Systèmes Polymère Structural Canada et Manseau |
2008 QCCLP 617 |
|
||
COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
||
|
||
|
||
Saint-Hyacinthe |
1er février 2008 |
|
|
||
Région : |
Mauricie-Centre-du-Québec |
|
|
||
242078-04B-0408, 260420-04B-0504 288150-04B-0605, 297591-04B-0608 |
||
|
||
Dossier CSST : |
125026286 |
|
|
||
Commissaire : |
Alain Vaillancourt |
|
|
||
Membres : |
René Prince, associations d’employeurs |
|
|
Jean-Pierre Périgny, associations syndicales |
|
|
|
|
______________________________________________________________________ |
||
|
||
242078, 260420, 288150 |
297591 |
|
|
|
|
Systèmes Polymère Structural Canada |
Stéphane Manseau |
|
Partie requérante |
Partie requérante |
|
|
|
|
et |
et |
|
|
|
|
Stéphane Manseau |
Systèmes Polymère Structural Canada |
|
Partie intéressée |
Partie intéressée |
|
|
|
|
Commission de la santé et de la sécurité du travail |
Commission de la santé et de la sécurité du travail |
|
Partie intervenante |
Partie intervenante |
|
|
|
|
______________________________________________________________________
DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION
______________________________________________________________________
[1] Le 3 mai 2007, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) dépose une requête en révision ou révocation d’une décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 16 mars 2007.
[2] Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles entérine un accord intervenu entre Systèmes Polymère Structural Canada (l’employeur) et monsieur Stéphane Manseau (le travailleur).
[3] Elle prend acte des désistements de l’employeur dans les dossiers 260420 et 288150
[4] Elle accueille la requête de l’employeur dans le dossier 242078, modifie la décision rendue par la CSST le 17 août 2004 à la suite d’une révision administrative et déclare que la lésion professionnelle et le nouveau diagnostic de déchirure du ménisque interne subis par le travailleur, le 28 octobre 2003, sont des lésions professionnelles au sens de l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).
[5] Elle accueille la requête du travailleur dans le dossier 297591, modifie la décision de la CSST rendue le 17 juillet 2006 à la suite d’une révision administrative et « déclare que les diagnostics en relation avec la rechute, récidive ou aggravation du 20 mars 2005 du travailleur, rechute, récidive ou aggravation étant une lésion découlant de l’omission de soins, soit une lésion au sens de l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, sont un syndrome fémoro-rotulien, un syndrome douloureux chronique et un status post-méniscectomie et que le travailleur demeure avec les séquelles suivantes » :
BILAN DES SÉQUELLES ACTUELLES
|
||
CODE |
DESCRIPTION |
% |
DÉFICIT ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE (DAP) |
||
|
Séquelles actuelles |
|
103060 |
Méniscectomie interne |
1 |
103131 |
Syndrome féméro-patellaire |
2 |
106824 |
Perte 10o de flexion |
1 |
107066 |
Instabilité nécessitant le port d’une orthèse |
10 |
|
|
|
|
TOTAL du DAP : 13 % |
|
|
||
PRÉJUDICE ESTHÉTIQUE (PE) |
||
224935 |
Cicatrices d’arthroscopies |
0 |
|
BILAN DES SÉQUELLES ANTÉRIEURES
|
||
CODE |
DESCRIPTION |
% |
DÉFICIT ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE (DAP) |
||
103060 |
Méniscectomie interne |
1 |
106824 |
Perte 10o de flexion |
1 |
107039 |
Laxité sans séquelles fonctionnelles |
1 |
|
|
|
|
TOTAL du DAP : 3 % |
|
[6] Elle déclare que le travailleur a droit aux indemnités prévues à la loi.
[7] À l’audience tenue le 22 octobre 2007 à Drummondville, la CSST est représentée et le travailleur et l’employeur sont présents et représentés. L’affaire a été mise en délibéré le 13 novembre 2007 date limite accordée à l’employeur et au travailleur pour répliquer à l’argumentation de la CSST, transmise après l’audience avec la permission du tribunal, sur les questions préliminaires soulevées par l’employeur à l’audience. Le travailleur n'a pas transmis de commentaires.
L’OBJET DE LA REQUÊTE
[8] La CSST demande de réviser la décision du 16 mars 2007 et de déclarer que la lésion professionnelle du 28 octobre 2003, le diagnostic de déchirure du ménisque interne et les diagnostics reliés à la récidive, rechute ou aggravation du 20 mars 2005 ne constituent pas des lésions résultant de l’omission de soins reçus par le travailleur suite à la lésion professionnelle du 28 octobre 2003 et de déclarer que l’article 31 de la loi ne trouve pas application.
[9] Elle demande de confirmer la décision rendue le 17 août 2004 à la suite d’une révision administrative; de confirmer celle du 17 juillet 2006 à la suite d’une révision administrative concernant la relation entre les diagnostics issus de la récidive, rechute ou aggravation et la lésion initiale du 28 octobre 2003 et de déclarer que la lésion initiale au genou droit, le diagnostic de déchirure partielle du ménisque interne et les diagnostics reliés à la récidive, rechute ou aggravation du 20 mars 2005 sont en relation avec l’accident du travail survenu le 28 octobre 2003.
QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[10] L’employeur a soumis deux moyens préliminaires visant à faire déclarer la requête de la CSST irrecevable.
[11] Il prétend que la requête est irrecevable parce qu’elle n’a pas été produite dans un délai raisonnable. Elle a été déposée à l’extérieur du délai de 45 jours suivant la réception de la décision de la Commission des lésions professionnelles.
[12] Il argumente que le délai prenait fin le 4 mai 2007, que la lettre transmise par la CSST à la Commission des lésions professionnelles le 3 mai 2007 ne rencontre pas les exigences prévues à la loi et qu’elle ne peut être considérée comme constituant une requête valablement formée parce qu’il ne s’agit que d’une simple lettre de comparution qui n’indique pas les conclusions recherchées ni les motifs au soutien de ces conclusions.
[13] L’employeur prétend également que la requête devrait être rejetée parce que la CSST n’a pas l’intérêt juridique pour intervenir à ce stade des procédures. Elle n’est pas intervenue en temps utile, elle était donc forclose d’intervenir après jugement. Seules les parties peuvent demander la révision ou la révocation d’une décision or, comme la CSST n’est jamais intervenue elle n'a pas le statut de partie et ne peut donc prétendre intervenir.
[14] Permettre à la CSST d’intervenir même après jugement est contraire à l’article 429.16 qui prévoit spécifiquement que la CSST peut intervenir à tout moment jusqu’à la fin de l’enquête et de l’audition.
LES FAITS RELATIFS AUX QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[15] Le 27 novembre 2003, la CSST accepte la réclamation du travailleur au motif qu’il a subi un accident du travail le 28 octobre 2003 qui lui a causé une contusion au genou droit.
[16] Le 24 mars 2004, la CSST décide qu’il y a relation entre le nouveau diagnostic de déchirure du ménisque interne et la lésion professionnelle du 28 octobre 2003. L’employeur a demandé la révision de cette décision qui a été confirmée le 17 août 2004 à la suite d’une révision administrative. Le 25 août 2004 l’employeur a déposé une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre de cette décision (dossier 242078).
[17] Le 22 février 2005, la CSST déclare que le travailleur demeure avec un déficit anatomo-physiologique de 3% lui donnant droit à une indemnité pour préjudice corporel de 2 259,44 $.
