Décision

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Modèle de décision CLP - juin 2011

Moreau et Cégep de Limoilou

2013 QCCLP 3446

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Québec

11 juin 2013

 

Région :

Québec

 

Dossiers :

472136-31-1205                                         481877-31-1209

 

Dossier CSST :

129320685

 

Commissaire :

Marie Beaudoin, juge administratif

 

Membres :

Suzanne McNeil, associations d’employeurs

 

Sonia Cormier, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

472136

481877

 

 

Chantal Moreau

Chantal Moreau

Partie requérante

Partie requérante

 

 

et

et

 

 

Cégep de Limoilou

Cégep de Limoilou

Partie intéressée

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

Dossier 472136-31-1205

[1]           Le 9 mars 2012, madame Chantal Moreau (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 29 février 2012 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 2 février 2012 et déclare que la travailleuse n’a pas droit au remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed) au montant de 195,45 $.

Dossier 481877-31-1209

[3]           Le 12 septembre 2012, la travailleuse dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la CSST rendue le 7 septembre 2012 à la suite d’une révision administrative.

[4]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 11 juillet 2012 et déclare que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle le 30 mars 2011.

[5]           Une audience est tenue à Québec le 22 février 2013 en présence de la travailleuse et de l’avocate de la CSST. Le Cégep de Limoilou (l’employeur) est absent et n’est pas représenté à l’audience. L’affaire est mise en délibéré à compter du 18 mars 2013, sur réception de la réplique de la travailleuse à l’argumentation écrite déposée par la CSST.

 

L’OBJET DES CONTESTATIONS

Dossier 472136-31-1205

[6]           La travailleuse demande le remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed) prescrit par la docteure Danie Saucier, physiatre, en février 2012.

 

Dossier 481877-31-1209

[7]           La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de conclure qu’elle a subi une récidive, rechute ou aggravation le 30 mars 2011.

 

L’AVIS DES MEMBRES

Dossier 472136-31-1205

[8]           Le membre issu des associations syndicales et membre issu des associations d'employeurs recommandent d’accorder à la travailleuse le remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed) prescrit par la docteure Saucier, physiatre, en février 2012.

Dossier 481877-31-1209

[9]           Le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d'employeurs recommandent d’accueillir, en partie, la requête de la travailleuse. Ils sont d’avis que la prépondérance de la preuve permet de conclure que le syndrome myofascial et le trouble de l’adaptation sont des récidives, rechutes ou aggravations en lien avec la lésion professionnelle initiale survenue janvier 2006. Ils sont par contre d’avis que la prépondérance de la preuve ne mène pas à la conclusion que l’épitrochléite et le syndrome du canal carpien gauche sont des lésions professionnelles.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[10]        Cette décision concerne deux litiges : l’admissibilité d’une réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation et le remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed).

            1-        Admissibilité de la réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation (30 mars 2011)

[11]        La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) définit la notion de « lésion professionnelle » comme suit :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

[12]        Dans cette affaire, il est question d’une récidive, rechute ou aggravation. Il n’a pas été prétendu ni démontré que les lésions diagnostiquées en mars 2011 sont attribuables à un accident du travail ou qu’elles correspondent à une maladie professionnelle. 

[13]        Les notions de « récidive, rechute ou aggravation » ne sont toutefois pas définies de façon spécifique dans la loi. Ainsi, depuis la décision rendue dans l’affaire Lapointe et Cie Minière Québec Cartier[2], la Commission des lésions professionnelles interprète ces notions dans leur sens courant et usuel à savoir, une reprise évolutive, une réapparition, une recrudescence d’une lésion ou de ses symptômes.

[14]        Pour conclure à l’existence d’une récidive, rechute ou aggravation, la travailleuse doit d’une part démontrer, par une prépondérance de preuve, que son état de santé s’est détérioré depuis la consolidation de la lésion professionnelle initiale. La seule allégation de la persistance ou de l’augmentation des douleurs n’est pas suffisante. D’autre part, il lui appartient de prouver le lien entre la pathologie diagnostiquée lors de la rechute ou aggravation alléguée et celle qu’il a présentée à l’occasion de l’accident initial[3].

[15]        Afin de déterminer si cette relation existe, la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles identifie un certain nombre de paramètres à considérer notamment : la gravité de la lésion initiale, la continuité de la symptomatologie, l’existence ou non du suivi médical, le délai entre la récidive, rechute ou aggravation alléguée et la lésion initiale, le retour au travail avec ou sans limitations fonctionnelles et la présence ou l’absence d’une condition personnelle. Aucun de ces paramètres n’est à lui seul décisif mais lorsque pris dans son ensemble, ils permettront de se prononcer sur le bien-fondé de la réclamation[4].

[16]        Qu’en est-il en l’espèce?

