Décision

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Modèle de décision CLP - juin 2011

Victor Innovatex inc. et Larochelle

2012 QCCLP 7023

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Lévis

1er novembre 2012

 

Région :

Chaudière-Appalaches

 

Dossier :

436480-03B-1104

 

Dossier CSST :

137233656

 

Commissaire :

Ann Quigley, juge administratif

 

Membres :

Jean-Marc Simard, associations d’employeurs

 

Pierre de Carufel, associations syndicales

 

 

Assesseure :

Johanne Gagnon, médecin

______________________________________________________________________

 

 

 

Victor Innovatex inc.

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Sonia Larochelle

Les emballages Jomat inc. (fermé)

Techtrabois inc.

 

Parties intéressées

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 19 avril 2011, Victor Innovatex inc. (l’employeur) dépose une requête devant la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 9 mars 2011 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle initialement rendue le 25 novembre 2010 et déclare que madame Sonia Larochelle (la travailleuse) a subi une lésion professionnelle le 25 octobre 2010, soit un canal carpien bilatéral, et a donc droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[3]           L’employeur et la travailleuse sont présents et représentés à l’audience qui a lieu devant la Commission des lésions professionnelles siégeant à Saint-Joseph le 26 septembre 2012. Quant à l’entreprise Les emballages Jomat inc., puisqu’elle est fermée, elle n’est pas représentée. Pour sa part, l’entreprise Techtrabois inc. a informé le tribunal de son absence à l’audience et a déposé une argumentation écrite. La CSST a également avisé le tribunal, par écrit, qu’elle serait absente à l’audience. La cause a été mise en délibéré le jour de l’audience.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]           L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que la travailleuse n’a pas subi de maladie professionnelle dans le cadre de l’exercice de ses tâches de manœuvre chez l’employeur. Plus précisément, il soutient qu’il n’y a pas de relation entre le diagnostic de canal carpien bilatéral et les tâches qu’elle effectue.

[5]           Par ailleurs, l’employeur demande au tribunal d’exclure l’intervention de la CSST au présent dossier puisqu’à son avis, il s’agit d’une comparution purement académique. Il appuie cette demande sur une décision récente rendue par la Commission des lésions professionnelles[2].

LES FAITS

[6]           En s’appuyant sur l’ensemble de la preuve offerte, dont notamment les témoignages de la travailleuse, de monsieur François Talbot, directeur adjoint de l’usine, et de monsieur Nicolas Paradis, ergonome, la preuve vidéo et la preuve documentaire, le tribunal retient les faits suivants qui lui apparaissent les plus pertinents à l’issue du litige.

[7]           La travailleuse occupe un emploi de manœuvre chez l’employeur depuis 2004, au moment où elle produit une réclamation à la CSST, soit le 29 octobre 2010. Elle décrit ainsi les circonstances entourant la production de sa réclamation :

Suite à des mouvements répétitifs reliés à mon travail, j’ai pris connaissance en juin 2010 d’une douleur au poignet droit. J’ai été consulté mon médecin le 25 juin 2010. Elle m’a diagnostiqué une inflamation au tunnel carpien droit. Cette douleur ne m’empêchait pas de travailler, mais depuis quelques semaines, elle a augmenté et j’ai dû arrêter de travailler. Ma physio pense que j’aurais une tendinite en plus du tunnel carpien. ET, mon poignet gauche commence à faire la même chose. [sic]

 

 

[8]           Cette réclamation fait suite à une visite médicale le 25 octobre 2010 auprès du docteur Dion qui pose le diagnostic de canal carpien bilatéral, prescrit une attelle et des traitements de physiothérapie. Il autorise un arrêt de travail jusqu’au 8 novembre 2010 et mentionne que la travailleuse pourrait bénéficier de travaux légers.

[9]           La travailleuse témoigne à l’audience. Elle précise qu’elle occupe deux postes chez l’employeur, l’un à l’inspection et l’autre à l’ourdissoir. Au cours de la période contemporaine à sa réclamation à la CSST, elle a occupé les deux postes.

[10]        Appelée à décrire plus spécifiquement les tâches effectuées au poste d’ourdissoir, la travailleuse indique qu’elle doit monter sur des supports des bobines qui arrivent dans des boîtes. Elle reçoit des lots de 200 à 500 bobines à monter. Elle doit  ouvrir les boîtes, manipuler chacune des bobines pour les déposer sur les supports qui sont localisés à différents endroits sur l’ourdissoir, très près du sol ou à bout de bras, puis faire un nœud pour relier le fil de deux bobines. Pour ce faire, elle utilise habituellement un petit crochet qui lui sert aussi lorsqu’il y a une « cassure » dans le fil qu’elle doit réparer. Elle saisit ce petit crochet avec le pouce et l’index de la main droite, puisqu’elle est droitière. Une fois qu’elle a déposé toutes les bobines sur les supports et relié les fils entre eux, elle démarre la machine qui achemine le fil à l’ourdissoir. Ce transfert s’effectue mécaniquement.

[11]        Pour expliquer chacune des étapes qu’elle doit franchir au poste d’ourdissoir, la travailleuse a commenté la preuve vidéo prise par l’ergonome mandaté par l’employeur, monsieur Nicolas Paradis, et visionnée à l’audience.

[12]        Lorsque toutes les bobines ont été transférées en entier sur l’ourdissoir, elles doivent ensuite être mises sur une bobine, désignée « ensouple », d’un diamètre de 5 à 6 pieds. Ce transfert se fait selon la méthode particulière de travail apparaissant au visionnement de la vidéo. Ce sont, dans les grandes lignes, les tâches qu’elle doit effectuer à ce poste.

[13]        Puis, la travailleuse décrit les tâches qu’elle doit effectuer à l’inspection, toujours à l’aide du visionnement de la vidéo du poste de travail. Elle explique au tribunal qu’une bande de tissu déroule devant elle à l’aide d’une pédale qu’elle actionne, au besoin. Dès qu’il y a un défaut, elle doit tenter de le réparer. Elle arrête donc le déroulement du tissu et procède à la réparation à l’aide de petites pinces, semblables à des pinces à sourcils, qu’elle utilise avec minutie pour réparer, dans la mesure du possible, le tissu. Il lui arrive d’avoir des réparations plus importantes qu’elle fera par temps perdu. Elle précise que, lorsque la pièce de tissu n’est pas réparable, elle doit mettre une étiquette en plastique pour le signaler et laisse le tissu se dérouler.

[14]        La travailleuse poursuit en mentionnant qu’aux 60 verges, elle doit couper le tissu puis commencer une nouvelle pièce de tissu. Chaque rouleau comportant ces 60 verges de tissu mesure de 6 à 8 pouces de diamètre. La travailleuse mentionne que si le tissu est de belle qualité, il ne lui prend que 3 à 4 minutes pour procéder à l’inspection du rouleau de 60 verges. Par contre, s’il est endommagé, cet exercice peut prendre de 15 à 20 minutes et même aller jusqu’à une heure de travail. Selon les consignes de l’employeur, lorsque le tissu est réparable, elle doit le faire. S’il ne l’est pas, il sera considéré non conforme.

