Décision

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Bédard et Toitures Qualitoit inc.

2011 QCCLP 7117

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Québec

31 octobre 2011

 

Région :

Québec

 

Dossiers :

439558-31-1105      445115-31-1107      445932-31-1108

 

Dossier CSST :

135003929

 

Commissaire :

Jean-Luc Rivard, juge administratif

 

Membres :

Claude Jacques, associations d’employeurs

 

Gilles Dubé, associations syndicales

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Simon Bédard

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Toitures Qualitoit inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

Dossier 439558-31-1105

 

[1]           Le 24 mai 2011, monsieur Simon Bédard (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 14 avril 2011 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 9 mars 2011 donnant suite à l’avis émis par un membre du Bureau d’évaluation médicale le 12 janvier 2011 sous la plume du docteur Jean-Pierre Dalcourt. L’avis du Bureau d’évaluation médicale portait sur la question de l’atteinte permanente à l’intégrité physique du travailleur et l’existence des limitations fonctionnelles suite à la lésion professionnelle survenue le 15 mai 2009. Ainsi, la CSST concluait que l’atteinte permanente était fixée à 21,70 % incluant 3,45 % pour douleur et perte de jouissance de la vie et établissait que le travailleur avait droit à une indemnité pour préjudice corporel de 14 845,62 $.

Dossier 445115-31-1107

[3]           Le 21 juillet 2011, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 14 juillet 2011 à la suite d’une révision administrative.

[4]           Par cette décision, la CSST conclut que la demande de révision du travailleur datée du 10 juin 2011 a été produite au-delà du délai de 30 jours prévu par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) pour contester celle émise le 21 février 2011. La CSST conclut qu’aucun motif raisonnable n’a été démontré permettant de relever le travailleur de son défaut et conclut en conséquence à l’irrecevabilité de la demande de révision du 10 juin 2011.

[5]           Il faut préciser que la décision du 21 février 2011 donnait suite à l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale le 12 janvier 2011 sous la plume du docteur Jean-Pierre Dalcourt à l’égard de la question d’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles découlant de la lésion professionnelle survenue le 15 mai 2009.

Dossier 445932-31-1108

[6]           Le 4 août 2011, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 22 juillet 2011 à la suite d’une révision administrative.

[7]           Par cette décision, la CSST confirme deux décisions rendues à la même date soit le 6 avril 2011.

[8]           Ainsi, la première décision est à l’effet de refuser de rembourser au travailleur des travaux de coupe de bois et de cordage du bois de chauffage ainsi que de déneigement de la toiture de sa résidence, à titre de travaux d’entretien courant du domicile.

[9]           La seconde décision est à l’effet d’accepter de lui rembourser des travaux de tonte de son gazon ainsi que du déneigement de son stationnement et de deux voies d’accès à son domicile, mais de refuser de rembourser les travaux de déneigement du chemin entre la rue du Geai bleu et son écurie située près de son domicile.

L’OBJET DES CONTESTATIONS

Dossier 439558-31-1105

[10]        Dans ce dossier, le travailleur ne remet aucunement en cause le pourcentage d’atteinte permanente reconnu par la CSST à raison de 21,70 % donnant droit à une indemnité pour préjudice corporelle de 14 845,62 $. Le travailleur fait simplement remarquer que la décision de la CSST portait sur l’atteinte permanente découlant d’un avis du Bureau d’évaluation médicale portant non seulement sur l’atteinte permanente, mais également sur la question des limitations fonctionnelles.

[11]        Dans le cadre de sa contestation du 4 avril 2011 logée à la CSST, la représentante du travailleur contestait non seulement la question du pourcentage de l’atteinte permanente, mais également la question des limitations fonctionnelles. Le travailleur soulève à cette étape cette particularité puisque cet élément servira au travailleur pour être relevé de son défaut d’avoir contesté la décision de la révision administrative du 14  juillet 2011 dans le dossier CLP 445115-31-1107.

Dossier 445115-31-1107

[12]        Dans ce dossier, le travailleur fait remarquer qu’il doit être relevé de son défaut puisque la question des limitations fonctionnelles avait déjà été soulevée dans le cadre de la décision rendue par la CSST initialement le 9 mars 2011 et par la suite en révision administrative le 14 avril 2011. Le travailleur demande d’ajouter au chapitre des limitations fonctionnelles une limitation spécifique à savoir « éviter la station debout prolongée », tel que recommandé par son médecin traitant.

Dossier 445932-31-1108

[13]        Dans ce dossier, le travailleur demande, conformément à l’article 165 de la loi, le remboursement des frais de travaux d’entretien courant de son domicile, soit les travaux de coupe et de cordage de son bois de chauffage, le déneigement de la toiture de sa résidence et enfin le déneigement du chemin entre la rue du Geai bleu et son écurie située sur sa propriété.


L’AVIS DES MEMBRES

[14]        Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs prennent acte que le travailleur ne conteste plus la question du pourcentage de l’atteinte permanente fixé par la CSST à 21,70 % donnant droit ainsi à une indemnité pour préjudice corporel de 14 845,62 $.

