Décision

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Renaud et Marché R. Théberge inc.

2007 QCCLP 4297

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Joliette

23 juillet 2007

 

Région :

Lanaudière

 

Dossiers :

245162-63-0409      282252-63-0602

 

Dossier CSST :

102822988

 

Commissaire :

Me Michèle Juteau

 

Membres :

M. Luc Dupéré, associations d’employeurs

 

M. Serge Lavoie, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

Pierre Renaud

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Marché R. Théberge inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Monsieur Pierre Renaud (le travailleur) conteste deux décisions rendues par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) à la suite d’une révision administrative portant respectivement les numéros de dossiers : 245162-63-0409 et 282252-63-0602.

Dossier 245162

[2]                Le 27 septembre 2004, le travailleur conteste une décision du 15 septembre 2004. Cette décision confirme celle du 16 juin 2004 par laquelle la CSST refusait d’accorder au travailleur une allocation d’aide personnelle à domicile en vertu de l’article 158 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

Dossier 282252

[3]                Le 8 février 2006, le travailleur conteste une décision du 2 février 2006. Cette décision confirme celle du 15 septembre 2005 par laquelle la CSST refuse de rembourser le coût des comprimés d’« oméga 3 ».

[4]                Le travailleur a demandé que le tribunal rende une décision à partir des renseignements du dossier. L’employeur, Marché R. Théberge inc., n’étant plus en activité, le tribunal a donc procédé à rendre une décision sur dossier.

 

L’OBJET DES CONTESTATIONS

[5]                Le tribunal comprend que le travailleur veut obtenir une allocation pour de l’aide personnelle à domicile ainsi que le remboursement du coût des comprimés d’« oméga 3 » prescrits par son médecin.

 

L’AVIS DES MEMBRES

Dossier 245162

[6]                Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales rejetteraient la contestation du travailleur portant sur l’aide personnelle à domicile. Ils considèrent qu’en juin 2004, le travailleur pouvait prendre soin de lui-même. Toutefois, ils reconnaissent que la santé du travailleur s’est détériorée comme le rapport du psychiatre Charles-Henri Massac en témoigne. Ce faisant, ils recommandent que le dossier soit retourné à la CSST afin que l’on fasse une nouvelle évaluation.

Dossier 282252

[7]                Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales accueilleraient la contestation du travailleur relative au remboursement du coût des comprimés d’« oméga 3 ». Ils considèrent qu’il s’agit d’un médicament prescrit par le médecin du travailleur pour améliorer la condition psychique du travailleur. À leur avis, il ne s’agit pas de simple supplément alimentaire. En vertu de l’article 189, ils croient que le travailleur a droit au remboursement du coût de ce médicament, d’autant plus qu’à cet égard, l’avis du médecin traitant lie les instances décisionnelles.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[8]                Le travailleur a subi une lésion professionnelle le 3 mars 1992 qui l’a laissé avec une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Comme mesure de réadaptation, il bénéficie d’une psychothérapie et d’une pharmacothérapie de soutien.

[9]                Le 12 avril 2004, la CSST reconnaît une rechute, récidive, aggravation. Le travailleur éprouve alors une recrudescence des symptômes anxieux et dépressifs notamment en raison de difficultés liées au dosage de sa médication.

[10]           C’est dans ce contexte qu’en juin 2004, la CSST entreprend des démarches pour déterminer si le travailleur peut bénéficier d’une aide personnelle à domicile. Elle donne à un ergothérapeute le mandat d’évaluer la situation du travailleur en fonction de la grille prescrite[2].

[11]           Après avoir effectué une visite au domicile du travailleur, ce professionnel conclut que le travailleur est autonome dans ses activités personnelles. Sur la base de cet avis, la CSST refuse d’accorder au travailleur une allocation pour l’aide personnelle à domicile.

[12]           Le tribunal croit qu’en juin 2004 le travailleur ne pouvait bénéficier de cette allocation. En effet, à ce moment les conditions prévues l’article 158 de la loi n’étaient pas toutes satisfaites.