[15]        Elle précise qu’à ce poste de travail, il y a un bonus de production prévu dans la convention collective. Ce bonus est octroyé, non pas sur une base individuelle, mais plutôt collective dans le sens où il implique le travail du département à l’inspection en entier et prend en considération plusieurs paramètres.

[16]        Pour résumer les choses simplement, la travailleuse mentionne que si la production est plus rapide et le tissu de meilleure qualité, elle aurait droit à un bonus plus important. L’objectif de ce bonus étant de motiver le personnel à fournir la meilleure qualité de travail possible. L’employeur a produit l’extrait de la convention collective prévoyant ce bonus de production. On peut y lire ce qui suit :

LETTRE D’ENTENTE

BONUS DE PRODUCTION

 

Les parties conviennent ce qui suit :

 

1.         Le versement du bonus de production est semi-annuel. Il est versé de la façon suivante :

 

·         directement dans son compte bancaire ou par chèque, au choix de l’employeur;

·         dans son REER.

 

2.         Les heures bonifiables sont : les heures de production, d’activités d’amélioration continue incluant kaizen, en assignation temporaire, en réunion, en CSST (arrêt complet) et en retrait préventif et la formation et les libérations syndicales.

 

3.         Seuls les salariés à l’emploi de la compagnie au moment du paiement ont droit au bonus.

 

4.         Les heures faites par les étudiants et salariés à temps partiel, sont incluses dans le calcul des heures travaillées et ces derniers sont on bonifiables.

 

5.         Le calcul du bonus de production est fait selon les modalités suivantes :

 

·         Duites ÷ homme heure travaillée :

Duites produites au tissage ÷ heures travaillées à l’ourdissoir, tissage et mécanique.

 

·         Verges ÷ homme heure travaillée :

Verges inspectées (code 70) ÷ heures travaillées à l’inspection, réception fil, station 23, écofinisseur, expédition, table de coupe et laboratoire.

 

·         Qualité St-Georges

Total verges inspectées non conformes St-Georges ÷ total verges inspectées (code 70)

 

·         Rebuts St-Georges

Total du poids de rebuts St-Georges Ourdissoir, tissage, inspection, table de coupe et ensouple coupé relié à une erreur de production) ÷ total de poids produit (verges inspectées en livres)

 

·         Heures incluses pour le calcul des points précédents sont :

Les heures de production (incluant les étudiants et salariés à temps partiel), les assignations temporaires, la formation (incluant le coaching), les réunions, CSST (arrêt complet) et retrait préventif et libérations syndicales.

 

 

[17]        La travailleuse précise que son horaire de travail est de 4 jours par semaine, 10 heures par jour. Elle bénéficie d’une pause repas de 30 minutes et de 2 pauses santé de 10 minutes, l’une le matin et l’autre l’après-midi.

[18]        Depuis son entrée en fonction chez l’employeur, elle a d’abord été formée sur l’ourdissoir, poste qu’elle a occupé à compter de 2004. Vers 2007, elle a bénéficié d’une formation à l’inspection et, depuis cette date, elle est assignée à l’un ou l’autre de ces postes en fonction des besoins de l’entreprise. Elle se souvient qu’à la période précédant son arrêt de travail, elle était assignée aux deux départements.

[19]        À ce sujet, l’employeur a produit un rapport détaillé des assignations de la travailleuse pour la période s’échelonnant du 13 janvier au 30 octobre 2010 aux deux départements, soit à l’ourdissoir et à l’inspection. Il appert de ce document, qui n’est pas remis en cause par la travailleuse et qui lui apparaît représentatif, qu’elle a fait 287,33 heures à l’ourdissoir et 1 428,82 heures à l’inspection.

[20]        Appelée à préciser l’apparition des premiers symptômes, la travailleuse la situe vers le mois de juin 2010, alors qu’elle a consulté un médecin, puisqu’elle ressentait ce qu’elle qualifie de « drôle de sensation dans les doigts et les poignets ». Fait à noter, lors de cette consultation, aucune attestation médicale destinée à la CSST n’a été remplie.

[21]        Malgré ces sensations aux doigts et aux poignets, la travailleuse poursuit son travail, mais consulte de nouveau le 25 octobre 2010 en raison d’engourdissements plus importants. Elle précise qu’elle « ne sentait plus le bout de ses doigts ».

[22]        Il appert des notes de consultation du médecin qu’elle consulte alors pour une douleur aux deux mains. À l’histoire de la maladie actuelle, le médecin indique :

Tunnel carpien bilatéral en attente de EMG avant chirurgie. Travaille manuellement +++ depuis 6 ans. Douleur á ces dernières semaines. Aggravée ++ par son travail, engourdissements D > G. 3e doigt quasi constant. Préhension â. N’échappe pas d’objet.

 

 

[23]        À l’examen physique, les signes de Tinel, tant à droite qu’à gauche, de même que le signe de Phalen, sont positifs. Le médecin conclut à un syndrome du canal carpien cliniquement sévère bilatéralement.

[24]        Au cours de la période où la travailleuse a ressenti les premiers symptômes d’engourdissement, soit en juin 2010, elle était enceinte. Elle a malheureusement subi une fausse couche en juillet 2010, mais est de nouveau devenue enceinte à la fin de novembre ou au début de décembre 2010. Cette deuxième grossesse a été menée à terme.

[25]        La travailleuse précise avoir cessé le travail le 25 octobre 2010 en raison des douleurs ressenties aux mains et aux poignets, suivant ainsi les recommandations du médecin qu’elle avait consulté. Elle a bénéficié de traitements de physiothérapie de novembre 2010 à janvier 2011 et a constaté une amélioration de sa condition.

[26]        En janvier 2011, elle a communiqué avec monsieur Poulin, chez l’employeur, relativement à une assignation temporaire, mais il ne lui a jamais retourné son appel. Elle a communiqué de nouveau avec l’employeur à la fin de cette semaine et a parlé avec monsieur Éric Montmigny qui lui a dit qu’il allait se pencher sur la situation. Il ne l’a rappelée qu’en mai 2011. Elle était alors enceinte de 28 semaines.

[27]        Une nouvelle assignation temporaire lui a été proposée, qu’elle a occupée de juin 2011, alors qu’elle était enceinte de 30 semaines, jusqu’à juillet 2011, soit une période de 2 à 3 semaines. Elle a dû ensuite mettre fin à l’assignation temporaire en raison de son état de grossesse, puisqu’elle souffrait de chutes de pression et de diabète de grossesse.

[28]        Interrogée sur sa condition à la suite de son arrêt de travail, en juillet 2011, la travailleuse affirme qu’elle se sentait beaucoup mieux en raison du repos et de la physiothérapie dont elle bénéficiait. Elle n’a pas vécu de problème particulier lors des travaux légers qu’elle a effectués en juin et juillet 2011.

[29]        Interrogée sur son état de santé général, la travailleuse confirme qu’elle souffre d’un problème de glande thyroïde, soit d’hypothyroïdie, depuis l’âge de 17 ou 18 ans, pour lequel elle doit prendre une médication à vie.