[17]        D’entrée de jeu, le tribunal souligne que la travailleuse, née en 1965, est handicapée depuis sa naissance. Elle n’a pas de membre supérieur droit. De plus, elle présente des malformations importantes à la main gauche. Par ailleurs, le tribunal retient de la preuve que la travailleuse, malgré son handicap, a toujours été autonome dans ses activités personnelles et professionnelles. Entre autres, elle a élevé sans aide ses deux enfants. Elle utilise de façon constante son cou comme deuxième bras, soit en contre-appui au menton ou encore pour tenir des objets avec sa bouche.

[18]        À l’époque pertinente au litige, elle est agente de bureau à la bibliothèque chez l’employeur. Elle occupe ce poste depuis une vingtaine d’années. Le 25 janvier 2006, elle subit un accident du travail. Selon la preuve documentaire, la travailleuse a développé des douleurs à l’épaule gauche en raison de l’aménagement inadéquat de son poste de travail. Les médecins traitants diagnostiquent une tendinite à l’épaule gauche. La CSST reconnaît qu’il s’agit d’une lésion professionnelle. Les traitements prodigués à la travailleuse incluent médicaments, physiothérapie et infiltrations. Cette lésion professionnelle est consolidée depuis le 18 janvier 2007. Bien qu’un plateau de récupération soit atteint, selon le rapport du docteur R. Parent, physiatre, des douleurs persistent à cette épaule et certaines manœuvres diagnostiques demeurent positives. Toutefois, les amplitudes articulaires sont complètes et il n’y a pas de signe d’instabilité. L’atteinte permanente à l’intégrité physique est évaluée à 4,40 %. Le docteur R. Parent décrit des limitations fonctionnelles :

Considérant la tendinopathie chronique de cette patiente au niveau de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, je recommande à titre préventif :

 

-           d’éviter les mouvements répétitifs impliquant la coiffe des rotateurs, donc les mouvements d’abduction et de rotation externe répétés,

-           éviter de travailler les bras au-dessus de 90o d’abduction de façon soutenue ou avec charge.

-           éviter de soulever des charges au-delà de 5 kgs avec mouvements d’abduction et de rotation externe répétés.

 

 

[19]        La travailleuse est admise en réadaptation. Des démarches sont entreprises en collaboration avec l’employeur pour offrir un poste à la travailleuse.

[20]        Au cours de l’année 2007, la travailleuse consulte régulièrement son médecin, le docteur Landry, parce que les douleurs au membre supérieur gauche persistent. Depuis septembre 2007, la travailleuse bénéficie d’ailleurs d’une aide personnelle à domicile[5]. Les douleurs restreignent ses activités domestiques et sociales, ainsi que ses loisirs.

[21]        En novembre 2007, la travailleuse reprend progressivement le travail dans un poste d’agente de bureau classe 2 (services audiovisuels)[6]. Dès le 11 décembre 2007, elle arrête de travailler en raison d’une augmentation de la douleur à l’épaule gauche. Elle n’est pas retournée au travail depuis.

[22]        À l’audience, la travailleuse explique qu’elle ne peut reprendre le travail parce que les douleurs à l’épaule gauche ne cessent d’augmenter. De plus, au fil du temps, elle devient de plus en plus vigilante dans l’utilisation de son membre supérieur gauche et elle prend conscience des difficultés reliées à sa réintégration professionnelle. Peu à peu, elle constate qu’elle perd beaucoup d’autonomie.

[23]        La travailleuse présente une réclamation à la CSST en novembre 2007. Elle allègue être victime d’une récidive, rechute ou aggravation depuis le 15 octobre 2007. Elle présente encore des douleurs à l’épaule et au coude gauches, des douleurs  myofasciales au trapèze gauche et aux rhomboïdes. La travailleuse revoit le docteur R. Parent, physiatre (19 février 2008 et rapport complémentaire 15 avril 2008). Elle est examinée par les chirurgiens orthopédistes B. Lacasse (27 février 2008), R. Lirette, membre du bureau d’évaluation médicale (26 juin 2008), M. Blanchet (4 novembre 2008), M. Giguère (25 mars 2009) et Pierre Du Tremblay (15 avril 2009).

[24]        La CSST refuse cette réclamation. La travailleuse conteste cette décision qui est maintenue à la suite d’une révision administrative. Une requête est déposée devant la Commission des lésions professionnelles. Dans la décision rendue le 4 août 2010[7], la Commission des lésions professionnelles analyse les questions médicales et conclut comme suit sur la question du diagnostic :

[259]    C’est dans ce contexte que se produisent les événements du 15 octobre 2007 et, par la suite.

 

[260]    La première question à régler est celle du diagnostic.

 

[261]    Quant au diagnostic d’épicondylite au coude gauche, d’emblée, le tribunal constate que ce diagnostic ne peut être retenu.

 

[262]    Bien que le docteur Landry ait émis ce diagnostic, tous les professionnels de la santé, de façon unanime, concluent que la travailleuse n’a pas présenté une « réelle » épicondylite du coude gauche, conformément à la définition clinique de cette lésion.

