Décision

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Service de personnel Riverain inc.

2011 QCCLP 3031

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Saint-Hyacinthe

29 avril 2011

 

Région :

Yamaska

 

Dossier :

411560-62B-1005

 

Dossier CSST :

130879349

 

Commissaire :

Yvan Vigneault, juge administratif

______________________________________________________________________

 

Service de Personnel Riverain inc.

 

Partie requérante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 19 mail 2010, Service de Personnel Riverain inc. (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête à l’encontre d’une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 22 avril 2010, à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle rendue le 5 février 2010 et déclare que l’employeur doit assumer la totalité du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par monsieur Jean Deslauriers (le travailleur), le 23 novembre 2006.

[3]           L’employeur est représenté à l’audience tenue le 26 avril 2011 à Saint-Hyacinthe.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]           L’employeur demande de déclarer qu’il a droit à un partage d’imputation de 85% ou 90 % du coût des prestations à l’ensemble des employeurs et 15% ou 10 % à son dossier financier conformément à l’article 329 de La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (la loi)[1].

LES FAITS ET LES MOTIFS

[5]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que la requête est mal fondée en faits et en droit.

[6]           Il s’agit d’un cas d’application de l’article 329 de la loi qui se lit comme suit :

329.  Dans le cas d'un travailleur déjà handicapé lorsque se manifeste sa lésion professionnelle, la Commission peut, de sa propre initiative ou à la demande d'un employeur, imputer tout ou partie du coût des prestations aux employeurs de toutes les unités.

 

L'employeur qui présente une demande en vertu du premier alinéa doit le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien avant l'expiration de la troisième année qui suit l'année de la lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 329; 1996, c. 70, a. 35.

 

 

[7]           La demande de partage date du 23 décembre 2009 et se situe par conséquent à l’intérieur du délai imparti par le second alinéa de l’article 329 de la loi.

[8]           Le travailleur, né le [...] 1958, était en emploi comme chauffeur de semi-remorque. Le 23 novembre 2006, il subit un accident du travail au coude gauche en étendant le bras pour repousser avec son bras gauche un refroidisseur à vin qui allait tomber. Il consulte le jour-même et un diagnostic de tendinite traumatique au coude gauche est posé.

[9]           Le 21 décembre 2006, la CSST accepte la réclamation du travailleur avec un diagnostic de tendinite traumatique au coude gauche auquel s’ajoutera celui de déchirure quasi-complète du tendon commun des extenseurs du coude gauche.

[10]        C’est que l’examen par résonance magnétique a révélé selon le radiologiste une déchirure quasi-complète du tendon commun des extenseurs. L’examen révèle aussi un épanchement intra-articulaire de léger à modéré.

[11]        Le travailleur est opéré le 3 octobre 2007. Le diagnostic pré et post-opératoire est une épicondylite du coude gauche. La chirurgie permet la découverte d’un plica synovial. Voici comment s’exprime le docteur David Blanchette, chirurgien orthopédiste :

« …Nous retrouvons la masse commune des extenseurs et exploitons l’intervalle entre l’extenseur commun des doigts et l’extenseur carpi radialis longus. Nous retrouvons d’emblée sous cette première couche un site de tendinopathie important mesurant approximativement 2.5 cm en longueur par 0.5 cm dans le plan antéro-postérieur. Nous relâchons cette tendinopathie qui correspond à l’attache de l’extenseur carpi radialis brevis. Nous faisons ceci jusqu’au niveau de la capsule laquelle est ouverte de façon à visualiser s’il y a un plica synovial à ce niveau, ce que nous avons retrouvé. Nous pratiquons l’exérèse de celui-ci. Nous dépériostons de plus l’épicondyle à son versant antérieur… »

 

 

[12]        Le représentant de l’employeur a déposé une évaluation du dossier réalisée par le docteur Jacques Paradis. Ce dernier soumet que le plica synovial est un repli congénital de la membrane synoviale au niveau de la capsule articulaire qui favorise la survenance d’un épanchement intra-articulaire, tel que retrouvé à l’examen par résonance magnétique.

[13]        La preuve prépondérante démontre que le travailleur a subi une épicondylite traumatique qui affecte particulièrement l’extenseur carpi radialis longus au coude gauche et que l’intervention chirurgicale a permis de découvrir la présence d’un plica au niveau de la capsule.  

