Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

Québec (Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine) (programme des classes d'entraînement)

2011 QCCLP 7349

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Longueuil

11 novembre 2011

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

433865-62-1103

 

Dossier CSST :

131701187

 

Commissaire :

Doris Lévesque, juge administratif

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine - Programme des classes d’entraînement

 

Partie requérante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 16 mars 2011, Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine - Programme des classes d’entraînement (l’employeur) dépose une requête, auprès de la Commission des lésions professionnelles, à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative, le 11 mars 2011.

[2]           Par cette décision, la CSST maintient celle rendue initialement en imputation le 26 octobre 2010 pour conclure que l’employeur doit assumer la totalité du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par madame Sophie-Anne Scherrer (la travailleuse) le 26 avril 2007.

[3]           Le 25 octobre 2011, le dossier est mis en délibéré conformément à l’article 429.14 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) permettant à la Commission des lésions professionnelles de procéder sur dossier tout en tenant compte de l’argumentation écrite produite par la représentante de l’employeur, madame Karine Jalbert.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]           L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit à un partage d’imputation conformément à l’article 329 de la loi dans les proportions suivantes : 10 % à son dossier d’employeur et 90 % à l’ensemble des employeurs.

[5]           Subsidiairement, elle suggère qu’un ratio de 25 % à son dossier d’employeur et de 75 % à l’ensemble des employeurs pourrait aussi trouver application.

LES FAITS

[6]           Le 26 avril 2007, la travailleuse alors âgée de 26 ans, dans le cadre de son emploi d’interprète en danse, subit un accident du travail qu’elle décrit ainsi : « Douleur au dos au moment de l’atterrissage d’un saut ».

[7]           Le 10 mai 2007, le docteur Hobden note une douleur à la région lombaire et une dysfonction somatique de la colonne lombopelvienne. Lors des consultations médicales subséquentes, ce médecin maintient ce diagnostic.

[8]           Le 17 mai 2007, une résonance magnétique de la colonne lombaire, demandée par le docteur Hobden, est ainsi lue par le docteur S. Fontaine, radiologiste :

En L5-S1, je note des signes de discopathie avec un hypo-signal discal en pondération T2. Présence de discrètes modifications discogéniques des plateaux vertébraux adjacents. Ceci s’accompagne d’une hernie discale focale postéro-médiane, légèrement latéralisée à droite. La hernie discale vient en contact avec la racine S1 droite, qui n’est cependant pas comprimée. Il n’y a pas de sténose spinale ni foraminale. Les structures osseuses ne présentent pas d’autre anomalie. Il n’y a pas d’arthrose facettaire.

 

[Dossier C.L.P., page 22]

 

 

[9]           Le 31 mai 2007, la CSST rend une décision d’admissibilité dans laquelle elle accepte le diagnostic de douleur lombaire en relation avec l’accident du travail du 26 avril 2007. Cette décision n’a pas été contestée.

[10]        Le 25 septembre 2008, dans un rapport médical final, le docteur Hobden consolide le même jour une lésion relative à une dysfonction somatique de la colonne lombopelvienne ainsi qu’une hernie discale en L5-S1. Il prévoit une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

[11]        Le 3 novembre 2008, le docteur B. Chartrand diagnostique une entorse lombaire avec hernie. Il précise que la travailleuse est au travail avec des modifications.

[12]        Dans les faits, il n’y a jamais eu d’arrêt de travail complet, puisque la travailleuse  aurait toujours effectué son travail selon sa tolérance[2].

[13]        Le 16 octobre 2008, le docteur C. Godin, orthopédiste désigné par la CSST, conclut que la travailleuse a subi une blessure à la région lombaire lors de l’accident survenu le 26 avril 2007. Il ajoute que l’investigation médicale a mis en évidence la présence d’une hernie discale en L5-S1 qui, selon lui, doit être l’étiologie la plus probable pour expliquer les douleurs lombaires survenues après le 26 avril 2007. Il émet le 16 octobre 2008 comme date de consolidation de la lésion professionnelle, avec un déficit anatomo-physiologique de 2 % pour une hernie discale non opérée, prouvée cliniquement par tests spécifiques, le tout sans nécessité de soins ou traitements après cette date ni limitation fonctionnelle.

