Décision

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Larose et Jardins du Haut St-Laurent

2008 QCCLP 1890

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Lévis

27 mars 2008

 

Région :

Chaudière-Appalaches

 

Dossier :

307626-03B-0612

 

Dossier CSST :

129958310

 

Commissaire :

Robert Deraiche, avocat

 

Membres :

Claude Jacques, associations d’employeurs

 

Yves Poulin, associations syndicales

 

 

Assesseur :

Marc-André Bergeron, médecin

______________________________________________________________________

 

 

 

Jean-Guy Larose

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Jardins du Haut St-Laurent

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 28 décembre 2006, monsieur Jean-Guy Larose (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 20 novembre 2006 à la suite d'une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme celle qu'elle a initialement rendue le 23 août 2006 et déclare que le travailleur n'a pas subi de lésion professionnelle le 20 mars 2006.

[3]                L'audience s'est tenue le 18 mars 2008, à Lévis, en présence du travailleur. Les Jardins du Haut Saint-Laurent (l'employeur) était également représenté.

 

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître qu'il a subi une lésion professionnelle le 20 mars 2006, soit une aggravation d’une dépression sévère.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[5]                Les membres issus des associations des employeurs et des associations syndicales, après avoir été consultés sur les questions en litige, sont d'avis de rejeter la requête en contestation du travailleur aux motifs suivants.

[6]                Premièrement, en regard des commentaires du représentant de l’employeur portant sur l’absence de rapport médical et la production tardive de la réclamation du travailleur, ils en disposeraient comme suit.

[7]                Concernant la non-production d’un rapport médical sous la forme prévue à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), ils considèrent que dès le dépôt du billet médical émis par la docteure Meilleur et de la réclamation du travailleur, l’employeur était en mesure de savoir quel était le diagnostic et il pouvait faire expertiser le travailleur. L’employeur ne peut prétendre être pris par surprise, d’autant plus que la réclamation du travailleur a été rejetée et qu’il y avait eu dépôt des notes médicales du médecin traitant au dossier. Ce moyen serait donc rejeté.

[8]                Quant à la production tardive de la réclamation du travailleur, ils considèrent que le travailleur était déjà dans un état dépressif lorsqu’il a engagé des frais de thérapie psychologique. Ils considèrent donc qu’il est difficile de trancher sur cette seule question, à savoir si les frais engagés l’ont été, soit pour la dépression existante, soit pour l’aggravation de celle-ci.

[9]                Deuxièmement, en regard du fond de la requête du travailleur, ils considèrent que ce dernier n’a pas fait la preuve d’un harcèlement dirigé contre lui. En effet, les faits reprochés à l’employeur relèvent soit de la gestion du personnel, soit d’erreurs qui ont été corrigées lorsque l’employeur a été mis au courant de la situation. Bien que certaines situations décrites puissent être irritantes, ils considèrent que ces situations n’ont pas été orchestrées dans le but de nuire ou de harceler le travailleur. Ils sont donc d’avis de rejeter la requête du travailleur.

 

LES FAITS ET LES MOTIFS

[10]           La Commission des lésions professionnelles, après avoir analysé la preuve documentaire apparaissant au dossier et celle déposée par les parties, avoir entendu les témoignages et avoir consulté ses membres, rend la présente décision.

[11]           En premier lieu, il convient de disposer des moyens d’irrecevabilité soumis par l’employeur. Ainsi, il est allégué deux moyens d’irrecevabilité, soit l’absence d’un rapport médical à être émis à la CSST et la production tardive de la réclamation du travailleur.

[12]           Concernant ces questions, la loi prévoit en regard de la question médicale les dispositions suivantes :

199.  Le médecin qui, le premier, prend charge d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle doit remettre sans délai à celui-ci, sur le formulaire prescrit par la Commission, une attestation comportant le diagnostic et :

 

1° s'il prévoit que la lésion professionnelle du travailleur sera consolidée dans les 14 jours complets suivant la date où il est devenu incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, la date prévisible de consolidation de cette lésion; ou

 

2° s'il prévoit que la lésion professionnelle du travailleur sera consolidée plus de 14 jours complets après la date où il est devenu incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, la période prévisible de consolidation de cette lésion.

 

Cependant, si le travailleur n'est pas en mesure de choisir le médecin qui, le premier, en prend charge, il peut, aussitôt qu'il est en mesure de le faire, choisir un autre médecin qui en aura charge et qui doit alors, à la demande du travailleur, lui remettre l'attestation prévue par le premier alinéa.

__________

1985, c. 6, a. 199.

 

267.  Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui le rend incapable d'exercer son emploi au-delà de la journée au cours de laquelle s'est manifestée sa lésion doit remettre à son employeur l'attestation médicale prévue par l'article 199 .

 

Si aucun employeur n'est tenu de verser un salaire à ce travailleur en vertu de l'article 60, celui-ci remet cette attestation à la Commission.

__________

1985, c. 6, a. 267.