 

[…]

 

[267]    Par la suite, la travailleuse a subi de nombreux examens médicaux, de multiples évaluations par différents professionnels de la santé, incluant aussi bien ses médecins traitants, les docteurs Landry et Parent, son médecin-évaluateur, le docteur Giguère que par d’autres professionnels de la santé, dont les docteurs Bernard Lacasse et Blanchet, auxquels on peut ajouter les examens effectués par le docteur Lirette ainsi que le docteur Pierre du Tremblay.

 

[268]    C’est dans le cadre de toutes ces évaluations que s’est engagé un débat sur des diagnostics alternatifs, qui, précisons-le, furent émis par le docteur Michel Giguère, à son évaluation du 25 mars 2009.

 

[…]

 

[272]    Or, l’opinion émise par le docteur Giguère est rejetée ou non confirmée par tous les autres professionnels de la santé quant à l’existence d’un syndrome de douleurs myofaciales [sic] (SDM).

 

[…]

 

[283]    Au-delà de ces éléments qui sont par ailleurs fondamentaux, le tribunal ne peut ignorer que toutes les évaluations pratiquées ont démontré que la tendinite de l’épaule gauche de la travailleuse évoluait de façon positive, la plupart des différentes manœuvres devenant normales, avec le temps, la travailleuse ne présentant aucune ankylose articulaire. Il n’y a pas de détérioration ou de changement négatif quant à la tendinite de l’épaule gauche.

 

[284]    Bien plus, on ne retrouve pas d’atrophie à la ceinture scapulaire, la travailleuse étant toujours en mesure d’utiliser son membre supérieur gauche pour faire certaines activités dont la conduite d’un véhicule automobile.

 

[285]    À ce stade-ci, de l’évolution du dossier de la travailleuse, tenant compte des résultats des différents examens cliniques objectifs réalisés par les professionnels de la santé, dans les champs de spécialisation requise, on ne peut retenir les diagnostics émis par le docteur Giguère, aussi bien au niveau d’un syndrome de douleurs myofasciales au niveau du membre supérieur gauche que ceux qu’il a émis à son expertise écrite et dont il serait redondant de répéter la nomenclature.

 

 

[25]        C’est dans ce contexte que le tribunal rejette la contestation de la travailleuse et conclut qu’elle n’a pas a été victime d’une lésion professionnelle en octobre 2007.

[26]        Cette décision de la Commission des lésions professionnelles[8] traite également de la question de l’aide personnelle à domicile. Elle conclut d’augmenter le montant versé à la quinzaine à 214,60 $ et de prolonger la période de paiement jusqu’au 1er novembre 2014.

[27]        Par ailleurs, selon les notes évolutives[9], des aides techniques pour la vie quotidienne recommandées par un ergothérapeute sont fournies à la travailleuse. Il s’agit pour la plupart d’objets adaptés qui facilitent la réalisation d’activités domestiques tout en minimisant les sollicitations de l’épaule gauche.

[28]        En 2010, s’appuyant sur le rapport du médecin traitant de la travailleuse, la Régie des rentes du Québec déclare la travailleuse inapte à tout emploi.

[29]        Le 30 mars 2011, la travailleuse consulte le docteur Berthelot qui diagnostique une tendinite à l’épaule gauche et une épitrochléite au coude gauche. Il considère la travailleuse inapte à tout travail. Il demande une consultation en physiatrie.

[30]        Le 5 juillet 2011, la docteure Danie Saucier examine la travailleuse. Elle décrit d’abord les circonstances dans lesquelles sont apparues les douleurs à l’épaule gauche en janvier 2006. Elle souligne que les traitements reçus incluant anti-inflammatoires, infiltrations, physiothérapie, acupuncture, massothérapie et chiropraxie ont soulagé la travailleuse temporairement. La travailleuse prend toujours des anti-inflammatoires (Célébrex) au moment de l’examen de la docteure Saucier.

[31]        L’examen physique met en évidence des douleurs multi-étagées et des tensions musculaires importantes dans la région de la musculature cervico-scapulaire. Par ailleurs, l’élévation antérieure de l’épaule gauche est à 165o, l’abduction à 180o, la rotation interne et externe à 60o. La docteure Saucier diagnostique un syndrome myofascial bilatéral au niveau de la musculature cervico-scapulaire ainsi qu’une tendinopathie de l’épaule gauche.

[32]        La travailleuse présente une réclamation à laquelle elle joint le rapport de la docteure Saucier. La CSST refuse cette réclamation. La travailleuse conteste cette décision qui est maintenue à la suite d’une révision administrative, d’où le litige dont est maintenant saisie la Commission des lésions professionnelles.