[18] L’employeur a demandé la révision de cette décision mais sa demande a été déclarée irrecevable dans une décision rendue par la CSST en révision administrative le 8 avril 2005 étant donné que la CSST est liée par les conclusions du médecin qui a charge du travailleur en l’absence d’avis d’un membre du Bureau d'évaluation médicale. Le 26 avril 2005, l’employeur a déposé une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre de cette décision (dossier 260420).
[19] Le 14 avril 2005, la CSST accepte la réclamation du travailleur pour une récidive, rechute ou aggravation qui s’est manifestée le 20 mars 2005 sous la forme d’une déchirure du ménisque interne du genou droit.
[20] Le 19 décembre 2005, la CSST décide que le travailleur a droit à la réadaptation professionnelle. L’employeur a demandé la révision de cette décision qui a été confirmée à la suite d’une révision administrative le 14 mars 2006. Le 1er mai 2006, l’employeur a déposé une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre de cette décision (dossier 288150).
[21] Le 15 mai 2006, la CSST rend une décision où elle donne suite à l’avis d’un membre du Bureau d'évaluation médicale daté du 28 avril 2006 et déclare que des suites de sa rechute, récidive ou aggravation du 20 mars 2005, le travailleur ne conserve aucune atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supplémentaire à celle retenue suite à la lésion professionnelle initiale du 28 octobre 2003.
[22] Le 16 mai 2006, la CSST donne suite au même avis et déclare que le diagnostic d’arthrose tibio-fémorale interne du genou droit n’est pas en relation avec la rechute, récidive ou aggravation du 20 mars 2005 et que le travailleur continuera de recevoir des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle statue sur sa capacité à exercer un emploi.
[23] Le travailleur a demandé la révision de ces deux dernières décisions qui ont été confirmées à la suite d’une révision administrative le 17 juillet 2006. Le 24 août 2006, le travailleur a déposé une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre de cette décision (dossier 297591).
[24] L’employeur et le travailleur ont été convoqués à des audiences les 9 novembre 2004, 4 mai 2006 et 26 octobre 2006 mais l’affaire n’a jamais procédé. La CSST n’a jamais été convoquée car elle n'a pas comparu.
[25] L’employeur et le travailleur en sont arrivés à un accord qui disposait des 4 contestations. Cet accord a été entériné par la Commission des lésions professionnelles le 16 mars 2007.
[26] Le 16 mars 2007 la décision est expédiée aux parties. La CSST la reçoit le 20 mars 2007.
[27] Le 3 mai 2007, la CSST transmet, par télécopieur, à la Commission des lésions professionnelles la lettre suivante :
La présente est pour vous informer que nous avons reçu mandat de notre cliente, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), afin de déposer une requête en révision (art. 429.56 LATMP) concernant la décision entérinant un accord dans le dossier ci-haut mentionné daté du 16 mars 2007 et reçu aux bureaux de la CSST le 20 mars 2007.
Veuillez prendre note que la présente lettre vise à sauvegarder les droits de notre cliente et que les motifs à l’appui de la présente demande vous seront transmis sous peu.
[28] Les motifs à l’appui de la demande sont expédiés au tribunal le 8 mai 2007 par télécopieur. La CSST demande alors de :
RÉVISER la décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 16 mars 2007;
DÉCLARER que la lésion professionnelle du 28 octobre 2004, le diagnostic de déchirure du ménisque interne et les diagnostics reliés à la rechute, récidive ou aggravation du 20 mars 2005 ne constituent pas des lésions résultant de l’omission des soins reçus par le travailleur suite à sa lésion professionnelle du 28 octobre 2004;
DÉCLARER que l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ne trouve pas application dans le présent dossier;
CONFIRMER la décision de la révision administrative rendue le 17 août 2004;
CONFIRMER la décision de la révision administrative du 17 juillet 2006 concernant la relation entre les diagnostics issus de la rechute, récidive ou aggravation du 28 octobre 2004;
DÉCLARER que la lésion initiale au genou droit, le diagnostic de déchirure partielle du ménisque interne et les diagnostics reliés à la rechute, récidive ou aggravation du 20 mars 2005 sont en relation avec l’accident du travail survenu le 28 octobre 2004.
[29] Le 11 mai 2007 la Commission des lésions professionnelles accuse réception d’une requête en révision ou révocation dans les dossiers 242078 et 297591 alors qu’elle accuse réception d’une requête en réouverture dans les dossiers 288150 et 260420.
AVIS DES MEMBRES SUR LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[30] Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs sont d’avis d’accueillir la requête de la CSST. La décision est entachée d’un vice de fond car les faits qui permettent de conclure à une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi ne sont pas au dossier. De plus, le dispositif de la décision précise que la lésion professionnelle dans son entier constitue une lésion au sens de l’article 31 de la loi ce qui n’est pas possible. La décision doit être révoquée pour que les parties aient l’opportunité de faire valoir leurs moyens sur le fond de l’affaire lors d’une audience. De même, les désistements qui ont été ont été déposés dans le cadre de l’accord doivent être annulés.
MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[31] Le tribunal doit tout d’abord décider si la CSST pouvait demander la révision ou la révocation de la décision de la Commission des lésions professionnelles vu qu’elle n’est pas intervenue avant la fin de l’enquête et de l’audition.
[32] Les articles pertinents de la loi sont les suivants :
429.16. La Commission peut intervenir devant la Commission des lésions professionnelles à tout moment jusqu'à la fin de l'enquête et de l'audition.
Lorsqu'elle désire intervenir, elle transmet un avis à cet effet à chacune des parties et à la Commission des lésions professionnelles; elle est alors considérée partie à la contestation.
Il en est de même du travailleur concerné par un recours relatif à l'application de l'article 329 .
__________
1997, c. 27, a. 24.
429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :
1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;
2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;
3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.
Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.
__________
1997, c. 27, a. 24.
429.57. Le recours en révision ou en révocation est formé par requête déposée à la Commission des lésions professionnelles, dans un délai raisonnable à partir de la décision visée ou de la connaissance du fait nouveau susceptible de justifier une décision différente. La requête indique la décision visée et les motifs invoqués à son soutien. Elle contient tout autre renseignement exigé par les règles de preuve, de procédure et de pratique.
La Commission des lésions professionnelles transmet copie de la requête aux autres parties qui peuvent y répondre, par écrit, dans un délai de 30 jours de sa réception.
La Commission des lésions professionnelles procède sur dossier, sauf si l'une des parties demande d'être entendue ou si, de sa propre initiative, elle le juge approprié.
__________
1997, c. 27, a. 24.
[33] La jurisprudence[2] du tribunal est à l’effet que même si la CSST n'est pas intervenue au dossier comme le lui permettait l'article 429.16 qu’il ne s'agit pas d'une fin de non-recevoir à sa requête en révision produite selon l'article 429.56.
[34] D’une part, cet article n'indique pas la qualité de la personne qui peut déposer une requête en révision par opposition aux articles 358, 359 et 359.1, qui indiquent clairement que seule la personne qui se croit lésée par une décision peut la contester.
[35] D’autre part, la CSST a un intérêt suffisant, en tant qu'organisme chargé de l'application de la loi et à titre d'administrateur du régime, pour exercer le recours en révision, et ce, afin de s'assurer du respect de la loi.
[36] Plus précisément, il a aussi été décidé que la CSST avait le droit de demander la révision d'une décision de la Commission des lésions professionnelles, même si elle n'est pas intervenue à l'étape de la conciliation[3].
