Biscuits Leclerc ltée et Morin |
2008 QCCLP 7095 |
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Dossier : 325711-31-0708
[1] Le 20 août 2007, Biscuits Leclerc ltée (l’employeur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par le biais de laquelle il conteste la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), le 12 juillet 2007, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme la décision initialement rendue le 8 mars 2007 et déclare que madame Amélie Morin (la travailleuse) a subi une lésion professionnelle, le 4 décembre 2006.
Dossier : 338886-31-0801
[3] Le 30 janvier 2008, l’employeur dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par le biais de laquelle il conteste la décision rendue par la CSST, le 23 janvier 2008, à la suite d’une révision administrative.
[4] Par cette décision, la CSST confirme la décision initialement rendue le 13 décembre 2007 en respect de l’avis du Bureau d’évaluation médicale (le BEM), du 4 décembre 2007.
[5] Étant liée par toutes et chacune des conclusions apparaissant à cet avis, la CSST déclare que la lésion professionnelle subie le 4 décembre 2006 est un syndrome du canal carpien bilatéral et que cette lésion est consolidée le 27 novembre 2007, sans nécessité de soins ou de traitements additionnels et sans limitations fonctionnelles. Cette lésion, toutefois, permet l’octroi d’une atteinte permanente à l’intégrité physique.
[6] Enfin, la CSST déclare que la travailleuse est capable d’exercer son emploi à compter du 27 novembre 2007 et qu’elle doit cesser de payer les soins et les traitements après cette même date.
[7] L’audience s’est tenue à Québec, les 19 juin et 2 décembre 2008, en présence des parties. Le témoignage de la travailleuse, de madame Carole Houde et du docteur Jean-François Fradet sont entendus, le tout en référence au visionnement des bandes vidéo déposées (Pièce E-1, en liasse) et qui illustrent les différents postes de travail que la travailleuse fut appelée à occuper de février 2006 à janvier 2007.
[8] La cause est mise en délibéré le 2 décembre 2008.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
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[9] La représentante de l’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision rendue par la CSST, le 12 juillet 2007 et de déclarer que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle, le 4 décembre 2006 et ce, en référence plus particulièrement au diagnostic de syndrome du canal carpien bilatéral.
[10] Elle entend donc démontrer que toutes et chacune des tâches que la travailleuse fut appelée à accomplir au sein de différents postes ne comportent nullement l’exécution de mouvements qui impliquent des sollicitations à risque pour développer un syndrome du canal carpien bilatéral.
[11] À l’appui, référence est faite aux opinions émises par les docteurs Nadeau, Fradet et Lizotte.
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[12] La représentante de l’employeur soumet qu’elle n’entend nullement remettre en cause le diagnostic retenu par le membre du BEM et qui est celui de syndrome du canal carpien bilatéral.
[13] Par contre, dans l’hypothèse voulant que la Commission des lésions professionnelles conclut, en premier lieu, que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle, le 4 décembre 2006, elle demande de déclarer sans effet la décision rendue par la CSST, le 23 janvier 2008, et ce, en ce qui a trait aux conclusions d’ordre médical retenu par le membre du BEM au sein de l’avis émis le 4 décembre 2007.
[14] Dans l’hypothèse, toutefois, voulant que la Commission des lésions professionnelles conclut que la travailleuse a subi une lésion professionnelle, le 4 décembre 2006, elle demande de déclarer que la lésion est consolidée à la date de l’examen du docteur Fradet, soit en date du 18 septembre 2007, sans nécessité de soins ou de traitements additionnels, sans atteinte permanente et sans limitation fonctionnelle.
L’AVIS DES MEMBRES
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[15] Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d’avis que la Commission des lésions professionnelles devrait infirmer la décision rendue le 12 juillet 2007 et déclarer que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle, le 4 décembre 2006.
[16] Ainsi, ils sont d’avis que la preuve soumise ne permet pas de démontrer, de manière probante, que la travailleuse a subi une lésion professionnelle, le 4 décembre 2006.
[17] Ils considèrent, en premier lieu, que la travailleuse ne peut bénéficier de l’application de la présomption énoncée à l’article 29 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) et ce, au principal motif que le syndrome du canal carpien ne figure pas parmi les diagnostics énumérés à l’annexe 1 de la loi.
[18] Ils considèrent, de plus, que le niveau de preuve offert par la travailleuse et ce, avec les quelques précisions que sa mémoire lui a permis de fournir ne permettent pas de conclure que la travailleuse s’est acquittée du fardeau de démontrer, de manière probante, qu’elle fut appelée à exécuter des mouvements répétitifs sur des périodes prolongées.
[19] D’ailleurs, en référence au visionnement des bandes vidéo (Pièce E-1, en liasse) les membres ont pu constater que les tâches étaient régulièrement accomplies sans qu’il y ait une cadence imposée et donc, au rythme de la travailleuse, le tout de manière à permettre aux structures sollicitées de bénéficier de certaines périodes de repos.
