Carignan et Ébénisterie St-Urbain ltée |
2012 QCCLP 7857 |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Longueuil |
10 décembre 2012 |
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Région : |
Richelieu-Salaberry |
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Dossier CSST : |
134828425 |
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Commissaire : |
Norman Tremblay, juge administratif |
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Membres : |
Jean-Benoit Marcotte, associations d’employeurs |
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René Deshaies, associations syndicales |
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Assesseur : |
Pedro Molina-Negro, médecin |
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425195 |
469956 |
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René Carignan |
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Partie requérante |
Partie requérante |
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et |
et |
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Ébénisterie St-Urbain ltée |
Ébénisterie St-Urbain ltée |
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Partie intéressée |
Partie intéressée |
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Commission de la santé et de la sécurité du travail |
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Partie intervenante |
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DÉCISION
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Dossier 425195-62C-1011
[1] Le 25 novembre 2010, monsieur René Carignan (le travailleur) dépose, à la Commission des lésions professionnelles, une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité au travail (la CSST) rendue le 3 novembre 2010, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme deux décisions qu’elle a initialement rendues le 26 août 2010 et le 3 septembre 2010.
[3] La première décision donnait suite aux conclusions rendues par un membre du Bureau d’évaluation médicale relativement à la consolidation de la lésion professionnelle, à la suffisance des soins et traitements, à l’atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles. Conformément à l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 29 juillet 2010, la CSST conclut que le diagnostic est celui de contusion et entorse lombaire sur discopathie L4-L5 et L5-S1, épicondylite au coude droit, tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite et capsulite adhésive secondaire, contusion du genou droit et contusion et entorse de la cheville droite sur arthrose sous-astragalienne. La contusion du genou droit, la contusion et entorse de la cheville droite sont déclarées consolidées sans nécessité de médicaments ni de traitements et sans aucune atteinte permanente ni limitation fonctionnelle.
[4] La seconde décision, quant à elle, refuse au travailleur le remboursement des frais d’entretien courant du domicile.
Dossier 469956-62C-1205
[5] Le 3 mai 2012, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 17 avril 2012, à la suite d’une révision administrative.
[6] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 31 janvier 2012, concluant à l’absence de relation entre le nouveau diagnostic de tendinite achilléenne gauche et l’événement du 16 juin 2009.
[7] À l’audience tenue le 24 septembre 2012, le travailleur est présent et non représenté. Ébénisterie St-Urbain ltée (l’employeur) n’est ni présent ni représenté. La CSST a avisé de son absence à l’audition et elle envoyé une argumentation écrite relativement au dossier 425195-62C-1011.
[8] Le dossier est mis en délibéré le 24 septembre 2012.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
Dossier 425195-62C-1011
[9] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que l’entorse à la cheville droite est consolidée avec une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[10] Le travailleur demande également à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit au remboursement des frais d’entretien courant de son domicile.
Dossier 469956-62C-1205
[11] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que le nouveau diagnostic de tendinite achilléenne gauche est en relation avec l’événement du 16 juin 2009.
L’AVIS DES MEMBRES
[12] Le membre issu des associations syndicales est d’avis d’accueillir en partie les requêtes du travailleur. Selon le membre, la preuve démontre de façon prépondérante que le travailleur demeure avec une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. De ce fait, il conclut aussi que la lésion au niveau de la cheville gauche résulte d’une surutilisation de cette cheville causée par la lésion à la cheville droite.
[13] Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis de rejeter les requêtes du travailleur. Il est d’avis que la preuve ne démontre pas d’atteinte permanente ni de limitation fonctionnelle à la cheville droite. Il s’en suit que la lésion à la cheville gauche ne résulte pas d’une surutilisation de cette cheville.