[37] Le soussigné est aussi d’opinion que l’article 429.56 ne prévoit pas le statut que doit avoir la personne qui dépose une requête et avec respect pour les arguments soulevés par l’employeur, la Commission des lésions professionnelles considère que l’article 429.57 n’impose pas l’obligation d’être déjà une partie à la décision dont on veut demander la révision pour pouvoir loger une requête. Le tribunal y voit seulement l’obligation pour la Commission des lésions professionnelles de transmettre la requête aux autres parties visées par la requête afin qu’elles puissent y répondre.
[38] Contrairement à l’employeur la Commission des lésions professionnelles ne peut conclure que permettre à la CSST de déposer une requête en révision ou révocation à l’encontre d’une décision du tribunal si elle n’est pas déjà partie au dossier équivaut à priver l’article 429.16 de tout son sens car cet article vise à permettre à la CSST d’être considérée comme étant une partie à la contestation ce qui lui permet notamment de présenter une preuve alors qu’en l'espèce, elle doit se limiter à démontrer un motif de révision.
[39] De toute façon, comme il a été reconnu par la jurisprudence mentionnée précédemment et à laquelle adhère le soussigné, la CSST a un intérêt suffisant, en tant qu'organisme chargé de l'application de la loi et à titre d'administrateur du régime, pour exercer le recours en révision, et ce, afin de s'assurer du respect de la loi. La Commission des lésions professionnelles en conclut donc que le premier moyen préliminaire soulevé par l’employeur doit être rejeté.
[40] La Commission des lésions professionnelles doit maintenant décider si la requête a été déposée dans le délai prévu à la loi.
[41] L’article 429.57 de la loi prévoit que la requête doit être déposée dans un délai raisonnable à partir de la décision visée, qu’elle doit indiquer la décision contestée et qu’elle doit préciser les motifs invoqués à son soutien.
[42] Dans le présent cas, dans sa lettre du 3 mai 2007, la CSST mentionne qu’elle a reçu mandat de déposer une requête en révision de la décision de la Commission des lésions professionnelles du 16 mars 2007 et que les motifs à l’appui de la requête seront transmis sous peu, ce qui a été fait le 8 mai 2007.
[43] La lettre du 3 mai 2007 a été reçue à l’intérieur du délai raisonnable de 45 jours reconnu par la jurisprudence alors que celle du 8 mai 2007 n’a pas été déposée à l’intérieur de ce délai or, les motifs de la requête et les conclusions recherchées n’apparaissent que dans la lettre du 8 mai 2007.
[44] Le représentant de l’employeur souligne qu’il existe deux courants jurisprudentiels à la Commission des lésions professionnelles relativement aux formalités requises par les dispositions des articles 429.56 et 429.57 et demande au tribunal d’appliquer celui voulant que pour être valide la requête se doit de contenir les motifs invoqués à son soutien. Il allègue aussi qu’il s’agit d’une exigence de fond et non une simple exigence de forme pour l’exercice du recours.
[45] Récemment, dans l’affaire Ménard et Arontec[4] la Commission des lésions professionnelles faisait le point sur la controverse jurisprudentielle alléguée par le représentant de l’employeur :
[19] La Commission des lésions professionnelles a, dans certaines décisions, adopté une approche selon laquelle une lettre n’indiquant pas les motifs invoqués au soutien de la demande de révision ou de révocation, ne constituait pas une requête valide, en raison principalement du caractère exceptionnel du recours en révision. L’employeur invoque ces décisions à l’appui de sa demande. Toutefois, presque toutes ces décisions ont été rendues avant 2001 et comme le souligne le commissaire Lemay dans l’affaire Fourniture de Bureau Denis inc. et Forgues3, la jurisprudence a évolué depuis ces décisions4.
[20] La Commission des lésions professionnelles souscrit entièrement au raisonnement tenu dans l’affaire Vêtements Peerless5 dont il convient de reproduire certains passages :
[25] Il est vrai que la révision ou la révocation d’une décision constitue une mesure exceptionnelle parce qu’elle déroge au principe posé par l’article 429.49 de la loi qui veut qu’une décision de la Commission des lésions professionnelles soit finale et sans appel, ce qui fait en sorte qu’elle n’est possible que si l’un ou l’autre des motifs prévus par l’article 429.56 est établi. Il est également vrai que l’article 429.57 prévoit que la requête doit contenir un exposé des motifs au soutien de la demande de révision ou de révocation.
[26] Toutefois, les articles 353 et 429.18 veulent qu’une procédure faite en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ne soit pas considérée invalide en raison d’un vice de forme ou d’une irrégularité. Ces articles se lisent comme suit:
353. Aucune procédure faite en vertu de la présente loi ne doit être considérée nulle ou rejetée pour vice de forme ou irrégularité.
________
1985, c. 6, a. 353.
429.18. La Commission des lésions professionnelles peut accepter une procédure même si elle est entachée d'un vice de forme ou d'une irrégularité.
________
1997, c. 27, a. 24.
[27] C’est cette approche qui a été adoptée dans la décision L’Écuyer et Super Carnaval (Super C, une division de Métro-Richelieu 2000 inc.)8 et qui doit être retenue de l’avis du présent tribunal. La Commission des lésions professionnelles estime en effet qu’il n’y a pas lieu d’écarter la règle énoncée par les articles 353 et 429.18 de la loi du seul fait que la révision ou la révocation d’une décision constitue une mesure exceptionnelle.
[28] Il est certainement préférable que les motifs sur lesquels est fondée une demande de révision ou de révocation soient connus avant l’audience et des mesures peuvent sans doute être envisagées au niveau administratif pour que cela soit fait, mais la Commission des lésions professionnelles estime que l’exposé des motifs dans la requête ne constitue pas une condition de sa validité.
________________
8 C.L.P. 75666-62B-9512-R, 2000-11-29, G. Godin
______________________
3 C.L.P. 212953-63-0307, 11 octobre 2006, B. Lemay
4 Vêtements Peerless inc. et Doan, [2001] C.L.P. 360 ; Arsenault et Canadian Tire, C.L.P. 94044-08-9802, 31 octobre 2001, H. Thériault; Fontaine et Berklyne inc., C.L.P. 130757-07-0001, 27 mars 2002, G. Robichaud; Récupération Florence inc., et Gauvin-Barette, C.L.P. 138001-64-0005, 18 juin 2002, Anne Vaillancourt; Greco et CAE électronique ltée, C.L.P. 172859-61-0111, 29 janvier 2003, L. Landriault; Sambrook et Société canadienne des postes, C.L.P. 207237-71-0305, 15 août 2006, M. Zigby
5 Précitée note 4
[46] Le soussigné souscrit entièrement au raisonnement tenu dans l’affaire Vêtements Peerless inc. et Doan[5].
[47] La Commission des lésions professionnelles ne voit pas pourquoi elle écarterait la règle énoncée aux articles 353 et 429.18 parce que la requête a été déposée par la CSST et écarte donc l’argument de l’employeur à cet effet.
[48] La Commission des lésions professionnelles conclut donc que la lettre du 3 mai 2007 constitue une requête en révision conforme à la loi. Elle a été déposée à l’intérieur du délai de 45 jours prévu par la jurisprudence et elle est donc recevable d’autant plus que des précisions concernant les motifs de révision et conclusions recherchées ont été produites, le 8 mai 2007, bien avant la date prévue pour l’audience.
[49] De ce qui précède, la Commission des lésions professionnelles conclut que la requête en révision ou révocation de la CSST est recevable.