269.  L'employeur transmet à la Commission le formulaire prévu par l'article 268, accompagné d'une copie de l'attestation médicale prévue par l'article 199, dans les deux jours suivant :

 

1° la date du retour au travail du travailleur, si celui-ci revient au travail dans les 14 jours complets suivant le début de son incapacité d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle; ou

 

2° les 14 jours complets suivant le début de l'incapacité du travailleur d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle, si le travailleur n'est pas revenu au travail à la fin de cette période.

 

Il remet au travailleur copie de ce formulaire dûment rempli et signé.

__________

1985, c. 6, a. 269.

 

 

200.  Dans le cas prévu par le paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 199, le médecin qui a charge du travailleur doit de plus expédier à la Commission, dans les six jours de son premier examen, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport sommaire comportant notamment :

 

1° la date de l'accident du travail;

 

2° le diagnostic principal et les renseignements complémentaires pertinents;

 

3° la période prévisible de consolidation de la lésion professionnelle;

 

4° le fait que le travailleur est en attente de traitements de physiothérapie ou d'ergothérapie ou en attente d'hospitalisation ou le fait qu'il reçoit de tels traitements ou qu'il est hospitalisé;

 

5° dans la mesure où il peut se prononcer à cet égard, la possibilité que des séquelles permanentes subsistent.

 

Il en est de même pour tout médecin qui en aura charge subséquemment.

__________

1985, c. 6, a. 200.

 

 

202.  Dans les 10 jours de la réception d'une demande de la Commission à cet effet, le médecin qui a charge du travailleur doit fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport qui comporte les précisions qu'elle requiert sur un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 .

__________

1985, c. 6, a. 202; 1992, c. 11, a. 12.

 

 

203.  Dans le cas du paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 199, si le travailleur a subi une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique, et dans le cas du paragraphe 2° du premier alinéa de cet article, le médecin qui a charge du travailleur expédie à la Commission, dès que la lésion professionnelle de celui-ci est consolidée, un rapport final, sur un formulaire qu'elle prescrit à cette fin.

 

Ce rapport indique notamment la date de consolidation de la lésion et, le cas échéant :

 

1° le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur d'après le barème des indemnités pour préjudice corporel adopté par règlement;

 

2° la description des limitations fonctionnelles du travailleur résultant de sa lésion;

 

3° l'aggravation des limitations fonctionnelles antérieures à celles qui résultent de la lésion.

 

Le médecin qui a charge du travailleur l'informe sans délai du contenu de son rapport.

__________

1985, c. 6, a. 203; 1999, c. 40, a. 4.

 

 

204.  La Commission peut exiger d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle qu'il se soumette à l'examen du professionnel de la santé qu'elle désigne, pour obtenir un rapport écrit de celui-ci sur toute question relative à la lésion. Le travailleur doit se soumettre à cet examen.

 

La Commission assume le coût de cet examen et les dépenses qu'engage le travailleur pour s'y rendre selon les normes et les montants qu'elle détermine en vertu de l'article 115 .

__________

1985, c. 6, a. 204; 1992, c. 11, a. 13.

 

 

212.  L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la Commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l'attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s'il obtient un rapport d'un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l'un ou plusieurs des sujets suivants :

 

1° le diagnostic;

 

2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;

 

3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;

 

4° l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur;

 

5° l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.

 

L'employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l'attestation ou du rapport qu'il désire contester.

__________

1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.

 

 

 

 

224.  Aux fins de rendre une décision en vertu de la présente loi, et sous réserve de l'article 224.1, la Commission est liée par le diagnostic et les autres conclusions établis par le médecin qui a charge du travailleur relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 .

__________

1985, c. 6, a. 224; 1992, c. 11, a. 26.

 

 

353.  Aucune procédure faite en vertu de la présente loi ne doit être rejetée pour vice de forme ou irrégularité.

__________

1985, c. 6, a. 353; 1999, c. 40, a. 4.

 

 

[13]           Comme on peut le constater, il appert que les informations médicales sont nécessaires au traitement du dossier en accident du travail. Dans le présent cas, monsieur Larose consulte son médecin le 20 mars 2006. À ce moment, la docteure Meilleur recommande un arrêt de travail pour une période de 4 mois pour un diagnostic d’aggravation d’une dépression, et ce dans le cadre d’une demande de prestations d’assurance-chômage-maladie. Un autre billet indique la médication prescrite.

[14]           Le travailleur recevra effectivement des prestations d’assurance-emploi-maladie. À la fin de cette période, il produit une réclamation du travailleur et soumet les billets médicaux qui ont été émis pour sa demande de prestations d’assurance-emploi-maladie. La CSST traitera le dossier du travailleur et, le 20 juillet 2006, une attestation médicale pour la CSST sera demandée au travailleur.

[15]           Cette demande restera lettre morte puisque le travailleur croyait erronément que c’était à l’employeur de lui fournir les formulaires.

[16]           Lors de l’audience, le tribunal a expliqué au travailleur les conséquences de ne pas avoir cette attestation médicale. De plus, un délai a été offert pour qu’il puisse produire le document. Le travailleur a décliné l’invitation du tribunal.