[20] Dans de telles circonstances, la travailleuse avait donc le fardeau de démontrer, par une preuve prépondérante, que le syndrome du canal carpien bilatéral diagnostiqué au cours du suivi médical initié le 30 janvier 2007 est relié aux tâches accomplies à son travail.
[21] Or, la preuve, dans l’ensemble, n’a pas permis de démontrer la présence de risques particuliers susceptibles de causer une telle lésion; à l’appui de cette conclusion, référence doit plus particulièrement être faite aux avis émis par les docteurs Lizotte et Fradet.
[22] Aussi, bien que plusieurs des tâches accomplies par la travailleuse exigent constamment d’utiliser l’une ou l’autre des mains ou enfin, les deux à la fois, il n’en demeure pas moins qu’aucun des mouvements n’implique des mouvements de flexion ou d’extension du poignet avec une amplitude importante. En effet, règle générale, les mouvements sont accomplis alors que le poignet est en position neutre ou alors, qu’il effectue une légère flexion ou une légère extension.
[23] Dans l’ensemble, les tâches que la travailleuse dut accomplir ont essentiellement requis l’exécution de mouvements de préhension pleine main ou de mouvements de préhension en pince. Or, selon les items qu’elle eût à manipuler et ce, qu’il s’agisse de biscuits, de barres aux fruits ou gaufrettes enrobées, le poids en cause est négligeable et il y a lieu de conclure que les mouvements de préhension furent tous exécutés sans effort ou sans résistance.
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[24] Compte tenu de la conclusion énoncée dans le précédent dossier, la Commission des lésions professionnelles devrait déclarer sans effet la décision rendue par la CSST, le 23 janvier 2008 et ayant trait aux conclusions d’ordre médical retenues par le membre du BEM au sein de l’avis émis le 4 décembre 2007.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[25] Le Commission des lésions professionnelles doit déterminer, en premier lieu, si la travailleuse a subi une lésion professionnelle le 4 décembre 2006. Elle doit décider, en second lieu, si cette lésion doit être consolidée le 27 novembre 2007 sans nécessité de soins ou de traitements additionnels et sans limitations fonctionnelles, le tout en référence à la décision que la CSST fut appelée à rendre le 13 décembre 2007, en respect de l’avis du BEM émis le 4 décembre 2007.
[26] Cette seconde analyse doit évidemment s’effectuer dans l’hypothèse voulant que la Commission des lésions professionnelles conclut, en premier lieu, que la travailleuse a subi une lésion professionnelle, le 4 décembre 2006.
[27] Aux fins d’apprécier ces questions, la Commission des lésions professionnelles retient de l’ensemble de la preuve documentaire et testimoniale les éléments pertinents suivants.
[28] Le 15 février 2007, la travailleuse complète un formulaire de réclamation en référant à des douleurs qui sont apparues en date du 4 décembre 2006, alors qu’elle s’affairait à remplir des distributrices à biscuits et à ramasser des biscuits sur la table.
[29] La travailleuse est alors à l’emploi de l’employeur, depuis le mois de février 2006, à titre de préposée à la production et est âgée de 29 ans.
[30] En date du 4 décembre 2006, la travailleuse avise l’employeur de l’apparition de ses douleurs et ce, en complétant le « Rapport d’enquête et analyse d’accident du travail ». Elle réfère, à nouveau, à des douleurs qui sont apparues alors qu’elle remplissait des distributrices à biscuits (dalots) et à ramasser des biscuits.
[31] Lors de son témoignage, la travailleuse affirme que ses douleurs sont apparues graduellement au cours du mois de novembre 2006. Aussi, en raison des engourdissements qu’elle ressentait la nuit, elle s’est décidée à consulter.
[32] Le premier médecin qu’elle pût voir dans une clinique, à Saint-Augustin, aurait diagnostiqué une tendinite au niveau des poignets. Or, lorsqu’elle voit le docteur Viens, en décembre 2006, celui-ci réfère plutôt à un syndrome du canal carpien.
[33] D’ailleurs, tel qu’il appert de l’attestation médicale complétée par ce dernier, en date du 30 janvier 2007, un premier diagnostic de tendinite aux deux poignets est alors émis. Toutefois, ce diagnostic n’est pas repris ensuite puisque le rapport médical complété par ce même médecin, le 2 février 2007, réfère plutôt à un syndrome du canal carpien, eu égard auquel il recommande une infiltration et ce, tant au niveau du poignet gauche qu’au niveau du poignet droit. Le suivi médical ainsi initié réfèrera ensuite essentiellement au diagnostic de syndrome du canal carpien bilatéral.
[34] D’ailleurs, lorsque la travailleuse est examinée par le docteur Paul-O. Nadeau, à la demande de l’employeur, en date du 30 mars 2007, celui-ci confirme le diagnostic de syndrome du canal carpien bilatéral.
[35] Il réfère d’ailleurs à l’étude électrophysiologique qui a confirmé un tel diagnostic et précisant qu’il s’avérait modéré à gauche, alors qu’il était plus sévère à droite.