[13]           L’article 158 prescrit que l’aide personnelle à domicile est accordée à un travailleur incapable de prendre soin de lui-même et incapable d’effectuer sans aide les tâches domestiques qu’il effectuerait normalement. De plus, l’aide doit être nécessaire au maintien ou au retour à domicile du travailleur.

[14]           Selon le rapport de l’ergothérapeute, en juin 2004 le travailleur est capable de prendre soin de lui-même. Il ne pouvait donc pas bénéficier d’une allocation pour de l’aide personnelle à domicile.

[15]           Toutefois, sa situation personnelle a évolué et son état de santé s’est gravement détérioré depuis. De toute évidence, ce que décrit l’ergothérapeute ne correspond plus à ce que le travailleur est capable d’accomplir de manière autonome.

 

[16]           À cet égard le psychiatre Massac qui a évalué le travailleur en août 2006, est d’avis que celui-ci a une autonomie minimale. En regard de la rechute, récidive, aggravation, le psychiatre attribue un déficit anatomophysiologique de 45 % pour une névrose de groupe III :

Le syndrome est envahissant et conduit alors à une nette détérioration du rendement social et personnel. Il s’accompagne de modifications sérieuses et constantes des relations interpersonnelles : isolement ou besoin d’être encouragé et réconforté. Les activités quotidiennes sont bouleversées et le sujet a besoin d’une surveillance ou de l’assistance de son entourage.

 

 

[17]           Par ailleurs, le tribunal ne dispose pas d’une évaluation de la nouvelle situation du travailleur qui soit conforme aux prescriptions de l’article 160 et du Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile, notamment l’article 5.

[18]           Considérant les faits particuliers du présent dossier et l’état psychique du travailleur, le tribunal juge qu’il est opportun de retourner le dossier du travailleur à la CSST afin qu’elle évalue de nouveau la situation et qu’elle détermine le droit à l’allocation personnelle à domicile et le montant de cette allocation, le cas échéant.

[19]           Quant au refus du remboursement du coût des comprimés d’« oméga 3 », le tribunal juge que la CSST n’est pas conforme à la loi.

[20]           L’article 188 prescrit qu’un travailleur a droit à l’assistance médicale que requiert son état en raison de la lésion professionnelle qu’il a subie. En vertu de l’article 189, l’assistance médicale inclut les médicaments.

[21]           Or le tribunal considère que les comprimés d’« oméga 3 » prescrits par le médecin du travailleur s’assimilent à un médicament. Il s’agit bien plus qu’un simple supplément alimentaire.

[22]           Selon ce que le médecin indique au rapport médical du 12 août 2005, la prise d’« oméga 3 » est tentée pour améliorer les membranes neuronales ainsi que la réponse aux autres médicaments. Il s’agit donc d’une substance prescrite par le médecin pour traiter la condition du travailleur.

[23]           Comme la prescription du médecin traitant du travailleur n’a pas été contestée par la CSST ou par l’employeur, il a un effet liant en vertu de l’article 224 de la loi.

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

Dossier 245162

REJETTE la contestation de monsieur Pierre Renaud;

CONFIRME la décision du 15 septembre 2004 rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE qu’en juin 2004, le travailleur n’avait pas droit à une allocation pour aide personnelle à domicile;

RETOURNE le dossier du travailleur à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle évalue de nouveau la situation du travailleur et qu’elle détermine son droit à l’allocation personnelle à domicile et le montant de cette allocation, le cas échéant.

Dossier 282252

ACCUEILLE la contestation de monsieur Pierre Renaud (le travailleur);

INFIRME la décision du 2 février 2006 rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement du coût des comprimés d’« oméga 3 ».

 

 

 

__________________________________

 

Michèle Juteau

 

Commissaire

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]          Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile, (1997) 129 G.O. II, 7365

 

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