[14] Quant au remboursement des frais d’entretien courant de son domicile, les deux membres sont d’avis que le travailleur n’y a pas droit puisqu’il reçoit déjà de la CSST le maximum prévu par la loi à ce chapitre.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[15] Dans un premier temps, la Commission des lésions professionnelles analysera la demande du travailleur par rapport à l’atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles relatives à la contusion et à l’entorse de la cheville droite ainsi que la demande de reconnaissance du nouveau diagnostic de tendinite achilléenne gauche à titre de lésion professionnelle.
[16] Ensuite, la Commission des lésions professionnelles étudiera la question du droit au remboursement des frais d’entretien courant du domicile.
[17] Dans sa description des faits, le tribunal ne retiendra que les faits pertinents aux réclamations du travailleur.
[18] Le 16 juin 2009, le travailleur subit un accident qu’il décrit dans sa réclamation à la CSST comme suit : « J’ai reçu entre 30 et 40 panneaux de mélamine sur la tête et tous le corp » [sic]. Le travailleur subit une perte de conscience et est transporté en ambulance à l’hôpital de Salaberry-de-Valleyfield.
[19] Le même jour, le docteur Leduc examine le travailleur et conclut à des contusions multiples au cou, au genou droit, à l’épaule droite, au coccyx et au niveau lombaire. Le docteur Leduc diagnostique aussi une entorse à la cheville droite.
[20] Le 23 juin 2009, la CSST accepte la réclamation du travailleur pour un accident de travail survenu le 16 juin 2009. À ce moment, le diagnostic retenu est celui de contusion multiple et une entorse à la cheville droite.
[21] Le 25 juin 2009, le docteur Lareau diagnostique des contusions multiples avec trois épisodes de syncope.
[22] Le 9 juillet 2009, un rapport médical du docteur Lareau conclut à des contusions multiples, à des syncopes récurrentes et à une entorse bimalléolaire de la cheville droite.
[23] Le 6 août 2009, le travailleur est dirigé par le docteur Lareau vers la docteure Browman, orthopédiste et médecin traitant. En examinant le travailleur les 7 et 21 octobre, la docteure Browman recommande une imagerie par résonance magnétique.
[24] Le 29 octobre 2009, l’imagerie par résonance magnétique de la cheville droite est réalisée. Le rapport du docteur Dussault mentionne un petit épanchement intra-articulaire tibio-astragalien, un os trigonome non uni avec arthrose entre l’os trigonome et le processus postérieur du calcanéum et une arthrose modérément sévère de l’articulation sous-astragalienne postérieure.
[25] Le 30 octobre 2009, la docteure Browman remplit un rapport médical concluant à une entorse de la cheville droite, entorse lombaire ainsi qu’une tendinite à l’épaule droite et au coude droit.
[26] Durant les mois de novembre et de décembre 2009, le travailleur a été examiné par plusieurs médecins et a subi quelques tests et imageries pour des lésions autres que celle de la cheville droite. Il s’agit de contusion de l’épaule droite, et du coude droit, de contusion cérébrale, de pertes de conscience et de phénomènes syncopaux.
[27] Le 10 février 2010, le travailleur est réexaminé par la docteure Browman qui diagnostique une entorse à la cheville droite, diagnostic qu’elle maintient lors de la visite suivante du 7 avril 2010.
[28] Le 6 mai 2010, le travailleur est examiné par le docteur Farmer, médecin désigné par l’employeur qui diagnostique plusieurs lésions, dont l’entorse à la cheville droite.
[29] Le docteur Farmer considère que son examen fait ressortir des signes de non-organicité sans par ailleurs donner plus de précisions. Son examen de la cheville est rapporté comme démontrant une mobilité active variante. Le docteur Farmer consolide néanmoins l’entorse de la cheville droite au 6 mai 2010 sans nécessité de traitements, ni d’atteinte permanente ou limitation fonctionnelle.
[30] Le 30 juin 2010, la docteure Browman rédige un rapport médical dans lequel elle mentionne qu’elle n’est pas d’accord avec l’expertise du docteur Farmer.