[14]        Le 3 novembre 2008, dans un rapport d’évaluation médicale, le docteur Chartrand retient un déficit anatomo-physiologique de 2 % pour une dysfonction somatique avec hernie en L5-S1 ainsi que des limitations fonctionnelles.

[15]        Le dossier est dirigé auprès d’un membre du Bureau d'évaluation médicale, le docteur P.-P. Hébert, orthopédiste, qui rend son avis motivé le 16 janvier 2009. Il retient comme diagnostic de la lésion professionnelle celui de hernie discale L5-S1 droite responsable d’un déficit anatomo-physiologique de 2 %.

[16]        Le 23 janvier 2009, la CSST entérine les conclusions émises par le membre du Bureau d'évaluation médicale. Cette décision n’a pas fait l’objet d’une demande de révision.

[17]        Le 29 septembre 2010, l’employeur dépose une demande de partage d’imputation au motif que la travailleuse est porteuse d’une condition personnelle préexistante, à savoir une dégénérescence discale, avant l’événement du 26 avril 2007, qui est déviante de la norme biomédicale et qui a prolongé la période de consolidation de la lésion en faisant accroître les coûts au dossier.

[18]        Le 26 octobre 2010, la CSST refuse cette demande de partage d’imputation, ce qu’elle maintient à nouveau en révision administrative, le 11 mars 2011. Contestée par l’employeur, cette décision fait l’objet du présent litige.

[19]        Le 22 juin 2011, le docteur André Canakis, à la demande de l’employeur, donne ses commentaires à la suite de la révision du dossier :

Il est évident que vingt-et-un jours après l’événement, l’IRM a montré deux pathologies distinctes en apparence mais qui peuvent aussi faire partie du même syndrome dégénératif :

 

·         « en L5-S1… discopathie… [avec] présence de discrètes modifications discogéniques des plateaux vertébraux adjacents »;

·         « ceci s’accompagne » d’une hernie discale focale postéromédiane légèrement latéralisée à droite.

 

La discopathie dégénérative - comme tout phénomène dégénératif - est un processus chronique et lent qui s’installe après de nombreux mois et années. Ce n’est pas un processus aigu et le fait qu’elle était déjà présente vingt-et-un jour après l’événement indique clairement qu’elle était préexistante.

 

L’histoire naturelle de la discopathie dégénérative telle qu’étudiée par Kirkaldy-Willis et Hill ainsi que de nombreux autres observateurs nous montre que la discopathie dégénérative se développe en trois phases. La première phase, la dysfonction, apparaît entre l’âge de 15 et 45 ans.

 

La phase suivante, celle d’instabilité, se développe entre 35 et 70 ans. La dernière phase, celle de stabilisation, apparaît après 60 ans. Chaque segment vertébral dégénère à un rythme différent et plusieurs phases différentes peuvent coexister sur une même colonne.

 

Dans ce schéma, deux complications vont survenir en cours d’évolution.

 

·         La hernie discale est une complication de la discopathie dégénérative qui survient dans la phase de dysfonction et d’instabilité.

·         La sténose spinale par arthrose dégénérative est une complication d’hypertrophie osseuse ou ostéophytique qui compromet le tissu nerveux dans la phase d’instabilité tardive et au début de la phase de stabilisation.

 

Cette évolution avec ces complications nous indiquent que la discopathie dégénérative est une condition nécessaire sine qua non pour la production d’une hernie discale et sans laquelle la hernie ne se produirait pas.

 

L’histoire naturelle de la discopathie dégénérative est caractérisée par des épisodes douloureux suivis de périodes de résolution complète ou partielle jusqu’à l’épisode douloureux suivant, le cas échéant.

 

Par ailleurs, grâce à l’imagerie par résonance magnétique, les études statistiques nous démontrent que seulement 35% d’une population générale non symptomatique de 20 à 39 ans présenteront à l’IRM une discopathie dégénérative lombaire et 20% de ceux qui sont plus jeunes que 60 ans, une hernie discale non symptomatique.