[33]        La travailleuse revoit la docteure Saucier les 12 août et 7 octobre 2011 ainsi que les 15 juin et 8 novembre 2012. Le tribunal a pris connaissance des notes de ces consultations. Elles révèlent d’une part, la mise en place d’un plan de traitement incluant physiothérapie, massothérapie et anti-inflammatoires, vu l’importance de la composante myofasciale et, d’autre part, la poursuite de l’investigation notamment par un électromyogramme pour des douleurs compatibles avec un syndrome du canal carpien. À ce sujet, elle demande d’ailleurs une consultation au docteur A. Baribeault, physiatre, qui diagnostique un syndrome du canal carpien léger pour lequel il recommande un traitement conservateur.

[34]        Par ailleurs, le dossier médical révèle que la docteure Brigitte Blouin, qui suit la travailleuse depuis peu, diagnostique en juin 2011 un trouble d’adaptation avec éléments anxio-dépressifs. Elle suggère à la travailleuse de consulter un psychologue pour l’aider à surmonter les difficultés. La travailleuse consulte madame Charlaine Fortin, travailleuse sociale et psychothérapeute. Dans un rapport d’évolution du 29 août 2011, qu’elle adresse à la CSST, madame Fortin écrit :

[…] Madame a fait une demande de suivi puisqu’elle vit des difficultés d’adaptation en lien avec la perte de fonctionnalité de son bras gauche. Selon nos observations cliniques, madame manifeste des difficultés d’adaptation avec symptômes anxieux et dépressifs. En effet, puisqu’elle n’a seulement d’un bras depuis la naissance, les limitations fonctionnelles significatives de son bras gauche entrainent des difficultés psychologiques pour madame Moreau. Elle n’arrive plus à assumer ses tâches domestiques et professionnelles habituelles. Elle vit une grande perte d’autonomie. Cette perte provoque une baisse d’intérêt marquée pour ses activités quotidiennes, un retrait social, une baisse importante de l’estime de soi, une dévalorisation personnelle, une humeur maussade, un taux d’irascibilité élevé, des difficultés de concentration, un sentiment de culpabilité constant dû au fait qu’elle ne travaille plus, un épuisement physique et psychologique.

 

 

[35]        À l’audience, la travailleuse affirme qu’elle a rencontré madame Fortin à quelques reprises. Elle n’a pas de suivi régulier mais le support psychologique lui est profitable.

[36]        Dans son analyse de la réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation au 30 mars 2011, la CSST prend en considération le nouveau diagnostic de « trouble d’adaptation » retenu par la docteure Blouin[10]. De plus, concernant les autres diagnostics d’ordre orthopédique, madame Pilote, agente au dossier, consulte le docteur Rémi R. Côté du bureau médical :

- ASPECT MÉDICAL :

Est-ce qu’il y a une démonstration d’une aggravation objective de la condition de l’épaule gauche?

 

Dans les notes médicales contemporaines à la demande de RRA actuelle, on peut constater qu’il y a actuellement présence d’ankylose de l’élévation et de la rotation externe à l’épaule gauche alors que le REM du Dr Parent du 19 janvier 2007 ne démontrait aucune ankylose.

 

 

[37]        Le 25 octobre 2011, la travailleuse est examinée par la docteur Nathalie Guimond, physiatre, à la demande de la CSST. Le rapport de la docteure Guimond a toutefois été transmis à la CSST le matin de l’audience, soit le 22 février 2013. Dans ce rapport, on peut lire ce qui suit :

Au plan postural, l’épaule gauche est surélevée et en protraction avec tensions musculaires augmentées au trapèze supérieur. Toute la musculature périscapulaire gauche est plus tendue. Pas de décollement scapulaire; pas d’amyotrophie, pas d’œdème au niveau articulaire du membre supérieur ni des tissus mous.

 

À l’examen neurologique, les réflexes bicipital, tricipital et styloradial sont normaux à 2/4. L’impact du marteau au coude augmente la douleur à l’épaule. La patiente allègue une légère hypoesthésie diffuse à l’épaule et à l’omoplate sans territoire neurologique périphérique bien défini.

 

[…]

 

À la palpation du rachis cervical, douleurs paracervicales gauches étagées, tension douloureuse des muscles sous occipitaux plus marquée à gauche, tension douloureuse significative du sténocléïdomastoïdien gauche et tension douloureuse de l’angulaire de l’omoplate. La mobilité du poignet est normale.

 

[…]

 

Les muscles épicondyliens sont tendus et douloureux, particulièrement l’extenseur court radial du carpe et l’extenseur commun des doigts, avec cordons myalgiques et points gâchettes actifs reproduisant les douleurs à l’avant-bras et au coude.

