G.D. et Centre d'accueil A (fermé) |
2007 QCCLP 5435 |
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[1] Le 30 novembre 2006, Mme G... D... (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 9 novembre 2006 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme les huit décisions qu’elle a initialement rendues le 27 juillet 2006 concernant le remboursement de différents frais.
[3] L’audience s’est tenue à Laval le 30 mai 2007 en présence de la travailleuse et de son représentant. Le CSSS A (l’employeur) a avisé de son absence à l’audience.
[4] Un délai a été accordé à la travailleuse pour produire des documents supplémentaires. Le dossier a été pris en délibéré le 19 juin 2007, soit au moment du dernier envoi de la travailleuse.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[5] La travailleuse demande de lui reconnaître le droit au remboursement des frais suivants : frais d’entretien ménager et de travaux de grand ménage, frais de déplacement et de traitements pour des soins psychologiques, frais de déplacement et d’hébergement pour une thérapie de repos, frais de déplacement et d’inscription à un cours d’autodéfense.
[6] La travailleuse se désiste de sa demande concernant les frais suivants : frais de déplacement pour une expertise médicale; frais de repas pour des soins psychologiques, frais de déplacement pour des consultations auprès de son médecin traitant et pour se rendre à la pharmacie, frais de huissier, frais pour résumés de dossier, frais pour formulaires d’assurance.
[7] Quant au coût de ses médicaments, la CSST a reconnu à la travailleuse le droit au remboursement sur production des factures originales. Ce droit étant établi, la travailleuse reconnaît qu’il lui appartient de soumettre les documents demandés à la CSST.
L’AVIS DES MEMBRES
[8] Le membre issu des associations syndicales est d’avis d’accueillir en partie la requête de la travailleuse. Il estime qu’elle doit être relevée de son défaut d’avoir produit sa réclamation dans le délai et qu’elle a droit au remboursement du coût des traitements en psychologie et des frais de déplacement pour s’y rendre. Il lui accorderait également les frais concernant le ménage de son domicile à titre de frais d’entretien courant du domicile. Il estime que les autres demandes de la travailleuse ne sont pas couvertes par la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).
[9] Le membre issu des associations d’employeurs accueillerait la requête de la travailleuse uniquement pour les traitements en psychologie et les frais de déplacement qui y sont reliés. Il considère lui aussi que la travailleuse doit être relevée de son défaut d’avoir produit sa réclamation dans le délai. Les autres demandes de remboursement ne lui apparaissent pas bien fondées.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[10] La travailleuse occupe un poste de préposée aux bénéficiaires au Centre d’accueil A. Le 14 mai 2004, elle est victime d’une agression verbale et d’une bousculade par un collègue de travail.
[11] La CSST refuse initialement sa réclamation mais, en mai 2005, à la suite d’une révision administrative[2], elle reconnaît que la travailleuse a subi une lésion professionnelle ayant entraîné une anxiété post-traumatique. Cette lésion est consolidée le 14 septembre 2004, sans atteinte permanente à l’intégrité physique ni limitations fonctionnelles, suivant le rapport final émis par le Dr Robert Hamel, médecin qui a charge de la travailleuse. Le Dr Hamel indique toutefois que la travailleuse ne peut pas retourner au travail en raison d’une condition personnelle.
[12] À la suite de son retour au travail en janvier 2005, la travailleuse subit le 2 février 2005 une récidive, rechute ou aggravation. Sa réclamation est acceptée par la CSST et maintenue en révision administrative[3].
[13] Au moment de l’audience, la lésion de la travailleuse n’était toujours pas consolidée. L’évaluation des séquelles et des limitations fonctionnelles n’est donc pas encore complétée.
[14] La réclamation initiale de la travailleuse ayant été refusée par la CSST, ce n’est qu’en mai 2005, après la décision de la révision administrative que la travailleuse se voit reconnaître le droit aux bénéfices de la loi.
[15] Signalons que dans son analyse des diverses demandes de remboursement de frais soumis par la travailleuse, la CSST a tenu compte du fait que sa réclamation a été acceptée uniquement le 6 mai 2005 et a retenu cette date comme point de départ du calcul du délai de six mois applicable.
[16] À l’audience, la travailleuse explique qu’à compter de mai 2005, elle a remis toutes ses factures et reçus à son représentant syndical de l’époque[4]. Elle croyait que celui-ci s’occupait des demandes de remboursement auquel elle avait droit. En juin 2006, ce dernier soumet à la CSST plusieurs demandes de remboursement de différents frais. Précisons que les demandes sont signées par la travailleuse mais qu’elle n’a pas eu connaissance de leurs contenus. Son représentant lui avait fait signer en blanc plusieurs formulaires. Elle ignore même à quoi réfèrent certaines demandes.
