COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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RÉGION : |
MONTRÉAL |
MONTRÉAL, le 10 janvier 2000 |
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DOSSIER : |
DEVANT LE COMMISSAIRE : |
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ASSISTÉ DES MEMBRES : |
Gilles Veillette |
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Associations d’employeurs |
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André Tremblay |
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Associations syndicales |
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DOSSIER CSST : |
114840903-1 |
AUDIENCE TENUE LE : |
24 novembre 1999 |
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À : |
Montréal |
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MONSIEUR RICHARD LAVOIE 3828, rue Mackenzie Montréal (Québec) H3S 1E5 |
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PARTIE REQUÉRANTE |
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ET |
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99165 CANADA LTÉE M. Roger Guay 8770, boul. Langelier, # 224 Saint-Léonard (Québec) H1P 3C6 |
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PARTIE INTÉRESSÉE |
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DÉCISION
[1] Le 11 février 1999, le travailleur conteste la décision rendue par la Direction de la révision administrative (la Révision administrative) de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) datée du 26 janvier 1999 qui déclare que les soins et traitements proposés pour les dents antérieures et inférieures 31, 32, 33, 41, 42 et 43 ne sont pas en relation avec l’accident survenu au travail le 30 mai 1998.
[2] La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience à laquelle le travailleur était présent et représenté le 24 novembre 1999. L’employeur a avisé de son absence par lettre.
OBJET DE L’APPEL
[3] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître que les traitements proposés au niveau des dents inférieures par le docteur Josef Bartos sont reliés à l’accident survenu au travail le 30 mai 1998.
LES FAITS
[4] Le travailleur, représentant à l’emploi des Entreprises RG ltée a été frappé par une remorque qui s’est détachée d’un véhicule en marche le 30 mai 1998. Le travailleur a alors subi plusieurs traumatismes dont une fracture radius-cubitus distale gauche, de même que plusieurs fractures au niveau facial. Le rapport de CT scan daté du 31 mai 1998 décrit les fractures suivantes :
« - Fracture alvéolaire au maxillaire supérieur et fracture sagittale traversant le palais dur à droite et à gauche.
- Fracture des parois antérieures, latérales et médiales du sinus maxillaire droit.
- Fracture de la paroi antérieure du sinus maxillaire gauche.
- Fracture pterygoide bilatérale.
- Fracture comminutive du plancher orbitaire droit.
- Fracture linéaire du plancher orbitaire gauche. »
[5] Un deuxième scan fait le ler juin 1998, révèle ce qui suit :
« Fracture étendue au niveau de la portion postérieure du massif facial le long de la paroi médiale du sinus maxillaire droit. Il y a également une fracture du mandibule supérieure en postérieure discrètement décalée inférieurement d’à peine 3 mm.
L’os propre du nez est déplacé et fracturé à deux endroits. Il semble également y avoir possiblement une petite fracture de la portion tout à fait postérieure de la paroi médiale du sinus maxillaire gauche.
La paroi latérale du sinus maxillaire droit est fracturée à deux endroits et déplacée.
Il y a également une fracture du plancher de l’orbite enfoncée d’au moins 4 mm. Il semble y avoir surtout de la graisse herniée dans le trait de fracture.
La lame criblée et la portion tout à fait antérieure du massif m’apparaissent sans grande particularité, sauf pour une petite fracture au niveau de la portion médiane de la portion tout à fait antérieure de la paroi médiale du sinus maxillaire gauche. »
[6] Il est à noter que lors de l’arrivée à l’hôpital, trois des dents incisives supérieures étaient disparues, le travailleur les ayant extraites lui-même suite à l’impact.
[7] Au niveau des fractures et réparations dentaires, le travailleur a été suivi par le docteur Josef Bartos, prosthodontiste et par le docteur Mark M. Spatzner, périodontiste.
[8] Sur un document daté du 14 septembre 1998, le docteur Bartos propose de procéder à des réparations au niveau des dents 31, 32, 41, 42 et 43 par pivots coulés et couronnes céramo-métalliques.