[17]           Ceci constitue l’essentiel de la preuve et elle amène les conclusions suivantes.

[18]           Premièrement, comme le mentionnait le commissaire Martel dans une décision[2] traitant de cette question :

[21]      Dès l’ouverture d’un dossier à la suite du dépôt d’une réclamation, l’Attestation médicale initiale et le premier rapport du médecin traitant fournissent des informations cruciales pour les parties en cause : d’abord préciser la date à laquelle le fait accidentel allégué est survenu, ensuite identifier la nature de la lésion (c’est le diagnostic), justifier l’absence du travail et en fixer la durée, prévoir la période de consolidation de la lésion, annoncer un plan de traitement et même, si possible, faire un pronostic quant à d’éventuelles séquelles permanentes.  Il ne s’agit donc pas d’une exigence de pure forme à laquelle on peut passer outre comme en matière procédurale, selon l’article 353 de la loi.  Au contraire, étant donné que les droits et recours dont tous les intéressés pourront se prévaloir conformément à la loi dépendent largement des informations médicales livrées dès le début du dossier, les documents médicaux d’ouverture représentent une condition de fond substantielle et indispensable à l’exercice du droit de réclamer.

 

 

[19]           Effectivement, l’objet de cette disposition est de fournir le minimum d’information médicale pour permettre d’une part à la CSST de prendre en charge le dossier et de rendre les décisions nécessaires, notamment celle de l’admissibilité. D’autre part, l’information est aussi transmise à l’employeur qui peut ainsi réagir en émettant ses commentaires ou en faisant expertiser le travailleur, le cas échéant.

[20]           Or, dans le présent dossier, il apparaît aux billets médicaux fournis à l’employeur les informations suivantes :

·         Le diagnostic, soit une aggravation d’une dépression sévère;

·         La période d’arrêt, soit quatre mois;

·        Le traitement médical.

 

 

[21]           Ainsi, les informations médicales pour effectuer le traitement de la réclamation du travailleur étaient connues.

[22]           Deuxièmement, la seule stipulation non respectée qui est prévue à l’article 199 de la loi, est celle de ne pas avoir soumis sur le formulaire prescrit par la Commission les informations médicales. Or, cette obligation n’est pas fatale à l’analyse d’une réclamation du travailleur et à son acceptation le cas échéant. En effet, ce n’est qu’une question procédurale que l’article 353 de la loi permet de disposer et concluant que ce vice de procédure n’est pas fatal.

[23]           Troisièmement, la CSST a tout de même traité le dossier. En effet, il appert au dossier que cette dernière s’est enquis auprès du médecin traitant afin qu’elle lui transmette ses notes médicales contemporaines, ce qui fut fait. De plus, deux expertises de nature psychologique ont été déposées à la CSST.

[24]           En résumé, l’employeur ne peut plaider être pris par surprise sur le volet médical du dossier. puisque toutes les informations médicales requises par la loi étaient disponibles et déposées au dossier de monsieur Larose.

[25]           Par contre, comme le soussigné l’écrivait dans une de ses décisions :

[11]      Il appert donc de la preuve déposée que le médecin traitant de Madame Lalancette ne veut pas compléter le formulaire prévu à la loi. Selon les explications données par ce dernier, il semble qu'il ne relie pas la lésion psychologique de Madame Lalancette à un ou des événements survenus au travail. Or, la relation entre une maladie et le travail est une question à compétence exclusive du tribunal2.

 

[12]      Le médecin traitant refuse donc de compléter une attestation et un rapport médical tout en mentionnant que le diagnostic retenu est une dépression majeure versus trouble de l’adaptation avec humeur dépressive. Le tribunal considère donc que la preuve médicale démontre que Madame Lalancette est atteinte d'une lésion à caractère psychologique, ce qui constitue un diagnostic au sens de l'article 199 de la loi.

 

[13]      À cet effet, le tribunal se réfère à certaines décisions qui établissent qu'une travailleuse ne peut se voir refuser le droit de voir sa réclamation acceptée pour une lésion professionnelle, et ce, même si le médecin traitant refuse d'émettre une attestation médicale3. En effet, le médecin traitant doit fournir l'attestation médicale et le fait qu'il ne le fasse pas ainsi que les conséquences de ce geste ne peuvent être imputées à la travailleuse puisque le médecin est un tiers.

 

[14]      Le cas serait différent si aucun diagnostic n'avait été émis par le médecin traitant ce qui n'est pas le cas ici.

 

[15]      Par contre, la travailleuse doit prendre conscience du fardeau de preuve qui sera sien. En effet, son propre médecin ne relie pas sa maladie au travail. Il est important dans un litige que le volet médical permette d'appuyer la preuve factuelle, ce qui constitue la prépondérance de la preuve qu'il y relation entre la maladie et le travail. Or, dans le présent dossier, cette preuve médicale est presque inexistante quant au lien entre la maladie et le travail.