 

 

[38]        De plus, la docteure Guimond mentionne que les mouvements de l’épaule gauche actif et passif sont limités à la flexion et à l’abduction et en rotation interne. Tous ces mouvements sont douloureux. Plus précisément, elle décrit la condition de l’épaule gauche comme suit :

Les manœuvres de Jobe, Fullcan, Hawkins, Yokum, Speed, Neer et Foulard sont toutes douloureuses à l’épaule, et dans la région du trapèze supérieur. Légère sensibilité à la palpation de l’articulation acromio-claviculaire. À la palpation musculaire, on retrouve de multiples cordons myalgiques et des points gachettes actifs reproduisant les symptômes connus de la patiente plus particulièrement au sus épineux avec douleur à l’épaule « comme (sa) tendinite », sous épineux avec douleur à l’épaule, grand rond avec douleur à l’épaule, grand dentelé sur la ligne axillaire avec douleur connue au thorax latéral sous l’épaule (aisselle) et finalement grand dorsal avec douleur référée au coude.

 

Tensions douloureuses également au trapèze supérieur, rhomboïdes et angulaire de l’omoplate gauches.

 

 

[39]        La docteure Guimond ajoute :

Madame Moreau ressent une douleur constante à l’épaule gauche augmentée par tous les mouvements de l’épaule et les efforts du membre supérieur. La douleur est située au trapèze supérieur, face externe de l’épaule au deltoïde et sous l’aisselle. La toux augmente la douleur à l’épaule.

 

En position assise, elle ressent des raideurs au cou, à l’épaule et au membre supérieur gauche globalement. Elle a une forte sensation de pesanteur de son épaule et dit devoir souvent mettre sa main dans un espace de son chandail pour supporter son membre comme dans une attelle.

 

Depuis environ un an, elle a une sensation d’engourdissements diffuse à l’épaule, elle dit qu’elle perçoit moins la glace.

 

Elle ressent aussi une douleur constante au coude, augmentée par la préhension et par les mouvements de l’épaule.

 

Son sommeil est perturbé par les douleurs à l’épaule et au coude et des paresthésies diffuses au membre supérieur.

 

Elle a une sensation de faiblesse de sa main qu’elle relie à la douleur du coude qui irradie vers l’épaule.

 

Elle reçoit des traitements de massothérapie depuis mars 2011, la physiothérapie 3 fois par semaine a été acceptée par la CSST depuis août 2011. L’évolution est lente, elle reçoit surtout des massages; elle ne tolère plus les mobilisations.

 

Elle a reçu plusieurs traitements de physiothérapie de façon périodique qui, selon elle, ne l’ont pas clairement aidée. Les exercices ont toujours augmenté ses douleurs particulièrement ceux faits à l’aide d’élastiques ou de poids.

 

Ce qui la dérange le plus est sa perte d’autonomie. Elle est suivie en psychologie. Elle trouve la situation difficile; elle dit que « ça (la) brise en dedans ».

 

La seule tâche qu’elle peut encore faire seule est la conduite automobile. Elle doit recevoir l’aide de son conjoint et de ses deux filles pour les AVQ. Elle est dépendante pour les activités de la vie domestique. Elle n’arrive plus à préparer seule un repas simple. Elle ne peut faire aucune tâche qui nécessite un effort, une abduction même légère de l’épaule et une pression de la main. Elle a de la douleur en portant la nourriture à sa bouche.

 

Elle reçoit de l’aide de la CSST pour l’entretien ménager 4 heures par semaine depuis quelques années.

 

De façon générale, les douleurs ont augmenté progressivement au fil du temps et en mars 2011, elle dit qu’elle n’en pouvait plus. Son objectif ultime est de récupérer la fonction de sa main.

 

 

[40]        Dans un avis motivé, la docteure Guimond conclut que l’évaluation défavorable de la condition de la travailleuse est en lien avec le syndrome myofascial qui n’a pas été traité plutôt qu’une simple tendinopathie dont les signes sont devenus, à son avis, beaucoup plus discrets au fil du temps. Selon l’avis de la docteure Guimond, le syndrome myofascial était présent dès le départ et le fait qu’il n’a pas été traité adéquatement explique la perte fonctionnelle progressive et la perte d’autonomie qui en découle chez la travailleuse.

[41]        Elle conclut donc qu’il y a une aggravation de la condition de l’épaule gauche. Elle retient les diagnostics de tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs et de syndrome myofascial cervico-scapulaire et brachial gauche. Elle considère que la lésion n’est pas consolidée et suggère des traitements spécifiques pour le syndrome myofascial. La docteure Guimond suggère également une investigation incluant un examen de l’épaule et du coude gauches par résonance magnétique.

[42]        Quant à l’oreiller de qualité supérieure (Zedbed) prescrit par la docteure Saucier, la docteure Guimond souligne que la CSST avait déjà, en 2007, accordé le remboursement du coût d’achat d’une telle aide technique. La travailleuse en a bénéficié pendant un certain temps. Elle ajoute qu’une telle aide permet à la travailleuse de maximiser ses heures de sommeil.

[43]        Après analyse de l’ensemble de la preuve, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la travailleuse a subi une récidive, rechute ou aggravation le 30 mars 2011.

