Cardinal et Lafarge Groupe matériaux de construction |
2012 QCCLP 7839 |
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[1] Le 16 avril 2012, monsieur Michel Cardinal (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision rendue le 30 mars 2012 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision en révision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 7 mars 2012 et refuse d’autoriser le coût des traitements de bloc de branche médiane lombaire au motif que la réclamation du travailleur pour une récidive, rechute ou aggravation a été refusée.
[3] À l’audience tenue à Montréal, seul le travailleur était présent.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision du 30 mars 2012 et d’autoriser le coût des traitements de bloc de branche médiane lombaire.
L’AVIS DES MEMBRES
[5]
La membre issue des associations syndicales ainsi que la membre issue
des associations d’employeurs sont d’avis que la requête du travailleur doit
être accueillie. Ils considèrent que l’article
LES FAITS ET LES MOTIFS
[6] La Commission des lésions professionnelles doit décider du bien-fondé de la décision du 30 mars 2012 et, plus particulièrement, si le travailleur a droit au remboursement du coût relié aux traitements de bloc de branche médiane lombaire.
[7] La CSST, autant dans sa décision initiale que dans sa décision en révision du 30 mars 2012, refuse le remboursement des traitements de bloc de branche médiane lombaire au motif que la réclamation du travailleur pour une récidive, rechute ou aggravation qui serait survenue le 14 août 2007 a été refusée.
[8] La Commission des lésions professionnelles ne peut retenir la conclusion de la CSST, puisqu’elle ne s’appuie sur aucune disposition dans la loi et est contraire à la jurisprudence du tribunal.
[9]
En effet, c’est l’article
188. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.
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1985, c. 6, a. 188.
[10] L’assistance médicale est assujettie à deux conditions. Le travailleur doit avoir subi une lésion professionnelle et l’assistance médicale doit être requise par son état de santé en raison de cette lésion professionnelle.
[11] Le travailleur n’a pas à prouver une nouvelle lésion professionnelle pour avoir droit à l’assistance médicale[2].
[12]
Par ailleurs, l’article
[13] D’ailleurs, dans l’affaire Quenneville et Truscon Steel Works[6], la Commission des lésions professionnelles s’exprime comme suit à ce sujet :
[16] La soussignée est d'opinion que cette prémisse ne
respecte pas l'esprit de la loi, particulièrement les termes de l'article
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2 Les Entrepreneurs Becker
inc. Et Sylvestre
3 Basting et R.J.R. MacDonald inc.
Bush et Urgences Santé,
4 Faucher
et Canadian Tire,
5 Larochelle
et Entreprise Vibec inc.,
6 Lamontagne et Sûreté du Québec,
Paul et Howard Bienvenue inc., 91644-08-9709m 99-01-29, R. Savard
7 Houde
et SPCUM,
[14] Dans l’affaire Vachon et Société Asbestos ltée[7], la Commission des lésions professionnelles est aussi de cet avis :
[51] En cette matière, il n’y a donc aucune exigence relative à une quelconque démonstration de détérioration ou de réapparition d’une symptomatologie. Il suffit que le travailleur ait été victime d’une lésion auparavant, qu’elle soit consolidée ou non, et que le besoin d’assistance prescrit soit requis par l’état de santé du travailleur et qu’il soit en lien avec la lésion.
[15] En l’espèce, la lésion professionnelle initiale est survenue le 5 juin 2001. Initialement, la lésion reconnue est une entorse de la malléole gauche. Cependant, dans une décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 2 décembre 2005, les diagnostics de lombalgie, de méralgie paresthésique à la cuisse gauche et de douleurs aux deux hanches ont été reconnus comme étant en relation avec l’événement du 5 juin 2001[8].
[16] Dans une décision du 4 juillet 2007, la Commission des lésions professionnelles[9] retient une atteinte permanente de 2 % pour l’entorse à la cheville gauche, de 2 % pour lombalgie résiduelle et de 1 % pour la méralgie à la cuisse gauche. S’est ajouté 0,75 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie. Le travailleur s’est aussi vu reconnaître des limitations fonctionnelles au niveau de la cheville ainsi que des limitations fonctionnelles au niveau lombaire.