 

[16]      De plus, le défaut du médecin qui a charge de la travailleuse de lui remettre l'attestation médicale prévue à l'article 199, bien que ne la privant pas de son droit de faire une réclamation à la CSST, empêche cette dernière d'exiger de son employeur le versement de son salaire conformément à l'article 60 de la loi4.

 

_______________________________

 

2.             Garage Rousseau et Fils Ltée c. CLP et CSST et Martial Bouchard, C.S. 155-17-000002-044, le 13 juillet 2004.

3.             Cie de papier Québec et Ontario Ltée et Fortin (1990) CALP 1153 ; Philippe McKay et Héroux Inc., CALP 01569-62-8612, le 6 juin 1989, commissaire Réal Brassard.

4.            Supra note 3.

 

 

[26]           Tel que mentionné lors de l’audience, le fait que le travailleur refuse de compléter son dossier en déposant la preuve médicale permettant d’établir la relation entre les allégués du travailleur et la lésion, a un impact important sur l’issu du litige.

[27]           Concernant la deuxième requête en irrecevabilité déposée par l’employeur, soit la production tardive de la réclamation du travailleur, les dispositions suivantes s’appliquent :

 

272.  Le travailleur atteint d'une maladie professionnelle ou, s'il en décède, le bénéficiaire, produit sa réclamation à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, dans les six mois de la date où il est porté à la connaissance du travailleur ou du bénéficiaire que le travailleur est atteint d'une maladie professionnelle ou qu'il en est décédé, selon le cas.

Ce formulaire porte notamment sur les nom et adresse de chaque employeur pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle.

 

La Commission transmet copie de ce formulaire à chacun des employeurs dont le nom y apparaît.

__________

1985, c. 6, a. 272.

 

 

[28]           Par contre, la loi prévoit qu’un motif raisonnable permet à la personne ayant produit une réclamation après six mois de la connaissance du travailleur de la maladie professionnelle, d’être relevée de son défaut d’avoir respecté ce délai. Ainsi :

352.  La Commission prolonge un délai que la présente loi accorde pour l'exercice d'un droit ou relève une personne des conséquences de son défaut de le respecter, lorsque la personne démontre un motif raisonnable pour expliquer son retard.

__________

1985, c. 6, a. 352.

 

 

[29]           L’employeur allègue que le travailleur savait lors de son expertise du 31 juillet 2002 qu’il y a avait une relation entre le travail et sa condition psychologique. À cet effet, il réfère à l’expertise psychiatrique de la docteure Soulières qui écrit à l’histoire de la maladie actuelle ce qui suit :

À tout cela, se sont greffées l’an dernier des négociations syndicales, une situation avec l’employeur l’ayant affecté au point où monsieur a l’impression que c’est cela qui a déclenché la chute dépressive.

 

(…)

 

IMPRESSION DIAGNOSTIQUE

 

Axe I : Épisode dépressif majeur en rémission. Possibilité de séquelles cognitives de type difficulté de concentration et de mémoire reliées à une commotion cérébrale versus reliées avec des sentiments d’anxiété. Je n’élimine par ailleurs pas actuellement une certaine contribution de l’Effexor au fait que la concentration est toujours perturbée.

 

Axe II : Pas d’évidence de trouble de personnalité.

 

Axe III : Status post ancienne commotion.

 

Axe IV : Stresseurs : il y a eu la dernière année certaines difficulté au niveau de l’organisation au travail et au niveau syndical.

 

Axe V : Son échelle de fonctionnement est actuellement relativement bonne et est évaluée aux environ de 75 à 80. (sic)

[30]           Interrogé par le tribunal, le travailleur dira qu’il s’est payé des traitements psychologiques de 2002 à 2004.

[31]           Concernant la requête en irrecevabilité présentée par l’employeur en regard de la présentation tardive de la réclamation du travailleur, il y a lieu de relever le travailleur de ce défaut puisqu’il a présenté un motif raisonnable.

[32]           En effet, le travailleur n’invoque pas que sa dépression a été causée par du harcèlement au travail mais bien que cette pathologie a été aggravée par du harcèlement survenu au travail.

[33]           C’est donc dire que le travailleur se faisait soigner en payant des traitements psychologiques. Il est difficile de départager les coûts relatifs à l’aggravation et ceux déboursés dans le cadre des soins reliés à la dépression.

[34]           Il faut donc rejeter cette requête en irrecevabilité.

[35]           Ceci étant dit, le tribunal doit décider si la lésion de monsieur Larose, diagnostiquée comme étant une aggravation d’une dépression, en est une d'ordre professionnel au sens de la loi.

[36]           La loi donne, à l'article 2, la définition des termes suivants :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:

 

« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27.

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27.

 

« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27.

 

LES PRÉSOMPTIONS DE LA LOI

 

[37]           Afin de faciliter le fardeau de preuve du travailleur en regard de la relation nécessaire entre les événements et la lésion diagnostiquée, le législateur a édicté certaines présomptions. Lorsque les éléments constituant la présomption sont démontrés, cette dernière s'applique, sous réserve d'être renversée par la preuve. Ainsi :

28. Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 28.

 

29. Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.

 

Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.

__________

1985, c. 6, a. 29.

