Décision

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Modèle de décision CLP - juin 2011

Chassé et Conciergerie Speico inc.

2013 QCCLP 379

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Lévis

23 janvier 2013

 

Région :

Québec

 

Dossier :

456010-31-1111-R

 

Dossier CSST :

136617487

 

Commissaire :

Ann Quigley, juge administratif

 

Membres :

Michel Piuze, associations d’employeurs

 

Pierre Banville, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

Réjean Chassé

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Conciergerie Speico inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU RÉVOCATION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 7 mai 2012, monsieur Réjean Chassé (le travailleur) dépose une requête en révision ou révocation à l’encontre d’une décision[1] rendue par la Commission des lésions professionnelles le 10 avril 2012.

[2]           Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles rejette la requête déposée par le travailleur, confirme la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 3 novembre 2011 à la suite d’une révision administrative et déclare irrecevable la demande de révision déposée par le travailleur le 23 juin 2011 à l’encontre de la décision  initialement rendue par la CSST le 15 février 2011.

[3]           Le travailleur se représente seul à l’audience portant sur la requête en révocation tenue devant la Commission des lésions professionnelles siégeant à Québec le 24 octobre 2012. Conciergerie Speico inc. (l’employeur) est également représenté. La cause est mise en délibéré à cette date.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[4]           Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’accueillir sa requête au motif qu’il n’a pu être entendu par le premier juge administratif le 10 avril 2012, pour des raisons jugées suffisantes tel que le prévoit le deuxième paragraphe de l’article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[2] (la loi), de révoquer la décision rendue par le premier juge administratif et de déclarer que sa demande de révision administrative déposée le 23 juin 2011 est recevable.

L’AVIS DES MEMBRES

[5]           Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs partagent le même avis. Ils considèrent que le travailleur n’a pas démontré qu’il n’a pu se faire entendre pour des raisons jugées suffisantes au sens où le prévoit le deuxième paragraphe de l’article 429.56 de la loi.

[6]           En effet, les membres retiennent du témoignage du travailleur, de même que de la preuve documentaire qu’il a fait preuve d’une certaine négligence à l’égard du suivi de son dossier.

[7]           Ils sont d’avis que bien qu’il ait erronément inscrit dans son agenda le 20 avril 2012 comme date d’audience au moment où il a reçu l’avis de convocation de la Commission des lésions professionnelles, des correspondances subséquentes émanant soit de l’employeur ou encore du tribunal lui ont fourni à nouveau la date de convocation, mais il n’a pas cru utile de revalider  le tout dans son agenda. Ils sont d’opinion que le travailleur invoque sa propre turpitude, ce qui ne peut constituer « des raisons jugées suffisantes ».

[8]           Les membres sont donc d’avis de rejeter la requête en révocation déposée le 7 mai 2012 par le travailleur et de confirmer la décision rendue par le premier juge administratif le 10 avril 2012.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[9]           La Commission des lésions professionnelles doit décider s’il y a lieu de révoquer la décision rendue par le premier juge administratif le 10 avril 2012.

[10]        Le pouvoir de la Commission des lésions professionnelles de réviser ou de révoquer une décision qu’elle a rendue est prévu à l’article 429.56 de la loi en ces termes :

429.56.  La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

 

2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

[notre soulignement]

[11]        Il apparaît essentiel de rappeler que ce pouvoir de réviser ou de révoquer une décision rendue par la Commission des lésions professionnelles constitue une exception au principe général édicté en vertu de l’article 429.49 de la loi selon lequel les décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles sont finales et sans appel.

[12]        En l’espèce, au soutien de sa requête en révocation, le travailleur invoque qu’il n’a pu se faire entendre pour des raisons jugées suffisantes, en s’appuyant sur le deuxième paragraphe de l’article 429.56 précité.

[13]        Dans l’affaire Imbeault et S.E.C.A.L.[3], décision à laquelle se réfère notamment la procureure de l’employeur, la Commission des lésions professionnelles a établi que lorsqu’une partie invoque l’application du second paragraphe de l’article 429.56 de la loi, il revient au juge administratif qui siège en révision d’apprécier la preuve et de décider si des raisons jugées suffisantes ont été démontrées pour expliquer que la partie n’a pu se faire entendre. Pour être jugées suffisantes, ces raisons doivent être sérieuses et il ne doit pas y avoir négligence de la part de la partie qui prétend n’avoir pu se faire entendre. Le principe qui doit guider le tribunal dans ce contexte est celui du respect des règles de justice naturelle.

[14]        Dans le présent cas, il appert du dossier que le 30 novembre 2011, le travailleur produit un formulaire de contestation à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la CSST à la suite d’une révision administrative le 3 novembre 2011. L’adresse que fournit alors le travailleur correspond à celle de son domicile.