[36] Pour le docteur Nadeau, la relation avec les tâches accomplies au travail est questionnable et ce, d’autant plus que l’indice de masse corporel s’avère, en l’espèce, un élément susceptible de provoquer une telle problématique, le tout en référence à un indice de masse corporel de la travailleuse qu’il évalue au-dessus de 30.
[37] En date du 15 mars 2007, la travailleuse est examinée par la docteure Claudine Morand, laquelle corrobore le diagnostic de syndrome du canal carpien bilatéral et poursuit l’arrêt de travail, tout en la référant en chirurgie.
[38] Lorsque la travailleuse est vue, ensuite, par le docteur André Léveillé, celui-ci suggère l’intervention chirurgicale. Une première intervention eut donc lieu le 14 juin 2007, laquelle a consisté à effectuer une décompression du canal carpien gauche. Quant à la seconde chirurgie, elle fut effectuée en date du 19 juillet 2007 et a consisté à effectuer une décompression du canal carpien droit.
[39] La travailleuse est ensuite examinée par le docteur Jean-François Fradet. Au rapport complété par ce dernier, en date du 18 septembre 2007, on peut lire que son examen démontre la présence d’une paresthésie persistante au niveau de la main droite qu’il considère hors de proportion avec une lésion subie à ce site et qui est de la nature d’un canal carpien. Quant à son examen, du côté gauche, il s’avère normal.
[40] À la date de cet examen, la travailleuse se plaint toujours de douleurs persistantes au niveau des deux poignets. Or, compte tenu que son examen ne permet pas de confirmer cliniquement des signes d’un syndrome du canal carpien et ce, de manière bilatérale, le docteur Fradet conclut qu’il y a lieu de consolider ces lésions en date du 18 septembre 2007, sans nécessité de soins ou de traitements additionnels, sans atteinte permanente et sans limitation fonctionnelle.
[41] Le docteur Richard Lirette fut ensuite appelé à se prononcer sur ces mêmes questions et ce, à titre de membre du BEM. Au sein de l’avis qu’il émet le 4 décembre 2007, il rapporte que son examen ne lui permet pas de constater, cliniquement, des signes de syndrome du canal carpien et ce, tant à gauche qu’à droite.
[42] Considérant, toutefois, que l’état de la travailleuse s’est amélioré entre-temps par le biais des traitements prescrits, à savoir des traitements d’ergothérapie, il conclut que la lésion doit être consolidée à la date de son examen, soit en date du 27 novembre 2007 et ce, sans nécessité de soins ou de traitements additionnels.
[43] Il conclut, de plus, que cette lésion ne permet pas l’octroi de limitations fonctionnelles mais qu’elle permet d’octroyer, par contre, un déficit anatomo-physiologique de 1 % pour un syndrome du canal carpien avec changements électromyographiques et ce, tant pour le côté droit que pour le côté gauche. De plus, il ajoute un déficit anatomo-physiologique de 1 % et ce, pour le facteur de bilatéralité.
[44] Bien que la représentante de l’employeur ait soumis qu’elle n’entendait pas remettre en cause le diagnostic de syndrome du canal carpien bilatéral, il n’en demeure pas moins que la Commission des lésions professionnelles doit d’abord préciser la lésion en cause et ce, afin de déterminer, ensuite, si cette lésion a pu être causée par des activités accomplies au travail.
[45] Or, en référence à l’ensemble de la preuve médicale ci-haut rapportée, et plus particulièrement aux chirurgies qui durent être effectuées aux poignets gauche et droit, pour un syndrome du canal carpien, la Commission des lésions professionnelles doit retenir que le seul diagnostic en cause, pour les fins de l’analyse de la réclamation, est celui de syndrome du canal carpien bilatéral.
[46] D’ailleurs, le diagnostic de tendinite des poignets qui fût initialement émis au sein du suivi médical fut rapidement éliminé par les médecins qui ont successivement pris charge de la travailleuse et, selon l’investigation additionnelle qui dût être complétée, seul le diagnostic de syndrome du canal carpien put être confirmé.
[47] Par conséquent, la Commission des lésions professionnelles entend procéder à l’analyse de la réclamation en faisant référence à ce seul diagnostic.
[48] L’article 2 de la loi définit la notion de lésion professionnelle comme suit :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;
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1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.
[49] Quant à la notion de maladie professionnelle, elle y est définie en ces termes :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail;
__________
1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.
[50] La lecture de cette définition doit se faire en conjonction avec la lecture des articles 29 et 30 de la loi qui s’appliquent spécifiquement à la notion de maladie professionnelle.
29. Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.
Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.
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1985, c. 6, a. 29.
30. Le travailleur atteint d'une maladie non prévue par l'annexe I, contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui ne résulte pas d'un accident du travail ni d'une blessure ou d'une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d'une maladie professionnelle s'il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d'un travail qu'il a exercé ou qu'elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.
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1985, c. 6, a. 30.