[31] Le 22 juillet 2010, le travailleur est examiné par le docteur Hany Daoud, chirurgien orthopédiste et membre du Bureau d’évaluation médicale. Dans un rapport datant du 29 juillet 2010, le docteur Daoud conclut à des lésions multiples dont une contusion et une entorse à la cheville droite sur arthrose sous-astragalienne. Son examen démontre une dorsiflexion de 15 degrés et une plantiflexion à 40 degrés. Il constate aussi une mobilité réduite de 50 % au niveau du sous-astragalienne. Il considère cet examen normal du fait qu’il est identique du côté gauche.
[32] À l’instar du docteur Farmer, il consolide donc la lésion à la cheville droite au 6 mai 2010 sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle.
[33] Le 18 août 2010 et le 20 octobre 2010, la docteure Browman examine le travailleur et diagnostique toujours une entorse à la cheville droite. Elle recommande alors la poursuite de la physiothérapie et les traitements d’acupuncture.
[34] Le 13 septembre 2011, la docteure Browman rédige un rapport d’évaluation médicale concluant notamment à la consolidation de la lésion à la cheville droite. La docteure Browman accorde ainsi une atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique correspondant à un déficit anatomo-physiologique total de 33 % dont 2 % pour la cheville droite. Le rapport d’évaluation médicale accorde également des limitations fonctionnelles, dont la marche pour plus de 20 à 30 minutes et le travail sur un terrain glissant ou accidenté.
[35] Le 13 janvier 2012, la docteure Browman diagnostique une tendinite achilléenne gauche qu’elle estime attribuable à un phénomène de compensation. Elle prescrit des traitements de physiothérapie.
[36] Le 10 avril 2012, le Bureau d’évaluation médicale rend un avis dans lequel le docteur Greenfield accorde au travailleur une atteinte permanente de 31 % pour l’ensemble des diagnostics reconnus en relation avec l’événement du 16 juin 2009.
[37] Le 18 juillet 2012, la CSST, faisant suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 10 avril 2012, accorde le remboursement de certains frais d’entretien courant du domicile. Par cette même décision, la CSST refuse le remboursement de l’entretien de la piscine, l’émondage des arbres et l’entretien ménager.
[38] À l’audience, le travailleur témoigne qu’avant l’événement du 16 juin 2009, il était capable de courir, mais que depuis cette date, il ne peut même plus marcher sans l’aide d’une canne l’obligeant à solliciter davantage son pied gauche qui a commencé à être douloureux à compter du printemps 2010.
[39] Concernant le remboursement des frais d’entretien courant du domicile, le travailleur témoigne à l’audience qu’il ignorait qu’il y avait un maximum annuel pour le remboursement de ces frais d’entretien courant du domicile.
Atteinte permanente et limitations fonctionnelles de la cheville droite
[40] La preuve médicale présente dans le dossier et relative à la cheville droite du travailleur se résume en 3 éléments : l’avis du médecin traitant, la docteure Browman, l’expertise médicale du docteur Farmer, médecin désigné par l’employeur, et l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale.
[41] Si l’on s’en tient aux seules conclusions, deux de ces éléments plaident en faveur d’une consolidation de la cheville droite sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle.
[42] En effet, le docteur Farmer, médecin désigné par l’employeur et le docteur Daoud, membre du Bureau d’évaluation médicale, concluent tous les deux leurs examens par la consolidation de l’entorse et la contusion à la cheville droite sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle.
[43] Cependant, la lecture de ces deux examens médicaux, plus précisément des examens cliniques réalisés sur la cheville droite du travailleur, montre quelques différences avec les conclusions.
[44] Tout d’abord, le docteur Farmer explique dans son examen clinique de la cheville droite que celle-ci a une mobilité active variable selon les circonstances. Ainsi, même s’il conclut à une consolidation de la lésion à la cheville sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle, le docteur Farmer indique dans son rapport que l’articulation sous-astragalienne est caractérisée par une diminution du mouvement bilatéral.