[17] Nous allons maintenant analyser chacune des demandes de la travailleuse le tout suivant les dispositions de la loi et des règlements applicables.
Ø Frais de ménage et travaux de grand ménage
[18] La travailleuse produit un relevé assermenté du 17 juin 2007, obtenu après l’audience, concernant des frais de ménage pour l’année 2004 et 2005 pour un montant total de 4 800 $. Cette somme inclut des frais pour l’entretien régulier du domicile, des frais supplémentaires pour le lavage des vitres à trois reprises pendant cette période (100 $ chaque fois) de même que des frais pour le grand ménage à une occasion en 2004 et à deux reprises en 2005 (400 $ à chaque occasion).
[19] Un travailleur qui a droit à l’aide personnelle à domicile peut obtenir un montant d’aide mensuelle pour effectuer certaines tâches domestiques. Le droit à l’aide personnelle à domicile est prévu aux articles 158 à 162 de la loi. L’article 158 énonce les conditions d’ouverture :
158. L'aide personnelle à domicile peut être accordée à un travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, est incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement, si cette aide s'avère nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.
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1985, c. 6, a. 158.
[20] Pour avoir droit à l’aide personnelle à domicile, la travailleuse doit donc satisfaire à trois conditions : être incapable de prendre soin d’elle-même, être incapable d’effectuer sans aide les tâches domestiques qu’elle effectuerait normalement et que l’aide soit nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.
[21] La jurisprudence[5] a interprété que le «et» de l’expression «est incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement» est conjonctif. Un des principaux motifs étant qu’en vertu de l’article 162, le droit à l’aide personnelle cesse lorsque le travailleur redevient capable de prendre soin de lui-même «ou» d’effectuer sans aide ses tâches domestiques. L’obtention de l’aide doit donc répondre aux deux mêmes conditions.
[22] Dans le présent dossier, la Commission des lésions professionnelles considère qu’elle n’a pas la preuve que la travailleuse est incapable de prendre soin d’elle-même.
[23] La travailleuse témoigne qu’elle avait mal partout, qu’elle avait perdu du poids, qu’elle était au lit. Elle a embauché quelqu’un pour faire l’entretien ménager chez elle une fois par semaine, ce qu’elle faisait elle-même auparavant.
[24] Rappelons que la travailleuse souffre d’anxiété post-traumatique et de dépression. Or la preuve médicale au dossier ne démontre pas que la travailleuse avait des difficultés à prendre soin d’elle-même selon les besoins énumérés au Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile[6] soit le lever, le coucher, l'hygiène corporelle, l'habillage, le déshabillage, les soins intestinaux et vésicaux et l'alimentation.
[25] La travailleuse n’ayant pas droit à l’aide personnelle à domicile, il faut déterminer si elle peut avoir droit au remboursement aux frais d’entretien ménager et de grand ménage en vertu de l’article 165 de la loi qui énonce ceci :
165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.
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1985, c. 6, a. 165.
[26] Comme la Commission des lésions professionnelles l’a souligné dans l’affaire Lebel et Municipalité Paroisse de Saint-Éloi[7], l’entretien courant du domicile peut inclure les frais d’entretien ménager.
[27] L'article 165 n'est pas conditionnel à l'impossibilité de prendre soin de soi-même mais il exige la preuve que le travailleur demeure avec une atteinte permanente grave à son intégrité physique et des limitations fonctionnelles qui l'empêchent de reprendre certaines activités qu'il effectuait auparavant.
[28] Or la lésion professionnelle de la travailleuse, de nature psychique, n’est toujours pas consolidée. Rien ne permet de prévoir qu’elle conservera une atteinte permanente grave à son intégrité physique ni des limitations fonctionnelles pouvant affecter sa capacité résiduelle d’effectuer ce type de travaux.
[29] Le seul témoignage de la travailleuse qui affirme qu’elle ne sent pas capable d’effectuer le ménage ne suffit pas à faire cette preuve.
[30] La travailleuse n’a donc pas droit au remboursement demandé pour les frais de ménage courant et de grand ménage tant en vertu de l’article 158 que de l’article 165 de la loi.
Ø Frais de traitements et de déplacement pour des soins psychologiques
[31] La travailleuse bénéficie d’un suivi psychologique au centre Traumatys depuis mai 2004. Elle demande le remboursement des frais de thérapie auprès de la psychologue Louise Gaston de même que les frais de déplacement pour se présenter à ses traitements. La travailleuse dépose copie d’un compte d’honoraires de 1 190 $ pour 17 séances entre le 14 octobre 2004 et le 17 mars 2005 au taux horaire de 70 $.