[44]        La Commission des lésions professionnelles souligne d’abord que l’existence d’une décision, devenue finale, refusant une réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation ne fait pas obstacle à la production d’une autre réclamation. Le tribunal doit, en effet, exercer pleinement sa compétence et apprécier chaque réclamation à son mérite. Il importe, par contre, de s’assurer que la nouvelle réclamation s’appuie sur des éléments nouveaux car la décision précédente ne peut être remise en cause[11].

[45]        Le tribunal considère que le contexte de la réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation en 2011 est différent de celui qui prévalait en 2007.

[46]        Premièrement, le diagnostic de syndrome myofascial n’est plus remis en question contrairement à l’époque où le docteur Giguère l’avait soupçonné. Il fait maintenant l’unanimité parmi les physiatres qui ont examiné la travailleuse. En effet, la docteure Saucier et la docteure Guimond le décrivent de manière comparable et retiennent ce diagnostic. Deuxièmement, tel que le fait remarquer le docteur Côté de la CSST, il existe des ankyloses à l’épaule gauche qui n’étaient pas objectivées par les médecins traitants antérieurement. Troisièmement, depuis 2010, la Régie des rentes du Québec a statué que la travailleuse était maintenant inapte à tout emploi principalement en raison des douleurs à l’épaule gauche. Quatrièmement, la preuve démontre sans conteste qu’il y a eu une détérioration sur le plan émotif reliée au fait que la travailleuse peine à utiliser son membre supérieur gauche ce qui, compte tenu de son handicap, diminue considérablement son autonomie. Cinquièmement, on ne peut passer sous silence que le montant d’aide personnelle à domicile à laquelle la travailleuse a droit a augmenté et que la CSST a fourni une série d’aides techniques pour éviter des sollicitations trop importantes du membre supérieur gauche.

[47]        Tous ces éléments amènent le tribunal à considérer le contexte de la réclamation pour la rechute en mars 2011, différent de ce qu’il était en 2007. Tout ce contexte démontre aussi, de l’avis de la Commission des lésions professionnelles, que l’état de la travailleuse n’est plus le même qu’il était au moment de la consolidation initiale en 2006.

[48]        Par ailleurs, sur le plan orthopédique, les médecins consultés par la travailleuse ont, à l’époque contemporaine à la réclamation pour récidive, rechute ou aggravation, posés différents diagnostics. Dans ces circonstances, il apparaît tout à fait opportun et légitime pour le tribunal de préciser le diagnostic en retenant celui qui semble le plus approprié, celui qui décrit le mieux la condition de santé de la travailleuse au moment où elle dépose sa réclamation.

[49]        Tel que le rappelle la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire St-Pierre et Ministère des Transports[12] :

[49]      Dans la résolution de cette problématique d’identification du diagnostic du médecin qui a charge, le tribunal doit garder à l’esprit que son devoir est de s’assurer que le travailleur obtient ce à quoi il a droit, pas plus ni moins, qu’il doit rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu5 et qu’il doit s’attarder à rechercher la vérité.

 

[50]      C’est ainsi que, lorsque plusieurs médecins consultés successivement posent des diagnostics différents, la jurisprudence de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles et de la Commission des lésions professionnelles est à l’effet que le tribunal doit retenir parmi ces diagnostics celui qui lui paraît le plus approprié compte tenu de la preuve et des faits contemporains6.

 

[51]      Il ne s’agit pas pour le tribunal de statuer lui-même sur le diagnostic mais de retenir, à partir des diagnostics posés par les médecins du travailleur, celui qui s’accorde le mieux avec les faits prouvés.

 

[52]      Dans l’esprit de la jurisprudence déjà citée, il faut préférer une application souple à une application mécanique de l’article 224 de la loi, en privilégiant la recherche de la vérité. Ce devoir qui incombe au tribunal est si fondamental qu’il lui permet même d’écarter un diagnostic non contesté selon la procédure d’évaluation médicale s’il s’avère manifestement faux7.

 

[53]      Ayant ce devoir de recherche de la vérité à l’esprit, le tribunal considère l’ensemble de la preuve qui lui a été offerte afin de déterminer si le travailleur a prouvé qu’il souffre d’une maladie professionnelle plutôt que de se borner à appliquer mécaniquement et sans autre effort de compréhension les diagnostics d’arthrose cervicale et de tendinite de la coiffe des rotateurs bilatérale