[45] Ensuite, le docteur Daoud du Bureau d’évaluation médicale qui conclut également à une consolidation de l’entorse à la cheville droite sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle mentionne dans son examen clinique de la cheville droite que les mouvements de celle-ci sont à 15° en dorsiflexion et à 40° en plantiflexion, ce qui laisse apparaître une perte de 5° en arc complet. De plus, le docteur Daoud évoque également, dans son examen clinique, la diminution de l’articulation sous-astragalienne qu’il calcule à environ 50 % de la normale.
[46] Pour sa part, la docteure Browman, médecin traitant, a rédigé un rapport d’évaluation médicale en date du 13 septembre 2011, dans lequel elle consolide l’entorse à la cheville droite avec une atteinte permanente de 2 % et des limitations fonctionnelles. L’examen clinique de la docteure Browman confirme ses conclusions et montre que l’amplitude de mouvement de la cheville droite est de 30° en flexion plantaire et de 0° en dorsiflexion. La docteure Browman arrive également à une diminution de la soustragalienne de 5°. L’examen de la docteure Browman n’est pas symétrique comme celui des docteurs Farmer et Daoud.
[47] Eu égard à tout ce qui précède, le tribunal retient l’examen clinique et les conclusions du rapport d’évaluation médicale de la docteure Browman quant à la question de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[48] Par conséquent, le tribunal estime que l’entorse à la cheville droite du travailleur est consolidée en date du 6 mai 2010, avec une atteinte permanente correspondant à un déficit anatomo-physiologique de 2 % et les limitations fonctionnelles suivantes :
- Éviter de faire des mouvements répétitifs de la cheville droite;
- Éviter la marche soutenue pour plus de 20-30 minutes à la fois;
- Éviter le travail dans une position accroupie ou agenouillée;
- Éviter le travail sur un terrain accidenté ou glissant.
Nouveau diagnostic de tendinite achilléenne gauche
[49] Selon la docteure Browman qui a produit un rapport médical datant du 13 janvier 2012, le nouveau diagnostic de tendinite achilléenne gauche est attribuable à un phénomène de compensation.
[50] Le phénomène de compensation suppose une surutilisation du membre symétrique destinée à compenser la diminution de capacité de l’autre membre. Cette diminution doit être attribuable à une lésion professionnelle.
[51] Le principe de la surutilisation est reconnu par la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles à condition d’être appuyé par une preuve factuelle et médicale prépondérante[1].
[52] En l’espèce, il ressort de la preuve soumise que le travailleur a une constitution forte puisqu’il pèse 315 livres pour 5 pieds et 11 pouces. En outre, le travailleur se déplace depuis l’événement du 16 juin 2009 à l’aide d’une canne.
[53] Selon la preuve, la docteure Browman ne fait pas référence à la cheville gauche avant le mois de janvier 2012. Rappelons aussi que l’état de cette cheville était normal lors de son examen de septembre 2011. Cette preuve exclut toute condition préexistante à cette cheville et milite en faveur de la thèse de la surutilisation. Le travailleur mentionne, quant à lui, que la douleur de ce côté a commencé de façon insidieuse à compter du printemps 2010 pour laquelle une attention médicale est requise à compter de janvier 2012.
[54] Le tribunal estime que cette preuve démontre que la diminution de capacité de la cheville gauche est attribuable à la lésion professionnelle du côté droit puisque le travailleur, comme expliqué plus haut, a, en relation avec la lésion professionnelle du 16 juin 2009, une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles à la cheville droite équivalant à un déficit anatomo-physiologique de 2 %. Cette lésion du côté gauche est apparue en cours du suivi pour la cheville droite alors que le travailleur en tout temps pertinent se déplaçait à l’aide d’une canne entrainant ainsi la surutilisation du côté gauche.
[55] Par conséquent, le tribunal estime que les déplacements d’une personne avec une constitution forte et utilisant une canne dans le cadre de ses activités de la vie quotidienne et domestique, sont de nature à solliciter le tendon d’Achille gauche, si cette personne souffre d’une atteinte permanente à la cheville droite comme écrit plus haut.