 

Madame n’avait que 26 ans à l’époque de l’événement. De toute évidence, la présence d’une discopathie dégénérative à son âge est fortement en-dehors des normes biomédicales et déjà ce facteur justifie un partage d’imputation. [sic]

 

 

[20]        Le docteur Canakis estime que la CSST aurait dû octroyer un partage d’imputation dans le présent dossier en énonçant les motifs suivants :

·Le premier argument concerne l’absence d’antécédent au niveau lombaire et le fait que madame n’a jamais présenté de problème à la région lombaire. Cet argument n’est pas recevable ni défendable et doit être rejeté.

 

En effet, un handicap reconnu comme tel par les instances peut très bien être présent de façon latente sans s’exprimer par des symptômes mais constitue néanmoins une atteinte de structure anatomique ou d’une fonction physiologique constituant un point faible et vulnérable du corps humain et sujet à des complications. Or, la dégénérescence d’un disque intervertébral avec sa perte d’hydratation constitue une atteinte de la fonction du disque en tant qu’absorbeur de stress compressif - dans le cas particulier de Mme Scherrer, à l’atterrissage à la suite d’un saut de danse en hauteur. Cette vulnérabilité anatomophysiologique latente est un handicap même s’il était asymptomatique et que madame n’a jamais connu de problème lombaire auparavant.

 

·      Le deuxième argument est basé sur le fait que l’IRM n’a montré qu’une hernie discale à L5-S1 retenue comme lésion professionnelle.

 

Cependant, la résonance magnétique n’a pas démontré que cela mais le Dr Fontaine a bien décrit « en L5-S1….[une] discopathie avec un hyposignal discal en pondération T2 [avec] présence de discrètes modifications discogéniques des plateaux vertébraux adjacents ». Que la discopathie dégénérative s’accompagne déjà de modifications des plateaux vertébraux adjacents indique sa chronicité.

 

Enfin, cette discopathie « s’accompagne » d’une hernie discale, ce qui indique clairement que les deux pathologies étaient présentes simultanément. Donc, en plus de la hernie, madame avait aussi une discopathie dégénérative L5-S1 toute à fait en dehors des normes biomédicales compte tenu de son âge de 26 ans seulement.

 

·      Le troisième argument qu’il n’y a pas de preuve prépondérante d’un handicap préexistant au niveau lombaire a déjà été démontré comme n’étant pas conforme à la réalité du cas puisqu’il y a handicap préexistant à L5-S1 et que le fait qu’il ne s’est pas manifesté dans le passé n’en fait pas une preuve prépondérante de son inexistence et ne fait que confirmer qu’il s’agit d’un handicap latent non symptomatique mais bien présent.

 

Pour toutes ces raisons, le refus du partage d’imputation n’est pas justifiée.

 

J’estime quant à moi que la discopathie dégénérative était préexistante quoique non symptomatique, qu’elle constituait un handicap en-dehors des normes biomédicales compte tenu de son âge de 26 ans. Cette discopathie dégénérative a joué un rôle déterminant dans la production de la lésion professionnelle de hernie discale - dans le cas où cette hernie discale s’est produite pendant l’événement, car elle aurait pu elle aussi être préexistante et non symptomatique, faisant partie du tableau dégénératif. La discopathie dégénérative a de plus prolongé la période de consolidation conjointement avec la hernie discale sur une période de près de soixante-quinze semaines. [sic]

 

[21]        À l’appui de ses prétentions, le docteur Canakis dépose un extrait de littérature médicale[3].

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[22]        L’employeur appuie sa demande de partage de l’imputation sur l’article 329 de la loi qui énonce :

329.  Dans le cas d'un travailleur déjà handicapé lorsque se manifeste sa lésion professionnelle, la Commission peut, de sa propre initiative ou à la demande d'un employeur, imputer tout ou partie du coût des prestations aux employeurs de toutes les unités.

 

L'employeur qui présente une demande en vertu du premier alinéa doit le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien avant l'expiration de la troisième année qui suit l'année de la lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 329; 1996, c. 70, a. 35.

 

 

[23]        Le terme « travailleur déjà handicapé » a fait l’objet d’une interprétation jurisprudentielle[4] par la Commission des lésions professionnelles qui considère que c’est celui qui présente une déficience physique ou psychique qui a entraîné des effets sur la production de la lésion professionnelle ou sur les conséquences de cette lésion.

[24]        Selon la définition retenue par la jurisprudence, une déficience constitue une perte de substance ou une altération d’une structure ou d’une fonction psychologique, physiologique ou anatomique et correspond à une déviation par rapport à une norme biomédicale. Cette déficience peut être congénitale ou acquise.