[30]        La travailleuse complète son témoignage en mentionnant avoir repris son travail le 27 août 2012, à l’ourdissoir, de façon allégée, puisqu’elle est de nouveau enceinte. Cet allégement des tâches est prévu chez l’employeur en cas de grossesse. Elle travaille donc 5 jours par semaine, 8 heures par jour, et peut le faire en position assise pendant 2 heures alors qu’elle effectue de petites tâches au laboratoire. Depuis son retour au travail, en août 2012, la travailleuse indique ne pas avoir ressenti de symptômes aux poignets ou aux doigts. Elle croit que c’est dû à la nature des tâches plus légères qui lui sont assignées. La travailleuse n’a pas eu à consulter de médecin depuis le mois de mars 2012 relativement à ses poignets ou à ses mains.

[31]        Le tribunal a également entendu le témoignage de monsieur François Talbot, qui occupe l’emploi de planificateur logistique et de directeur adjoint de l’usine chez depuis 6 ans, mais est au service de l’employeur depuis février 1998. Il a d’abord occupé différents postes d’opérateur avant d’être assigné à l’ordonnancement et au poste qu’il occupe actuellement.

[32]        À l’égard du poste à l’inspection, il indique que s’il n’y a pas plus de 5 défauts par 60 verges, le tissu est réparable. Il est alors transmis au département de la réparation, c’est-à-dire envoyé à l’entrepôt où il est éventuellement réparé. Par contre, s’il comporte plus de 5 défauts par 60 verges, il est considéré non conforme. Il confirme que la travailleuse peut être appelée à effectuer des réparations de tissu qui ont été acheminées à l’entrepôt. Dans ces cas, plus de temps est alloué à cette fin. Par ailleurs, il signale que, si ces réparations prennent plus d’une heure, le tissu sera déclaré non conforme, sinon les coûts de réparation diminueront considérablement le profit.

[33]        De plus, monsieur Talbot confirme qu’à l’ourdissoir, il est possible que la travailleuse ait à installer de 200 à 500 bobines sur les supports. Ceci dépend du nombre de brins requis pour l’ensouple. Les plus petites ensouples peuvent contenir 1 182 brins de fil et les plus grandes peuvent, jusqu’à 10 124 brins de fil, ce qui explique la différence entre le nombre de bobines requis. Évidemment, il précise que plus il y a de brins sur l’ensouple, plus il y aura de sections de fil à relier. Il indique qu’il y a 2 ou 3 personnes par quart de travail, par département, que ce soit à l’ourdissoir ou à l’inspection. À sa connaissance, il n’y a eu aucun autre cas de réclamation pour canal carpien bilatéral.

[34]        Il appert du dossier que la travailleuse a effectué divers emplois depuis son entrée sur le marché du travail. Ainsi, elle a œuvré pour Techtrabois inc. de janvier 2002 à juin 2004, au poste de classeur de la meule de plancher de bois franc et d’opératrice de la « démêleuse » et de la « strappeuse ». De juin au 22 novembre 2004, elle a occupé un poste chez Les emballages Jomat inc., une entreprise qui a fermé ses portes depuis. Elle devait alors démêler, inspecter et empiler des morceaux de bois de différentes longueurs et largeurs. Finalement, à compter du 22 novembre 2004 jusqu’à aujourd’hui, elle a occupé les postes à l’ourdissoir et à l’inspection chez l’employeur.

[35]        À compter du 26 janvier 2011, la travailleuse est prise en charge par la docteure Duguay qui la voit sur une base régulière. Dans une note de consultation du 23 avril 2011, la docteure Duguay écrit qu’elle voit la travailleuse en relation avec son suivi de grossesse et son suivi CSST. Elle mentionne que les symptômes sont améliorés ++ avec repos et arrêt de travail. Elle parle de récidive de syndrome du canal carpien, surtout à droite, dès qu’elle utilise le moindrement son membre supérieur droit avec un mouvement de flexion-extension du poignet droit (elle mentionne que la travailleuse a peinturé une semaine avant la consultation et que les symptômes se sont déclenchés immédiatement par des chocs électriques à la main droite).

[36]        Elle réitère donc le diagnostic de canal carpien à droite plus important qu’à gauche, mentionne la récidive des symptômes dès qu’elle utilise son membre supérieur droit et inscrit que le contexte de grossesse explique l’augmentation des symptômes. Elle recommande donc la poursuite de l’arrêt de travail et prévoit la revoir.

[37]        Dans le cadre de l’analyse de la réclamation de la travailleuse, madame Karine Bonneau, agente d’indemnisation à la CSST, communique avec l’employeur et la travailleuse pour obtenir plus d’informations. La représentante de l’employeur indique que ce dernier s’oppose à l’admissibilité de la réclamation, puisqu’il est d’opinion que la travailleuse n’exerce pas un travail à risque de développer un canal carpien. Elle ajoute qu’au cours de l’année précédant la réclamation de la travailleuse, soit à compter du début de 2010, elle a été principalement assignée à l’inspection dans une proportion d’environ 75 % de son temps de travail.

[38]        Quant à la travailleuse, elle indique que la douleur est apparue aux poignets au début du mois de juin, uniquement en fin de journée. Puis, à compter du 25 octobre 2010, elle a consulté de nouveau parce que cette douleur l’empêchait de travailler. Elle la relie aux mouvements répétitifs qu’elle effectue au travail. Elle précise qu’elle occupe deux postes, soit à l’inspection et à l’ourdissoir, et qu’elle travaille chez l’employeur depuis novembre 2004. Elle mentionne que, bien que ses postes de travail aient changé quelquefois, elle fait ces deux postes depuis plus d’un an, travaille 40 heures par semaine, a des pauses de 1,20 heure par quart de travail et est droitière.

[39]        Elle explique ensuite sommairement comment elle doit effectuer les tâches à l’ourdissoir et à l’inspection. Elle précise notamment que les bobines qu’elle doit manipuler à l’ourdissoir pèsent de 5 à 12 livres. Elle peut faire, en moyenne, entre 400 et 600 nœuds par quart de travail lorsqu’elle est au poste de l’ourdissoir. Elle indique que, lorsqu’elle doit déposer les bobines sur l’étage du bas, elle est à genoux et, pour le dernier étage, elle les dépose avec les bras surélevés au-dessus des épaules.

[40]        Sur la base de ces informations et du visionnement d’une vidéo fournie par l’employeur, la CSST accepte la réclamation de la travailleuse sous l’angle de l’article 30 de la loi en s’appuyant sur les motifs suivants :

Titre : Décision d’admissibilité

 

- ASPECT LÉGAL:

 

Décision prise suite au visionnement du vidéo fourni par E + annexe des tâches fournie par E.

 

Analyse en vertu des articles 28 et 2 de la LATMP:

Considérant que la T allègue une apparition de douleur graduelle, de la douleur il ne s’agit pas d’un accident de travail donc la présente réclamation ne peut être analysée sous cet angle.

 

Analyse en vertu de l’article 29 de la LATMP:

Considérant que le diagnostic de tunnel carpien n’est pas présent à l’annexe 1 de la LATMP, nous ne pouvons appliquer l’article 29 de la LATMP.