[32] La CSST a accepté de rembourser le coût des traitements pour la période du 9 juin 2004 au 12 octobre 2004. Elle a cependant refusé le remboursement des frais de déplacement au motif que la réclamation de la travailleuse a été produite en dehors du délai de six mois.
[33] En ce qui a trait au coût des traitements, la Commission des lésions professionnelles conclut que la travailleuse y a droit dans les limites prévues au Règlement sur l’assistance médicale[8]. L’article 3 de ce règlement prévoit ce qui suit :
3. La Commission de la santé et de la sécurité du travail assume le coût des soins, des traitements et des aides techniques reçus au Québec, selon les montants prévus au présent règlement, si ces soins, ces traitements ou ces aides techniques ont été prescrits par le médecin qui a charge du travailleur avant que les soins ou traitements ne soient reçus ou que les dépenses pour ces aides techniques ne soient faites; à moins de disposition contraire, ces montants comprennent les fournitures et les frais accessoires reliés à ces soins, traitements ou aides techniques.
De plus, toute réclamation à la Commission concernant ces soins, traitements ou aides techniques doit être accompagnée d'une copie de l'ordonnance du médecin qui a charge du travailleur, de la recommandation de l'intervenant de la santé le cas échéant, et des pièces justificatives détaillant leur coût.
L'ordonnance du médecin peut être détaillée ou prendre la forme d'une adresse à un intervenant de la santé.
[34] C’est le Dr Hamel qui a prescrit les traitements et dirigé la travailleuse chez Traumatys. D’ailleurs la CSST accepte le remboursement de ces soins mais la limite à une certaine période pour une raison que le Tribunal ignore. La travailleuse y a donc droit mais selon les montants prévus au règlement. Pour les soins de psychologie, l’annexe I prévoit un remboursement sur un taux horaire de 65 $.
[35] Concernant les frais de déplacement, ceux-ci sont prévus au Règlement sur les frais de déplacement et de séjour[9]. L’article 1 énonce le droit à ce remboursement et l’article 21 prévoit qu’une demande de remboursement doit être faite dans un délai de six mois :
1. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit au remboursement, selon les normes prévues au présent règlement et les montants prévus à l'annexe 1, des frais de déplacement et de séjour qu'il engage pour recevoir des soins, subir des examens médicaux ou accomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation conformément à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001).
Si l'état physique du travailleur le requiert, la personne qui doit l'accompagner a droit au remboursement des frais de déplacement et de séjour qu'elle engage, selon les mêmes normes et montants.
21. Les frais prévus au présent règlement ne sont remboursés que si la demande de remboursement, appuyée des pièces justificatives, est transmise à la Commission dans les 6 mois suivant la date où ils ont été faits.
Toutefois, la Commission peut prolonger ce délai lorsque la personne démontre un motif raisonnable pour expliquer son retard.
[36] La demande de la travailleuse a été soumise le 1er juin 2006. La Commission des lésions professionnelles estime toutefois que la travailleuse lui a démontré un motif raisonnable permettant de la relever de son défaut. Elle s’en est remise à son représentant qui a fait défaut d’agir en temps opportun et, lorsqu’il l’a fait, il a multiplié les demandes pour toutes sortes de frais sans en faire part à la travailleuse. Celle-ci était dans un état psychologique vulnérable limitant sa capacité d’assurer le suivi de son dossier dans un contexte où il y avait en plus de nombreuses contestations. Elle n’a pas à assumer l’erreur de son représentant.
[37] L’article 5 du Règlement sur les frais de déplacement et de séjour prévoit cependant que les frais sont remboursables pour le transport en commun. L’utilisation du véhicule personnel peut être autorisée par la CSST lorsque le médecin atteste qu’un travailleur est incapable d’utiliser le transport en commun. La travailleuse reconnaît qu’elle n’a pas une telle attestation. C’est donc sur la base du tarif du transport en commun que la travailleuse aura droit au remboursement de ses déplacements pour recevoir des soins psychologiques chez Traumatys.
[38] La travailleuse a également été suivie en psychiatrie au Pavillon Albert Prévost après la rechute de février 2005.
[39] La travailleuse précise qu’elle n’a pas assumé de frais de repas. Le remboursement de ses frais de déplacement a été refusé par la CSST`au motif que la réclamation été déposée hors délai et sans une ordonnance médicale d’accompagnement. La CSST lui indique cependant qu’elle lui remboursera ses frais pour la période du 30 novembre 2005 au 21 décembre 2005 dans la mesure où elle produira des factures originales et son horaire de traitements. La travailleuse indique à l’audience qu’elle adressera à la CSST les réclamations appropriées.