[51] Le législateur, à l’article 29 de la loi, a introduit un outil afin de faciliter de la démonstration de l’existence d’une relation causale entre les maladies qu’il a rapportées à son annexe I et un type de travail qu’il décrit.
[52] À défaut de pouvoir bénéficier de cette présomption, la travailleuse doit démontrer qu’elle est atteinte d’une maladie professionnelle au sens de l’article 30, soit que sa maladie est caractéristique du travail qu’elle occupe ou qu’elle est reliée aux risques particuliers que comporte ce travail.
[53] À la section IV de l’annexe 1, sous paragraphe 2, le législateur a stipulé qu’une lésion musculo-squelettique se manifestant par des signes objectifs, (bursite, tendinite, ténosynovite) est une maladie professionnelle causée par des agents physiques lorsqu’il est démontré que le travail implique des répétitions de mouvements ou de pression sur des périodes de temps prolongées.
[54] Or, le diagnostic de syndrome du canal carpien n’est pas prévu à l’annexe 1 de la loi. La travailleuse ne peut donc bénéficier de l’application de la présomption énoncée ci-haut pour ce seul motif.
[55] De plus, selon le niveau de preuve offert par la travailleuse et ce, plus particulièrement par son témoignage, les quelques précisions qu’elle pût apporter quant aux durées ou enfin, quant aux périodes ainsi qu’au nombre de fois qu’elle fût appelée à travailler à un poste de travail, distinctement d’un autre poste de travail, ne permettent pas d’établir qu’elle fût appelée à exécuter des mouvements répétitifs sur des périodes de temps prolongées.
[56] En effet, la travailleuse n’a pas fourni d’étude qui aurait pu se baser sur des données disponibles chez l’employeur et ce, aux fins d’illustrer le nombre de mouvements qu’elle eut à accomplir à l’intérieur d’une période donnée tout en mesurant les périodes de récupération des structures sollicitées afin de déterminer s’il s’agit de périodes de repos compensatoires suffisantes ou non, de telle sorte que la Commission des lésions professionnelles ne peut retenir qu’il y eut exécution de mouvements répétitifs sur une période prolongée.
[57] D’ailleurs, en référence à l’ensemble des postes visionnés lors des témoignages de la travailleuse et du docteur Fradet, il y a lieu de constater qu’aucune cadence n’est imposée et ce, bien que certaines activités s’effectuent le long d’un convoyeur sur lequel défilent les biscuits. Aussi, bien que la travailleuse ait été appelée à faire la cueillette de tels biscuits, il n’en demeure pas moins que ces mouvements étaient exécutés à son propre rythme et que les structures sollicitées pouvaient bénéficier d’une certaine période de récupération.
[58] Donc, à défaut d’une étude exhaustive permettant de conclure à l’exécution d’un nombre important de mouvements, par seconde ou par minute, lequel nombre étant de nature à empêcher les structures sollicitées de bénéficier d’une période suffisante de repos compensatoire, il s’avère indiqué de conclure, en l’espèce, que la travailleuse ne fut pas appelée à exécuter des mouvements répétitifs sur des périodes de temps prolongées.
[59] Cette conclusion vaut également sous l’égide de l’article 30 de la loi et ce, compte tenu que la Commission des lésions professionnelles dut écarter l’application de la présomption énoncée à l’article 29, au premier motif voulant que le syndrome du canal carpien n’est pas un diagnostic qui figure à l’annexe1 de la loi.
[60] Dans un tel contexte, la travailleuse a donc le fardeau de démontrer, par une preuve prépondérante, que sa lésion est caractéristique du travail ou reliée à des risques particuliers du travail.
[61] Or, aucune étude épidémiologique ne fut soumise aux fins de démontrer que la lésion en cause est caractéristique du travail exercé par la travailleuse. Le fardeau de preuve incombe donc à la travailleuse de démontrer que sa lésion résulte de risques particuliers du travail.
[62] Pour la causalité professionnelle du syndrome du canal carpien, la jurisprudence[2] identifie les mouvements répétitifs de flexion ou d’extension complète du poignet, de déviation radiale ou cubitale répétée ou continue du poignet, des mouvements de préhension répétés d’objets avec pinces digitales, des mouvements de préhension pleine main ou des mouvements de préhension forcés et prolongés de la main.
[63] Dans l’affaire General Motors du Canada et Larocque[3], la Commission d’appel en matière de lésion professionnelles (la CALP) rappelait que les gestes répétitifs pouvant donner lieu à un syndrome du canal carpien sont des mouvements d’extension et de flexion impliquant une amplitude extrême du poignet ou des mouvements de force, de grippe continue, entraînant la contracture des muscles fléchisseurs des doigts.
[64] Et, dans l’affaire Aliments Small Fry inc. et Lester[4], la Commission des lésions professionnelles rappelle que le syndrome du canal carpien s’associe à certains facteurs de risque au travail, comme le travail hautement répétitif et qui requière de la force. Cette décision reconnaît également que la flexion des doigts combinée à celle des poignets, tout comme les mouvements de déviation cubitale, sont des facteurs de risques.