[56] Le tribunal est donc d’avis de donner droit à la réclamation du travailleur en déclarant que le nouveau diagnostic de tendinite achilléenne gauche est attribuable à une surutilisation de ce membre et par conséquent, il constitue une lésion professionnelle.
Le remboursement des frais d’entretien courant du domicile
[57] Le travailleur demande au tribunal de lui accorder le remboursement des frais d’entretien courant de son domicile.
[58] Le remboursement de ces frais est prévu par l’article 165 de la loi qui se lit comme suit :
165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.
__________
1985, c. 6, a. 165.
[59] Au moment où il contestait la décision de la CSST du 3 novembre 2010, le travailleur réclamait le remboursement de tous les frais d’entretien courant de son domicile pour les années 2009, 2010, 2011 et 2012. En effet, la CSST lui avait refusé, aussi bien en décision initiale qu’en révision administrative, le remboursement des frais d’entretien courant en raison de l’absence d’une atteinte permanente à cette époque.
[60] Cependant, et comme mentionné plus haut, la CSST a accordé au travailleur, le 18 juillet 2012, le remboursement d’une partie de certains frais d’entretien courant du domicile pour toute la période concernée à la suite de sa décision faisant suite à l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale du 10 avril 2012 qui accorde au travailleur une atteinte permanente de 31 % pour l’ensemble des diagnostics reconnus en relation avec l’événement du 16 juin 2009.
[61] Ainsi, la CSST a remboursé le déneigement de l’entrée automobile, de deux voies d’accès au domicile (trottoirs), la tonte de gazon, la peinture intérieure aux 5 ans et extérieure (galerie et patio) aux 2 ans, le taillage des haies annuellement, le cordage de 5 cordes de bois par année et le grand ménage annuel incluant un lavage des vitres.
[62] Par contre, la CSST refuse toujours le remboursement des frais d’entretien suivants : l’entretien de la piscine, l’émondage des arbres et l’entretien ménager léger.
[63] Lors de l’audience, le travailleur indique qu’il maintient sa réclamation malgré le remboursement de certains frais d’entretien courant du domicile. Ainsi, le travailleur conteste le non-remboursement des frais mentionnés au paragraphe précédent, mais aussi le remboursement incomplet de certains frais d’entretien courant du domicile.
[64] En effet, la CSST n’a pas payé la totalité des montants réclamés par le travailleur au titre des frais d’entretien courant du domicile au motif qu’elle ne peut pas remboursé au-delà du maximum prévu par la loi.
[65] L’article 165 de la loi précité prévoit un maximum de 1,500 $ par année pour le remboursement des frais d’entretien courant du domicile. Ce montant est sujet à une revalorisation annuelle selon les articles 118 et 119 de la loi :
118. Toutes les sommes d'argent fixées dans le présent chapitre, à l'exception des articles 50, 63 et 66, dans le chapitre IV et dans les annexes II et V sont revalorisées le 1er janvier de chaque année.
L'indemnité de décès que reçoit un bénéficiaire en vertu du premier alinéa de l'article 102 est aussi revalorisée à cette date.
__________
1985, c. 6, a. 118.
119. La revalorisation est faite en multipliant le montant à revaloriser par le rapport entre l'indice des prix à la consommation de l'année courante et celui de l'année précédente.
__________
1985, c. 6, a. 119.
[66] Ce maximum légal est revalorisé chaque année par la CSST. Il était de 2836 $ en 2009, 2847 $ en 2010, 2895 $ en 2011 et il correspond à 2976 $ en 2012.
[67] Or, il appert des notes évolutives versées au dossier que la CSST a remboursé au travailleur les frais d’entretien courant du domicile à hauteur de 2836 $ (1220 $ + 1616 $) en 2009 et 2847 $ (2547 $ + 300 $) en 2010. Ce qui correspond parfaitement au maximum légal.