[17] Le travailleur a témoigné à l’audience. En raison de ses lésions professionnelles, il a dû prendre d’importantes quantités de médicaments. Son médecin a même suggéré une désintoxication. Le travailleur explique qu’il a par lui-même cessé la consommation de médicaments. Il a ensuite revu le docteur Harris en janvier 2011 et c’est alors qu’il lui a parlé des traitements de bloc de branche médiane lombaire qu’il avait eus avec le docteur Richard Lambert, seul traitement qui l’avait véritablement soulagé et sur une période importante. Il avait à ce moment senti un soulagement au delà d’une année. Il a donc rencontré le docteur Harris en février 2012 et ce dernier lui a prescrit un traitement de thermolésion, soit le traitement de bloc de branche médiane lombaire. Le travailleur s’explique difficilement pourquoi ce traitement lui est refusé. Il lui avait été accordé antérieurement et il en a besoin pour palier les douleurs importantes et l’incapacité significative causée par sa lésion professionnelle. La douleur est telle qu’il a de la difficulté à marcher et il ne peut plus prendre aucun médicament. Il précise qu’il n’a plus de qualité de vie et que le docteur Lambert est favorable à un tel traitement qui pourrait aider à le soulager et lui permettre d’avoir une certaine qualité de vie.
[18] Le docteur Lambert a effectivement prescrit le traitement en lien avec la lésion professionnelle initiale.
[19] La souffrance du travailleur en lien avec la nécessité de ce traitement est bien documentée dans le dossier. Le travailleur a d’ailleurs été référé au docteur Imbeault qui propose une première thermolésion en mars 2004. Déjà, en 2004, le docteur Harris mentionne des difficultés avec la CSST qui refusait de payer la thermolésion. Une autre thermolésion est recommandée en 2005. Le travailleur confirme d’ailleurs à l’audience qu’il a reçu deux traitements. Le dossier nous informe aussi que durant cette période, le travailleur est fortement médicamenté. Il a, entre autres, pris de l’Hydromorph Contin et du Dilaudil. On peut lire aussi au dossier que le docteur Harris constate que le travailleur n’est pas soulagé par l’importante médication.
[20] Il ne faut pas négliger les limitations fonctionnelles reconnues et l’atteinte permanente. Le docteur Henri-Louis Bouchard, membre du Bureau d’évaluation médicale, écrit le 20 juin 2006 qu’il s’agit ici d’une lombalgie chronique avec ankylose partielle aux dépens de la flexion et d’une atteinte sensitive de classe 2 du nerf fémorocutané à la cuisse gauche.
[21] Le 29 septembre 2006, le docteur Harris soulignait que le travailleur était très souffrant. Il précise, le 21 novembre 2006, que le travailleur est très souffrant, malgré les narcotiques. Il confirme, le 10 avril 2007, qu’il n’y a pas de changement sous narcotiques. Les séquelles douloureuses de la lésion professionnelle ne sont plus soulagées par les narcotiques, tel qu’il ressort clairement du suivi médical effectué par le docteur Harris. Il précise même, en mai 2007, que le travailleur doit être désintoxiqué. Ce qu’il fait par lui-même. C’est par la suite, afin d’être en mesure de soulager le travailleur de ses douleurs, qu’il recommande le traitement actuellement en litige. D’ailleurs, il indique au docteur Lambert, physiatre, qu’il a épuisé ses ressources, que le travailleur est souffrant et désespéré ainsi que lui-même et demande des recommandations pour des traitements.
[22] La Commission des lésions professionnelles constate qu’il ne fait aucun doute que l’état du travailleur nécessite des traitements de bloc de branche médiane lombaire et/ou thermolésion qui sont en lien avec sa lésion professionnelle initiale. Il s’agit d’un traitement de support et d’un traitement qui pourrait apaiser ses souffrances et augmenter sa qualité de vie. C’est en raison des séquelles liées à sa lésion professionnelle que le traitement est requis. Le travailleur a donc droit au remboursement du traitement.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête présentée par monsieur Michel Cardinal, le travailleur;
INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 30 mars 2012, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a droit à l’assistance médicale, soit aux traitements de bloc de branche médiane lombaire (thermolésion), qui doivent être remboursés par la Commission de la santé et de la sécurité du travail.
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Sylvie Arcand |
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Monsieur Carl Gilbert |
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DION, DURRELL ASSOCIÉS INC. |
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Représentant de la partie intéressée |
[1] L.R.Q. c. A-3.001.
[2] Basting et R.J. R. MacDonald inc., C.A.L.P.
[3] Dicaire et Métallurgie Noranda inc. (division CCR),
C.L.P.
[4] Estinvil et Fibro Friction, précitée, note 2; Sciascia
et Boulangerie & pâtisserie A. Ampère,
[5] Larochelle et Entretien Vibec inc., précitée,
note 4; Roy,
[6] Précitée, note 5.
[7] C.L.P.
[8] C.L.P.
[9] C.L.P. 281437-71-0602, C. Racine.
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