Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Québec

Le 12 février 2004

 

Région :

Québec

 

Dossier :

222161-31-0311

 

Dossier CSST :

091850545

 

Commissaire :

Pierre Simard

 

Membres :

Claude Jacques, associations d’employeurs

 

Sidney Bilodeau, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Yvan Huard

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Yvan Huard (employeur)

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 24 novembre 2002, monsieur Yvan Huard (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une contestation à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), le 12 novembre 2003, suite à une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirmait une décision initialement rendue le 22 juillet 2003 à l’effet d’informer le travailleur du refus de procéder au remboursement des frais rattachés aux travaux de tonte de gazon pour l’été 2003.

[3]                La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience à Québec, le 11 février 2004. Les parties étaient présentes.

 

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision contestée et de déclarer qu’il est en droit d’obtenir le remboursement de ses frais rattachés aux travaux de tonte de gazon pour l’été 2003.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[5]                Le membre issu des associations d’employeurs recommande à la Commission des lésions professionnelles de rejeter la contestation du travailleur pour le motif que le domicile du travailleur est situé dans un immeuble à revenus, comportant trois appartements, dont il est propriétaire. En conséquence, il considère que le travailleur opère un commerce et que les dépenses de tonte de gazon constituent des dépenses admissibles dans son état des revenus et dépenses pour les fins de percevoir un revenu de location.

[6]                Pour sa part, le membre issu des associations syndicales recommande à la Commission des lésions professionnelles d’accueillir la contestation déposée par le travailleur et de déclarer que celui-ci a le droit d’obtenir le remboursement de ses frais engagés pour faire exécuter les travaux de tonte de gazon pour l’été 2003. Il souligne que le travailleur rencontre les conditions spécifiques exigées par l’article 165 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles [1](la loi).

 

LES FAITS ET LES MOTIFS

[7]                La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement des frais qu’il a engagés pour faire exécuter des travaux d’entretien de son domicile, en l’occurrence la tonte de gazon pour l’été 2003.

[8]                À l’article 165 de la loi, on énonce :

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[9]                Pour pouvoir procéder à l’application de l’article 165, les conditions suivantes doivent être satisfaites :

a)                le travailleur doit avoir subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison de la lésion professionnelle;

b)                il doit être incapable d’effectuer les travaux d’entretien courant de son domicile;

c)                 travaux qu’il effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion.

 

[10]           Des documents au dossier ainsi que de la preuve administrée lors de l’audience, il en résulte qu’il est admis par la CSST, à sa décision du 12 novembre 2003, que le travailleur, suite à une lésion professionnelle survenue le 26 août 1985, demeurait affecté par une atteinte permanente grave à son intégrité physique aussi bien par le pourcentage du taux d’incapacité permanente qui lui fut attribué de 40.60 % que par l’existence de limitations fonctionnelles incompatibles avec l’exécution des travaux de tonte du gazon.

[11]           D’ailleurs, à la page 2 de la décision, le réviseur indique :

«  (...)

 

Dans le présent dossier, la Révision administrative reconnaît que le travailleur présente une atteinte permanente grave ainsi que des limitations fonctionnelles sévères qui le rendent admissible à la mesure prévue à la loi en ce qui a trait aux travaux d’entretien courant de son domicile. Toutefois, il est démontré dans le présent dossier que le travailleur, lors de l’événement du 26 août 1985, n’avait pas à tondre le gazon sur son terrain puisqu’il n’y en avait pas. Par conséquent, compte tenu que lors de l’événement, il n’avait pas à faire un tel travail d’entretien, il ne peut bénéficier des frais rattachés pour le faire exécuter.

 

(...)  »

 

 

 

 

[12]           La lecture de ce paragraphe convainc la Commission des lésions professionnelles que le réviseur mésestime l’application de la loi ainsi que l’interprétation de l’article 165.

[13]           En effet, lorsqu’il interprète le terme « effectuerait normalement lui-même », le réviseur ajoute à ce conditionnel une seconde condition, c’est-à-dire que le travailleur devait faire antérieurement ses travaux lors de la lésion professionnelle.

[14]           Or, donné un tel sens à l’article 165 c’est, à notre humble avis, en réduire la portée d’une façon inacceptable.

[15]           Plutôt, la seule question que l’on doit se poser est de décider si le travailleur, dans l’hypothèse où il n’a pas subi de lésion professionnelle, effectuerait lui-même ses travaux.

[16]           Rappelons que l’objectif ultime de la loi, tel qu’énoncé à l’article 1, vise la réparation des lésions professionnelles ainsi que des conséquences qu’elles entraînent pour les bénéficiaires.

[17]           D’autre part, la Commission des lésions professionnelles a vérifié que monsieur Huard est devenu propriétaire, le 1er janvier 2003, du 8716, rue Bélanger, Québec, et que son domicile est bien situé à cette adresse. Finalement, à toute fin que de droit, le docteur Jean-François Roy complétait, le 24 novembre 2003, une prescription médicale dans laquelle il indique :

«  Aide à domicile, tonte pelouse et déneigement. »

 

 

[18]           La Commission des lésions professionnelles ajoute en réponse aux arguments soulevés par le membre issu des associations d’employeurs que l’application de l’article 165 ne dépend pas, dans ces conditions d’application, de la nature ou type du domicile du travailleur. Procéder autrement c’est ajouter à la loi.

[19]           Ainsi, bien que le domicile du travailleur soit situé dans un immeuble dont il est propriétaire et dont il tire un revenu, il n’en demeure qu’il a accès aux travaux d’entretien de son domicile.

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la contestation déposée par monsieur Yvan Huard, le 24 novembre 2003;

INFIRME la décision émise par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 12 novembre 2003;

DÉCLARE que monsieur Yvan Huard a le droit d’obtenir le remboursement des frais d’entretien de son domicile requis pour la tonte de son gazon, pour l’année 2003.

 

 

 

__________________________________

 

PIERRE SIMARD

 

Commissaire

 

 

 

 

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001.

 

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