[14]        En conséquence, le travailleur présentait avant la survenance de la lésion, une atteinte d’une structure anatomique, soit un plica synovial au coude, condition exceptionnelle telle que l’écrit le docteur Paradis car cette condition se retrouve habituellement au genou :

« DISCUSSION

 

Selon Hitoni Awaya[2], la pathologie d’un plica synovial se retrouve chez 48 % des 153 patients soit 74 patients dans une étude d’autopsie. Kang dans Knee Surgical Sports Traumatology Arthroscopy[3] retient : «  Latéral sided snapping elbow is an unusual condition, an dit is apt to be misdiagnosed as lateral epicondylitis. »

 

La présence d’une frange synoviale est donc un problème de santé relié à un épaississement de la frange synoviale et c’est une condition qui n’est pas présente chez la majorité des individus. »

 

 

[15]        Maintenant, avant de conclure que le travailleur était déjà handicapé au sens de l’article 329 de la loi, il nous faut examiner si cette anomalie de structure congénitale a eu un impact sur l’apparition de la lésion et (ou) a aggravé ses conséquences.

[16]        Le docteur Paradis soumet que la présence du plica synovial a prolongé la période de consolidation et nécessité une intervention chirurgicale pour une épicondylite. Voici un passage de son opinion :

 

« […]

 

Cette condition de plica synovial au coude tout comme le plica synovial au genou prolonge de façon importante la période de consolidation et nécessite fréquemment une intervention chirurgicale pour corriger le phénomène de :« snapping ». »

 

 

[17]        Contrairement à la prétention du docteur Paradis, l’intervention chirurgicale a servi à réparer une tendinite traumatique avec déchirure quasi complète du tendon commun des extenseurs, diagnostic accepté par la CSST et non contesté.

[18]        Il n’y a aucune évidence que la présence du plica synovial a eu aucun impact sur la survenance de la lésion comme telle. Il semble plutôt que c’est une découverte fortuite qui n’avait pas été identifiée à l’imagerie et pour laquelle le chirurgien a procédé à l’excision, profitant de l’opportunité.

[19]        Par ailleurs, est-ce que l'existence de ce plica a eu un impact sur les conséquences de la lésion soit la période de consolidation, les traitements et les séquelles?

[20]        Dans la littérature[4] appuyant l’opinion du docteur Paradis, il est noté que le plica est habituellement asymptomatique mais peut le devenir à l'occasion. Cependant, la revue de la littérature déposée ne permet pas de répondre à la question à savoir si un plica synovial peut avoir impact sur les conséquences d'une tendinite traumatique du coude.

[21]        Dans le cas du travailleur, l'intervention a d'abord été projetée et réalisée pour une désinsertion des muscles épicondyliens et secondairement, le chirurgien a excisé le plica qu'il a visualisé. Quant à l’épanchement intra-articulaire qui serait favorisé selon le docteur Paradis par la présence d’un plica synovial, il faut se rappeler qu’il est question d'une tendinite traumatique dans le cas du travailleur, ce qui a pu aussi favoriser la survenance de l'épanchement.

[22]        Donc, en regard de la période de consolidation, il n 'y a pas de preuve probante, que le plica synovial a prolongé indûment la période de consolidation.

[23]        Les faits révèlent que la lésion a été consolidée le 6 mai 2008. Le travailleur a reçu de l’indemnité de remplacement du revenu pendant cinq cent quarante (540) jours ou soixante-dix-sept (77) semaines suivant le portrait CSST du travailleur, document déposé par le représentant de l’employeur.

[24]        En regard des séquelles, le docteur Georges-Henri Laflamme, orthopédiste et membre du Bureau d’évaluation médicale, attribue un déficit anatomophysiologique de 2% pour une atteinte des tissus mous avec séquelles fonctionnelles.

[25]        Toutefois, dans sa discussion, le docteur Laflamme retient que l'épicondylite est résolue depuis le traitement chirurgical. La fonction du coude est par ailleurs dans les limites de la normale. La seule limitation fonctionnelle est d’éviter de soulever des charges dépassant 10 kg de façon fréquente et prolongée. Il persiste quelques inconforts avec l'extension forcée du coude ou la flexion complète attribuables à une cicatrice chirurgicale sensible. Donc dans les faits, il y a très peu de séquelles.

[26]        En conséquence, la preuve prépondérante ne démontre pas que la condition préexistante a eu un impact sur la survenance de la lésion ou aggravé ses conséquences.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de l’employeur, Service Personnel Riverain inc.;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, rendue le 22 avril 2010, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que l’employeur doit assumer la totalité du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par le travailleur, monsieur Jean Deslauriers, le 23 novembre 2006.

 

 

__________________________________

 

Yvan Vigneault

 

 

 

 

Monsieur Gérald Corneau

GCO SANTÉ ET SÉCURITÉ INC.

Représentant de la partie requérante

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]           Elbow Synovial Fold Syndrome : MR Imaging Findings, December 2001.

[3]           2010 June, Pubmed, U.S. Mational Library of Medecine National Institute of Health.

[4]          Op. Cit. note 2, p.1377 1er par.

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