LES FAITS SUR LE FOND DE LA REQUÊTE
[50] Dans l’accord entériné par la Commission des lésions professionnelles les parties ont convenu de ceci :
[1] Monsieur Stéphane Manseau, le travailleur, occupe un poste de journalier pour le compte de Systèmes Polymère Structural Canada, l’employeur, lorsque, le 28 octobre 2003, se relevant d’une position accroupie alors qu’il vient de chuter, il se cogne le genou droit sur une poignée métallique. Il ressent une importante douleur suivie d’un gonflement. Il termine néanmoins sa journée de travail, puis applique de la glace sur la région douloureuse.
[2] Le lendemain, la douleur est nettement plus forte, le travailleur ayant même de la difficulté à se mobiliser. Il consulte à l’urgence le Dr Leduc qui pose un diagnostic de contusion du genou droit, les interprétations radiologiques ne démontrant aucun signe de fracture. Le médecin retourne le travailleur à l’emploi.
[3] Le 3 novembre 2003, le travailleur reprend son travail régulier bien que ressentant toujours d’importantes douleurs accompagnées d’enflure et de boiterie.
[4] Le 11 novembre 2003, ne ressentant aucune amélioration, le travailleur consulte le Dr Mainville qui retient un diagnostic de gonalgie droite post-trauma et recommande un arrêt de travail.
[5] L’interprétation d’une arthrographie passée par le travailleur, le 18 novembre 2003, ne parle que d’une déchirure partielle du ligament collatéral interne, le radiologiste ne reconnaissant aucune déchirure méniscale.
[6] Le travailleur est ensuite traité de façon conservatrice (repos, anti-inflammatoires non stéroïdiens et physiothérapie) pour des diagnostics d’entorse et de déchirure partielle du ligament.
[7] Devant l’évolution défavorable, la Dre Landry réfère le travailleur en orthopédie, le 23 janvier 2004, notant « arrêt de travail, travaux légers??? ».
[8] Le 5 février 2004, l’interprétation de l’imagerie par résonance magnétique du genou droit du travailleur fait état de signes d’une déchirure complexe de la corne postérieure du ménisque interne avec persistance d’un léger épanchement intra-articulaire.
[9] Le 19 février 2004, le Dr Hould, estimant l’état du travailleur prioritaire procède à une arthroscopie et à une méniscectomie interne au cours desquelles il constate, outre la déchirure méniscale, une insuffisance du ligament croisé antérieur.
[10] Le 22 mars 2004, le Dr Hould résèque la déchirure.
[11] Le Dr Hould produit un rapport final, consolidant avec séquelles l’état du travailleur au 28 juin 2004 et autorisant la reprise du travail selon tolérance.
[12] Bien que ressentant toujours d’importantes douleurs au genou, le travailleur tente de reprendre son emploi prélésionnel. Toutefois, incapable d’y rencontrer ses obligations en raison de ses douleurs, il doit quitter. En octobre 2004, il se trouve un nouvel emploi dans le domaine de la construction, auprès d’un employeur lui permettant de limiter ses activités. Ainsi, le travailleur élimine la montée d’échelles et d’échafaudages et évite le travail en position agenouillée ou accroupie. Avec le temps, le travailleur note l’augmentation de ses douleurs avec récidives de phénomènes de blocage et de dérobage.
[13] Le 15 janvier 2005, le Dr Hould produit un rapport d'évaluation médicale, y notant : « M. Manseau présente actuellement des signes objectifs de souffrance méniscale sous forme de douleurs au compartiment interne du genou, de synovite réactionnelle à l’activité et de nouveaux syndromes de blocage. En soi, cette symptomatologie justifie une réintervention chirurgicale. … À notre avis, en l’absence de relation causale à définir au dossier, la réintervention chirurgicale prévisible devra être considérée comme une RRA ». Il estime que le travailleur demeure avec les séquelles suivantes :
« Limitations fonctionnelles
Considérant la symptomatologie telle que mentionnée par M. Manseau, considérant que notre examen clinique nous démontre des signes compatibles avec une re-déchirure du ménisque interne du genou droit, compte tenu de la laxité observée aux dépens du ligament collatéral interne et du croisé antérieur et de la synovite qui est encore présente, la condition justifie alors certaines limitations fonctionnelles.
Ainsi M. Manseau devrait éviter de circuler sur de longues distances particulièrement en transportant des charges. Il devrait éviter de circuler sur un terrain inégal, de grimper échelles ou échafauds ou escaliers de façon répétitive.
Monsieur devrait éviter de maintenir une position accroupie de façon prolongée. Il ne devrait pas avoir à travailler en position agenouillée.
Ces limitations fonctionnelles ne peuvent être considérées comme permanentes puisqu’une investigation supplémentaire a été recommandée et qu’un traitement chirurgical pourrait être envisagé. On se réfère à la conclusion de cette évaluation.
[…]
Séquelles actuelles :
Déchirure ménisque interne genou droit, laxité ligament croisé antérieur et ligament collatéral interne.
D.A.P. : 103060 : Méniscectomie interne avec séquelles fonctionnelles 1%
D.A.P. : 106824 : Perte de 10o de flexion 1%
D.A.P. : 107039 : Laxité sans séquelles fonctionnelles 1%
P.E.M. : 224395 : Cicatrice d’arthroscopie non apparente 0% »
[14] Le 21 mars 2005, le travailleur rencontre le Dr Hould. Le rapport de cette visite de contrôle révèle :
« RADIOGRAPHIES : L’examen en résonance magnétique est un peu décevant, on note bien sûr certaine modification post-chirurgicale du ménisque interne avec suspicion d’une nouvelle déchirure.
Curieusement, on décrit encore toujours un ligament croisé antérieur normal.
DIAGNOSTIC : Re-déchirure probable ménisque interne, insuffisance ligament croisé antérieur. »
[15] Le travailleur allègue une rechute, récidive ou aggravation reconnue par la CSST.
[16] Le 26 avril 2005, le Dr Hould procède à une nouvelle méniscectomie interne avec résection partielle du ligament croisé. L’évolution postopératoire est insatisfaisante, le travailleur demeurant avec une symptomatologie douloureuse et une instabilité de son genou droit. Il est dirigé en physiothérapie à compter du 8 juin 2005 puis, le 13 juillet 2005, une orthèse stabilisatrice lui est prescrite. Devant la persistance des phénomènes de dérobage et d’instabilité, le docteur dirige le travailleur au Dr Fleury pour une éventuelle reconstruction ligamentaire.
[17] Le 1er septembre 2005, le Dr Fleury porte les diagnostics de syndrome fémoro-rotulien, syndrome douloureux chronique et status post méniscectomie du genou droit, ne recommandant aucune intervention supplémentaire.
[18] Le Dr Hould produit un rapport d'évaluation médicale, le 5 décembre 2005 y retenant les séquelles suivantes :
« Considérant les déchirures du ménisque interne qui ont dû être traitées chirurgicalement, considérant qu’à l’arthroscopie nous avions confirmé cette laxité aux dépens du ligament croisé antérieur même si la lésion n’avait pas été confirmée à l’imagerie par résonance magnétique, considérant que lors de notre deuxième scopie, nous avions documenté un ramollissement pathologique du cartilage interne du tibia, considérant le diagnostic clinique de syndrome féméro-patellaire, nous sommes d’avis que la condition justifie des limitations fonctionnelles.
Ainsi M. Manseau devrait éviter les activités impliquant de :
marcher sur de longues distances,
marcher en terrain inégal,
maintenir une position debout fixe de façon très prolongée,
monter de façon répétitive escaliers, échelles et échafauds,
transporter des charges lourdes,
maintenir de façon prolongée une position agenouillée ou accroupie.