[9] La CSST a demandé l’avis du docteur Armando Simard, dentiste conseil concernant les frais encourus. Celui-ci a demandé l’opinion du docteur Sonia Blouin qui a produit un document daté du 5 octobre 1998 au dossier. Dans ce document le docteur Blouin écrit ce qui suit :
« J’ai procédé à l’examen et à la lecture des films
tomodensitométriques tel que demandé et j’ai pris connaissance du dossier
hospitalier disponible. De plus, le docteur
Michel Giguère, chirurgien buccal et maxillo-facial, a été consulté.
De la lecture des données disponibles, les dommages dentaires et osseux reliés à cet accident d’un point de vue strictement bucco-dentaire, nous remarquons l’absence des dents # 12, 11 et 21.
Quant aux lésions osseuses périapicales signalées au niveau des dents antérieures inférieures (# 43 à 32 inclusivement), nous croyons fort peu probable qu’elles soient en rapport avec l’accident daté du 30 mai 1998 et ceci, particulièrement en ce qui concerne la dent # 43.
Aussi, nous croyons que la résorption radiculaire mentionnée au niveau des incisives inférieures est déjà présente au moment de l’accident de même que pour la condition parodontale existante. »
[10] Le docteur Simard rédige un rapport le 6 octobre 1998 dans lequel il mentionne avoir contacté le docteur Pierre Deslauriers par téléphone et le dentiste Bartos. Le docteur Simard conclut son expertise comme suit :
« De l’étude de l’ensemble des documents reçus et demandés, nous concluons que l’ensemble des traitements intéressant le maxillaire supérieur sont recevables concernant le remplacement des dents perdues par un pont fixe. Les traitements du parodontiste en préparation des piliers du pont sont aussi acceptables : la chirurgie de chaque côté au maxillaire supérieur et les greffes au niveau de la crête antérieure supérieure région des dents 12-11-21-22 de même que la phase de détartrage préparatoire dispensée évaluée à 500 $.
En ce qui regarde les dents antérieures inférieures 43-42-41-31-32-33, nous sommes d’avis que les lésions osseuses péridentaires ainsi que la résorption radiculaire sur 41-31-32 étaient présentes au moment de l’accident et qu’en conséquence aucun des traitements se rapportant à ces dents est relié à cet accident du 30 mai 1998, à commencer par les traitements de canal soumis par l’endodontiste Grenspoon pour finir par les pivots et couronnes recommandés par le prosthodontiste Bartos. Il n’est pas probable que ces lésions radiculaires et osseuses délimitées, sans fracture de l’os cortical buccal et lingual, se soient formées en une journée. Ces lésions proviennent des restaurations extensives dispensées antérieurement sur ses dents et/ou en relation avec la maladie péridentaire sérieuse préexistante.
Nous prenons note que les dents 16-28-36-46 étaient manquantes au moment de l’accident et que monsieur Lavoie souffrait d’une parodontite moyenne généralisée. Il ne serait pas étonnant que ce déchaussement chronique correspondant à une perte marquée d’os de support conduise spécialement au niveau antérieur inférieur et molaire supérieur à la perte prochaine de quelques-unes de ses dents.
Les honoraires estimés sont ceux des spécialistes et l’ensemble des traitements proposés sont conformes et acceptables à condition d’être reliés. Ce n’est pas le cas pour les dents inférieures 43-42-41-31-32-33; cet énoncé est corroboré par le rapport annexé. »
[11]
Le dossier recèle une lettre datée du 27 octobre 1998 dans laquelle
le docteur
Arthur J. Greenspoon, endodontiste, écrit ce qui suit :
« Evidently the teeth are restored but they never caused the patient any discomfort prior to the accident, and there was no apparent lessions either before the event occurred. The lesions which appear periapically are caused by the trauma received by the work related accident. If endodontic treatments won’t be performed the patient will end up extracting these teeth, and this is something no one should accept due to a misinterpretation of the case. »
[12] Lors de l’audience le travailleur a témoigné que suite à l’impact ses dents du bas bougeaient beaucoup et qu’il a lui-même extrait les dents d’en haut qui étaient ébranlées. Il a remis en preuve une photo prise lors de son hospitalisation sur laquelle on peut voir la lèvre inférieure enflée.