[65] Lors de son témoignage, la travailleuse a expliqué qu’elle fût appelée à travailler à différents postes de travail et ce, tant à l’usine à biscuits qu’à l’usine Nutriart. Elle précise alors que la période qui s’est échelonnée entre le mois de février 2006 et le mois d’octobre 2006, fut essentiellement consacrée à l’exécution de tâches aux postes de travail que l’on retrouve à l’usine à biscuits. Toutefois, pour la période qui s’est échelonnée du 29 octobre 2006 au mois de décembre 2006, elle fut essentiellement affectée au poste de travail que l’on retrouve au sein de l’usine Nutriart.
[66] Quand au moment de l’apparition de ses douleurs, elle indique que c’est au cours du mois d’octobre ou de novembre 2006 et ce, alors qu’elle travaillait plus particulièrement à l’usine à biscuits. Elle indique, par la même occasion, que ses engourdissements sont devenus de plus en plus importants au fur et à mesure qu’elle ramassait des biscuits.
[67] Or, en référence au visionnement des différents postes de travail que la travailleuse fût ainsi appelée à occuper durant les périodes ci-haut spécifiées et ce, au sein des deux usines, la Commission des lésions professionnelles retient essentiellement ce qui suit : dépendamment des lignes de production où la travailleuse était attitrée, elle pouvait être appelée à n’effectuer que du contrôle de qualité, la tâche devant alors être accomplie impliquant d’abord et avant tout une inspection visuelle et ce, afin de détecter les biscuits ne répondant pas aux normes ou enfin, au standard de qualité. Dans un tel cas, il lui appartenait alors de cueillir ce biscuit et de le retirer du convoyeur.
[68] Au poste plus spécifiquement désigné « aux dalots », la tâche consiste essentiellement à prendre plusieurs biscuits à la fois, lesquels sont rangés de manière horizontale dans un bac et de les maintenir rassemblés en pile, avec l’aide de ses deux mains, de manière à transporter celle-ci jusqu’à la machine qui est munie de dalots. Il s’agit alors de retourner la pile de biscuits alors maintenue de manière horizontale et ce, pour pouvoir l’insérer dans le dalot de manière verticale.
[69] La travailleuse précise alors qu’elle pouvait cueillir ainsi 30 à 40 biscuits par rangée. Quant au poids de chaque biscuit, elle l’évalue à tout au plus 10 grammes de telle sorte que le poids de la rangée ainsi manipulée s’évalue à tout au plus 300 ou 400 grammes.
[70] Lorsque le docteur Fradet fut appelé à commenter les mouvements que la travailleuse doit exécuter, il indique qu’il s’agit essentiellement d’un mouvement de préhension avec les deux mains. Aussi, au moment de cueillir la rangée de biscuits dans le bac de plastic, le poignet effectue une légère flexion mais sans plus puisqu’il considère l’amplitude bien peu importante.
[71] L’un des autres postes de travail visualisés implique de demeurer debout, devant une table, sur laquelle sont apposés de nombreux biscuits. L’activité consiste alors à prendre ces biscuits et à les déposer dans une petite caissette de plastic munie de séparateurs.
[72] Tel que constaté par le docteur Fradet, les mouvements en cause sont essentiellement des mouvements de préhension en pince, alors que le poignet est en position de fonction. Il indique alors que le poignet n’est nullement appelé à effectuer des mouvements de flexion ou d’extension avec amplitudes importantes ou extrêmes.
[73] À l’un des autres postes visualisés, il s’agit de séparer le chocolat des biscuits. La travailleuse est alors positionnée devant un bac rempli de biscuits au chocolat et maintient, dans l’une de ses mains, un couteau ou enfin, une spatule, alors que l’autre main sert à cueillir chaque biscuit.
[74] Encore là, tel que commenté par le docteur Fradet, le mouvement essentiellement accompli est un mouvement de préhension alors que le poignet est en position neutre.
[75] À l’un des postes, on a pu voir la travailleuse qui devait prendre, avec l’aide de ses deux mains, plusieurs biscuits qui étaient positionnés sur la table devant elle et ce, afin de les déposer en rangées, dans des bacs de plastic. Chaque rangée est déposée de manière à ce que les biscuits s’étalent horizontalement, dans le bac; quant aux rangées suivantes, elles sont empilées par-dessus ces premières rangées.
[76] Tel que commenté par le docteur Fradet, les mouvements alors accomplis par la travailleuse sont essentiellement des mouvements de préhension alors que le poignet est généralement en position de fonction. Il observe, toutefois, que celui-ci effectue, par moment, certains mouvements de légère flexion.
[77] Il indique, de plus, que le mouvement de préhension, tel qu’effectué, pour prendre plusieurs biscuits à la fois, implique davantage le niveau des interphalangiennes.