[25]        Selon la jurisprudence, l’employeur, qui désire obtenir l’application de l’article 329 en sa faveur, afin d’obtenir une imputation partagée et voir la travailleuse reconnue « déjà handicapée » au sens de cet article, doit démontrer la présence de deux critères.

[26]        En premier lieu, l’employeur doit démontrer, par une preuve prépondérante, que la travailleuse était porteuse d’une déficience avant que se manifeste sa lésion professionnelle. Puis, en deuxième lieu, il doit établir l’existence d’un lien entre cette déficience et la lésion professionnelle, soit en démontrant que la déficience a influencé l’apparition ou la production de la lésion professionnelle, soit parce qu’elle a agi sur les conséquences de cette lésion professionnelle.

[27]        Pour la détermination de l’existence d’un lien entre la déficience et la lésion professionnelle et ses conséquences, la jurisprudence[5] a indiqué qu’il y avait lieu de considérer certains critères, tels la nature ou la gravité du fait accidentel; le diagnostic initial de la lésion professionnelle; l’évolution des diagnostics et la condition du travailleur; la compatibilité entre le plan de traitement prescrit et le diagnostic de la lésion professionnelle; la durée de consolidation de la lésion compte tenu de la lésion professionnelle; la gravité des conséquences de la lésion professionnelle; les opinions médicales ainsi que l’âge de la travailleuse.

[28]        Dans le présent dossier, la preuve démontre que la travailleuse est atteinte d’une dégénérescence discale en L5-S1, soit au même niveau radiologique que la hernie discale diagnostiquée et reconnue d’ailleurs à titre de lésion professionnelle.

[29]        Cette imagerie par résonance magnétique, effectuée quelque 21 jours après l’événement, permet effectivement de constater qu’une telle dégénérescence n’a pu se développer en si peu de temps.

[30]        De plus, la Commission des lésions professionnelles retient les propos suivants du docteur Canakis démontrant que la résonance magnétique a révélé davantage que la présence d’une hernie discale à L5-S1, même si retenue comme lésion professionnelle, et que la travailleuse était porteuse d’une déficience avant que se manifeste sa lésion professionnelle :

Cependant, la résonance magnétique n’a pas démontré que cela mais le Dr Fontaine a bien décrit « en L5-S1….[une] discopathie avec un hyposignal discal en pondération T2 [avec] présence de discrètes modifications discogéniques des plateaux vertébraux adjacents ». Que la discopathie dégénérative s’accompagne déjà de modifications des plateaux vertébraux adjacents indique sa chronicité.

 

Enfin, cette discopathie « s’accompagne » d’une hernie discale, ce qui indique clairement que les deux pathologies étaient présentes simultanément. Donc, en plus de la hernie, madame avait aussi une discopathie dégénérative L5-S1 toute à fait en dehors des normes biomédicales compte tenu de son âge de 26 ans seulement.

 

 

[31]        Selon l’avis du docteur Canakis, cette dégénérescence discale en L5-S1 est déviante par rapport à la norme biomédicale chez une travailleuse âgée de 26 ans. Il indique qu’au moment de l’événement, elle présente de la dégénérescence d’un disque intervertébral avec une perte d’hydratation qui constituerait, selon lui, une atteinte de la fonction du disque en tant qu’absorbeur de stress compressif dans le cas particulier de la travailleuse « à l’atterrissage à la suite d’un saut de danse en hauteur. Cette vulnérabilité anatomophysiologique latente est un handicap même s’il était asymptomatique et que madame n’a jamais connu de problème lombaire auparavant ».

[32]        La Commission des lésions professionnelles retient l’opinion du docteur Canakis voulant que la constatation radiologique démontrant la présence de deux pathologies présentes simultanément, soit en plus d’une hernie également une discopathie dégénérative L5-S1, est en dehors des normes biomédicales compte tenu du jeune  âge de la travailleuse de 26 ans. Par conséquent,  il y a lieu de conclure à la présence d’un handicap au sens de l'article 329 de la loi.