[68] Avant de se pencher sur la question des frais d’entretien courant du domicile qui sont remboursables ou non par la CSST, le tribunal doit d’abord répondre à la question suivante : la Commission des lésions professionnelles peut-elle rembourser au-delà du maximum prévu par la loi?
[69] Si la réponse est positive, le tribunal traitera de la question des frais remboursables de ceux qui ne le sont pas. Sinon, le débat s’arrêtera à la première question puisqu’il ne s’agit pas ici de rendre un jugement déclaratoire.
[70] La Commission des lésions professionnelles a eu l’occasion, à maintes reprises, de s’exprimer au sujet du maximum des frais d’entretien courant du domicile remboursable par la CSST tel que prévu par les articles 118, 119 et 165 de la loi. Et sa jurisprudence est unanime[2] : la Commission des lésions professionnelles est liée par le maximum prévu par la loi.
[71] La Commission des lésions professionnelles s’exprimait ainsi dans l’affaire Forget et Chemins de fer nationaux du Canada[3] :
[16] Le tribunal a expliqué au travailleur qu’il n’avait pas compétence pour ordonner à la CSST de rembourser des frais qui dépassent le maximum prévu par la loi. Le texte de l’article 165 ne souffre d’aucune interprétation différente possible : le travailleur ne peut être remboursé des frais qu’il engage pour faire exécuter des travaux d’entretien, par ailleurs admissibles, que jusqu’à concurrence du maximum annuel prévu. […]
[72] Le soussigné partage l’avis de la jurisprudence selon laquelle la Commission des lésions professionnelles ne peut pas accorder un remboursement des frais d’entretien courant du domicile qui dépasserait le maximum légal.
[73] Par conséquent, le tribunal rejette la demande du travailleur quant au remboursement des frais d’entretien courant de son domicile.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossier 425195-62C-1011
ACCUEILLE en partie la requête du travailleur, monsieur René Carignan, déposée le 25 novembre 2010;
INFIRME en partie la décision de la Commission de la santé et sécurité au travail rendue le 3 novembre 2010, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que l’entorse à la cheville droite du travailleur est consolidée avec une atteinte permanente, correspondant à un déficit anatomo-physiologique de 2 %;
DÉCLARE que l’entorse à la cheville droite est consolidée avec les limitations fonctionnelles suivantes :
- Éviter de faire des mouvements répétitifs de la cheville droite;
- Éviter la marche soutenue pour plus de 20-30 minutes à la fois;
- Éviter le travail dans une position accroupie ou agenouillée;
- Éviter le travail sur un terrain accidenté ou glissant;
DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit à un montant supplémentaire à titre de frais d’entretien courant du domicile puisqu’il a atteint le maximum prévu par la loi.
Dossier 469956-62C-1205
ACCUEILLE la requête du travailleur, monsieur René Carignan, déposée le 3 mai 2012;
INFIRME la décision de la Commission de la santé et sécurité au travail rendue le 17 avril 2012, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la tendinite achilléenne gauche qu’a subie le travailleur constitue une lésion professionnelle.
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Norman Tremblay |
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Me Kevin Horth |
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VIGNEAULT, THIBODEAU, BERGERON |
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Représentant de la partie intervenante |
[1] Kennedy et Dixie Lee Gaspé, C.L.P. 408586-01B-1004, 22 février 2011, D. Therrien; Bellemare et Commission scolaire des Navigateurs, C.L.P. 213826-03B-0308, 30 novembre 2006, G. Marquis.
[2] Jean et Lambert Somec inc., C.L.P. 122765-72-9909, 31 janvier 2000, M. Bélanger; Tremblay et Centre de santé des Nord-Côtiers, C.L.P. 252181-09-0501, 12 juillet 2005, L. Boudreault; Lefebvre et Entreprise de soudure Mohamed, C.L.P. 141969-72-0007, 3 mai 2001, C.-A. Ducharme.
[3] C.L.P. 257631-72-0503, 19 août 2005, G. Robichaud.
AVIS :
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