DÉCISION
[1] Le 16 mars 2000, monsieur Marc-André Blain (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité (la CSST) rendue le 13 mars 2000 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme 2 décisions qu’elle a initialement rendues les 26 novembre 1998 et 11 mars 1999. Elle statue sur le droit du travailleur à la réadaptation suite à sa lésion professionnelle du 19 mars 1996 et confirme le refus du remboursement des frais de déménagement engagés par le travailleur.
[3] Le travailleur est présent à l’audience alors que l’employeur, bien que convoqué, est absent.
L'OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande de déclarer qu’il a droit à une indemnité pour le remboursement de ses frais de déménagement. Il ne conteste pas son admissibilité à la réadaptation.
LES FAITS
[5] Il s’agit d’un travailleur qui a subi un accident du travail le 21 décembre 1988 et une récidive, rechute ou aggravation le 19 mars 1996.
[6] Le 26 novembre 1998, la CSST l’avise qu’il a droit à la réadaptation puisqu’il conserve une atteinte permanente attribuable à sa lésion professionnelle du 19 mars 1996.
[7] Le 8 décembre 1998, le Dr St-Onge complète un rapport d’évaluation médicale dans lequel il établit l’atteinte permanente à 56,7 % et énumère les séquelles suivantes :
Monsieur Blain est incapable de soulever des objets plus lourds que 5 kgs. Il ne peut travailler en position accroupie. Il ne peut garder la position debout ou assise plus de 15 minutes et il est incapable de se pencher pour ramasser un objet.
[8] Le travailleur indique qu’il a déménagé le 1er mars 1999, car ses voisins étaient bruyants. Il habitait le rez-de-chaussée d’un 4 logis depuis 1996 et il a déménagé dans un duplex, au deuxième étage.
[9] Le travailleur témoigne qu’il a demandé à la CSST de le rembourser pour ses frais de déménagement vu qu’il s’agit d’une activité qu’il ne peut plus faire lui-même, compte tenu des séquelles découlant de sa lésion professionnelle.
L'AVIS DES MEMBRES
[10] Les membres issus des associations de travailleurs et d’employeurs sont d’avis que le travailleur n’a pas droit aux remboursements de ses frais de déménagement compte tenu qu’il ne rencontre pas les critères énumérés à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) pour y avoir droit.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[11] La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit de recevoir une indemnité couvrant ses frais de déménagement.
[12] La Commission d’appel en matière de lésions professionnelles[2] et la Commission des lésions professionnelles[3] ont décidé que pour que les frais de déménagement soient remboursables dans le cadre de la réadaptation sociale, le travailleur devait répondre aux critères énumérés aux articles 153 et 154 de la loi :
153. L'adaptation du domicile d'un travailleur peut être faite si :
1 le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique;
2 cette adaptation est nécessaire et constitue la solution appropriée pour permettre au travailleur d'entrer et de sortir de façon autonome de son domicile et d'avoir accès, de façon autonome, aux biens et commodités de son domicile; et
3 le travailleur s'engage à y demeurer au moins trois ans.
Lorsque le travailleur est locataire, il doit fournir à la Commission copie d'un bail d'une durée minimale de trois ans.
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1985, c. 6, a. 153.
154. Lorsque le domicile d'un travailleur visé dans l'article 153 ne peut être adapté à sa capacité résiduelle, ce travailleur peut être remboursé des frais qu'il engage, jusqu'à concurrence de 3 000 $, pour déménager dans un nouveau domicile adapté à sa capacité résiduelle ou qui peut l'être.
À cette fin, le travailleur doit fournir à la Commission au moins deux estimations détaillées dont la teneur est conforme à ce qu'elle exige.
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1985, c. 6, a. 154.
[13] La preuve doit donc démontrer que le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique qui rend nécessaire une adaptation de son domicile pour lui permettre notamment d’y entrer et sortir de façon autonome alors que le domicile ne peut être adapté.
[14] Le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique, mais il n’est pas déménagé en raison du fait que son domicile ne pouvait être adapté pour lui permettre d’entrer et de sortir de façon autonome et d’avoir accès de façon autonome aux biens et commodités de son domicile. Il est plutôt déménagé en raison des voisins bruyants. C’est donc pour une condition étrangère à sa lésion professionnelle qu’il a décidé de déménager.
[15] Le travailleur n’a pas non plus droit au remboursement de ses frais de déménagement dans le cadre de sa réadaptation professionnelle, car il n’est pas redevenu capable d’exercer son emploi ou un emploi convenable, et qu’il n’est pas déménagé pour se rapprocher de son nouveau lieu de travail tel que stipulé à l’article 177 de la loi :
177. Le travailleur qui, à la suite d'une lésion professionnelle, redevient capable d'exercer son emploi ou devient capable d'exercer un emploi convenable peut être remboursé, jusqu'à concurrence de 3 000 $, des frais qu'il engage pour :
1 explorer un marché d'emplois à plus de 50 kilomètres de son domicile, si un tel emploi n'est pas disponible dans un rayon de 50 kilomètres de son domicile; et
2 déménager dans un nouveau domicile, s'il obtient un emploi dans un rayon de plus de 50 kilomètres de son domicile actuel, si la distance entre ces deux domiciles est d'au moins 50 kilomètres et si son nouveau domicile est situé à moins de 50 kilomètres de son nouveau lieu de travail.
Le travailleur doit fournir à la Commission au moins deux estimations détaillées dont la teneur est conforme à ce qu'elle exige.
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1985, c. 6, a. 177.
[16] La Commission des lésions professionnelles ne doute pas que le travailleur ne soit pas lui-même capable de déménager ses biens, mais la preuve révèle qu’il n’est pas déménagé pour l’une des raisons que la loi autorise la CSST à rembourser les frais de déménagement. La Commission des lésions professionnelles conclue donc que le travailleur n’a pas droit au remboursement de ses frais de déménagement.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête de monsieur Marc-André Blain;
CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 13 mars 2000 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que les frais de déménagement encourus par monsieur Marc-André Blain ne sont pas remboursables.
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ALAIN VAILLANCOURT |
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Commissaire |
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[1]
L.R.Q.,
c. A-3.001
[2]
Tremblay
et Service de réadaptation du Sud-Ouest, 12500-62-8903, 91-12-10, F. Poupart,
(J3-24-12), révision rejetée,
[1993] C.A.L.P. 1377
; Beauchemin et A.S.
Transport inc., 47905-62-9212, 94-07-18, M. Cuddihy, (J6-17-14)
[3]
Larose
et 26291724 Québec inc., 115927-72-9904, 99-10-13, G. Robichaud
AVIS :
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