[13] Le travailleur a précisé concernant les soins dentaires précédent l’événement, qu’il était suivi par le dentiste Dao (rencontré un an avant l’accident) et par le docteur Deslauriers qu’il a consulté en février 1998. À cet effet, le dossier recèle une note du docteur Deslauriers du 21 septembre 1998 sur laquelle on peut lire ce qui suit :
« Par la présente, je vous confirme que suite à l’examen dentaire effectué le 9 février 1998 les dents de monsieur Richard Lavoie étaient en excellent état et qu’aucun traitement n’était requis si ce n’est le détartrage bi-annuel. »
[14] Quant aux traitements de ses dents inférieures le travailleur indique qu’il avait déjà eu un plombage sur la dent # 43, de même que des insertions esthétiques entre les autres dents pour refermer des espaces trop larges. Le travailleur insiste que son dentiste ne lui a jamais fait de commentaire concernant ses gencives.
ARGUMENTATION DES PARTIES
[15] Le représentant du travailleur souligne que le docteur Blouin n’affirme pas que les lésions osseuses périapicales au niveau des dents antérieures et inférieures ne sont pas en rapport avec l’accident puisqu’elle dit qu’elle croit fort peu probable qu’elles soient reliées. Selon le représentant cela ne constitue pas une affirmation précise. Il réfère au témoignage du travailleur, de même qu’à la note du docteur Deslauriers, pour invoquer que les dents inférieures n’avaient pas besoin de réparations avant le fait accident lors duquel le travailleur a subi un traumatisme important, non seulement à la région supérieure de la bouche, mais aussi au niveau inférieur, tel que le démontre la photographie déposée en preuve.
L’AVIS DES MEMBRES
[16] Le membre issu des associations syndicales est d’avis que les lésions aux dents inférieures sont reliées au traumatisme survenu le 30 mai 1998, lequel était de nature à aggraver la condition personnelle préexistante du travailleur.
[17] Le membre issu des associations d’employeurs considère qu’il n’y a de relation selon les rapports d’experts au dossier et les rayons X qui ne démontrent pas de blessures au niveau inférieur.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[18] Dans le présent dossier la Commission des lésions professionnelles doit décider si les soins proposés au niveau des dents inférieures du travailleur sont compensables en vertu de la loi.
[19] Les articles 188 et 189 de la loi sont les articles auxquels il faut référer dans ce cas.
188. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.
189. L'assistance médicale consiste en ce qui suit :
1 les services de professionnels de la santé;
2 les soins ou les traitements fournis par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S - 4.2) ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S‑5);
3 les médicaments et autres produits pharmaceutiques;
4 les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur la protection de la santé publique (chapitre P‑35), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance‑maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;
5 les soins, les traitements, les aides techniques et les frais non visés aux paragraphes 1° à 4° que la Commission détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.
[20] L’article 188 indique bien que le travailleur a droit à l’assistance médicale que requiert son état en raison d’une lésion professionnelle. Il doit donc exister une relation de cause à effet entre l’assistance médicale requise ou proposée et la lésion professionnelle reconnue.
[21] Dans le présent dossier, bien que le travailleur ait subi un traumatisme important lors de l'accident de travail survenu le 30 mai 1998, le dossier ne recèle aucune mention de traumatisme au niveau des dents inférieures ni de lésion à ce niveau si ce n’est que l’allégation du travailleur lui-même.
