Desnoyers et Laurier Desnoyers (fermé) |
2007 QCCLP 1409 |
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[1] Le 9 février 2007, monsieur Gilles Desnoyers dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles à l'encontre d'une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d'une révision administrative, le 6 février 2007.
[2] Par cette décision, la CSST confirme la décision du 17 novembre 2006 et déclare que monsieur Desnoyers a droit au remboursement d'un montant de 9 810,00 $ pour l'adaptation de son véhicule[1], mais qu'il n'a pas droit au remboursement du coût d'un toit de fibre de verre[2] et d'un système « Pow’r Topper PCL 1900 » de marque Bruno[3].
[3] Le 28 février 2007, la Commission des lésions professionnelles tient une audience à Saint-Jérôme à laquelle monsieur Desnoyers est présent et est représenté par monsieur Daniel Sabourin. Laurier Desnoyers (l’employeur) n’est pas représenté à l'audience.
L'OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Monsieur Desnoyers demande de reconnaître qu’il a droit au remboursement du coût d'adaptation de son véhicule incluant le coût d'un toit de fibre de verre de 1 595,00 $ et celui d'un système « Pow’r Topper PCL 1900 » de marque Bruno de 4 895,00 $.
L'AVIS DES MEMBRES
[5] Les membres issus des associations syndicales et d'employeurs sont d'avis qu’il y a lieu d'accueillir la requête de monsieur Desnoyers, d'infirmer la décision rendue par la CSST à la suite d’une révision administrative le 6 février 2007 et de déclarer que monsieur Desnoyers a droit au remboursement du coût d'adaptation de son véhicule incluant le coût d'un toit de fibre de verre de 1 595,00 $ et celui d'un système « Pow’r Topper PCL 1900 » de marque Bruno de 4 895,00 $.
[6] La preuve non contredite révèle que cette mesure aiderait monsieur Desnoyers à surmonter les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles en lui permettant de se déplacer seul avec son triporteur ou son fauteuil électrique, ce qui répond à l'objectif même de la réadaptation sociale.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[7] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si monsieur Desnoyers a droit au remboursement du coût d'adaptation de son véhicule incluant le coût d'un toit de fibre de verre de 1 595,00 $ et celui d'un système « Pow’r Topper PCL 1900 » de marque Bruno de 4 895,00 $.
[8] L'article 151 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[4] (la loi) prévoit que le but de la réadaptation sociale est d'aider un travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles. Cet article est libellé comme suit :
151. La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.
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1985, c. 6, a. 151.
[9] L'article 152 prévoit qu'un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment des services professionnels d'intervention psychosociale, la mise en oeuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle, le paiement de frais d'aide personnelle à domicile, le remboursement de frais de garde d'enfants et le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.
[10] Les conditions d'application du droit à l'adaptation d'un véhicule sont décrites à l'article 155 dans les termes suivants :
155. L'adaptation du véhicule principal du travailleur peut être faite si ce travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique et si cette adaptation est nécessaire, du fait de sa lésion professionnelle, pour le rendre capable de conduire lui-même ce véhicule ou pour lui permettre d'y avoir accès.
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1985, c. 6, a. 155.
[11] Dans le présent cas, monsieur Desnoyers est victime, le 21 octobre 1985, d'une lésion professionnelle diagnostiquée comme fracture de la malléole interne gauche. À la suite de cette lésion professionnelle, monsieur Desnoyers subit une triple arthrodèse du pied en 1986 et une exérèse de crampons en 1991. Ces lésions entraînent une atteinte permanente grave à l’intégrité physique ou psychique de 13,2 % et des limitations fonctionnelles qui le rendent incapable d'exercer son emploi.
[12] En raison de l'utilisation de béquilles, monsieur Desnoyers subit également des lésions professionnelles aux deux épaules, lesquelles entraînent des limitations fonctionnelles et une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique de 28,25 %. L'utilisation de béquilles entraîne également des lésions professionnelles aux poignets.
[13] À la suite de ces lésions professionnelles, monsieur Desnoyers est limité dans ses déplacements et doit utiliser un fauteuil roulant et un triporteur. Le coût d'achat du triporteur est défrayé par la CSST de même que celui d'un fauteuil roulant électrique.
[14] Le véhicule que monsieur Desnoyers utilise à l'été 2006, un Dodge Caravan 2000, est adapté en 2003 afin de rendre ce dernier capable de l'utiliser lui-même. Ce véhicule est notamment muni d'un treuil afin de permettre le transport du triporteur. Grâce au treuil, monsieur Desnoyers est autonome et peut lui-même mettre son triporteur à l'intérieur de sa camionnette.