 

 

[38]           En regard de la présomption prévue à l'article 28, la jurisprudence élaborée par ce tribunal concernant les diagnostics de lésions à caractère psychologique est majoritaire pour conclure que le travailleur ne peut bénéficier de celle-ci, puisque ce diagnostic ne constitue pas une blessure. En effet, la définition usuelle de blessure prévoit qu'il doit y avoir une atteinte des tissus vivants par un agent vulnérant extérieur. Un des éléments prévus à la présomption étant absent, le travailleur ne peut donc bénéficier de celle-ci.

[39]           En regard de la présomption énoncée à l'article 29, la loi prévoit que la maladie doit en être une qui apparaît à l'annexe I de la loi. Or, la pathologie affectant le travailleur n'est pas énumérée à la liste des maladies de cette annexe, ce qui empêche l'application cette présomption.

 

LES DÉFINITIONS

L'accident du travail et maladie professionnelle

[40]           Les présomptions prévues aux articles 28 et 29 de la loi ne s’appliquant pas aux cas de lésions à caractère psychologique, la preuve des éléments constitutifs de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle doit donc être faite par le travailleur, et ce, par prépondérance de preuve.

[41]           Le travailleur pourra voir sa réclamation acceptée s'il démontre les éléments apparaissant aux définitions mentionnées ci-haut.

[42]           Dans une décision[3] de la commissaire Guylaine Tardif, cette dernière fait une étude de la jurisprudence en matière de lésion à caractère psychologique. Selon cette étude, les critères suivants sont retenus pour l'analyse du type de lésion psychologique :

1.         Dans un premier temps, il s’agira de déterminer la disposition de la loi applicable. Ainsi, le dossier sera traité, soit comme étant :

1.1       Une récidive, rechute ou aggravation selon la définition d'une lésion professionnelle, lorsque le diagnostic émis de nature psychologique est en relation avec la lésion professionnelle initiale. Le fardeau de preuve sera celui de la prépondérance de la preuve médicale tel qu’établi par ce tribunal, notamment dans l'affaire Boisvert[4].

1.2       La notion d’un accident du travail sera retenue lorsque la preuve démontrera des circonstances inhabituelles, ponctuelles et limitées dans le temps.

1.3       La notion de maladie professionnelle sera retenue lorsqu’une maladie se développe à la suite de l’exposition à des agents stressants généralement présents dans le milieu de travail[5].

2.         Quant au fardeau de preuve se rattachant à la disposition de la loi, le travailleur devra établir les faits traumatisants qui ont conduit au développement de sa pathologie psychologique[6] et ce, de façon prépondérante. Ainsi :

2.1             Lorsqu’une lésion de nature psychologique se développe autour des relations de travail, c'est-à-dire celles concernant les liens de subordination et celles des relations interpersonnelles entre les individus impliqués, il s'agira de déterminer si ces relations peuvent être considérées comme anormales dans le contexte de l'entreprise[7]. Le critère de la normalité sert donc à apprécier le caractère traumatisant des événements ou le lien de causalité, selon les cas. Il ne doit pas servir à exclure du champ d’application de la loi les situations habituelles qui s’avèrent traumatisantes. Il serait en effet contraire à l’esprit de la loi de conclure qu’un milieu de travail habituellement malsain ne peut causer une lésion professionnelle.

2.2             La jurisprudence reconnaît que des événements, à première vue bénins, lorsque pris de façon isolée, deviennent plus significatifs lorsque considérés dans leur ensemble. La superposition, la juxtaposition et la connexité de ces événements peuvent constituer un événement imprévu et soudain[8].

2.3             Les facteurs traumatisants allégués devront être analysés en tenant compte de leur origine, soit provenant du milieu du travail, soit extérieur à celui-ci ou encore ayant une composante mixte[9]. Quant au lien de causalité, il faudra apprécier la participation des facteurs exogènes et endogènes au développement de la pathologie, notamment l’absence d’antécédents ou de condition personnelle[10].

[43]           Ce sont les critères d'analyse que retient le tribunal.

[44]           Dans un premier temps, le tribunal considère que la preuve démontre que l’analyse doit se faire sous l’angle de la notion d’accident du travail et ce, pour les motifs suivants.

[45]           D’une part, il ne peut s’agir d’une récidive, rechute ou aggravation d’une condition préexistante ayant été reconnue par la CSST comme lésion professionnelle.

[46]           D’autre part, les faits énoncés ne militent pas en faveur de l’application de la notion de maladie professionnelle, puisqu’ils sont circonscrits dans le temps et ne sont pas l’apanage du milieu de travail en temps normal.

[47]           C’est donc sous l’angle de la notion d’accident du travail que sera étudiée la preuve tant médicale que factuelle. Ceci étant dit, le tribunal retient les éléments suivants de la preuve documentaire et testimoniale. Lors de l’audience, le tribunal a reçu différents témoignages dont celui de monsieur Larose qui a identifié des situations qu’il considère comme harcelantes.