 

Analyse en vertu de l’article 30 de la LATMP:

Considérant que le travail de la T comporte pas suffisamment de facteurs de risque pouvant causer la lésion car:

 

- la T n’a pas un travail qui demande des mouvements répétés de préhension et manutention répétés mouvement de pince avec les doigts (manutention de fils, crochet, utilisation de ciseaux

 

- lorsque la T est à l’ourdissoir, doit fait 1 à deux noeud à la minutes

- la T a un délai d’exposition (+ de 2 mois)

- lorsque la T est au poste d’inspection, utilise des ciseaux aux 60 verges

- considérant que la T a à faire de la manutention avec précision avec ses deux mains

 

Considérant que la T a démontré que sa maladie est caractéristique de son travail d’opératrice à l’ourdissoir ou qu’elle est directement reliée aux risques particuliers de ce travail, l’article 30 de la LATMP ne peut s’appliquer.

 

Décision:

________

 

La réclamation du 2010-06-25 est acceptée pour un tunnel carpien bilatéral en vertu de l’article 30 de la LATMP


 

IRR à autorisé à T à compter du 2010-11-09 selon la base salariale suivante (validée avec T + E):

- T a un conjoint non à sa charge

- T n’a pas de personne majeure ou mineure à sa charge. [sic]

 

 

[41]        La révision administrative confirme cette décision et le tribunal est actuellement saisi d’une requête à l’encontre de celle-ci.

[42]        Le 12 avril 2012, l’employeur mandate monsieur Nicolas Paradis, kinésiologue et ergonome, afin qu’il procède à une étude ergonomique des tâches effectuées par la travailleuse aux postes d’ourdissoir et d’inspection.

[43]        Il appert du rapport qu’il rédige à la suite de cette évaluation qu’il a observé les activités de travail, le 12 avril 2011, de 13 h 30 à 16 h 30 environ. Il était alors accompagné de la travailleuse et de monsieur François Talbot. Tout au long de l’observation des activités de travail, il précise que la travailleuse a été invitée à commenter et à expliquer les différentes activités. C’est d’ailleurs elle que l’on peut voir sur la vidéo qui a été visionnée lors de l’audience.

[44]        Le mandat de monsieur Paradis confié par l’employeur était d’évaluer si, à travers les tâches à l’ourdissoir et à l’inspection telles qu’effectuées par madame Sonia Larochelle, il retrouve des facteurs de risque des lésions musculosquelettiques favorisant le développement d’une maladie professionnelle de type « syndrome du canal carpien bilatéral ».

[45]        Au plan méthodologique, monsieur Paradis a d’abord pris connaissance du dossier médico-légal acheminé par l’employeur, puis il a rencontré monsieur Jason Henri, coordonnateur des ressources humaines, et monsieur François Talbot, directeur adjoint à la production chez l’employeur, de même que la travailleuse, et a observé les différentes activités de travail.

[46]        Par la suite, il a effectué une revue de la littérature scientifique sur les facteurs de risque eu égard aux lésions musculosquelettiques et analyse, d’une façon objective, chacune des composantes des activités de travail observées sur place et à partir de la vidéo. Il a ensuite émis une opinion objective sur l’exposition aux facteurs de risque favorisant le développement du canal carpien bilatéral.

[47]        Sans reprendre intégralement le rapport de monsieur Paradis, le tribunal croit utile de référer notamment à la portion de son témoignage identifiant les facteurs de risque à vérifier. On peut y lire ce qui suit :

En fonction de cette littérature scientifique, il apparaît que l’évaluation de l’exposition du risque au développement d’un SCC devrait passer par une recherche de la présence de certains facteurs de risque.

 

 

Postures contraignantes

En fonction des écrits de Bergamasco et coll., les postures contraignantes au niveau des articulations du poignet sont:

 

·         déviation ulnaire 24°

·         déviation radiale 15°

·         mouvement de pronation 40°

·         mouvement de supination 57°

·         extension du poignet 50°

·         flexion du poignet 45°

 

Plus spécifiquement, nous notons que la littérature scientifique mentionne que l’étude de causalité devrait principalement passer par une évaluation des mouvements d’extension et de flexion du poignet.

 

 

Répétitivité

 

La répétitivité et les périodes de récupération réfèrent aux aspects temporels du travail. Le concept de répétitivité correspond à la sollicitation répétée des mêmes tissus et ramène à l’exécution de gestes ou de mouvements similaires.

 

L’estimation de la fréquence des mouvements, plutôt que la durée du cycle, semble être une mesure plus précise du risque. En effet, l’appréciation de la répétitivité sur l’analyse des gestes ou des mouvements donne une meilleure indication de l’intensité des sollicitations auxquelles est exposé le travailleur.

 

Selon certaines études, une fréquence régulière d’action de 10 mouvements par minute pour le coude et le poignet et/ou d’environ 200 mouvements par minute pour les doigts constituerait un niveau de risque élevé pour la fréquence, nonobstant l‘exposition aux autres facteurs de risque (Colombini, D. et coll.).

 

Kilbom (1994) a défini les fréquences de mouvements représentant un niveau de risque élevé pour diverses régions du membre supérieur.

 

 

Parmi ces guides, notons:

 

Région                                                           Fréquence

 

Coude/avant-bras                                  ≥ 10/minute

Main/poignet                                        ≥ 10/minute

Doigts                                                 ≥ 200/minute

 

 

Dans l’ouvrage Pathologie médicale de l’appareil locomoteur, on retrouve, à la page 1273, le tableau suivant :

 

 

Fréquences de mouvements représentant un niveau de risque élevé pour diverses régions du membre supérieur

Région

Fréquence

Épaule

≥ 2-4/min

Coude/avant-bras

≥ 4/min.

Main/poignet

≥ 20/min.

Doigts

≥ 200/min.

 

 

Force

 

L’effort correspond au prix que paye l’organisme pour exercer une force spécifique. Elle est directement reliée au changement biomécanique aux structures musculosquelettiques.

 

Habituellement, l’effort est exprimé en pourcentage de la contraction maximale volontaire (% MV). L’équation permettant d’évaluer le niveau d’effort nécessaire est:

 

Effort % = 100        X     force demandée par le travail

force maximale de l’individu

 

Pour des fins de calculs, les valeurs de force maximales sont généralement obtenues à partir des études sur les forces maximales chez différents groupes d’individus. En ce qui a trait au syndrome du canal carpien, l’application de la force de préhension est la force de l’effort que l’on évalue.

 

 

[48]        Le tribunal constate qu’au moment où monsieur Paradis a procédé à l’analyse du poste de travail, il a été informé par la travailleuse qu’elle effectuait, dans une proportion de temps relativement égale, les tâches à l’ourdissoir et à l’inspection. Il n’avait alors pas en main les données précises quant aux assignations de la travailleuse pour la période de janvier à octobre 2010 qui permettent plutôt de constater qu’elle a été assignée à 83 % de son temps de travail au poste d’inspection et 17 % à l’ourdissoir.

