Trudel et Transelec / Common inc. |
2007 QCCLP 4132 |
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DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION
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[1] Le 6 juillet 2006, monsieur Adrien Trudel (le travailleur) dépose une requête par laquelle il demande à la Commission des lésions professionnelles de révoquer une décision qu’elle a rendue le 24 février 2006.
[2] Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles confirme une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 15 février 2005 à la suite d’une révision administrative. Elle déclare que monsieur Trudel était capable d’exercer son emploi à compter du 13 décembre 2004 et que l’indemnité de remplacement du revenu devait cesser à cette date (dossier 257302-01B-0502).
[3] La Commission des lésions professionnelles confirme également une seconde décision de la CSST rendue le 2 mai 2005 à la suite d’une révision administrative. Elle déclare irrecevable la demande de révision de la décision que la CSST a initialement rendue le 8 février 2005 (dossier 261957-01B-0505).
[4] La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience le 9 juillet 2007 à Gaspé. Monsieur Trudel était présent à l’audience et il était représenté. L’employeur, Transelec / Common inc., et la CSST étaient également représentés.
L’OBJET DE LA REQUÊTE
[5] Monsieur Trudel prétend que la décision comporte un vice de fond qui est de nature à l’invalider.
[6] Plus précisément, il reproche à la première commissaire de ne pas avoir retenu son argument voulant que le rapport d’évaluation médicale d’un médecin qui l’a examiné (le docteur Théodore Nault) doive être considéré invalide parce que ce dernier ne l’a pas informé sans délai du contenu de son rapport, contrairement à ce que prévoit l’article 203 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).
[7] Il demande de révoquer la décision, de déclarer que les séquelles permanentes de sa lésion professionnelle sont celles établies par le docteur Guy Tremblay, de retourner le dossier à la CSST pour qu’elle se prononce sur sa capacité à exercer son emploi en tenant compte des limitations établies par ce médecin ou sinon, pour qu’elle reprenne tout le processus d’évaluation des séquelles permanentes.
QUESTION PRÉLIMINAIRE
[8] Le tribunal a soulevé d’office le fait que la requête apparaissait, à sa face même, irrecevable parce qu’elle a été déposée après l’expiration du délai prévu par la loi pour déposer une requête en révision ou en révocation.
L’AVIS DES MEMBRES
[9] Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d’avis que la requête est irrecevable.
[10] Ils retiennent qu'elle a été déposée après l’expiration du délai prévu par la loi et considèrent que monsieur Trudel n’a pas établi un motif raisonnable justifiant de le relever des conséquences de son défaut d’avoir respecté ce délai.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[11] La Commission des lésions professionnelles doit décider si la requête de monsieur Trudel est recevable.
[12] L’article 329.57 de la loi prévoit qu’une requête visant à obtenir la révision ou la révocation d’une décision doit être déposée dans un délai raisonnable. Cet article se lit comme suit :
429.57. Le recours en révision ou en révocation est formé par requête déposée à la Commission des lésions professionnelles, dans un délai raisonnable à partir de la décision visée ou de la connaissance du fait nouveau susceptible de justifier une décision différente. La requête indique la décision visée et les motifs invoqués à son soutien. Elle contient tout autre renseignement exigé par les règles de preuve, de procédure et de pratique.
La Commission des lésions professionnelles transmet copie de la requête aux autres parties qui peuvent y répondre, par écrit, dans un délai de 30 jours de sa réception.
La Commission des lésions professionnelles procède sur dossier, sauf si l'une des parties demande d'être entendue ou si, de sa propre initiative, elle le juge approprié.
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1997, c. 27, a. 24.
[13] La jurisprudence a établi que ce délai était le même que celui prévu par l’article 359 de loi pour contester une décision rendue par la CSST à la suite d’une révision administrative, soit 45 jours à partir de la notification de la décision[2].
[14] Lors de son témoignage, monsieur Trudel explique qu’il a reçu la décision du 24 février 2006 quelques jours après qu'elle ait été rendue. Le représentant de l’employeur précise, pour sa part, l’avoir reçue le 2 ou le 3 mars 2006.
[15] La requête a donc été déposée après l’expiration du délai de 45 jours établi par la jurisprudence parce que le représentant de monsieur Trudel ne l’a fait parvenir à la Commission des lésions professionnelles que le 6 juillet 2006. Le non-respect du délai fait en sorte qu'elle est irrecevable.
[16] Le tribunal peut néanmoins relever monsieur Trudel des conséquences de son défaut d’avoir respecté le délai et considérer sa requête recevable s’il établit que son retard est justifié par un motif raisonnable, comme le prévoit l’article 429.19 de la loi :
429.19. La Commission des lésions professionnelles peut prolonger un délai ou relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter, s'il est démontré que celle-ci n'a pu respecter le délai prescrit pour un motif raisonnable et si, à son avis, aucune autre partie n'en subit de préjudice grave.
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1997, c. 27, a. 24.
[17] Monsieur Trudel explique qu’après avoir reçu la décision, il a communiqué avec l’avocate qui le représentait lors de l’audience initiale. Il n’a pas précisé à quelle date cette communication a eu lieu, ni quelle a été la teneur des propos échangés.
[18] Il explique que, par la suite, il s’est mis à la recherche d’un autre avocat. Il ne précise pas à quel moment il a effectué ses démarches et, au départ, il n’était pas en mesure de fournir plus de précisions sur les personnes contactées. Ce n’est qu’après que son représentant lui ait suggéré des noms, qu’il dit avoir communiqué avec ces personnes.
[19] Il a finalement consulté Me Francis Bernatchez. Il ne se souvient pas à quelle date a eu lieu la première consultation et c’est ce dernier qui indique qu’elle a eu lieu au début du mois de mai, sans plus de précision sur la date.
[20] C’est également ce dernier qui explique qu’il a demandé à monsieur Trudel de communiquer avec son ancienne avocate pour qu’elle lui fasse parvenir le dossier. Il dit l’avoir reçu à la fin du mois de mai et avoir pris le mois de juin pour l’étudier avant de transmettre la requête à la Commission des lésions professionnelles.
[21] L’imprécision et la confusion des explications apportées par monsieur Trudel sont telles qu'elles n'apparaissent pas très convaincantes. Par ailleurs, il est pour le moins surprenant que son représentant ait pris plus d'un mois à étudier le dossier avant de déposer la requête dans le contexte sachant que le délai était expiré.
[22] Quoi qu’il en soit, le tribunal retient de la preuve soumise que le délai pour déposer la requête était déjà expiré lorsque monsieur Trudel consulte Me Bernatchez et il considère que le fait d'avoir pris deux mois avant de trouver un représentant apparaît déraisonnable et ne témoignage pas d’une conduite diligente de sa part, compte tenu des explications fournies.
[23] Dans ce contexte, le tribunal estime que monsieur Trudel n’a pas établi que son retard est justifié par un motif raisonnable et partant, qu'il n’y a pas lieu de le relever des conséquences de son défaut d’avoir respecté le délai de 45 jours.
[24] Après considération de la preuve et des arguments soumis par les représentants des parties, la Commission des lésions professionnelles en vient donc à la conclusion que la requête en révocation de monsieur Trudel doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête en révocation de monsieur Adrien Trudel.
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Claude-André Ducharme |
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Commissaire |
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Me Francis Bernatchez |
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Représentant de la partie requérante |
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Me Christian Tétreault |
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Bourque, Tétreault, ass. |
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Représentant de la partie intéressée |
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Me Pierre Villeneuve |
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Panneton Lessard |
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Représentant de la partie intervenante |
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