1. Séquelles actuelles :
Re-déchirure ménisque interne genou droit.
D.A.P. : 103060 : Méniscectomie interne 1%
D.A.P. : 103131 : Syndrome fémoro-patellaire 2%
D.A.P. : 106824 : Perte 10 o de flexion 1%
D.A.P. : 107066 : Instabilité nécessitant le port d’une orthèse 10%
P.E.M. : 224395 : Cicatrices d’arthroscopies 0%
2. Séquelles antérieures :
Déchirure ménisque interne.
D.A.P. : 103060 : Méniscectomie interne 1%
D.A.P. : 106824 : Perte de 10 o de flexion 1%
D.A.P. : 107039 : Laxité sans séquelles fonctionnelles 1% »
[19] À la demande de l’employeur, le travailleur est examiné par la Dre Lévesque le 18 janvier 2006 qui retient les diagnostics de :
« Syndrome féméro-patellaire douloureux postarthroscopie et méniscectomie partielle interne du genou droit;
Atrophie du quadriceps droit;
Diminution de flexion du genou droit. »
[20] Le 24 avril 2006, le Dr Dufour, membre du Bureau d'évaluation médicale, produit un avis, retenant les diagnostics de status post-méniscectomie interne et d’arthrose légère tibio-fémorale interne du genou droit, ce dernier diagnostique n’étant pas retenu par la CSST comme étant en relation avec la lésion professionnelle subie par le travailleur. Le docteur retient les séquelles suivantes :
BILAN DES SÉQUELLES
|
||
CODE |
DESCRIPTION |
% |
DÉFICIT ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE (DAP) |
||
|
Séquelle actuelle |
|
103033 |
Méniscectomie interne genou droit sans séquelle fonctionnelle |
1 |
|
|
|
|
Séquelle antérieure |
|
103033 |
Méniscectomie interne genou droit sans séquelle fonctionnelle |
1 |
|
|
|
et, à titre de limitations fonctionnelles, celles d’éviter la course et les sauts.
[21] De l’étude du dossier, les parties retiennent que la condition du genou droit du travailleur à la suite du fait accidentel initial était plus importante que ne le laissait croire les conclusions retenues par le médecin traitant. En effet, les diagnostics initiaux posés parlent de contusion, de gonalgie ou d’entorse, le travailleur ne bénéficiant au départ d’aucun arrêt de travail ni d’aucun traitement particulier. Les parties retiennent que le travailleur n’a alors pas reçu tous les soins nécessaires que son état recommandait afin d’éviter d’utiliser son genou sans aucune protection et sans aucune limitation. Le travailleur attendra jusqu’en février 2005 avant que le diagnostic réel de sa blessure ne soit reconnue et que les soins et traitements qu’elle nécessite ne soient entrepris.
[22] Tel que déjà statué par la Commission des lésions professionnelles, les parties retiennent que l’interprétation à donner au mot « soins » comprend la détermination d’un diagnostic1 et que le fait de ne pas avoir reconnu initialement chez le travailleur la présence d’une déchirure méniscale et l’insuffisance du ligament croisé antérieur a entraîné un retard important dans la période de consolidation normale de sa lésion, ceci constituant une omission de soins2.
[23] En conséquence, les parties retiennent que, tant la lésion professionnelle du 28 octobre 2003, à compter du 29 octobre 2003, date de la première consultation médicale, que la rechute, récidive ou aggravation subséquente du 20 mars 2005 constituent des lésions professionnelles découlant de l’omission de soins qui s’imposaient alors. En conséquence, les parties retiennent que les lésions professionnelles subies par le travailleur sont des lésions professionnelles au sens du paragraphe 1 de l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
[24] Les parties retiennent également que les diagnostic en relation avec la rechute, récidive ou aggravation ou lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles subie par le travailleur le 20 mars 2005 sont un syndrome féméro-rotulien, un syndrome douloureux chronique et un status post-méniscectomie laissant le travailleur porteur des séquelles retenues par le Dr Hould, soit :
BILAN DES SÉQUELLES ACTUELLES
|
||
CODE |
DESCRIPTION |
% |
DÉFICIT ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE (DAP) |
||
103060 |
Méniscectomie interne |
1 |
103131 |
Syndrome féméro-patellaire |
2 |
106824 |
Perte 10o de flexion |
1 |
107066 |
Instabilité nécessitant le port d’une orthèse |
10 |
|
|
|
|
TOTAL du DAP : 13 % |
|
|
||
PRÉJUDICE ESTHÉTIQUE (PE) |
||
224935 |
Cicatrices d’arthroscopies |
0 |
|
BILAN DES SÉQUELLES ANTÉRIEURES
|
||
CODE |
DESCRIPTION |
% |
DÉFICIT ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE (DAP) |
||
103060 |
Méniscectomie interne |
1 |
106824 |
Perte 10o de flexion |
1 |
107039 |
Laxité sans séquelles fonctionnelles |
1 |
|
|
|
|
TOTAL du DAP : 3 % |
|
[25] Les parties retiennent finalement que les frais imputables à ces lésions professionnelles doivent l’être conformément à ceux imputables en vertu de l’article 31 paragraphe 1 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles à compter du 29 octobre 2003 et qu’en conséquence les indemnités de remplacement du revenu versées ou dues au travailleur l’ont été, le sont et le seront en conformité avec l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
________________________
1 Casavant et Reliure Marine Terminal ltée, C.A .L.P. 1438-62-8611, 5 février 1988, J.-M. Dubois
2 Services cast Terminal inc. et C.S.S .T., C.A.L.P. 83948-60-9611m 18 mars 1998, J.-G. Raymond
[51] Les faits rapportés aux paragraphes [1] à [20] de l’accord sont conformes au dossier. Le soussigné considère toutefois que les précisions suivantes doivent être apportées :
[52] Au paragraphe [2] de l’accord il est indiqué que le 29 octobre 2003 le médecin retournait le travailleur à l’emploi. À l’attestation médicale complétée cette journée-là, il est plutôt indiqué que le médecin autorise un travail assis jusqu’au 3 novembre 2003. Dans le faits, le travailleur n'a pas travaillé jusqu’au 3 novembre 2003.
[53] Au paragraphe [4] de l’accord il aurait aussi pu être ajouté que le travailleur a bénéficié de l’arrêt de travail recommandé à compter du 11 novembre 2003.
[54] Au paragraphe [7] de l’accord est indiqué que le travailleur est référé en orthopédie le 23 janvier 2004 or, le 18 novembre 2003, le Dr Frenette indiquait déjà qu’une évaluation en orthopédie était à venir. De plus, le 23 janvier 2004, le Dr Landry soupçonnait une déchirure du ménisque externe (sic) et prévenait le physiothérapeute qu’il soupçonnait une telle condition.
[55] Les traitements de physiothérapie ont débuté le 29 janvier 2004 et le 18 février 2004 le travailleur mentionnait au physiothérapeute qu’il n’y avait pas d’amélioration depuis le début des traitements quoique ceux-ci soulageaient sa douleur.
[56] Au paragraphe [9] de l’accord il est indiqué que le Dr Hould a procédé à une arthroscopie le 19 février 2004 alors que le médecin a plutôt pris la décision d’opérer le travailleur à cette date. L’arthroscopie a été pratiquée le 22 mars 2004 tel que cela est rapporté au paragraphe [10].
LES MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LE FOND
[57] La Commission des lésions professionnelles doit décider si la décision rendue le 16 mars 2007 doit être révisée ou révoquée.