[33]        C’est d’ailleurs en ce sens qu’en a décidé monsieur le juge administratif Arsenault dans la décision Fixair inc.[6] :

[28]      L’entorse initialement diagnostiquée de même que la dégénérescence et la hernie discale observées à la résonance magnétique résultent davantage de la manifestation au travail alors que le travailleur était à son travail d’une condition personnelle que l’on peut qualifier en l’espèce de handicap antérieur. Il est étonnant d’observer chez une personne de l’âge du travailleur - 27 ans au moment de sa lésion professionnelle - des « modifications dégénératives des plateaux vertébraux de L5 » et une hernie discale.

 

 

[34]        Dans la cause Denla inc. et Paré[7],  la Commission des lésions professionnelles en était arrivée à une conclusion similaire à savoir qu’une dégénérescence,  chez un jeune travailleur âgé de 24 ans correspond à une altération d’une structure qui correspond à une déviation par rapport à une norme biomédicale :

[14]      Ce problème, identifié par le Docteur Mathieu comme étant une dégénérescence, ne semble pas à première vue très important. Cependant, il faut noter qu’ici le travailleur n’est âgé que de 24 ans. La Commission des lésions professionnelles estime que, dans le cas d’un travailleur aussi jeune, il s’agit ici d’une altération d’une structure qui correspond à une déviation par rapport à une norme biomédicale.

 

[15]      Par ailleurs, cette déficience a, selon la preuve médicale au dossier et l’opinion du docteur Mathieu, entraîné une consolidation plus longue que la normale puisque, selon les barèmes généralement reconnus, une telle entorse se guérit normalement à l’intérieur d’une période de quatre à six semaines. Dans le présent dossier, cette lésion a mis près de quatre mois et demi avant d’être jugée consolidée. Comme précédemment mentionné, cette durée inhabituelle de traitement serait due à la discopathie dégénérative. Dans les circonstances, et en considérant le fait qu’il y a eu assignation temporaire rapidement, le tribunal estime que l’employeur ne devrait être imputé que de 50 % des coûts attribuables à cette lésion professionnelle.

 

 

[35]        Par ailleurs, la Commission des lésions professionnelles retient que la travailleuse a tout de même subi un accident du travail chez l'employeur le 26 avril 2007, ayant consisté en un atterrissage d’un saut responsable de sa douleur lombaire.

[36]        La Commission des lésions professionnelles est plutôt d'avis que la présence de la déficience a eu des conséquences sur la lésion professionnelle.

[37]        En effet, on constate que la lésion professionnelle, soit la hernie discale, a été consolidée environ 75 semaines après l’événement du 26 avril 2007, ce qui est anormalement long pour ce type de diagnostic puisque, tel que souligné par la représentante de l'employeur, une consolidation normale est d’environ 18 semaines pour une hernie discale. Cette condition personnelle a donc contribué à prolonger indûment la période de consolidation de la lésion professionnelle.

[38]        Par conséquent, la Commission des lésions professionnelles retient un des ratios de partage d’imputation proposés par la procureure de l'employeur, puisqu'il appert raisonnable, soit 25 % au dossier d’employeur et 75 % à l’ensemble des employeurs.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine - Programme des classes d’entraînement déposée le 16 mars 2011;

INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative, le 11 mars 2011;

DÉCLARE que Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine - Programme des classes d’entraînement doit assumer 25 % du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par madame Sophie-Anne Scherrer, le 26 avril 2007, tandis que 75 % sera assumé par l'ensemble des employeurs.

 

 

__________________________________

 

Doris Lévesque

 

 

 

 

 

 

 

Madame Karine Jalbert

Medial Conseil Santé Sécurité inc.

Représentante de la partie requérante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Selon ce que la travailleuse a rapporté au docteur P.-P. Hébert, lors de son examen le 7 janvier 2009.

[3]           Willis C. CAMPBELL, Andrew H. CRENSHAW et Kay DAUGHERTY, Campbell's Operative Orthopaedics, 8e éd., St-Louis, Toronto, Mosby Year Book, 1992, 5 vol.

[4]          Municipalité Petite-Rivière-St-François et CSST, [1999] C.L.P. 779 .

[5]          Urgences Santé, [2000] C.L.P. 148 .

[6]          C.L.P. 247144-63-0410, 27 mai 2005, J.-P. Arsenault.

[7]          C.L.P. 151731-05-0012, 30 avril 2001, L. Boudreault.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.