________

5              Voir l’article 377 de la loi

6              Lefebvre et Services de protection Burns int ltée, 105170-72-9809, 14 décembre 1999, M. Lamarre; Hubert-Universel inc. et Poitras, 115562-72-9904, 29 février 2000, L. Landriault; Frédéric jr Dent et Intersan inc., 169897-64-0110, 1er octobre 2002, J-F. Martel; Cloutier et Canadian Tire, 154177-31-0101, 21 septembre 2001, H. Thériault, requête en révision rejetée, 28 novembre 2002, G. Marquis; Lahaie et Municipalité de St-Lin, 160268-63-0105, 15 avril 2003, L. Nadeau; Courchesne et Coopérative solidarité bon ménage, 179148-63-0202, 28 mars 2003, C.A. Ducharme; Baril et La Brasserie Labatt ltée, 148915-62B-0010, 23 octobre 2002, A. Vaillancourt, requête en révision rejetée, le 26 août 2003, L. Boucher; Proulx et Fédération UPA Centre du Québec, 30 septembre 2003, J.-L. Rivard; Bélanger et Jeno Neuman & Fils inc., 201441-64-0303, 15 avril 2004, J.-F. Martel; La Brasserie Labatt ltée et Desgagnés, 205494-31-0304, J.-F. Clément; Larouche et Agropur Coop Agro-alimentaire (Oka), 212768-64-0307, 7 juin 2004, J.-F. Martel; Savard et Gestion ADC (1996) inc., [2004] CLP 1380

7              Voir Savard et Gestion ADC (1996) inc., précitée, note précédente

 

 

[50]        En l’espèce, le tribunal considère que les diagnostics qui sont retenus par la docteure Guimond, soit ceux de tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs et syndrome myofascial cervico-scapulo-brachial gauche sont ceux à retenir. Force est de constater que les observations qui ont été faites par la docteure Guimond sont comparables à celles décrites par la docteure Saucier qui a pris charge de la travailleuse à compter du mois de juillet 2011.

 

[51]        La preuve permet certes de conclure que la travailleuse a développé, au fil du temps, des douleurs chroniques au niveau de la coiffe des rotateurs à l’épaule gauche qui évoluent de façon épisodique. Ainsi, parfois les mouvements de l’épaule gauche sont plus limités, parfois ils le sont moins. Force est de constater qu’au moment où elle présente la réclamation en mars 2011, les mouvements de l’épaule gauche sont limités. De plus, au moment où elle voit la docteure Guimond, les mouvements actifs et passifs de l’épaule gauche, en flexion, abduction et rotation externe demeurent toujours limités.

 

[52]        Le tribunal conclut que cette évolution de la condition à l’épaule gauche vers un état chronique correspond à la notion de « récidive, rechute ou aggravation ». En effet, il s’agit d’une détérioration de l’état de l’épaule gauche de la travailleuse et celle-ci doit être mise en relation avec la lésion initiale et ses conséquences.

[53]        Le syndrome myofascial est un nouveau diagnostic, différent de celui retenu lors de l’événement et le tribunal s’en remet à l’opinion de la docteure Guimond pour conclure que ce diagnostic correspond à une évolution défavorable de la condition de la travailleuse qui est donc en lien avec la lésion initiale.

[54]        Quant aux diagnostics d’épitrochléite et de syndrome du canal carpien, ceux-ci n’ont pas été retenus par la docteure Guimond et d’ailleurs, aucune preuve probante ne permet de les relier à la lésion initiale.

[55]        Sur le plan psychologique, la docteure Brigitte Blouin diagnostique, en juin 2011, un trouble d’adaptation avec éléments anxio-dépressifs. Ce diagnostic n’a pas fait l’objet d’un rapport formel adressé à la CSST. Toutefois, la CSST a retenu ce diagnostic dans l’analyse de la réclamation de la travailleuse. Ce diagnostic n’est pas contesté et ne peut donc être remis en cause[13].

[56]        Ainsi, le fait de ne pas pouvoir utiliser à sa guise le membre supérieur gauche engendre de redoutables complications dans les activités de la vie quotidienne et domestique. D’ailleurs, la CSST l’a reconnu en fournissant des objets adaptés pour faciliter la vie quotidienne et réduire le plus possible les sollicitations à l’épaule gauche. C’est dans ce contexte que la perte d’autonomie grandissante a provoqué une certaine détresse psychologique qui requière des traitements. Ceux-ci font partie l’assistance médicale à laquelle la travailleuse a droit.

 

2-           Demande de remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Kedbed)

 

 

[57]        Le tribunal doit déterminer si la travailleuse a droit au remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed) tel qu’il a été prescrit par la docteure Saucier en février 2012.

[58]        Dans un premier temps, le tribunal signale que cette demande ne peut être accueillie en fonction du droit à l’assistance médicale puisque le Règlement sur l’assistance médicale ne prévoit pas le remboursement de coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed).

[59]        Dans une décision récente rendue dans l’affaire Robitaille et Servisair inc. et CSST[14], la Commission des lésions professionnelles, ayant à statuer sur le remboursement du coût d’un matelas orthopédique, fait l’analyse de cette demande en vertu du droit à la réadaptation. Après avoir écarté les dispositions en matière d’assistance médicale, le tribunal écrit notamment ce qui suit :

[22]      La soussignée estime que la fourniture d’un matelas orthopédique peut s’inscrire dans le cadre du droit à la réadaptation sociale dont le but spécifié à l’article 151 de la loi est d’aider un travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s’adapter à sa nouvelle situation et à redevenir autonome dans l’accomplissement de ses activités habituelles.