[15] À l'automne 2006, monsieur Desnoyers fait l'acquisition d'un nouveau véhicule, un Chevrolet Silverado 2006. Il s'agit d'une camionnette de type « pick-up » avec une « boîte » ouverte.
[16] Il explique au tribunal qu’il fait cette acquisition, car il est incapable d'utiliser seul son Dodge Caravan pour le transport de son fauteuil électrique. Effectivement, en raison de sa hauteur et de sa largeur, le fauteuil électrique ne peut être placé dans le véhicule par la portière arrière, mais doit être introduit dans la camionnette par la portière du côté au moyen de rampes.
[17] Comme le treuil peut uniquement être utilisé par la portière arrière, monsieur Desnoyers ne peut s'en servir pour introduire son fauteuil électrique dans sa camionnette. Il est, par ailleurs, incapable de retirer le banc central dans son camion, d'installer les rampes et de pousser lui-même son fauteuil électrique sur celles-ci afin de l'introduire dans son véhicule. Il ne peut donc, de façon autonome, transporter son fauteuil électrique avec sa camionnette Dodge Caravan.
[18] Monsieur Desnoyers explique qu’il doit régulièrement utiliser son fauteuil électrique lors de ses déplacements, car l'accès à divers lieux publics est impraticable au triporteur en raison de ses dimensions. C'est notamment le cas de restaurants, de salles de bain de plusieurs lieux publics et de certains hôtels.
[19] Monsieur Desnoyers relate que c'est ce qui l'incite à se procurer un nouveau véhicule en 2006. Il achète alors une Chevrolet Silverado 2006. Il mentionne que la CSST accepte de défrayer le coût d'adaptation de ce nouveau véhicule, mais qu'elle refuse de lui rembourser le coût du toit de fibre de verre et du système permettant de soulever ce toit pour sortir le fauteuil électrique ou le triporteur du camion.
[20] Selon monsieur Desnoyers, ces deux travaux sont nécessaires puisqu'il requiert un toit sur sa camionnette pour protéger le fauteuil électrique ou le triporteur des intempéries et que le treuil qui permet de placer le fauteuil électrique ou le triporteur dans le camion ne peut être utilisé sans système de levier du toit.
[21] Durant la saison hivernale, monsieur Desnoyers est incapable de déneiger lui-même l'intérieur de la boîte en cas d'accumulations. Il est également incapable d'utiliser une toile pour recouvrir son triporteur comme le suggère la CSST puisqu'il ne peut se pencher pour l'attacher. En outre, l'installation de cette toile bloquerait les accès d'attache du câble du treuil sur le triporteur et sur le fauteuil électrique, empêchant ainsi de les placer déjà recouverts dans le camion. Or, monsieur Desnoyers n'est pas en mesure de monter dans le camion pour y installer la toile après y avoir placé le triporteur.
[22] Le tribunal estime, en conséquence, que monsieur Desnoyers a droit au remboursement du coût d'un toit de fibre de verre et de celui d'un système « Pow’r Topper PCL 1900 » de marque Bruno puisque la preuve non contredite révèle que cette mesure l'aiderait à surmonter les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles en lui permettant de se déplacer seul avec son triporteur ou son fauteuil électrique.
[23] Ce type d'adaptation du véhicule s'inscrit donc dans l'objectif de la réadaptation sociale puisqu'en permettant à monsieur Desnoyers de redevenir autonome dans ses transports, cette mesure l'aide à surmonter les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle et à s'adapter à la situation qui découle de sa lésion.
POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête de monsieur Gilles Desnoyers en date du 9 février 2007 ;
INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d'une révision administrative le 6 février 2007 ;
DÉCLARE que monsieur Desnoyers a droit au remboursement d'un montant de 9 810,00 $ pour l'adaptation de son véhicule pour l'achat et l'installation d'une commande manuelle pousser-tirer, d'une boule au volant, d'un système « glide and go » côté conducteur et d'un treuil Bruno PULL 1100 d'une capacité de 350 livres ;
DÉCLARE que monsieur Desnoyers a également droit au remboursement du coût d'un toit de fibre de verre de 1 595,00 $ et d'un système « Pow’r Topper PCL 1900 » de marque Bruno de 4 895,00 $.
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Martine Montplaisir |
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Commissaire |
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Monsieur Daniel Sabourin |
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Daniel Sabourin Consultant inc. |
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Représentant de la partie requérante |
[1] Ce montant comprend l'achat et l'installation d'une commande manuelle pousser-tirer, l'achat et l'installation d'une boule au volant, l'achat et l'installation d'un système « glide and go » côté conducteur et l'achat et l'installation d'un treuil Bruno PULL 1100 d'une capacité de 350 livres.
[2] 1 595,00 $
[3] 4 895,00 $
[4] L.R.Q., c. A-3.001
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.