[78] Un autre poste consiste à vérifier la qualité des boîtes de biscuits qui défilent sur un convoyeur. Lorsque l’une de ces boîtes de biscuits n’offre pas la qualité requise, il s’agit alors de la retirer et de la déposer dans un bac situé à proximité du convoyeur. Quant au poids de la boîte ainsi manipulée, il représente tout au plus 350 grammes.
[79] Outre les biscuits que la travailleuse est ainsi appelée à manipuler, un autre poste requiert qu’elle manipule des barres aux fruits. Or, il s’agit d’effectuer d’abord un contrôle de qualité par le biais d’une inspection visuelle. De plus, avec l’aide d’une règle, elle réaligne les barres qui sont sur le convoyeur et ce, lorsque nécessaire. Enfin, lorsqu’une barre ne semble pas offrir la qualité recherchée, elle doit l’enlever du convoyeur.
[80] Tel que commenté par le docteur Fradet, le mouvement alors effectué est essentiellement un mouvement de préhension alors que le poignet est en position de fonction.
[81] Quant à la ligne où défilent des gaufrettes enrobées, la tâche consistait essentiellement à prendre au moins quatre gaufrettes avec chaque main et déposer celles-ci, ensuite, dans une caissette positionnée juste devant elle. Quant au poids de chaque gaufrette, il est évalué environ à quatre grammes, de telle sorte que le mouvement de prendre quatre gaufrettes à la fois implique de manipuler tout au plus 16 grammes.
[82] Tel qu’observé par le docteur Fradet, les mouvements essentiellement accomplis sont des mouvements de préhension pleine main alors que le poignet est généralement en position de fonction. Celui-ci, toutefois, se retrouve en légère flexion lorsque la travailleuse dépose les gaufrettes dans la boîte.
[83] Quant au poste où défilent, sur un convoyeur, des paquets de gaufrettes, la travailleuse devait alors cueillir deux ou trois boîtes à la fois, avec chaque main et ce, afin de déposer celles-ci dans une plus grande boîte; ensuite, elle devait apposer des étiquettes sur chacune de ces boîtes.
[84] Encore là, le docteur Fradet constate qu’il n’y a aucune posture contraignante, les mouvements que la travailleuse accomplit étant essentiellement des mouvements de préhension pleine main alors que le poignet est en position neutre.
[85] Par contre, il convient que le geste de poser des étiquettes implique un certain mouvement d’extension du poignet, lequel, toutefois, s’exécute avec une faible amplitude, évaluant celle-ci à tout au plus 45 degrés.
[86] L’un des autres items que la travailleuse fût également appelée à manipuler est celui communément désigné « biscuit - gelée éponge ». Pour ce poste, référence peut être faite au rapport complété par le docteur Michel Lizotte, le 17 octobre 2008 ainsi qu’à la bande vidéo qui permet de visualiser, plus particulièrement, ce poste de travail. Il y a lieu de constater que la travailleuse doit cueillir plusieurs biscuits à la fois et que le mouvement de préhension se fait avec la main qui est légèrement ouverte, le tout de manière à maintenir ces biscuits entre le pouce et le quatrième doigt. Quant à l’index et le majeur, ils servent plus particulièrement à maintenir les biscuits en équilibre et ce, le temps nécessaire afin de les soulever et de les déposer ensuite dans la petite caissette de plastic.
[87] Tel qu’observé par le docteur Fradet, il s’agit d’un mouvement de préhension en pince alors que le poignet est en position de fonction. Toutefois, au moment de déposer les biscuits dans la caissette de plastic, le poignet se retrouve alors en extension mais ce, avec une très faible amplitude.
[88] Tel qu’il appert, plus particulièrement, du rapport complété par le docteur Lizotte, le poids d’un seul biscuit gelée éponge est de 15 grammes alors que le poids d’un cabaret rempli de biscuits, est de 350 grammes. Quant à l’effort en cause au niveau des tendons des fléchisseurs profonds et superficiels, le tout en considération de la répercussion que cela peut avoir sur le nerf médian, le docteur Lizotte considère que la manipulation de trois biscuits, à la fois, implique un effort total sur les tendons de 0.11 kilogramme ou enfin, de un Newton, lequel effort est partagé, toutefois, entre le pouce et le quatrième doigt.
[89] De l’avis du docteur Lizotte, l’effort ainsi déployé ne peut avoir qu’une faible répercussion sur les tendons des fléchisseurs des doigts et du pouce. Par conséquent, cet effort au niveau des articulations des doigts de la main est très faible et engendre une très faible répercussion sur la force alors impliquée sur le nerf médian.
[90] Le docteur Fradet rappelle que cette activité consistant à manipuler délicatement les biscuits éponge afin de ne pas les écraser n’implique aucunement des mouvements extrêmes de flexion et d’extension du poignet. De plus, la force pré-digitale en cause est nettement inférieure à celle considérée par la littérature médicale comme étant susceptible d’élever la pression au niveau du canal carpien et d’endommager le nerf médian; à l’appui, le docteur Fradet réfère à l’un des extraits de littérature déposés et qui s’intitule Conférence d’enseignement 2008[5].