AVIS D’AFFICHAGE DE POSTE

[48]           À ce sujet, le travailleur allègue trois événements qui se sont produits au cours des années et qui l’ont marqué :

·        En octobre 2000, le travailleur postule pour un poste de préposé d’entretien ménager. Il y a une modification à l’affichage qui a comme conséquence que la candidature du travailleur n’est pas retenue car l’exigence initiale requise était celle de l’ancienneté alors qu’après la modification, c’est l’ancienneté ET l’expérience qui sont requises du candidat. Monsieur Larose n’ayant aucune expérience dans le domaine ne peut accéder au poste et ce sont des personnes plus jeunes en ancienneté qui seront nommées;

·        En mai 2006, l’employeur affiche une demande pour combler un besoin 1,25 heure au poste de préposé à la salle à manger. Le travailleur postule sur le poste et l’employeur l’avise que ce n’est pas le poste qui est ouvert mais seulement 1,25 heure supplémentaire qui est à combler.

·        Enfin, alors qu’il est en congé de maladie, il y a un poste qui est ouvert, soit celui de préposé à la salle à manger à raison de 5 jours de travail sur une période de dix jours pour un total d’heures travaillées de 25 heures par quinzaine de jours. L’affichage est pour la période du 18 avril 2007 au 25 avril suivant. Le 23 avril 2007, il reçoit une lettre du secrétaire trésorier du syndicat l’avisant qu’il peut les mandater pour postuler pour lui vu son absence du travail, le tout en conformité avec la convention collective. Monsieur Larose recevra une autre lettre recommandée de la part de l’employeur, lettre qu’il prendra possession le 26 avril 2007, soit le lendemain de la fermeture du poste.

·        Monsieur Larose allègue, d’une part, qu’il y a collusion entre l’employeur et le syndicat car le secrétaire trésorier du syndicat n’a pas l’habitude d’aviser les membres absents. D’autre part, il reproche à l’employeur, non pas de lui avoir transmis la lettre après la fermeture du poste mais bien le fait qu’il lui offre un poste de travail où il ferait moins d’heures que son poste habituel de plongeur. Il considère que l’on voulait se débarrasser de lui en lui offrant un poste qui comprend moins d’heures que celui qu’il avait.

MODIFICATION DE L’HORAIRE DE TRAVAIL

[49]           En février 2006, l’employeur modifie l’horaire de travail de monsieur Larose. Ainsi, il doit travailler de 8 h à 16 h alors qu’auparavant son horaire était de 6 h 30 à 14 h 30. Sur cet horaire, il était chargé d’aider à la cuisine en faisant les rôties du matin. Le travailleur mentionne que lors de la modification, l’employeur lui a certifié que ce serait un cuisinier qui allait reprendre la tâche des rôties. À sa deuxième journée de travail, il constate que ce n’est pas un cuisinier qui effectue cette tâche. Il considère avoir été trompé par l’employeur.

ERREUR SUR SES PAYES

[50]           Monsieur Larose mentionne qu’il y a eu pendant une longue période de temps des erreurs sur toutes ses payes. Ces erreurs concernaient soit le nombre d’heures travaillées, soit les sommes retenues à titre d’avantage imposable, tels les repas pris chez l’employeur. Il s’est plaint à quelques reprises et ces erreurs ont été corrigées.

PAYE DE VACANCES

[51]           Monsieur Larose indique qu’en 2005, il a reçu son chèque de paye de vacances durant le temps où il était déjà en vacances. En 2006 et 2007, étant en congé de maladie, il n’a pas perçu de chèque de vacances. Par contre, lorsqu’il a donné sa démission, l’employeur lui a versé le solde des vacances dû. À ce moment, il bénéficiait des prestations de dernier secours, ce qui a eu comme conséquence qu’il a dû remettre 850 $ au gouvernement.

[52]           Concernant les sommes qui lui ont été remises lorsqu’il a donné sa démission, il considère que l’employeur lui doit une journée de congé de maladie. Par contre, il n’en a jamais fait la réclamation à l’employeur.

SUSPENSION DES 14 ET 15 AVRIL 2006

[53]           Plusieurs employés qui ne prenaient pas leurs deux pauses quotidiennes de 15 minutes quittaient le travail 30 minutes avant la fin du quart. Le travailleur a demandé de faire la même chose et la permission lui a été refusée. Il a décidé tout de même de quitter avant la fin du quart de travail. L’employeur l’a suspendu pendant deux jours, soit les 14 et 15 avril 2006. Il allègue que l’employeur faisait de la discrimination envers lui.

[54]           De plus, il mentionne n’avoir jamais reçu d’avis écrit concernant cette suspension.

[55]           Concernant ces situations, le travailleur a répondu aux questions du tribunal et du représentant de l’employeur. Les éléments suivants sont retenus :

 

·        Il a signé des griefs qu’il n’avait pas demandé pour contester une suspension et ce, à la demande du syndicat;

·        Ses relations avec le syndicat ont toujours été tendues depuis l’arrivée de madame Bouchard à titre de présidente. Sur les conseils de son médecin et de sa psychologue, il a décidé de cesser d’assister aux assemblées et d’avoir recours au syndicat pour défendre ses droits;

·        Presque tous les points mentionnés précédemment n’ont pas fait l’objet de griefs de la part du travailleur;

·        Le 10 mai 2007, il a remis sa démission;

·        Monsieur Larose a énuméré la liste des différents médicaments qui lui sont prescrits.