[49]        Monsieur Paradis décrit chacun des postes que la travailleuse occupe, soit celui de l’ourdissoir, qui comporte l’installation des bobines, l’attache des fils, l’installation des fils pour le démarrage, le changement de sections, la réparation d’une casse, l’installation de l’ensouple et la fin du cycle de l’ourdissoir. Au poste de l’inspection, il a rappelé que la travailleuse doit procéder à une vérification visuelle de la qualité du tissu, identifier les zones endommagées et effectuer une réparation, si possible, habituellement à l’aide d’une petite pince. Il précise que plus le tissu est endommagé, plus la travailleuse doit arrêter fréquemment le déroulement. Si le produit présente trop de défauts, elle peut le déclarer non conforme et n’effectuer aucune réparation. Suite à l’inspection et à la vérification, la travailleuse doit imprimer une étiquette spécifique au produit et couper le tissu à une longueur précise. Ensuite un nouveau rouleau est installé pour procéder à un nouvel enroulement.

[50]        Par la suite, monsieur Paradis procède à l’analyse des activités de travail. Au poste de l’ourdissoir, il constate ce qui suit :

À l’ourdissoir, le travail de Mme Larochelle est entrecoupé de plusieurs périodes de micropauses. D’ailleurs, la variation des activités de travail favorise la prise de ces micropauses. L’ensemble des étapes de travail comprend des relâchements musculaires, un changement de sollicitation musculaire, des efforts à intensité variable, des périodes de vérification uniquement visuelle, des déplacements, etc.

 

Le seul moment où la fréquence de mouvements est plus élevée au niveau de l’articulation du poignet est au cours des tâches d’attache.

 

[1 photo]

 

Donc, globalement, je ne considère pas qu’il s’agisse d’un travail répétitif.

En ce qui a trait aux postures de travail, nous n’avons pas observé de maintien de postures statiques ou contraignantes sur de longues périodes de temps au niveau des poignets.

 

[2 photos]

 

Cette activité est de durée variable et peut être entrecoupée par d’autres tâches.

 

Donc, globalement, je ne considère pas qu’il s’agisse d’un travail répétitif.

 

Essentiellement, au niveau des poignets, l’exécution des différentes activités de travail observées entraîne les amplitudes articulaires suivantes:

 

·         Extension du poignet                                        0 à 45 degrés

·         Flexion du poignet                                            0 à 45 degrés

·         Déviation cubitale du poignet                             0 à 20 degrés

·         Déviation radiale du poignet                               0 à 15 degrés

 

La grande majorité des postures observées demeurent fonctionnelles et très sécuritaires.

 

[4 photos]

 

En ce qui a trait à la force, on remarque que la travailleuse manipule des poids importants principalement lors de la manipulation des bobines. En effet, le poids des bobines varie entre 1 kg et 7 kg. La bobine la plus fréquemment manipulée pèse près de 3,5 kg.

 

[2 photos]

 

Essentiellement, les manipulations sont effectuées à 1 et 2 mains.

 

Suite à notre observation, nous estimons que la travailleuse exerce une force de préhension supérieure à 4 kg moins de 10 % de son temps de travail à ce poste de travail.

 

En ce qui a trait à l’utilisation des outils vibratoires, il est important de noter que les utilisations sont de courte durée (moins de 30 secondes) et sont observées uniquement lors des changements de l’ensouple.

 

[2 photos]

 

Suite à notre analyse, nous estimons que Mme Larochelle utilise un outil émettant des vibrations segmentaires moins de 1 % de son temps de travail.

 

 

[51]        Quant au poste à l’inspection, il retient ce qui suit :

À l’inspection, les activités de travail sont encore moins exigeantes physiquement.

L’inspection consiste à une vérification visuelle de la qualité du tissu par les travailleurs.

Conséquemment, le tissu est installé sur une plaque défilante devant la travailleuse.

Ils doivent identifier les zones endommagées et effectuer une réparation si possible.

Donc, les travailleuses manipulent de petits outils de travail d’un poids négligeable.

 

[2 photos]

 

On ne retrouve aucune application de force de préhension supérieure à 4 kg.

 

Essentiellement, au niveau des poignets, l’exécution des différentes activités de travail observées entraîne les amplitudes articulaires suivantes:

 

·         Extension du poignet                                        0 à 45 degrés

·         Flexion du poignet                                            0 à 30 degrés

·         Déviation cubitale du poignet                             0 à 20 degrés

·         Déviation radiale du poignet                               0 à 15 degrés

 

La grande majorité des postures observées demeurent fonctionnelles et très sécuritaires.

 

La travailleuse n’est soumise à aucune vibration segmentaire.

 

 

[52]        Sous la rubrique Discussion, il retient ce qui suit :

Rappelons qu’en fonction de la littérature scientifique actuelle, ii apparaît que l’évaluation de l’exposition du risque au développement d’un syndrome du canal carpien (SCC) devrait passer par une recherche de la combinaison de différents facteurs de risque.

 

Ce tableau résume et illustre les résultats de plusieurs recherches épidémiologiques sur le syndrome du canal carpien et l’exposition aux différents facteurs de risque professionnels.

 

 

+++

++

+/0

Aucun

impact

Répétition

 

X

 

 

Force

 

X

 

 

Posture

 

 

X

 

Vibrations

 

X

 

 

Combinaison

X

 

 

 

 

À notre avis, au cours des activités de travail de Mme Larochelle, nous retrouvons les facteurs de risque suivants :

 

Facteur de risque (FR)

Fréquence du FR

Présence

suffisante

Répétition

10 % temps de travail

Non

Force

6 % temps de travail

Non

Posture

6 % temps de travail

Non

Vibrations

1 % temps de travail

Non

Combinaison

Aucune

Non

 

Répétitivité

 

Une fréquence régulière d’action de 10 à 20 mouvements/minute pour le poignet et la main constituerait un niveau de risque élevé pour la fréquence.

 

Tel qu’illustré plus haut, les activités de travail de madame changent régulièrement.

 

La seule activité pouvant être classifiée de répétitive au niveau des poignets est l’attache des fils lors des activités de travail à l’ourdissoir. Cette activité de travail implique une fréquence de mouvements plus élevée au niveau de l’articulation du poignet.

 

Je ne remarque aucune autre activité pouvant être classifiée de répétitive.

 

Par ailleurs, les travailleurs observés se retrouvent constamment en changement de sollicitation musculaire.

 

Le travail de Mme Larochelle est entrecoupé de plusieurs périodes de micropauses.

 

Conséquemment, je ne considère pas que ce facteur de risque soit suffisamment présent.

 

Postures contraignantes

 

En fonction des écrits de Bergamasco et coll. (1998), les postures contraignantes au niveau des articulations du poignet sont, entre autres :

 

•          l‘extension du poignet    50°;

•          flexion du poignet          ≥ 45°

 

Tel qu’illustré plus haut, les amplitudes retrouvées à travers les activités de travail présentent des postures de travail acceptables et non en relation avec les valeurs spécifiées ci-haut.

 

La majorité des outils et le déroulement des activités de travail impliquent principalement des flexions et des extensions des poignets de moins de 45°. Rarement, on remarque des postures qui dépassent ces valeurs de référence.

 

Nous observons quelques postures de plus de 45° en extension passive du poignet lors de la vérification de pièces de tissu. Il est à noter que ces extensions du poignet sont principalement le résultat de changements d’angulation des segments du bras.

 

Dans ce contexte, je ne considère pas que ce facteur de risque soit suffisamment présent au cours des activités de travail de Mme Sonia Larochelle.