[15]        Par ailleurs, les membres sont d’avis que la question des limitations fonctionnelles a été valablement soulevée par le travailleur dans le cadre de la contestation de la décision rendue le 9 mars 2011 découlant de l’avis du Bureau d’évaluation médicale portant sur l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Le travailleur a manifesté son désaccord avec la question des limitations fonctionnelles et il serait redondant de l’exiger à nouveau lorsque la CSST rend une seconde décision portant sur le même sujet, comme elle le faisait dans le cadre de sa décision émise le 21 février 2011. Le travailleur est donc relevé de son défaut et peut valablement soulever devant le tribunal la question des limitations fonctionnelles.

[16]        Sur le fond de cette question, les membres sont d’avis qu’il y a lieu d’ajouter à la nomenclature des limitations fonctionnelles énoncées par le Bureau d’évaluation médicale dans son rapport produit le 12 janvier 2011 sous la plume du docteur Jean-Pierre Dalcourt, la limitation suivante : éviter la station debout prolongée. En effet, le médecin traitant du travailleur émettait cette recommandation le 20 septembre 2010. Le témoignage du travailleur confirme également la nécessité d’ajouter cette limitation fonctionnelle.

[17]        Enfin, les membres sont d’avis que le travailleur a droit au remboursement à titre de frais d’entretien courant du domicile, ceux de la coupe et du cordage de bois de chauffage. Le travailleur a également droit au déneigement de sa toiture et au déneigement du chemin du Geai bleu jusqu’à son écurie qui fait partie de sa propriété. Le travailleur procédait antérieurement lui-même à l’exécution de tous les travaux relatifs à ces activités. Il a donc droit au remboursement des frais qui les concernent.

LES FAITS ET LES MOTIFS

Dossier 439558-31-1105

[18]        Dans ce dossier, le travailleur n’entend plus remettre en cause la question de l’atteinte permanente fixée à 21,70 % et donnant droit à une indemnité pour préjudice corporel de 14 845,62 $ suite à la lésion professionnelle survenue le 15 mai 2009.

[19]        Le travailleur fait simplement remarquer que la CSST a rendu deux décisions distinctes découlant d’un seul et même avis du Bureau d’évaluation médicale qui portait sur la question de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles découlant de la lésion professionnelle survenue le 15 mai 2009.

[20]        La CSST rendait le 9 mars 2011 une décision portant spécifiquement sur la question de l’atteinte permanente à la suite de l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale. C’est ainsi que le 4 avril 2011, le travailleur, par le biais de sa représentante, produisait la contestation suivante visant à remettre en cause non seulement l’atteinte permanente mais les limitations fonctionnelles en écrivant :

« Par la présente, nous demandons la révision administrative de la décision de la CSST rendue le 9 mars 2011 concernant le pourcentage d’atteinte permanente. Cette décision est mal fondée en fait et en droit.

 

Nous soumettons que l’évaluation du Bureau d’évaluation médicale ne représente pas la situation médicale réelle du travailleur en ce qui concerne les dates et les limitations fonctionnelles. »

 

(nos soulignements)

 

 

[21]        Il est manifeste ici que suite à cette décision faisant suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale, le travailleur entendait exprimer son désaccord à l’égard des deux questions visées par cet avis soit l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Cet élément est important puisque celui-ci servira au travailleur qui pourra être relevé de son défaut dans le dossier suivant.

Dossier 445115-31-1107

[22]        Dans ce dossier, la révision administrative en date du 14 juillet 2011 conclut que la demande de révision du travailleur produite le 10 juin 2011, à l’encontre de la décision du 21 février 2011, n’a pas été logée dans le délai de 30 jours prévu par l’article 358 de la loi.

[23]        Les articles 358 et 358.2 de la loi se lisent comme suit :

358.  Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.

 

Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365 .

 

Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2 ni du refus de la Commission de renoncer à un intérêt, une pénalité ou des frais ou d'annuler un intérêt, une pénalité ou des frais en vertu de l'article 323.1 .

 

Une personne ne peut demander la révision du taux provisoire fixé par la Commission en vertu de l'article  315.2 .

__________

1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14; 2006, c. 53, a. 26.

 

 

358.2.  La Commission peut prolonger le délai prévu à l'article 358 ou relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter, s'il est démontré que la demande de révision n'a pu être faite dans le délai prescrit pour un motif raisonnable.

__________

1997, c. 27, a. 15.

 

 

[24]        Le tribunal note que la décision du 21 février 2011 découlait comme celle émise le 9 mars 2011 d’un seul avis du Bureau d’évaluation médicale signé par le docteur Jean-Pierre Dalcourt portant sur la question de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

[25]        Suite à la première décision du 9 mars 2011, le travailleur avait clairement exprimé son désaccord sur la question des limitations fonctionnelles retenues par le Bureau d’évaluation médicale.

[26]        Le tribunal est d’avis qu’il faudrait être particulièrement pointilleux sur la procédure pour prétendre que le travailleur devait contester spécifiquement la décision du 21 février 2011 qui est en pratique redondante puisqu’elle évoque à nouveau l’existence d’une atteinte permanente et réfère à la question des limitations fonctionnelles pour conclure au versement des indemnités de remplacement du revenu tant que la question de la capacité à exercer son emploi n’aura pas été tranchée par la CSST.