[40] Pour les motifs déjà énoncés, la travailleuse a été relevée de son défaut d’avoir produit sa réclamation dans le délai. Elle a donc droit aux frais de déplacement pour recevoir ses traitements au Pavillon Albert Prévost pour toute la période où elle a suivi ses traitements.
Ø Frais de déplacement et d’hébergement pour une thérapie de repos
[41] Chez Traumatys, la travailleuse poursuit une thérapie avec Mme Nicole Fortier, travailleuse sociale. La travailleuse témoigne que cette dernière lui aurait recommandé une semaine de repos en juillet 2004. Elle a donc passé une semaine de repos avec son conjoint à leur propre chalet à Mont-Laurier. Elle réclame les frais de déplacement requis pour s’y rendre soit la distance[10] pour effectuer un aller-retour entre son domicile à Laval et son chalet.
[42] La Commission des lésions professionnelles ne peut faire droit à cette demande. L’article 188 de la loi reconnaît le droit à l’assistance médicale au travailleur victime d’une lésion professionnelle. Cette assistance comprend les éléments suivants :
189. L'assistance médicale consiste en ce qui suit :
1° les services de professionnels de la santé;
2° les soins ou les traitements fournis par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5);
3° les médicaments et autres produits pharmaceutiques;
4° les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons, les services ambulanciers et la disposition des cadavres (chapitre L-0.2), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;
5° les soins, les traitements, les aides techniques et les frais non visés aux paragraphes 1° à 4° que la Commission détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.
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1985, c. 6, a. 189; 1992, c. 11, a. 8; 1994, c. 23, a. 23; 1999, c. 89, a. 53; 2001, c. 60, a. 166.
[43] La travailleuse qualifie de thérapie cette semaine de repos. Cependant il n’y a pas au dossier d’éléments indiquant que cette semaine puisse être considérée comme un élément du traitement ou des soins requis pour la lésion professionnelle. Il n’y a aucune prescription à ce sujet et il n’est pas fait mention de cela dans les rapports de suivi provenant de Traumatys.
[44] Les éléments au dossier démontrent plutôt qu’à cette période, Mme Fortier était elle-même en vacances. Le 13 juillet 2004, le Dr Michel H. Des Rosiers examine la travailleuse, à la demande de l’employeur. Il rapporte que la travailleuse est en thérapie avec Mme Fortier à raison de deux rencontres/semaine. Il indique que la dernière rencontre a eu lieu le 30 juin et que la prochaine rencontre est prévue uniquement pour le 3 août prochain en raison des vacances de cette dernière. La veille, le Dr Hamel note également que la travailleuse n’a pas de suivi au centre Traumatys pour une période d’un mois.
[45] Il est possible que Mme Fortier ait indiqué à la travailleuse de se reposer mais cela ne permet pas pour autant de conclure à une thérapie.
[46] La Commission des lésions professionnelles conclut donc que la preuve au dossier ne permet pas d’interpréter cette semaine de repos passée par la travailleuse à son chalet comme un élément d’assistance médicale reliée à sa lésion professionnelle.
Ø Frais d’inscription et de déplacement à un cours d’autodéfense
[47] La travailleuse a suivi une session d’un cours d’autodéfense (taekwondo) en janvier 2005. Elle a soumis copie de la facture des frais d’inscription à la CSST pour remboursement.
[48] Elle explique qu’elle a suivi ce cours à la suggestion du Dr Jacques Gagnon, psychiatre, qui a fait une expertise à la demande de l’employeur en novembre 2004. Dans une seconde expertise du 17 octobre 2005, le Dr Gagnon indique qu’il a effectivement fait cette recommandation à la travailleuse.
[49] La CSST refuse le remboursement des frais du cours parce que la travailleuse n’a pas obtenu une autorisation préalable. Mais elle avise la travailleuse que les frais pourraient être éventuellement remboursés consécutivement à une réclamation en bonne et due forme. Elle refuse aussi le remboursement des frais de déplacement au motif que la réclamation a été produite hors délai.