Force

 

En ce qui a trait au syndrome du canal carpien, l’application de la force de préhension est principalement l’effort que l’on évalue.

 

Avant d’établir la relation entre un diagnostic et un travail physique particulier, il est important de déterminer si ce travail comporte suffisamment de facteurs de risque susceptibles d’entraîner une sursollicitation de la structure affectée. Cette distinction entre sollicitation et sursollicitation est importante, car il est bien évident que la mobilisation du membre supérieur pour accomplir n’importe quelle tâche entraîne une contraction de plusieurs muscles.

 

Pour développer un trouble musculo-squelettique, une structure doit être sollicitée à un point tel que les périodes de récupération sont insuffisantes pour permettre la récupération de cette structure. Les derniers écrits de Rogier et coll. (2009) illustrent que le développement d’un SCC a été associé à un travail requérant une force de préhension moyenne supérieure à 4 kg par main.

 

Notre analyse nous permet de conclure que la travailleuse manipule des poids supérieurs à 4 kg moins de 6 % de son temps de travail.

 

Donc, nous ne pouvons retenir la présence suffisante de ce facteur de risque.

 

Vibrations

 

Habituellement, dans un contexte préventif, la littérature scientifique reconnaît que le fait d’utiliser un outil vibratoire pour une durée minimale d’une heure par jour peut représenter un facteur de risque pour développer un syndrome du canal carpien.

 

Suite à notre analyse, nous estimons que Mme Larochelle utilise un outil émettant des vibrations segmentaires moins de 1 % de son temps de travail, donc moins de 5 minutes par quart de travail.

 

Lorsque Mme Larochelle utilise un outil vibratoire, il est important de noter que la majorité des utilisations sont de courte durée (moins de 30 secondes).

 

Dans ce contexte, je ne considère pas que ce facteur de risque soit suffisamment présent au cours des activités de travail dé Mme Sonia Larochelle.

 

 

[53]        Puis, il conclut comme suit :

À partir des données disponibles dans la littérature scientifique actuelle et de mon observation des différentes activités de travail de Mme Sonia Larochelle chez Victor lnnovatex, je crois que ce travail ne présente pas les caractéristiques recherchées des facteurs de risque pouvant mener à l’apparition d’un syndrome du canal carpien bilatéral.

 

En tenant compte de l’ensemble des activités de travail, les facteurs de risque présentés sont insuffisants pour établir qu’il s’agit d’un poste de travail problématique et favorisant le développement d’un syndrome du canal carpien.

 

Je considère que le travail de Mme Sonia Larochelle, tel qu’observé le 12 avril 2012, comporte une variété de tâches sollicitant des structures anatomiques distinctes et que l’exécution de ces tâches implique le repos des structures sollicitées lorsque la travailleuse passe d’une tâche à une autre.

 

L’illustration de cette conclusion est effectuée dans le présent document.

 

 

[54]        Monsieur Paradis témoigne à l’audience. Appelé à commenter ses constatations, il indique qu’au poste de l’ourdissoir, la travailleuse effectue plusieurs tâches qui nécessitent une certaine minutie et attention. La tâche qui lui apparaît la plus exigeante, sur le plan physique, est la préhension et la manipulation des bobines dont le poids peut varier 1 à 7 kg. La bobine la plus souvent utilisée pèse environ 3,5 kg. La travailleuse procède à la préhension de cette bobine en insérant 2 ou 3 doigts à l’intérieur de celle-ci tout en utilisant le pouce et l’auriculaire pour la stabiliser. Parfois, elle la saisit à 2 mains avec une main sous la bobine, parfois, elle prend les 2 mains pour une bobine. Elle enlève, habituellement, la pellicule plastique qui recouvre la bobine à 2 mains. Elle saisit même parfois la bobine avec le pouce à l’intérieur du trou et la main en dessous. Monsieur Paradis indique que la préparation de l’ensouple peut prendre de 4 à 8 heures.

[55]        Lorsque la travailleuse doit procéder à la préparation d’une casse, une lumière rouge allume. Elle doit donc suivre le fil pour trouver à quel endroit il est cassé. Il s’agit d’un travail de précision pour localiser et réparer le tout. Il lui arrive de faire des mouvements de pince digitale pouce-index, mais elle n’a pas à exercer de force. Il s’agit d’un travail de précision et de minutie. Lorsqu’il y a casse, la machine arrête en moyenne quelques minutes. Le temps d’arrêt varie, en fonction de la section à réparer, entre quelques secondes et ± 10 minutes.

[56]        Une fois que la travailleuse finit une étape sur l’un des ourdissoirs, elle travaille à l’autre, soit au montage, au démontage ou à l’assemblage. Elle doit également, par moments, faire ce qu’elle appelle « du passage en rot » à l’aide d’un peigne de différentes largeurs. Cette tâche consiste à insérer les fils en utilisant un crochet. Elle doit aussi prendre des mesures de l’ourdissoir, couper la couette de fil avec les ciseaux de la main droite, détacher les couettes de fil une à une, prendre des mesures pour la largeur de l’ensouple et, au besoin, dévisser l’assiette de l’ensouple pour l’élargir ou la raccourcir, ce qu’elle fait à l’aide d’une clé Allen. Puis, elle doit rouler l’assiette de ses deux mains. Lorsqu’elle effectue cette tâche, c’est le seul moment où elle utilise un outil vibrant, tel qu’il le mentionne dans son rapport, et elle le fait pour une période maximale de 30 secondes.

[57]        Elle doit aussi, occasionnellement, utiliser du papier pour sabler les assiettes de l’ensouple, afin de s’assurer qu’il n’y ait pas d’irrégularités. Lorsqu’elle doit faire des couettes de fil pour les métiers à tisser, elle prend ses deux mains et les enroule. Elle a aussi de la saisie de données à faire à l’ordinateur pour générer une carte donnant le détail de l’ensouple pour le département  des métiers à tisser.

[58]        Monsieur Paradis précise que, lorsqu’il y a changement de sections sur l’ourdissoir, la machine s’arrête à la fin de chaque section, qu’elle défile environ 400 mètres par minute, qu’il doit y avoir une séparation de fil à chaque section, que la travailleuse doit avoir attaché les fils après avoir installé les bobines, qu’il y a alors des mouvements plus fréquents des poignets, mais qui sont de faible amplitude, et que ce sont surtout les doigts qui travaillent. Elle doit souvent tenir des ciseaux de la main droite.

[59]        Au poste d’inspection apparaissant à la vidéo, monsieur Paradis indique que ce n’est pas la travailleuse que l’on peut observer, mais elle était présente et elle confirme qu’il s’agit de tâches représentatives. À ce poste, il n’y a pas d’application de force, l’extension passive du poignet peut atteindre, au maximum, 45° et il n’y a pas de flexion du poignet à plus de 30°.

[60]        Monsieur Paradis poursuit son témoignage en indiquant que l’objectif des observations des activités de travail était de connaître le mode opératoire de la travailleuse et les facteurs de risque.

[61]        Il reprend ensuite les conclusions de son rapport, puis réfère à la littérature médicale, dont notamment les critères de NIOSH et les auteurs Fortin, Bergeron, Leclaire.