[91] Il explique qu’en référence à d’autres auteurs, le docteur Durandeau rappelle que ceux-ci ont constaté que la pression intracarpienne augmente lorsque le poignet se place en flexion ou en extension et ce, plus particulièrement lorsque le poignet atteint une amplitude de 90 degrés. Par contre, à l’état normal ou enfin, lorsque le poignet est en position neutre, la pression n’est pas affectée. De plus, ce même auteur indique que la force de prise digitale, de l’ordre de 10 Newton, est celle considérée comme pouvant élever la pression intracanalaire.
[92] Or, le docteur Fradet rappelle qu’il s’agit d’une pression qui dépasse 10 fois celle évaluée par le docteur Lizotte et qui n’est que d’un Newton.
[93] Outre la manipulation de biscuits ou d’autres items semblables, telles que les gaufrettes et barres en fruits, la travailleuse fut également appelée à travailler à un poste consistant à remplir les distributrices de sacs vides. Les sacs sont d’abord cueillis dans une grande boîte où ils sont contenus et ce, afin d’être transportés ensuite jusqu’à la machine. Les sacs sont alors insérés dans les distributeurs.
[94] Le docteur Fradet évalue, encore une fois, que la travailleuse n’est nullement appelée à exécuter des mouvements à risque, les mouvements essentiellement accomplis étant des mouvements de préhension associés, à certains moments, à un mouvement d’extension du poignet mais qu’il évalue de faible amplitude puisque atteignant tout au plus 45 degrés.
[95] Parmi les postes non visionnés, figure celui requérant de fermer les sacs de biscuits; la travailleuse fut alors appelée à simuler le mouvement requis pour procéder à la fermeture des sacs. Tel que commenté par le docteur Fradet, les mouvements essentiellement accomplis sont des mouvements de préhension avec les mains, combinés à un mouvement d’extension du poignet ou à un mouvement de déviation radiale et cubitale, lesquels mouvements, toutefois, n’impliquent qu’une faible amplitude.
[96] De l’avis du docteur Fradet, les mouvements ainsi accomplis ne comportent nullement des mouvements à risque pour occasionner un syndrome du canal carpien.
[97] Enfin, le docteur Fradet croit utile de référer à un autre extrait de littérature médicale issue de l’American Academy of Disability Evaluating Physicians (AADEP)[6] aux fins de rappeler que l’obésité est l’un des facteurs reconnus à risque par les auteurs. Il réfère, plus particulièrement, à l’un des tableaux qui apparaît au sein de cet article et qui permet d’établir qu’il y a quatre et cinq fois plus de risques de développer un syndrome du canal carpien lorsque l’indice de masse corporelle est supérieur à 25 ou 28. Il est ainsi d’opinion que le poids de la travailleuse, au moment de l’apparition de ses douleurs, correspond à un tel indice de masse corporelle.
[98] Enfin, le facteur de bilatéralité suggère également que le syndrome du canal carpien en cause s’associe davantage à une condition personnelle et ce, d’autant plus que plusieurs tâches que la travailleuse fût appelée à accomplir le sont souvent avec une seule main. Or, lorsque les deux mains sont mises à contribution, celles-ci ne sont pas nécessairement appelées à effectuer les mêmes mouvements.
[99] De l’avis du docteur Fradet, en somme, tous les postes décrits par la travailleuse et tels que plus spécifiquement observés lors du visionnement des vidéos, ne comportent nullement de postures contraignantes ou enfin, l’exécution de mouvements reconnus à risque pour causer un syndrome du canal carpien.
[100] Aussi, bien qu’il y ait plusieurs tâches qui requièrent d’effectuer constamment des mouvements de préhension, il n’en demeure pas moins qu’aucun effort ne doit être déployé et ce, compte tenu des conclusions énoncées par le docteur Lizotte, au sein du rapport qu’il a complété le 17 octobre 2008.
[101] En effet, il rappelle que la force ainsi mesurée par le docteur Lizotte pour les biscuits éponge s’avère infime par rapport à celle qui est considérée normalement dommageable pour le nerf médian, et ce, lorsque la pression se retrouve indûment augmentée dans le canal; par conséquent, il y a lieu d’extrapoler cette conclusion, pour toutes les autres manipulations effectuées par la travailleuse et ce, peu importe le type de biscuits qu’elle fût appelée à manipuler ou enfin le type de gaufrettes ainsi que le type de barres aux fruits.
[102] Madame Carole Houde fut également inviter à témoigner, à la demande de la représentante de l’employeur. Celle-ci indique qu’elle occupe le poste de vice-présidente à la production, depuis au moins 10 ans.
[103] Elle convient qu’en ce qui a trait au poste requérant de fermer les sacs de biscuits, il n’est nullement illustré par les bandes vidéo.