[15]        Le 5 décembre 2011, la Commission des lésions professionnelles accuse réception de cette contestation. Le 9 décembre 2011, un avis d’enquête et d’audition le convoquant devant la Commission des lésions professionnelles le 10 avril 2012 à 11 h est transmis au travailleur.

[16]        Le 10 février 2012, Me Ève St-Hilaire, procureure de l’employeur, transmet un avis de comparution au tribunal. On peut y lire ce qui suit :

Madame, Monsieur,

 

Par la présente, nous vous informons que la soussignée a été dûment mandatée par la compagnie Conciergerie Speico inc. afin de la représenter dans les dossiers mentionnés en rubrique, dont l’audition est prévue le 10 avril 2012 à 11h00 à la CLP de Québec.

 

[…]

[17]        Copie de cet avis est transmis au travailleur le 13 février 2012.

[18]        Le 15 février 2012, la CSST transmet au travailleur une copie du dossier constitué en vue de l’audience du 10 avril 2012.

[19]        Le 20 mars 2012, le travailleur transmet, par télécopie, des documents médicaux à la Commission des lésions professionnelles. Ces documents ne sont pas accompagnés d’un bordereau de transmission, mais le travailleur inscrit le numéro de dossier CLP sur la première page transmise, sans autre précision. Ce même jour, le tribunal accuse réception de ces documents dont il transmet une copie à l’employeur et à sa procureure.

[20]        Le travailleur témoigne à l’audience dans le cadre de la présente requête en révocation. Le tribunal retient principalement de son témoignage qu’il a bien reçu l’avis de convocation transmis par le tribunal l’informant qu’une audience aurait lieu le 10 avril 2012. Il soutient qu’il a commis une erreur en inscrivant la date de cette audience à son calendrier, ayant plutôt noté le 20 avril 2012. Il ne produit cependant aucun document au soutien de son témoignage.

[21]        Ainsi, le 10 avril 2012, il affirme qu’il était au travail au moment où le premier juge administratif a fait des démarches pour tenter de le joindre à son domicile, sans succès. Comme mesure de précaution additionnelle, le premier juge administratif a attendu 20 minutes après l’heure fixée pour l’audience, tel qu’il appert du paragraphe 3 de sa décision.

[22]        Interrogé par la procureure de l’employeur, le travailleur ne se souvient pas d’avoir reçu copie d’une lettre d’avis de représentation transmise par la procureure de l’employeur le 13 février 2012 où il est spécifiquement fait référence à l’audience du 10 avril 2012. Il affirme ne pas avoir de mémoire « pour ces choses-là ».

[23]        Par ailleurs, il confirme avoir reçu la copie du dossier constitué par la Commission des lésions professionnelles le 15 février 2012. Il admet l’avoir feuilleté, mais ne pas avoir alors vérifié sur son calendrier la date de convocation, n’en voyant pas l’utilité.

[24]        Le tribunal doit déterminer si les raisons pour ne pas avoir été entendu soulevées par le travailleur peuvent être  qualifiées de suffisantes au sens où l’entend le second paragraphe de l’article 429.56 de la loi.

[25]        À la lumière de la preuve offerte, le tribunal en vient à la conclusion que le travailleur n’a pas satisfait au fardeau de la preuve qui lui incombait.

[26]        Pour en venir à cette conclusion, le tribunal s’appuie principalement sur les agissements du travailleur dans le cadre de la gestion de son dossier. Plus spécifiquement, le tribunal est d’avis que le travailleur a fait preuve d’une certaine négligence en ne validant pas la date d’audience lorsqu’il a reçu la copie du dossier préparé en vue de l’audience, ou encore lorsqu’il a reçu copie de l’avis de représentation de la procureure de l’employeur. Il était de sa responsabilité, dans la mesure où il a fait le choix de se représenter seul, d’assurer un suivi efficace de son dossier et de s’assurer ainsi d’être présent à l’audience, si tel était son désir.

[27]        Par conséquent, le tribunal conclut que le travailleur ne satisfait pas aux conditions d’application du second paragraphe de l’article 429.56 de la loi et ne peut donc obtenir la révocation de la décision rendue par le premier juge administratif le 10 avril 2012.

 

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête en révocation déposée par monsieur Réjean Chassé, le travailleur, le 7 mai 2012.

 

 

 

Ann Quigley

 

 

 

Me Ève-St-Hilaire

Raymond Chabot Grant Thornton

Représentante de la partie intéressée

 

 



[1]           2012 QCCLP 2545 .

[2]           L.R.Q. c. A-3.001.

[3]           C.L.P. 84137-02-9611, 24 septembre 1999, M. Carignan (99LP-136).

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