[62]        Il termine son témoignage en mentionnant qu’au moment où il a procédé à l’analyse des résultats de ses observations, il était informé que la travailleuse faisait 50 % de son temps de travail à l’inspection et 50 % à l’ourdissoir. Il comprend, de la preuve documentaire produite par l’employeur, qu’elle a fait beaucoup plus d’inspection. Ses conclusions demeurent cependant les mêmes puisque, selon lui, si une plus grande proportion de son temps de travail a été attribuée à l’inspection, il s’agit de la tâche comportant le moins de facteurs de risque et encore moins d’éléments permettant de conclure à l’existence d’un lien de causalité entre le canal carpien bilatéral dont la travailleuse souffre et le travail exercé.

[63]        Dans le cadre de son contre-interrogatoire, monsieur Paradis admet qu’il n’a pas calculé précisément le nombre de fois où la travailleuse peut être appelée à utiliser des ciseaux ou d’autres outils, telles des petites pinces. Néanmoins, il rétorque qu’en ergonomie, c’est le cycle de travail qui importe. C’est d’ailleurs ce qu’il a tenté d’analyser lors de ses observations et des questions posées à la travailleuse.

[64]        À la suite de la preuve de l’employeur, la travailleuse a témoigné à nouveau en précisant que ses assignations de travail sont variables. Il peut lui arriver d’être affectée à un poste pour une journée complète ou deux, dépendamment des besoins de la production. À l’inspection, elle fait environ 400 verges l’heure et entre 1 000 et 3 000 verges en 5 heures, dépendamment de la qualité du tissu.

[65]        Elle dit que, lorsqu’elle a occasionnellement à procéder à la réparation du tissu, elle prend les ciseaux de la main droite et une pince dans chaque main qu’elle utilise simultanément dans un mouvement de pince digitale pouce-index. Elle simule ensuite le mouvement qu’elle a à faire lorsqu’elle attache des fils à l’ourdissoir. Il s’agit également d’un mouvement de pince digitale pouce-index accompagné d’une rotation rapide du poignet droit.

[66]        Quant à la manipulation des bobines, elle rappelle qu’elle en manipule de 200 à 400 par ensouple et qu’il lui arrive de faire de 3 à 4 ensouples par jour. Elle confirme qu’ils sont 3 par équipe et qu’il peut y avoir alternance entre les différentes tâches, soit à la machine TGV, à l’ourdissoir ou au montage de bobines. Sur un quart de 10 heures, elle estime manipuler de 300 à 500 bobines. Elle précise également que, lorsque les bobines sont vides, elles doivent être manipulées de nouveau pour les remettre en inventaire, mentionnant qu’elles sont alors moins lourdes.

L’AVIS DES MEMBRES

[67]        Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que la travailleuse n’a pas satisfait au fardeau de la preuve qui lui incombait.

[68]        Pour en venir à cette conclusion, il s’appuie notamment sur la preuve offerte par l’employeur dont notamment la vidéo des tâches, le rapport ergonomique de monsieur Paradis, son témoignage à l’audience, la littérature scientifique et médicale énonçant les facteurs de risque, la preuve documentaire relative aux assignations de travail et le témoignage de la travailleuse.

[69]        Il retient de l’ensemble de la preuve que la travailleuse n’a pas démontré qu’elle est exposée aux facteurs de risque pouvant causer un syndrome du canal carpien bilatéral. À son avis, il n’y a pas d’exposition suffisante ou de combinaison de facteurs de risque permettant de conclure en ce sens.

[70]        Le membre issu des associations d’employeurs est donc d’opinion d’accueillir la requête déposée par l’employeur le 19 avril 2011 et d’infirmer la décision de la CSST rendue le 9 mars 2011 à la suite d’une révision administrative.

[71]        Pour le membre issu des associations syndicales, la travailleuse a démontré, de manière prépondérante, qu’elle effectue des gestes et mouvements à risque de développer un syndrome du canal carpien dans l’exercice de ses tâches à l’ourdissoir et à l’inspection dont des pinces digitales, de la manipulation de charges avec force lorsqu’elle doit transporter les bobines, et de la dextérité fine lorsqu’elle doit faire des nœuds pour relier les fils et lorsqu’elle utilise ses ciseaux.

[72]        Il est donc d’avis que la travailleuse a aggravé une condition personnelle, comprenant à la fois son problème d’hypothyroïdie et son état de grossesse, en exerçant ses tâches chez l’employeur.

[73]        Le membre issu des associations syndicales est donc d’opinion de rejeter la  requête déposée par l’employeur le 19 avril 2011 et de confirmer la décision de la CSST rendue le 9 mars 2011 à la suite d’une révision administrative.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[74]        La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la travailleuse a subi une lésion professionnelle à compter du 25 octobre 2010.

[75]        En vue de se prononcer à cette fin, le tribunal est lié par le diagnostic de canal carpien bilatéral posé par le médecin qui a charge et non remis en question par la procédure d’évaluation médicale. C’est donc sur la base de ce diagnostic que portera la présente analyse.

[76]        La loi définit ainsi la notion de lésion professionnelle :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

[77]        Dans la présente affaire, la travailleuse soutient qu’elle a subi une maladie reliée aux risques particuliers des tâches effectuées à l’inspection et à l’ourdissoir chez l’employeur, conformément à l’article 30 de la loi qui prévoit ce qui suit :

30.  Le travailleur atteint d'une maladie non prévue par l'annexe I, contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui ne résulte pas d'un accident du travail ni d'une blessure ou d'une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d'une maladie professionnelle s'il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d'un travail qu'il a exercé ou qu'elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.

__________

1985, c. 6, a. 30.

 

 

[78]        En l’espèce, la travailleuse ne soutient pas que le syndrome du canal carpien bilatéral dont elle souffre est caractéristique des tâches effectuées, mais prétend plutôt que son syndrome du canal carpien bilatéral est relié aux risques particuliers de cet emploi.

[79]        La Commission des lésions professionnelles a eu à déterminer la preuve requise lorsque les risques particuliers du travail sont invoqués au soutien de l’admissibilité d’une réclamation pour maladie professionnelle[3].

[80]        Selon les paramètres ainsi établis, il faut d’abord procéder à une analyse des structures anatomiques atteintes par la maladie afin d’identifier les facteurs biomécaniques, physiques ou organisationnels sollicitant ces structures. Il faut par ailleurs regarder l’importance de l’exposition, que ce soit en matière de durée, d’intensité ou de fréquence ainsi que la relation temporelle. Le tribunal fait siens ces paramètres qui s’appliquent au présent dossier.

[81]        Quant aux facteurs biomécaniques ou facteurs de risque généralement en cause reconnus par la littérature médicale, le tribunal retient ceux apparaissant au rapport d’étude ergonomique de monsieur Paradis qui reprend, en substance, ceux mentionnés dans un document produit par le représentant de la travailleuse émanant du site internet du Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail. Il s’agit donc de la répétitivité, de la force et des postures contraignantes ou statiques auxquelles peuvent s’ajouter des facteurs physiques, tels les pressions mécaniques locales, les vibrations, les chocs et les impacts, les facteurs environnementaux, tel le froid, les facteurs organisationnels et les facteurs psychosociaux. Le tribunal comprend également que ces facteurs doivent être analysés en fonction de leur intensité ou de l’amplitude des mouvements et de la durée d’exposition.