[58] L’article 429.49 de la loi énonce que les décisions de la Commission des lésions professionnelles sont finales et sans appel :
429.49. Le commissaire rend seul la décision de la Commission des lésions professionnelles dans chacune de ses divisions.
Lorsqu'une affaire est entendue par plus d'un commissaire, la décision est prise à la majorité des commissaires qui l'ont entendue.
La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.
__________
1997, c. 27, a. 24.
Toutefois, l’article 429.56 précité de la loi prévoit que la Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision qu’elle a rendue pour les motifs qui y sont énoncés.
[59] En l’espèce, la CSST invoque l’application du 3e alinéa de cet article soit, un vice de fond ou de procédure de nature à invalider la décision. Depuis les affaires Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve[6] et Franchellini et Sousa[7] la Commission des lésions professionnelles considère que cette expression réfère à une erreur manifeste de droit ou de fait ayant un effet déterminant sur l’objet de la contestation.
[60] Dans l’affaire Bourassa c. Commission des lésions professionnelles[8], dont la requête pour autorisation de pourvoi à la Cour Suprême a été rejetée[9], la Cour d’appel a reconnu que la notion de vice de fond peut englober une pluralité de situations mais l’erreur doit être suffisamment fondamentale et sérieuse pour être de nature à invalider la décision.
[61] Plus récemment, la Cour d’appel du Québec, plus particulièrement dans l’arrêt CSST c. Fontaine[10], conclut que c’est la gravité, l’évidence et le caractère déterminant d’une erreur qui sont les traits distinctifs susceptibles d’en faire un vice de fond de nature à invalider une décision.
[62] Dans cet arrêt, la Cour d’appel insiste sur la primauté ou l’autorité à accorder à la première décision de sorte que la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision doit faire preuve d’une très grande retenue à l’égard de la décision contestée. Ceci étant établi, qu’en est-il dans le cas sous étude ?
[63] La CSST allègue ce qui suit :
43. La commissaire a commis une erreur de droit manifeste et assimilable à un vice de fond lorsqu’elle a refusé d’exercer sa compétence en entérinant un accord fondé sur une absence totale de preuve;
44. De plus particulièrement, l’erreur de la commissaire consiste à fonder sa décision sur une admission des parties à l’effet que la lésion professionnelle du 28 octobre 2004, le diagnostic de déchirure du ménisque interne et les diagnostic reliés à la rechute, récidive ou aggravation du 20 mars 2005 résultent de l’omission des soins;
45. Il n’existe aucune preuve médicale démontrant que la lésion initiale et le diagnostic de déchirure du ménisque interne résultent de l’omission des soins;
46. Il n’existe aucune preuve médicale démontrant que les diagnostics suite à la rechute, récidive ou aggravation subie le 20 mars 2005 résultent de l’omission des soins;
47. Déterminer la cause d’une pathologie fait partie de «l’acte diagnostic» au sens du Larousse médical;
48. Le fait de poser un diagnostic fait partie de l’exercice de la médecine et constitue un acte réservé au sens de l’article 31 de la Loi médicale (L.R.Q., chapitre M-9)[11];
49. L’article 43 de la Loi médicale (L.R.Q » chapitre M-9), interdit à une personne qui n’est pas médecin l’exercice d’un acte réservé;
50. Aucune des parties en la présente cause n’est un médecin;
51. Si il n’y avait pas eu accord et que la Commission des lésions professionnelles avait tenu une audience d’appel, le témoignage des parties sur la cause de la lésion initiale, du diagnostic de la rechute, récidive ou aggravation aurait été irrecevable parce qu’il aurait constitué un témoignage d’expert rendu par des personnes qui ne possèdent pas cette qualité;
52. L’erreur de droit commise par la commissaire est manifeste et déterminante puisque sans elle, l’article 31 LATMP n’aurait pas trouvé application;
[64] Pendant le délibéré de la présente requête, la commissaire Sophie Sénéchal, saisie d’un litige soulevant une question similaire à celle soulevée dans le présent dossier, a rendu une décision très motivée dans l’affaire Les magasins Hart inc et Déry [12]. Elle était saisie d’une requête de la CSST en révision ou révocation d’une décision entérinant un accord concluant à l’existence d’une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi. Comme en l’espèce, la CSST plaidait l’absence totale de preuve.
[65] Dans cette décision, la Commission des lésions professionnelles souligne le contexte particulier de l’analyse du motif de vice de fond dans le cadre d’une décision entérinant un accord et rappelle les critères qui permettent de statuer sur la conformité à la loi de l’accord :
[14] Dans le cas sous étude, il s’agit plus particulièrement d’une requête en révocation soumise à l’encontre d’une décision entérinant un accord intervenu entre les parties. Ce faisant, dans son analyse du motif de vice de fond, le tribunal doit considérer ce contexte particulier. Et pour comprendre ce contexte particulier, il y a lieu de référer à l’article 429.46 de la loi, lequel donne les conditions pour l’entérinement d’un accord:
429.46. Tout accord est constaté par écrit et les documents auxquels il réfère y sont annexés, le cas échéant. Il est signé par le conciliateur et les parties et lie ces dernières.
Cet accord est entériné par un commissaire dans la mesure où il est conforme à la loi. Si tel est le cas, celui-ci constitue alors la décision de la Commission des lésions professionnelles et il met fin à l'instance.
Cette décision a un caractère obligatoire et lie les parties.
__________
1997, c. 27, a. 24.
[15] L’accord est entériné par un commissaire dans la mesure où il est conforme à la loi. Si tel est le cas, celui-ci constitue alors la décision de la Commission des lésions professionnelles et il met fin à l'instance. On comprend que pour en arriver à une telle décision, le rôle de la Commission des lésions professionnelles est bien différent de celui qu’elle exerce à la suite d’une enquête et audition. Pour entériner un accord afin que ce dernier constitue la décision, la Commission des lésions professionnelles doit s’assurer que l’accord est conforme à la loi.
[16] Dans sa décision rendue dans l’affaire Perron et Cambior inc.5, la Commission des lésions professionnelles, alors saisie d’une requête en révocation, s’attarde à cette notion de conformité à la loi. Elle s’exprime comme suit:
« […]
[41] Nul doute que si la Commission des lésions professionnelles entérine un accord qui n’est pas conforme à la loi, elle commet une erreur de droit manifeste et déterminante donnant ouverture à la révocation. La question qui se pose, dans le cas présent, est celle de savoir si l’accord entériné par la décision de la Commission des lésions professionnelles du 20 novembre 2003 était effectivement non conforme à la loi comme le prétend la CSST.
[42] La notion de conformité à la loi a été définie par la jurisprudence tant de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) que de la Commission des lésions professionnelles. Il faut rappeler, en effet, qu’avant même l’entrée en vigueur de l’article 429.46 de la loi, le 1er avril 1998, la Commission d’appel avait déjà imposé la notion de conformité à la loi lorsqu’elle entérinait une entente intervenue en conciliation4. Les critères retenus par la jurisprudence sont les suivants : l’entente résultant d’un exercice de conciliation doit respecter la compétence du tribunal c’est-à-dire qu’elle ne doit pas déborder le cadre de l’objet en litige5; les conclusions de l’entente ne doivent pas être contraires à l’ordre public6; l’entente doit respecter la législation et la réglementation pertinentes7; enfin, l’entente ne doit pas être fondée sur des faits manifestement faux, inexacts ou qui ne sauraient supporter les conclusions recherchées8.