 

 

[56]           Monsieur Steeve Morel, directeur des services financiers chez l’employeur, témoigne des faits suivants :

·         Durant une période de transition entre deux systèmes informatisés de paye, il y a effectivement eu des erreurs sur les payes mais celles-ci concernaient tous les employés. Lorsqu’on l’avisait, il les corrigeait en remettant aux travailleurs les sommes dues. À ce propos, il dépose deux bordereaux de paye du travailleur sur lesquels apparaît une correction;

·         Il a vu à quelques reprises monsieur Larose pour des erreurs et celles-ci ont été corrigées;

·         Concernant l’avantage imposable que constituait la prise des repas chez l’employeur, il mentionne qu’un repas coûtait 4,75 $ à l’employeur alors que l’employé ne payait que 2,75 $. Il a été avisé qu’il devait considérer la différence, soit 1,90 $ comme un avantage fiscal imposable. L’employé avait le choix de payer l’impôt sur cet avantage ou de payer 4,75 $ le repas. La grande partie des employés a choisi de se voir imposer cet avantage. Par contre, monsieur Larose a préféré payer 4,75 $. C’est à ce moment que l’employeur a fait préparer des cartes spéciales pour ceux qui voulaient payer le plein montant.

[57]           Madame Sylvie Poulin, chef-cuisinier, témoigne comme suit :

·        Concernant la modification de l’horaire de travail, elle déclare que celle-ci était devenue nécessaire car entre la fin du quart de travail du plongeur de jour et l’entrée de celui de soir, il s’accumulait beaucoup de vaisselles. L’employeur avait besoin d’avoir plus d’heures à la plonge. C’est pour cette raison qu’il y a eu modification de l’horaire. Quant au fait que ce serait un cuisinier qui ferait les rôties le matin, elle déclare n’avoir jamais pris cet engagement;

·        Lors de son témoignage, madame Poulin mentionne qu’un avis disciplinaire a été remis en main propre au travailleur en regard de sa suspension des 14 et 15 avril 2006. En contre-interrogatoire, elle admettra s’être trompée sur la date de la remise de l’avis disciplinaire au travailleur, ce dernier étant absent la prétendue journée de la remise;

·        Enfin, elle dira qu’il y a eu d’autres avis de donner à des travailleurs pour d’autres manquements.

 

[58]           Madame Côté, directrice générale chez l’employeur, témoigne des faits suivants :

·        Essentiellement, elle mentionne que la responsabilité des affichages reposait sur les épaules des personnes qu’elle avait nommées. Quant à elle, elle déclare n’avoir pas eu connaissance des difficultés rencontrées par le travailleur. Plus précisément, en regard des affichages, elle dira que pour celui de préposé à l’entretien, elle se rappelle que la demande d’avoir de l’expérience était devenue un prérequis pour occuper ce poste. Quant à celui indiquant qu’il y avait 1,25 heure à combler, elle dira que c’est à la demande du syndicat qu’elle a procédé de cette façon. Par contre, aucun poste de préposé au service n’était disponible et cet affichage ne servait qu’à combler cette période car les préposés au service ne travaillaient que 6,75 heures par jour et dû au fait que l’établissement avait agrandi, il devenait nécessaire de modifier les heures de travail des préposés au service.

·        Quant au dernier affichage, celui pour lequel l’employeur a transmis un courrier recommandé au travailleur, elle mentionne que c’est la convention collective qui l’oblige à aviser les personnes qui sont en congé de l’affichage d’un poste. Elle admet qu’il n’est pas coutume, d’une part, que le secrétaire trésorier du syndicat envoie une lettre à un travailleur et, d’autre part, que l’employeur transmette cette information par courrier recommandé.

·        Elle admettra que c’est à cause du profil du travailleur qu’ils ont décidé de procéder de cette façon dans le but de ne pas se faire critiquer par la suite. Elle dira que cela n’a jamais été de leur intention de se débarrasser du travailleur mentionnant que sur le plan travail comme tel, monsieur Larose était un bon travailleur.

 

 

[59]           Ceci constitue l’essentiel de la preuve et elle amène le tribunal à conclure comme suit.

[60]           Premièrement, tel qu’expliqué au travailleur, il faut que les situations décrites constituent du harcèlement. Il ne s’agit pas de décrier des situations au travail qui ne sont pas au goût du travailleur. De plus, monsieur Larose a très bien compris que le tribunal n’était pas un tribunal d’arbitrage de griefs ou de relations de travail. La compétence du tribunal se borne à décider si la pathologie dont est atteint le travailleur est une lésion professionnelle.

