Lévis et CSST[5] qui conclut au remboursement sur la base de la maxime de « l’accessoire, suit le principal ». Avec respect, le tribunal ne peut adhérer à ce raisonnement et souligne que cette décision est isolée.

[56]        Par ailleurs, quant à l’aide personnelle à domicile, le tribunal est d’avis comme les membres issus des associations syndicales et des associations patronales de faire droit à la demande du travailleur.

[57]        Ils estiment en effet que la preuve prépondérante démontre que la décision de refuser l’aide personnelle à domicile est basée sur le rapport de l’ergothérapeute  Belhumeur qui concluait en février 2010 que le travailleur n’avait pas besoin d’une telle aide puisque sa mère était en mesure de faire les travaux domestiques pour le travailleur. Toutefois, ce dernier concluait qu’il faudrait réévaluer cette demande si la mère du travailleur devenait incapable de faire le ménage.

[58]        Rappelons que l’aide personnelle à domicile est visée par les articles 158 et 159 de la loi :

158.  L'aide personnelle à domicile peut être accordée à un travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, est incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement, si cette aide s'avère nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.

__________

1985, c. 6, a. 158.

 

 

159.  L'aide personnelle à domicile comprend les frais d'engagement d'une personne pour aider le travailleur à prendre soin de lui-même et pour effectuer les tâches domestiques que le travailleur effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion.

 

Cette personne peut être le conjoint du travailleur.

__________

1985, c. 6, a. 159.  

 

[59]        En l’espèce, la preuve non contredite démontre que la mère du travailleur est atteinte de la maladie d’Alzheimer et qu’elle est devenue incapable d’effectuer le ménage. La preuve révèle par ailleurs que le travailleur est lui-même incapable d’effectuer les travaux d’entretien courant du domicile en raison des limitations fonctionnelles importantes dont il est porteur.

[60]        Puisque l’aide personnelle est nécessaire à son maintien à domicile et vu les recommandations de l’ergothérapeute, le tribunal est d’opinion qu’il y a lieu de lui accorder de l’aide personnelle à domicile.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE en partie la requête du travailleur, M. Gaétan Lajoie;

MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 1er décembre 2010 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit à l’adaptation du véhicule, en ce qui concerne l’installation d’une plateforme pour un quadriporteur;

DÉCLARE que le travailleur a doit à une allocation pour l’aide personnelle à domicile.

 

 

__________________________________

 

J. André Tremblay

 

 

 

Steve Rivest

UNION DEUX MÉTIERS (U2M)

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Fannie Nepton

ASSOCIATION DE LA CONSTRUCTION DU QUÉBEC

Représentante de la partie intéressée

 

 

Me Annie Veillette

VIGNEAULT THIBODEAU BERGERON

Représentante de la partie intervenante

 



[1]           L.R.Q., C. A-3.001.

[2]           Dossier : 344357-04-0804.

[3]           Dossier : 356159-04-0808.

[4]           C.L.P., 348771-04-0805, 25 septembre 2008, M. Watkins.

[5]           C.L.P. 197412-62-0301, 10 juillet 2003, S. Mathieu.

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