[…] »
_______________
4 Vaillancourt et Imprimerie Canada, [1993] C.A.L.P. 1227 ; Céleste et Cie Gaspésia ltée, [1994] C.A.L.P. 167 .
5 Voir note 4, Vaillancourt, p. 1231; Élag (1994) inc. et Courcelles, C.L.P. 85600-07-9701, 29 avril 1999, L. Couture; Tremblay et Desroches, [2000] C.L.P. 650 .
6 Voir note 4, Vaillancourt p. 1236; Voir note 4, Céleste, p. 172; Kohos et Daniel Cuda, C.A.L.P 35651-60-9201, 4 juin 1993, Y. Tardif.
7 CSST et Del Grosso et Cie Moruzzi ltée, [1998] C.L.P. 866 ; Gauthier et Gaétan Proulx et CSST, [2000] C.L.P. 994 ; Lamontagne et Les Entreprises Denis Boisvert inc., C.L.P. 138943-05-0005, 30 juillet 2002, F. Ranger
8 CSST et Del Grosso et Cie Moruzzi ltée, [1998] C.L.P. 866 ; Gauthier et Gaétan Proulx et CSST, [2000] C.L.P. 994 ; Lamontagne et Les Entreprises Denis Boisvert inc., C.L.P. 138943-05-0005, 30 juillet 2002, F. Ranger.
[17] Si la Commission des lésions professionnelles entérine un accord qui n’est pas conforme à la loi, elle commet une erreur de droit manifeste et déterminante, soit un vice de fond, donnant ouverture à la révocation. Pour être conforme, l’accord résultant d’un exercice de conciliation doit respecter la compétence du tribunal, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas déborder le cadre de l’objet en litige. Les conclusions de l’accord ne doivent pas être contraires à l’ordre public. L’accord doit respecter la législation et la réglementation pertinentes. Enfin, l’accord ne doit pas être fondé sur des faits manifestement faux, inexacts ou qui ne sauraient supporter les conclusions recherchées.
(…)
[24] La conformité de l’accord est donc au cœur du débat. (…)Le motif que soulève la CSST concerne plutôt la véracité ou l’exactitude des faits qui sous-tendent l’accord en ce qui concerne l’existence d’une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi. La CSST plaide l’absence totale de preuve sur cet aspect.
[25] Or, dans une optique de juger de la conformité de l’accord sur cet aspect, il convient d’abord de reproduire le texte de l’article 31 de la loi et par la suite, de passer en revue les faits disponibles aux parties au moment de l’accord ou de l’entérinement de celui-ci. Ceci, non pas dans le but de procéder à une appréciation de cette preuve mais bien de déterminer s’il y a absence totale d’une telle preuve et ce, pour juger de la véracité ou de l’exactitude des faits qui sous-tendent les conclusions recherchées.
________________________
5 C.L.P. 216155-72-0309, 24 février 2004, M. Zigby; voir aussi Service Matrec inc. et Ringuette, [2005] C.L.P. 1692
[66] Après avoir procédé à la revue des faits au dossier, le tribunal a conclu d’une part, que les parties ne pouvaient convenir d’une conclusion de droit comme par exemple d’une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi et d’autre part, qu’il y avait absence de preuve démontrant que la lésion découlait de l’omission de soins et elle a révoqué la décision :
[50] Par conséquent, lorsque les parties indiquent qu’elles conviennent que la contestation de l’employeur porte sur le diagnostic de capsulite adhésive résultant de l’omission de soins, il s’agit ni plus ni moins de convenir d’une preuve médicale pour justifier une conclusion de droit, soit l’existence d’une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi. Ceci est d’autant plus évident lorsqu’à la toute fin des allégués, les parties indiquent qu’elles conviennent que la lésion initiale n’a pas été traitée de façon complète et suffisante et qu’en conséquence, les parties retiennent que le diagnostic de capsulite est une nouvelle lésion qui découle de l’omission de soins à l’épaule droite.
[51] Pour simplifier le débat, les parties peuvent convenir d’admettre des faits, même contestés. Par contre, les parties ne peuvent convenir d’une conclusion de droit8, comme par exemple l’existence d’une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi. Tel est pourtant le cas en l’espèce, puisque les parties «…conviennent que la lésion initiale n’a pas été traitée de façon complète et suffisante. En conséquence, elles retiennent que le diagnostic de capsulite est une nouvelle lésion qui découle de l’omission de soins à l’épaule droite. » Non seulement il s’agit d’une conclusion de droit mais le dossier, tel que constitué, ne comporte aucun fait qui puisse soutenir une telle conclusion de droit admise par les parties. Or, la partie du dispositif suivant laquelle la Commission des lésions professionnelles déclare que le diagnostic de capsulite constitue une nouvelle lésion résultant de l’omission des soins reçus par la travailleuse dans le cadre de sa lésion professionnelle du 29 mars 2006, repose essentiellement sur cette admission des parties. Et cette conclusion est importante puisqu’elle en entraîne une autre, soit celle de déclarer qu’à compter du 11 juin 2006, toutes les prestations versées au dossier découlent de l’application de l’article 31 de la loi.
[52] De l’avis du tribunal, une telle situation touche directement à la véracité ou l’exactitude des faits qui sous-tendent les conclusions recherchées. Or, tel que préalablement indiqué, la conformité d’un accord s’évalue, entre autres, en regard du fait qu’il ne doit pas être fondé sur des faits manifestement faux, inexacts ou qui ne sauraient supporter les conclusions recherchées.
[53] Dans les circonstances, il y a lieu de révoquer la décision du 8 mars 2007 entérinant l’accord intervenu entre les parties.
_________________________
8 Whitty et Centre hospitalier régional de Sept-Îles et CSST, C.L.P. 194088-09-0211, 17 août 2004, G. Marquis; voir aussi Gauthier et Proulx, [2000] C.L.P. 994 .
[67] De ce qui précède, le soussigné retient notamment que les parties ne peuvent convenir de l’existence d’une lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la loi. De plus, le dossier doit contenir des faits soutenant la conclusion recherchée.
[68] En l’espèce, il convient de rappeler les paragraphes [21] à [24] de l’accord où les parties retiennent ce qui suit :
[21] De l’étude du dossier, les parties retiennent que la condition du genou droit du travailleur à la suite du fait accidentel initial était plus importante que ne le laissait croire les conclusions retenues par le médecin traitant. En effet, les diagnostics initiaux posés parlent de contusion, de gonalgie ou d’entorse, le travailleur ne bénéficiant au départ d’aucun arrêt de travail ni d’aucun traitement particulier. Les parties retiennent que le travailleur n’a alors pas reçu tous les soins nécessaires que son état recommandait afin d’éviter d’utiliser son genou sans aucune protection et sans aucune limitation. Le travailleur attendra jusqu’en février 2005 avant que le diagnostic réel de sa blessure ne soit reconnue et que les soins et traitements qu’elle nécessite ne soient entrepris.
[22] Tel que déjà statué par la Commission des lésions professionnelles, les parties retiennent que l’interprétation à donner au mot « soins » comprend la détermination d’un diagnostic1 et que le fait de ne pas avoir reconnu initialement chez le travailleur la présence d’une déchirure méniscale et l’insuffisance du ligament croisé antérieur a entraîné un retard important dans la période de consolidation normale de sa lésion, ceci constituant une omission de soins2.