 

[…]

 

[25]      La Commission des lésions professionnelles rappelle que l’interprétation de l’article 151 de la loi amène une conclusion d’indissociabilité entre les différentes conditions édictées dans cette disposition en raison de la présence du mot et entre les deux derniers éléments. Ainsi, le seul fait de rechercher à s’adapter aux conséquences d’une lésion professionnelle est insuffisant pour ouvrir le droit aux bénéfices de la réadaptation si un travailleur s’avère autonome dans l’accomplissement de ses activités quotidiennes comme c’est le cas en l’espèce.

 

[Leur soulignement]

 

 

[60]        Dans cette affaire, le tribunal conclut que la prescription du matelas orthopédique par le médecin qui a charge, ne vise pas à surmonter une difficulté, mais répond plutôt à l’amélioration du confort du travailleur, ce qui peut être facilement compréhensible, mais qui n’est pas couvert par le régime en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

[61]        En l’espèce, il est clair que la travailleuse bénéficie d’un droit à la réadaptation comme le confirme d’ailleurs, en 2011, l’aide personnelle à domicile qu’elle reçoit de la CSST et les aides techniques qui lui ont été fournies pour faciliter la vie quotidienne.

[62]        Les articles 145 et 151 de la loi prévoient ce qui suit :

145.  Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 145.

 

 

151.  La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.

__________

1985, c. 6, a. 151.

 

 

[63]        La preuve révèle que la docteure Saucier a prescrit cet oreiller dans le cadre du traitement du syndrome myofascial qu’elle a diagnostiqué. Dans la décision qu’elle vient de rendre, la Commission des lésions professionnelles reconnaît que ce syndrome myofascial est une lésion professionnelle. Ce syndrome est, entre autres, caractérisé par la présence de tensions et de raideurs à la région cervicale et des trapèzes. L’oreiller prescrit permet un soutien thérapeutique en contribuant à réduire les tensions musculaires et raideurs pour favoriser le sommeil.

[64]        On peut conclure, qu’en l’espèce, l’oreiller prescrit par la docteure Saucier participe à la réadaptation de la travailleuse en l’aidant à surmonter les conséquences personnelles de la lésion, dont fait partie la mauvaise qualité de sommeil, comme le signale d’ailleurs la docteure Guimond. Il s’agit d’un moyen de s’adapter à cette situation et d’atteindre un degré d’autonomie comparable à ce qu’il était avant la lésion professionnelle.

[65]        En conséquence, le tribunal estime que la travailleuse a aussi droit au remboursement du coût d’achat de cet oreiller de qualité supérieure (Zedbed) à titre de mesure en réadaptation que requiert son état.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

Dans le dossier 472136-31-1205 :

ACCUEILLE la requête de madame Chantal Moreau;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 29 février 2012 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que madame Chantal Moreau a droit au remboursement du coût d’achat d’un oreiller de qualité supérieure (Zedbed).

 

Dans le dossier 481877-31-1209 :

ACCUEILLE la requête de madame Chantal Moreau;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 7 septembre 2012 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que madame Chantal Moreau a subi une récidive, rechute ou aggravation le 30 mars 2011, à savoir une tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs, un syndrome myofascial cervico-scapulo-brachial et un trouble de l’adaptation avec éléments anxio-dépressifs.

 

 

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MARIE BEAUDOIN

 

Me Marie-Claude Jutras

VIGNEAULT THIBODEAU, BERGERON

            Représentante de la partie intervenante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           [1989] C.A.L.P. 38 .

[3]          Beauchamp et Inspec-Sol inc., [2009] C.L.P. 93 .

[4]           Boisvert et Halco inc., [1995] C.A.L.P. 19 .

[5]           Il s’agit d’une mesure de réadaptation sociale prévue aux articles 152 et 158 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

[6]           Il s’agit de l’emploi convenable retenu par la CSST (décision du 7 novembre 2011). Le poste de travail a été adapté.

[7]           C.L.P. 350792-31-0806 et ss, 4 août 2010, P. Simard.

[8]           Précitée, note 7.

[9]           Précitée, note 6.

[10]         Voir notes évolutives des 7 août 2011 et 4 juillet 2012.

[11]         Bélanger et Iron Mountain Canada corporation, C.L.P. 315152-61-0704, 20 décembre 2007, L. Nadeau; Ouellet et Entreprises Paul-Émile Ouellet (F), 2011 QCCLP 6124 .

[12]         C.L.P. 260575-09-0504, 7 novembre 2005, G. Tardif.

[13]         Voir article 224 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

[14]         2013 QCCLP 2879 .

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