[104] Elle rappelle, toutefois, que cette activité ne s’exerce qu’à raison d’une fois par mois et ce, à raison d’une journée à la fois. Elle affirme, de plus, qu’une rotation est prévue aux demies heures, entre trois travailleuses, qui, en alternance, s’affairent à différentes activités dont celle consistant à fermer les sacs. Elle évalue que chaque travailleuse peut consacrer, tout au plus, une heure à une heure et demie par jour, à cette même activité.
[105] La Commission des lésions professionnelles retient de l’ensemble de la preuve soumise que, bien que les activités à accomplir au sein des différents postes puissent varier entre elles, il n’en demeure pas moins et ce, tel que constaté par le docteur Fradet, lui-même, que toutes ces activités impliquent l’exécution constante des mêmes mouvements, à savoir des mouvements de préhension ou des mouvements en pince, lesquels sont combinés occasionnellement ou bien à des mouvements de légères flexions ou enfin, à de légères extensions du poignet.
[106] La Commission des lésions professionnelles retient donc que la travailleuse était appelée à exécuter vraisemblablement les mêmes mouvements toute la journée et donc, toute la semaine et ce, peu importe le poste où elle était assignée et ce, que ce soit que pour quelques heures ou quelques jours.
[107] Or, bien qu’il s’agisse de l’exécution des mêmes mouvements, la Commission des lésions professionnelles retient l’opinion du docteur Fradet voulant que ceux-ci ne comportent aucunement de mouvements de flexion ou d’extension extrêmes du poignet.
[108] Et, quant aux mouvements de préhension pleine main ou de préhension avec pince digitale, ils furent accomplis sans que la travailleuse ait à déployer un quelconque effort puisque les charges en cause sont négligeables.
[109] En effet, tel que davantage explicité par le docteur Fradet et ce, à la lueur des conclusions énoncées par le docteur Lizotte au sein du rapport complété le 17 octobre 2008, les items manipulés représentent un poids négligeable, de telle sorte que la force en cause n’excède, en aucun cas, celle calculée par le docteur Lizotte, soit un Newton. Or, il s’agit d’une force nettement insuffisante pour contribuer à augmenter la pression au niveau du canal carpien et occasionner, par la même occasion, des dommages au niveau nerf médian.
[110] En somme, bien que la travailleuse ait eu à accomplir quotidiennement et ce, de manière répétée, de tels mouvements de préhension, il n’en demeure pas moins que ces mouvements ne comportent aucunement des sollicitations reconnues à risque pour causer un syndrome du canal carpien.
[111] Par conséquent, bien que la Commission des lésions professionnelles puisse retenir que la preuve a établi que la travailleuse fut appelée à exécuter des tâches qui comportent tantôt l’exécution répétée de mouvements de préhension d’objets avec pince digitale tantôt l’exécution répétée de mouvements de préhension pleine main, il n’en demeure pas moins que ces mouvements furent effectués sans l’usage de la force et sans résistance.
[112] La Commission des lésions professionnelles doit donc conclure, de l’ensemble de la preuve présentée devant elle, que les tâches accomplies par la travailleuse, au sein des deux usines de biscuits Leclerc, ne comportent pas de facteurs de risque susceptibles de causer un syndrome du canal carpien.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossier : 325711-31-0708
ACCUEILLE la requête de Biscuits Leclerc ltée, l’employeur;
INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 12 juillet 2007, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que madame Amélie Morin, la travailleuse, n’a pas subi de lésion professionnelle, le ou vers le 4 décembre 2006.
Dossier : 338886-31-0801
DÉCLARE sans objet la requête de Biscuits Leclerc ltée;
DÉCLARE sans effet la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 23 janvier 2008, à la suite d’une révision administrative et ce, eu égard aux conclusions d’ordre médical énoncées au sein de l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 4 décembre 2007.
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Carole Lessard |
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Me Karine Brassard |
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BEAUVAIS, TRUCHON, ASS. |
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Représentante de la partie requérante |
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[1] L.R.Q., c. A-3.001.
[2] Claveau et Provigo et CSST-Saguenay-Lac-St-Jean, 117214-02-9905, 9 février 2000, P. Simard; Gouin et Les Industries P.P.D. inc., 128103-05-9912, 6 avril 2000, M. Allard; Gilbert et Les Salaisons Brochu inc., 128893-31-9912, 7 août 2000, P. Simard; Audet et Hydro-Québec, 177852-32-0202, 13 janvier 2003, C. Lessard.
[3] C.A.L.P. 61985-64-9408, 4 juin 1996, M. Cuddihy.
[4] [2000] C.L.P. 960 .
[5] DUPRAC, Cahier d’enseignement de la SOFCOT, DURANDEAU, A., Syndrome du canal carpien, Pôle d’orthopédie-traumatologie, Hôpital Pellegrin, Bordeaux, France. 2008, Elsevier Masson SAS.
[6] TALMAGE, James B. et MELHOM, J. Mark, Carpal Tunnel Syndrome A to Z : Including the Relevance of nerve Conduction Sutdies, 19th Annual Scientific - Advanced Skills Courses, 9 novembre 2005.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.