[23] En conséquence, les parties retiennent que, tant la lésion professionnelle du 28 octobre 2003, à compter du 29 octobre 2003, date de la première consultation médicale, que la rechute, récidive ou aggravation subséquente du 20 mars 2005 constituent des lésions professionnelles découlant de l’omission de soins qui s’imposaient alors. En conséquence, les parties retiennent que les lésions professionnelles subies par le travailleur sont des lésions professionnelles au sens du paragraphe 1 de l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
[24] Les parties retiennent également que les diagnostic en relation avec la rechute, récidive ou aggravation ou lésion professionnelle au sens de l’article 31 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles subie par le travailleur le 20 mars 2005 sont un syndrome féméro-rotulien, un syndrome douloureux chronique et un status post-méniscectomie laissant le travailleur porteur des séquelles retenues par le Dr Hould,
________________________
1 Casavant et Reliure Marine Terminal ltée, C.A.L.P. 1438-62-8611, 5 février 1988, J.-M. Dubois
2 Services cast Terminal inc. et C.S.S.T., C.A.L.P. 83948-60-9611, 18 mars 1998, J.-G. Raymond
[69] Tout d’abord et contrairement à ce qui est indiqué au paragraphe [21] le médecin avait prescrit des travaux légers du 29 octobre au 3 novembre et en plus, dans les faits le travailleur a bénéficié d’un arrêt de travail au cours de cette période.
[70] Les parties retiennent que le travailleur n'a pas reçu tous les soins nécessaires que son état recommandait afin d’éviter d’utiliser son genou sans aucune protection ou limitation or, cette affirmation n’est aucunement soutenue par la preuve médicale au dossier, aucun des médecins à avoir examiné le travailleur n'a émis l’opinion qu’il n’avait pas reçu les soins nécessaires ou n'a discuté de cette possibilité.
[71] Au paragraphe [22] les parties retiennent que le fait que la déchirure méniscale n’ait pas été reconnue initialement a entrainé un retard important dans la période de consolidation de la lésion ce qui constituerait une omission de soins.
[72] Cette affirmation à l’effet que la période de consolidation a été plus longue en raison du retard à poser le diagnostic de déchirure méniscale n’est pas soutenue par la preuve médicale au dossier car dès le mois de novembre le travailleur était dirigé en orthopédie et un arrêt de travail accordé.
[73] Au paragraphe [23] les parties retiennent que tant la lésion initiale que la récidive, rechute ou aggravation constituent des lésions professionnelles découlant de l’omission de soins et sont des lésions professionnelles au sens de l’article 31 de la loi.
[74] L’article 31 de la loi édicte ceci :
31. Est considérée une lésion professionnelle, une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion :
1° des soins qu'un travailleur reçoit pour une lésion professionnelle ou de l'omission de tels soins;
2° d'une activité prescrite au travailleur dans le cadre des traitements médicaux qu'il reçoit pour une lésion professionnelle ou dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation.
Cependant, le premier alinéa ne s'applique pas si la blessure ou la maladie donne lieu à une indemnisation en vertu de la Loi sur l'assurance automobile (chapitre A-25), de la Loi visant à favoriser le civisme (chapitre C-20) ou de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels (chapitre I-6).
__________
1985, c. 6, a. 31.
[75] Pour qu’une blessure ou une maladie soit considérée une lésion professionnelle au sens de l’article 31, cette blessure ou cette maladie doit survenir par le fait ou à l’occasion des soins qu’un travailleur reçoit pour une lésion professionnelle ou de l’omission de tels soins.
[76] Dans le présent cas, les parties conviennent que le travailleur n'a pas eu tous les soins nécessaires que son état recommandait au départ et que le retard de ne pas avoir reconnu initialement la présence d’une déchirure méniscale a entrainé un retard important dans la période de consolidation. C’est ce qui les amène à conclure qu’il y a eu omissions de soins et que la lésion professionnelle du 28 octobre 2003 et le nouveau diagnostic de déchirure du ménisque interne et la récidive, rechute ou aggravation du 20 mars 2005 sont des lésions au sens du paragraphe 1 de l’article 31.
[77] La Commission des lésions professionnelles constate que les parties conviennent que la lésion professionnelle du 28 octobre 2003 et celle du 20 mars 2005 sont des lésions professionnelles au sens du premier paragraphe de l’article 31 de la loi. Il n’y a donc plus de lésion professionnelle pour laquelle il y aurait eu omission de soins or, la jurisprudence, est à l’effet que pour conclure à une lésion professionnelle au sens de l’article 31 il faut démontrer que l'omission des soins requis par une lésion professionnelle a causé une deuxième lésion distincte de la première[13].
[78] Il y a plus, tel que déjà mentionné les parties ne pouvaient convenir d’une conclusion de droit comme l'existence d’une lésion professionnelle au sens de l'article 31 de la loi or, c’est ce qu’elles font au paragraphe [23].
[79] Par ailleurs, rien au dossier ne permet de soutenir une telle conclusion vu l'absence totale de preuve démontrant que le travailleur s’est infligé une lésion professionnelle et que l’omission de soins pour cette lésion professionnelle a entrainé une seconde lésion.
[80] Dans les circonstances, le tribunal conclut que les faits au dossier ne supportent pas les conclusions recherchées de sorte que l’accord n’étant pas conforme à la loi, il n'aurait pas dû être entériné pour cette raison.
[81] Comme les parties n’ont pas eu l’occasion de faire valoir leurs moyens sur le fond des contestations, le tribunal conclut que les décisions rendues dans les dossiers 242078 et 297591 doivent être révoquées et les parties convoquées en audience.
[82] Par ailleurs, comme les désistements dans les dossiers 260420 et 288150 ont été déposés dans le cadre de l'accord à être entériné, la Commission des lésions professionnelles conclut qu’ils doivent être annulés et les parties convoquées en audience.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête en révocation déposée le 3 mai 2007 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail;
RÉVOQUE la décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 16 mars 2007 dans les dossiers 242078 et 297591;
ANNULE les désistements dans les dossiers 260420 et 288150;
CONVOQUERA les parties à une audience sur le fond dans les dossiers 242078, 260420, 288150 et 297591.
|
|
|
Alain Vaillancourt |
|
Commissaire |
|
|
|
|
|
|
|
|
Jacques Fleurent |
|
R.A.T.T.A.C.Q. |
|
Représentant du travailleur |
|
|
|
|
|
Me Éric Latulippe |
|
LANGLOIS KRONSTRÔM DESJARDINS |
|
Représentant de l’employeur |
|
|
|
|
|
Me Annie Veillette |
|
PANNETON LESSARD |
|
Représentant de la partie intervenante |
[1] L.R.Q., c.A-3.001
[2] CSST et Restaurants McDonald du Canada ltée, [1998] C.L.P. 1318 ; Hardoin et Société Asbestos ltée, 116756-03-9905, 00-09-05, G. Tardif, révision rejetée, 02-03-05, M. Beaudoin, (01LP-182).
[3] Gauthier et Proulx, [2000] C.L.P. 994
[4] C.L.P. 218512-64-0310, 1er mai 2007, S. Di Pasquale
[5] [2001] C.L.P. 360
[6] [1998] C.L.P. 733
[7] [1998] C.L.P. 783
[8] [2003] C.L.P. 601 (C.A.)
[9] 04-01-22, (30009)
[10] [2005] C.L.P. (C.A.)
[11] La CSST a déposé la Loi Médicale à l’audience
[12] C.L.P. 302302-04-0611, 16 novembre 2007, S. Sénéchal
[13] Bernard Gobeil (succ.) et Hydro-Québec, [2006] C.L.P. 454 .
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.