[50] La Commission des lésions professionnelles estime que la travailleuse a droit au remboursement de ses frais d’inscription. L’article 184, 5e paragraphe permet à la CSST de prendre toute mesure qu’elle estime utile pour atténuer ou faire disparaître les conséquences d'une lésion professionnelle :
184. La Commission peut:
1° développer et soutenir les activités des personnes et des organismes qui s'occupent de réadaptation et coopérer avec eux;
2° évaluer l'efficacité des politiques, des programmes et des services de réadaptation disponibles;
3° effectuer ou faire effectuer des études et des recherches sur la réadaptation;
4° prendre toute mesure qu'elle estime utile pour favoriser la réinsertion professionnelle du conjoint d'un travailleur décédé en raison d'une lésion professionnelle;
5° prendre toute mesure qu'elle estime utile pour atténuer ou faire disparaître les conséquences d'une lésion professionnelle.
Aux fins des paragraphes 1°, 2° et 3°, la Commission forme un comité multidisciplinaire.
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1985, c. 6, a. 184.
[51] Comme le souligne la Commission des lésions professionnelles dans Major et Émondage St-Germain & Frères ltée[11], cette disposition ne confère aucun droit au travailleur mais elle investit la CSST d’un pouvoir discrétionnaire qui est sujet à révision.
[52] Dans le présent dossier, c’est le psychiatre évaluateur pour l’employeur qui fait cette recommandation à la travailleuse. Il signale que la travailleuse manifeste beaucoup d’anxiété et une amorce de phobie. Dans ce contexte, cette mesure apparaît utile pour atténuer les conséquences de la lésion professionnelle. D’ailleurs la CSST ne ferme pas la porte à une nouvelle demande. Mais cela demeure un peu théorique, la travailleuse ayant déjà pris l’initiative de suivre ce cours.
[53] Comme le signale également la Commission des lésions professionnelles dans la décision Major et Émondage St-Germain & Frères ltée[12], quoiqu’il aurait été préférable que la travailleuse demande l’autorisation du remboursement au préalable, elle a droit au remboursement des frais engagés pour suivre ce cours.
[54] Par conséquent, elle a également droit aux frais de déplacement pour suivre le cours en question. Sur la question du délai, pour les motifs déjà énoncés plus haut, la Commission des lésions professionnelles considère que la travailleuse doit être relevée de son défaut. Évidemment elle a uniquement droit aux frais du transport en commun tel que prévu au Règlement sur les frais de déplacement et de séjour.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE en partie la requête de Mme G... D..., la travailleuse;
MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 9 novembre 2006 à la suite d’une révision administrative en ce qui a trait aux frais de traitements et de déplacement pour recevoir des soins psychologiques et aux frais d’inscription et de déplacement pour un cours d’autodéfense;
DÉCLARE que la travailleuse a droit au remboursement des soins psychologiques reçus chez Traumatys au coût prévu par le Règlement sur l’assistance médicale;
DÉCLARE que la travailleuse a droit au remboursement de ses frais de déplacement pour les soins reçus chez Traumatys et au Pavillon Albert Prévost suivant les modalités prévues au Règlement sur les frais de déplacement et de séjour;
DÉCLARE que la travailleuse a droit au remboursement du coût d’inscription du cours d’autodéfense et des frais de déplacement pour s’y rendre suivant les tarifs autorisés par le Règlement sur les frais de déplacement et de séjour.
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Lucie Nadeau |
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Commissaire |
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M. Julien Lapointe |
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S.C.F.P. (LOCAL 4296) |
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Représentant de la partie requérante |
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[1] L.R.Q., c. A-3.001
[2] Décision du 6 mai 2005 (l’employeur s’est désisté en mai 2006 de sa contestation à la Commission des lésions professionnelles à l’égard de cette décision dans le dossier 263198).
[3] L’employeur s’est également désisté de sa contestation à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre de la décision de la révision administrative du 20 janvier 2006 dans le dossier 281810.
[4] Ce n’est plus lui qui représente la travailleuse.
[5] CSST et Fleurent, [1998] C.L.P. 360; Lebel et Municipalité Paroisse de Saint-Éloi, C.L.P. 124846-01A-9910, 29 juin 2000, L. Boudreault (00LP-29); Turgeon et Pro santé enr., C.L.P. 130628-01A-0001, 2 août 2001, R. Arseneau; Calandrino et Banyo Canada inc., C.L.P. 172440-71-0111, 4 septembre 2002, D. Taillon; Espinosa et Air Nova inc., C.L.P. 192230-31-0210, 20 décembre 2002, H. Thériault
[6] (1997) 129 G.O. II, 7365
[7] Déjà citée, note 5.
[8] (1993) 125 G.O. II, 1331
[9] (1993) 125 G.O. II, 4257
[10] La travailleuse réduit la demande initiale formulée par son représentant qui avait réclamé 3 744 km pour l’aller-retour et ce à trois reprises.
[11] C.L.P. 282720-71-0602, 8 septembre 2006, P. Perron
[12] Id.
AVIS :
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