[82]        Dans le cadre de l’appréciation de la preuve offerte, le tribunal doit donc rechercher la présence de ces facteurs de risque.

[83]        À ce sujet, le tribunal retient, du témoignage transparent et crédible de la travailleuse, qu’elle a effectué une multitude de tâches au poste de l’ourdissoir comportant notamment certains gestes faits avec minutie, comme lorsqu’elle doit ajuster, mesurer, préparer l’ensouple, réparer les casses, attacher les fils, procéder au changement de sections ou procéder à la fin du cycle de l’ourdissoir.

[84]        En effet, eu égard au poste à l’ourdissoir, le tribunal comprend que les principales tâches à risque sont reliées à la manipulation de bobines qui nécessite une certaine force et des mouvements dans des amplitudes variables.

[85]        Le tribunal accorde une valeur probante à l’analyse de monsieur Paradis sur ce point qui précise que la travailleuse manipule des poids supérieurs à 4 kg, moins de 6 % de son temps de travail. Or, ce poids constitue un paramètre retenu dans la littérature pour permettre d’associer un travail exigeant une force de préhension au développement d’un syndrome du canal carpien bilatéral. Le tribunal est donc d’avis que cette tâche ne permet pas de conclure à la présence d’un facteur de risque.

[86]        En ce qui a trait à la notion de répétitivité, le tribunal retient la mesure proposée par monsieur Paradis, émanant de la littérature médicale et scientifique sur laquelle il s’appuie, soit une fréquence régulière d’action de 10 à 20 mouvements par minute pour le poignet et la main qui constitue un niveau de risque élevé.

[87]        Or, le visionnement de la vidéo et le témoignage de la travailleuse permettent de comprendre qu’elle n’a pas à effectuer des mouvements répétitifs selon un cycle régulier de travail. En ce sens, le tribunal partage l’analyse de monsieur Paradis à l’effet que la seule activité qui pourrait être classifiée de répétitive au niveau des poignets est l’attache des fils lors des activités de travail à l’ourdissoir.

[88]        Cependant, le tribunal constate qu’il ne s’agit pas d’une tâche qu’elle fait de façon soutenue, mais à des périodes spécifiques dans le temps qui sont entrecoupées de périodes pouvant être qualifiées de micropauses.

[89]        De plus, le tribunal constate que, dans les 10 mois précédant son arrêt de travail, elle n’a été affectée à l’ourdissoir que dans une proportion de 17 % de son temps de travail, ce qui diminue considérablement la durée d’exposition à ce type de tâches.

[90]        Relativement aux postures contraignantes, bien que le représentant de la travailleuse ait insisté sur le fait que cette dernière doit effectuer un mouvement de pince digitale lorsqu’elle procède à la réparation du tissu, tant en raison des pinces que des ciseaux qu’elle utilise, le tribunal ne considère pas qu’elle le fait dans des postures contraignantes et sur des périodes de temps prolongées.

[91]        À cet effet, le tribunal accorde une valeur probante à l’évaluation de monsieur Paradis qui constate que ces postures de travail se font dans des amplitudes acceptables, soit avec le poignet en extension à moins de 50° ou en flexion à moins de 45°. Rarement, remarque-t-il des postures qui dépassent ces valeurs, si ce n’est quelques postures de plus de 45° en extension passive du poignet lors de la vérification des pièces de tissu. Le tribunal considère que ce facteur de risque n’a donc pas été démontré de manière prépondérante dans la présente tâche.

[92]        Quant aux vibrations, ce facteur de risque n’est pas démontré et, au surplus, la travailleuse ne soutient pas être soumise à des vibrations segmentaires à risque puisqu’elle utilise un outil vibratoire dans moins de 1 % de son temps de travail.

[93]        Le tribunal conclut donc que la travailleuse n’a pas satisfait au fardeau de preuve qui lui incombait, en ce qu’elle n’a pas démontré, à l’aide d’une preuve prépondérante, que le syndrome du canal carpien bilatéral dont elle souffre est relié aux risques particuliers des tâches à l’inspection et à l’ourdissoir telles qu’exercées chez l’employeur.

[94]        Au surplus, et bien que l’employeur n’ait pas à démontrer l’autre cause de la lésion, le tribunal constate, à la lecture du document déposé par le représentant de la travailleuse, soit l’extrait du site internet du Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail, que le syndrome du canal carpien peut être de nature idiopathique et certains facteurs en favorisent l’apparition, dont notamment l’arthrite, le diabète, la goutte, l’amylose (accumulation dans le foie, les reins, la rate d’une substance semblable à l’amidon), l’hypothyroïdie (insuffisance de la glande thyroïde), les tumeurs des gaines tendineuses, les fractures et dislocation des poignets, les kystes aux poignets, la grossesse, l’utilisation de contraceptifs oraux et la ménopause.

[95]        Or, en l’espèce, au moment où la travailleuse a ressenti les premiers symptômes, elle était enceinte et, de plus, elle souffre d’une maladie de la glande thyroïde, soit l’hypothyroïdie telle qu’elle en a informé le tribunal.

[96]        De l’avis du tribunal, ces éléments doivent être également considérés dans le cadre de la détermination d’un lien de causalité.

[97]        Vu ce qui précède, le tribunal conclut que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle le 25 octobre 2010 et qu’elle n’a donc pas droit aux prestations prévues à la loi.

[98]        Compte tenu de la conclusion à laquelle en arrive le tribunal à l’égard de l’admissibilité de la lésion professionnelle, il ne lui apparaît pas utile de se prononcer à l’égard de la demande incidente de l’employeur visant à faire exclure l’intervention de la CSST.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête déposée par Victor Innovatex inc., l’employeur, le 19 avril 2011;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 9 mars 2011, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que madame Sonia Larochelle, la travailleuse, n’a pas subi de lésion professionnelle, soit un syndrome du canal carpien bilatéral, le 25 octobre 2010, et n’a donc pas droit aux prestations de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en regard de ce diagnostic.

 

 

__________________________________

 

Ann Quigley

 

 

 

Madame Katy Boucher

MEDIAL CONSEIL SANTÉ SÉCURITÉ INC.

Représentante de « Victor Innovatex inc. »

 

 

Monsieur Benoît Boulet

SYNDICAT DES MÉTALLOS

Représentant de la travailleuse

 

 

Me Corinne Lambert

ARCHAMBAULT, AVOCATS

Représentante de « Techtrabois inc. »

 

 

Me Stéphane Larouche

VIGNEAULT, THIBODEAU, BERGERON

Représentant de la CSST

 

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Aubin et Groupe DSD inc. et CSST, 2012 QCCLP 3288 .

[3]           Industries de Moulage Polytech inc. et Pouliot, C.L.P. 144010-62B-0008, 20 novembre 2001, N. Blanchard; voir au même effet : Cadieux et B.O.L.D., C.L.P. 216395-64-0309, 1er juin 2004, R. Daniel.

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