[61]           Deuxièmement, afin de déterminer la relation entre des événements et une pathologie, le tribunal doit prendre en considération la preuve médicale et la preuve factuelle. Or, dans le présent dossier, la preuve médicale est mince. En effet, seul le billet médical de la docteure Meilleur est pris en considération par le tribunal car l’expertise de la docteure Soulières n’est pas contemporaine à l’arrêt de travail du mois de mars 2006.

[62]           Ce rapport médical n’établit pas la relation entre le travail et l’aggravation de la condition du travailleur. C’est un élément important dans l’analyse d’un dossier médico-légale comme celui de monsieur Larose qui, ayant décliné l’offre du tribunal de bonifier sa preuve médicale, doit vivre avec les conséquences de sa décision.

[63]           Troisièmement, des situations décrites ci-haut, le tribunal infère que ces problèmes étaient reliés aux relations de travail entre l’employeur et ses travailleurs. En effet, les affichages, les modifications d’horaire de travail, les erreurs sur les payes et la distribution de la paye de vacances sont tous des éléments couverts par une convention collective qui prévoit un mécanisme de résolution de conflit, soit le grief. Il est évident par les commentaires du travailleur qu’il ne faisait pas confiance à son syndicat pour défendre ses droits. Or, ce fait ne peut être assimilable à une condition de harcèlement de la part du syndicat ou de l’employeur.

[64]           De plus, la suspension survenue les 14 et 15 avril 2006 était la conséquence des agissements du travailleur face à une situation qu’il qualifiait de discriminatoire. C’est donc un acte volontaire qu’il effectuait en réponse au refus de l’employeur de le laisser quitter son travail avant la fin du quart. Il doit donc en assumer la responsabilité.

[65]           Enfin, le fait que l’employeur accorde à certaines personnes le droit de quitter avant la fin du quart et le refuse à d’autres est sûrement une cause de grande frustration mais la preuve n’a pas démontré que ce refus était dirigé seulement contre monsieur Larose, d’autant plus qu’il existait dans l’entreprise une procédure contre le harcèlement que le travailleur aurait effectivement pu se servir pour dénouer l’impasse.

[66]           En résumé, le tribunal considère que la preuve médicale et la preuve factuelle ne correspondent pas à des situations de harcèlement et, en conséquence, il y a lieu de rejeter la requête du travailleur.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de monsieur Jean-Guy Larose, le travailleur;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 20 novembre 2006 à la suite d'une révision administrative, et;

DÉCLARE que le travailleur n'a pas subi de lésion professionnelle le 20 mars 2006.

 

 

__________________________________

 

Robert Deraiche

 

Commissaire

 

 

M. Serge Julien

Société Mutuelle de Prévention inc.

Représentant de la partie intéressée

 



[1]           L.R.Q., chapitre A-3.001.

[2]           Beaucaire et Municipalité de St-Joseph-du-Lac, C.L.P. 166237-64-0107, le 26 mai 2004.

[3]           Roussel et Sûreté du Québec, C.L.P. 168222-02-0109, 10 décembre 2003, G.Tardif;

[4]           Boisvert et Halco, [1995] C.A.L.P. 19 .

[5]          Mailhot et Garderie La Marmaille de Laval inc., C.L.P. 136579-64-0004, 20 avril 2001, G. Perreault; Tanguay et Prospection inc., C.L.P. 185969-31-0206, 7 octobre 2002, M. Carignan.

[6]           Welch et Groupe pharmaceutique Bristol Myers, [1993] C.A.L.P. 1470 , requête en révision judiciaire rejetée, [1993] C.A.L.P. 1490 (C.S.), appel rejeté, [1998] C.A.L.P. 553 (C.A.)

[7]          Welch et Groupe pharmaceutique Bristol Myers, op. cit. note 6; Tremblay et Hydro-Québec, C.L.P. 101447-32-9806, 11 juin 1999, J.-G. Roy; Forget-Chagnon et Marché Bel-Air  inc., [2000] C.L.P. 388 ; Tremblay et C.P.E. La Maison des enfants, C.L.P. 138845-05-0005, 30 octobre 2000, L. Boudreault; Boivin et C.L.S.C. Villeray, [2001], C.L.P. 554 ; Lafrenière et Sodema, [2001], C.L.P. 12 ; Arbour et Hydro-Québec, C.L.P. 161775-09-0105, 28 octobre 2002, Y. Vigneault; A.F.G. Industries ltée (Glaverbec) et Bhérer, C.L.P. 178446-32-0202, 29 janvier 2003, G. Tardif.

[8]           Anglade et Communauté urbaine de Montréal, C.A.L.P. 00837-60-8609, 17 juin 1988, G. Godin; Centre Du Sablon et Mamousos, C.L.P. 179831-61-0203, 26 juillet 2002, S. Di Pasquale; Coulombe et Industries Perfection inc., C.L.P. 169922-61-0110, 21 janvier 2003, G. Morin.

[9]           Émond et Résidence Les quatre saisons, C.L.P. 156396-03B-0102, 01-08-28, G. Marquis.

[10]          Jasmin et Commission scolaire Marguerite-Bourgeois, C.L.P. 145846-72-0009, 01-04-09, P. Perron.

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