Savoie et Produits forestiers Saucier |
2009 QCCLP 6045 |
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[2] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 13 janvier 2009 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement du coût des traitements de massothérapie.
[3] Une audience se tient à Val-d'Or le 4 juin 2009 à laquelle assiste le travailleur.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit au remboursement du coût des traitements de massothérapie.
LES FAITS
[5] Le travailleur est journalier chez Produits forestiers Saucier (l’employeur).
[6] Le 1er juin 1978, il subit une lésion professionnelle au moment où son pied gauche est écrasé par un chariot élévateur. Il subit des fractures aux deuxième, troisième et quatrième orteils du pied gauche. La nécrose s’installe aux sites lésés. Le 19 juin 1978, le docteur Comeau procède à une amputation au niveau métatarso-phalangien des trois orteils.
[7] Le 8 juin 1983, le travailleur subit une révision d’amputation trans-métatarsienne. Les structures plantaires du pied gauche sont relevées et rattachées par ténodèse.
[8] À compter du mois de mai 1994, les diagnostics de lombosciatalgie et de lombalgie chronique sont retenus en relation avec la lésion professionnelle initiale. Ces diagnostics font l’objet d’une consolidation le 23 mai 1994 et le travailleur en conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique et des limitations fonctionnelles.
[9] Le travailleur est hospitalisé le 22 août 1994. Il subit l’exérèse du système de stimulation à la suite d’une réaction de l’organisme au corps étranger.
[10] Un autre rapport final est complété le 17 janvier 1995. La lombalgie chronique est consolidée au 12 septembre 1994 avec atteinte permanente à l’intégrité physique et limitations fonctionnelles. Un support lombaire est prescrit.
[11] Le 19 octobre 1999, le travailleur consulte pour des douleurs lombaires irradiant à la fesse gauche.
[12] Le 3 novembre 1999, le retour au travail régulier est autorisé.
[13] Le 23 mars 2000, le docteur Biron rapporte que le travailleur présente des lombalgies récurrentes ayant l’allure de subluxation. Le travailleur prétend que ces malaises sont présents depuis l’implantation d’électrodes à la région lombaire.
[14] Le 11 avril 2001, la Commission des lésions professionnelles reconnaît que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 19 octobre 1999. Elle accepte que l’altération physiologique consécutive à l’amputation de trois orteils du pied gauche est susceptible de causer des problèmes lombaires du type de ceux identifiés par les médecins du travailleur.
[15] Le 23 janvier 2005, le travailleur subit une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale. Il conserve de cette lésion une nouvelle atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique.
[16] Le 18 octobre 2006, le docteur Maurais pose le diagnostic de discopathie L5-S1. Il indique que le travailleur est en attente d’une discographie lombaire. La CSST refuse de reconnaître que le travailleur a subi une rechute, récidive ou aggravation à cette date. Elle motive sa décision par l’absence de détérioration objective de l’état de santé du travailleur. Elle invite toutefois ce dernier à produire une réclamation après la fusion recommandée par le docteur Maurais.
[17] Le 8 janvier 2007, le docteur Maurais pose le diagnostic d’instabilité lombaire. Il recommande une fusion lombaire.
[18] Le 29 mai 2007, le travailleur subit une fusion lombaire postérieure L4-S1 avec instrumentation pour traiter une instabilité lombaire.
[19] Le 1er juin 2007, la CSST accueille la réclamation du travailleur. Elle déclare qu’il y a relation entre la fusion lombaire et la lésion professionnelle subie le 1er juin 1978.
[20] Le 1er novembre 2007, la Commission des lésions professionnelles déclare que le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation le 18 octobre 2006 de sa lésion professionnelle initiale survenue le 1er juin 1978.
[21] Le 1er décembre 2008, le docteur Maurais prescrit au travailleur des traitements de massothérapie.
[22] Ceux-ci débutent le 5 décembre 2008 à raison d’un traitement par semaine. Le travailleur demande à la CSST le remboursement de ces traitements.
[23] Le 13 janvier 2009, la CSST déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement du coût des traitements de massothérapie. Le travailleur demande la révision de cette décision.
[24] Le 30 mars 2009, à la suite d’une révision administrative, la CSST confirme sa décision du 13 janvier 2009. Le travailleur conteste cette décision devant la Commission des lésions professionnelles.