[22] Quant aux opinions médicales de relation de cause à effet entre l’événement et les travaux recommandés par le docteur Bartos, il semble que les opinions des docteurs Blouin et Simard soient plus élaborées que celles des docteurs Deslauriers et Greenspoon. En effet le docteur Deslauriers mentionne que les dents de monsieur Lavoie étaient en excellent état et qu’aucun traitement n’était requis, sauf le détartrage bi-annuel suite à l’examen du 9 février 1998. Le docteur Deslauriers ne commente pas les scans effectués suite au traumatisme subi par le travailleur non plus que le docteur Greenspoon. Par opposition à ces deux opinions les docteurs Blouin et Simard commentent un phénomène de résorption radiculaire au niveau des incisives inférieures de même qu’une condition parodontale existante qui, de l’avis du docteur Blouin, était présente au moment de l’accident, alors que le docteur Simard indique qu’il n’est pas probable que ces lésions radiculaires et osseuses délimitées, sans fractures de l’os cortical buccal et lingual se soient formées en une journée. Il ajoute que ces lésions proviennent des restaurations extensives dispensées antérieurement sur les dents et/ou en relation avec la maladie péridentaire sérieuse préexistante.
[23] Tel que mentionné précédemment, ni le docteur Deslauriers ni le docteur Greenspoon ne commentent le phénomène de parodontite généralisée ou déchaussement chronique et la présence de lésions radiculaires. Or, le docteur Simard indique que le travailleur souffrait d’une parodontite moyenne généralisée préalablement à l’accident et il ajoute que ce déchaussement chronique correspond à une perte marquée d’os de support qui pourrait conduire spécialement au niveau antérieur inférieur et molaire supérieure à la perte prochaine des quelques-unes des dents. D’ailleurs à cet effet, lors d’une communication téléphonique avec le dentiste Bartos, le docteur Simard commente dans son rapport que le docteur Bartos a raconté que le docteur Famm, maxillo-facial, a été consulté en vue du remplacement des trois dents supérieures par des implants et que cette option a été rejetée en raison de la faiblesse de l’os au niveau antérieur supérieur.
[24] Bien que le docteur Greenspoon mentionne que le travailleur ne présentait pas de symptômes préalablement à l’événement, il ne détaille pas non plus cette symptomatologie qui n’est pas autrement documentée au dossier.
[25] Ce qui semble le plus évident, c’est que le travailleur présentait déjà avant son accident du travail, une condition personnelle de parodontite et de résorption radiculaire supérieure et inférieure.
[26] Cette condition apparaît à ce point importante que le prosthodontiste se voit obligé, pour remplacer les trois dents supérieures, 12, 11 et 21 perdues lors de l’accident, d’utiliser trois dents pilières de chaque côté et d’enlever la dent #22 affaiblie péridentairement. La CSST a donc accepté l’ensemble de ces soins à la mâchoire supérieure pour le remplacement des trois dents perdues malgré cette condition personnelle préexistante, puisque l’accident a entraîné la perte de ces trois dents. Il y a là une relation directe de cause à effet.
[27] Or, au niveau du maxillaire inférieur, l’accident n’a pas causé de dommage comme tel et il s’agit de la même condition personnelle qu’au niveau supérieur. Cette condition qui était présente avant l’accident et qui compte tenu de la preuve soumise, n’a pas été causée ou aggravée par l’événement, n’a pas à être compensée puisqu’elle ne constitue pas une lésion professionnelle au sens de l’article 2 de la loi.
[28] De l’ensemble de ce qui précède la Commission des lésions professionnelles estime que la preuve médicale prépondérante est plutôt à l’effet que les chirurgies proposées pour les dents inférieures du travailleur ne sont pas reliées à l’événement accidentel survenu le 30 mai 1998 mais découlent plutôt d’une condition personnelle préexistante à cet événement.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la contestation de monsieur Lavoie;
MAINTIENT la décision de la Direction de la révision administrative et de la Commission de la santé et de la sécurité du travail datée du 26 janvier 1999;
ET
DÉCLARE que les soins et traitements dentaires pour les dents inférieures 31, 32, 33, 41, 42 et 43 ne sont pas en relation avec l’accident et ne sont donc pas indemnisables en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
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Yves Ostiguy |
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Commissaire |
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MONSIEUR MARC CHENARD 5022, chemin de la Côte-des-Neiges Bureau 4 Montréal (Québec) H3V 1G6 |
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Représentant de la partie requérante |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.