[25] À l’audience, le travailleur déclare que les traitements de massothérapie lui font du bien. Ceux-ci activent la circulation sanguine et soulagent ses maux de dos et de jambes.
[26] Les traitements de massothérapie lui permettent aussi de diminuer sa consommation de médicaments.
[27] Avant le début de ses traitements de massothérapie, le travailleur a eu des traitements de physiothérapie. Ceux-ci augmentaient ses douleurs.
L’AVIS DES MEMBRES
[28] Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont tous les deux d’avis que la requête du travailleur doit être accueillie.
[29] Ils retiennent de la preuve que les traitements de massothérapie sont prescrits par son médecin, qu’ils sont utiles et qu’ils permettent au travailleur de diminuer sa consommation de médicaments.
[30] La CSST a donc l’obligation de rembourser au travailleur le coût des traitements de massothérapie.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[31] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a droit au remboursement du coût des traitements de massothérapie.
[32] Afin de disposer de l’objet de la contestation, la Commission des lésions professionnelles réfère aux dispositions suivantes de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) :
1. La présente loi a pour objet la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires.
Le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d'une lésion, la réadaptation physique, sociale et professionnelle du travailleur victime d'une lésion, le paiement d'indemnités de remplacement du revenu, d'indemnités pour préjudice corporel et, le cas échéant, d'indemnités de décès.
La présente loi confère en outre, dans les limites prévues au chapitre VII, le droit au retour au travail du travailleur victime d'une lésion professionnelle.
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1985, c. 6, a. 1; 1999, c. 40, a. 4.
184. La Commission peut:
[…]
5° prendre toute mesure qu'elle estime utile pour atténuer ou faire disparaître les conséquences d'une lésion professionnelle.
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1985, c. 6, a. 184.
188. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.
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1985, c. 6, a. 188.
189. L'assistance médicale consiste en ce qui suit :
1° les services de professionnels de la santé;
2° les soins ou les traitements fournis par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5);
3° les médicaments et autres produits pharmaceutiques;
4° les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons et la disposition des cadavres (chapitre L-0.2), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;
5° les soins, les traitements, les aides techniques et les frais non visés aux paragraphes 1° à 4° que la Commission détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.
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1985, c. 6, a. 189; 1992, c. 11, a. 8; 1994, c. 23, a. 23; 1999, c. 89, a. 53; 2001, c. 60, a. 166.
[33] La Commission des lésions professionnelles retient de la preuve que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 1er juin 1978.
[34] De cette lésion, le travailleur a subi plusieurs récidives, rechutes ou aggravations dont la dernière le 1er juin 2007.
[35] Le 1er décembre 2008, le docteur Maurais prescrit au travailleur des traitements de massothérapie. Ceux-ci débutent le 5 décembre 2008 à raison d’un traitement par semaine.
[36] À l’audience, le travailleur déclare que les traitements de massothérapie lui font du bien. Ils lui permettent aussi de diminuer sa consommation de médicaments. Avant le début de ses traitements de massothérapie, le travailleur a eu des traitements de physiothérapie. Ceux-ci augmentaient ses douleurs.
[37] La Commission des lésions professionnelles considère que les traitements de massothérapie prescrits par le docteur Maurais sont directement reliés aux lésions que le travailleur a subies et qu’ils ont pour but d’en atténuer les conséquences sur sa vie personnelle et professionnelle. Il ne fait aucun doute qu’en vertu de l’article 188 de la loi, le travailleur a droit à cette assistance médicale et au remboursement des coûts déjà encourus pour recevoir ces traitements.
[38] La Commission des lésions professionnelles retient aussi de la preuve non contredite que les traitements de massothérapie procurent au travailleur un soulagement de ses symptômes au point qu’ils ont permis la diminution de la consommation de médicaments.
[39] De plus, la CSST aurait pu, en vertu de l’article 184 alinéa 5 de la loi, autoriser les traitements de massothérapie puisque les traitements de physiothérapie n’apportent pas au travailleur le soulagement escompté. Elle aurait ainsi contribué à atténuer ou faire disparaître les conséquences des lésions professionnelles du travailleur, tel que la loi le prévoit.
[40] En conséquence, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur satisfait à toutes les conditions exigées par la loi et qu’il a droit au remboursement du coût des traitements de massothérapie.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête de monsieur Denis Savoie, le travailleur;
INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 30 mars 2009 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement du coût des traitements de massothérapie.
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Fernand Daigneault |
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