[27]        Il est manifeste que ces deux décisions découlent du même avis du Bureau d’évaluation médicale et réfèrent aux mêmes conclusions médicales. Le travailleur, en contestant le 4 avril 2011 la question des limitations fonctionnelles à l’égard de l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale, exprimait ainsi un désaccord en temps voulu et ainsi, on ne peut aucunement reprocher au travailleur de ne pas avoir respecté les délais prévus à l’article 358 de la loi. De toute façon, si même cette contestation était hors délai, le travailleur dispose d’un motif raisonnable pour être relevé de son défaut en raison de l’existence de deux décisions qui, en fin de compte, traitent des mêmes sujets.

[28]        En conséquence, le tribunal est d’avis que le travailleur peut valablement soulever la question des limitations fonctionnelles.

[29]        Le travailleur ne remet aucunement en cause les limitations fonctionnelles retenues par le docteur Jean-Pierre Dalcourt dans son avis du 12 janvier 2011. Toutefois, le travailleur demande d’ajouter une limitation fonctionnelle énoncée par son médecin traitant le 20 septembre 2010, soit d’éviter la station debout prolongée en raison des séquelles de la lésion professionnelle du 15 mai 2009 à son genou droit. Le tribunal est d’avis qu’il y a lieu effectivement d’ajouter cette limitation fonctionnelle supplémentaire suite à l’analyse du dossier et après avoir entendu le témoignage du travailleur qui confirme la nécessité d’un tel ajout.

[30]        Rappelons simplement que le travailleur a subi le 15 mai 2009 un accident du travail significatif au cours duquel il a subi une chute d’environ une trentaine de pieds au bas d’une échelle. Le travailleur a alors subi une fracture ouverte du plateau tibial et du tibia droit, une fracture et une luxation au coude gauche, une hémarthrose du genou gauche et une lacération du bras droit. Dans son rapport produit le 12  janvier 2011, le docteur Jean-Pierre Dalcourt pour le compte du Bureau d’évaluation médicale concluait que le travailleur conservait des limitations fonctionnelles en raison de la fracture du plateau tibial et diaphyse ouverte du genou droit considérant l’atrophie importante, l’atteinte du plateau tibial comminutive, de la diaphyse tibiale avec ankylose, douleur et atteinte fonctionnelle. Le docteur Dalcourt énonçait ainsi les limitations fonctionnelles au niveau du genou droit du travailleur :

« […]

 

2.   Fracture plateau tibial et diaphyse ouverte du genou droit

Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente des activités qui impliquent de :

-    Travailler en position accroupie ou à genoux

-    Ramper, grimper

-    Travailler dans une position instable (échafaudage, échelle, escaliers)

-    Travailler en terrain accidenté ou glissant

-    Effectuer des mouvement répétitifs ou fréquents avec effort de l’articulation du genou gauche (comme action d’un pédalier pour la marche prolongée)

[…] »

 

 

[31]        Il est utile ici de préciser que la dernière limitation fonctionnelle du docteur Dalcourt énonce que le travailleur doit éviter d’effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents avec effort de l’articulation du genou comme l’action d’un pédalier pour la marche prolongée. Il s’agit en pratique de l’évocation de la limitation fonctionnelle émise par le docteur Lemire le 20 septembre 2010 qui stipule de façon plus claire que le travailleur doit éviter la station debout prolongée.

[32]        Le témoignage du travailleur permet de confirmer que dans les faits, il présente beaucoup de difficultés à maintenir une station debout prolongée en raison des séquelles à son genou droit. Il ne peut maintenir cette position plus de quelques heures sans ressentir un brûlement et une douleur au niveau de la face interne de son mollet droit, soit au site même de l’intervention chirurgicale subie suite à la lésion professionnelle survenue le 15 mai 2009. Le travailleur a également confirmé qu’il doit souvent se presser pour accomplir une tâche qui doit s’effectuer debout parce qu’il présente une telle fatigabilité qu’il craint souvent de ne pas être en mesure de terminer sa tâche.

[33]        Le tribunal est d’avis que le travailleur doit donc bénéficier d’une limitation fonctionnelle supplémentaire à celle établie par le docteur Dalcourt soit celle d’éviter la station debout prolongée.

Dossier 445932-31-1108

[34]        Le tribunal doit décider si le travailleur a droit au remboursement des frais de certains travaux d’entretien courant du domicile conformément à l’article 165 de la loi qui se lit comme suit :

165.  Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[35]        La CSST a refusé de rembourser au travailleur des travaux de coupe et de cordage de bois de chauffage ainsi que de déneigement de la toiture de sa résidence à titre de travaux d’entretien courant de son domicile.

[36]        La CSST a toutefois accepté de lui rembourser des travaux de tonte de gazon ainsi que de déneigement du stationnement et de deux voies d’accès à son domicile mais tout en refusant de rembourser des travaux de déneigement du chemin entre la rue du Geai bleu et de son écurie située sur sa propriété.

[37]        Le tribunal est d’avis après analyse que le travailleur a droit au remboursement de tous les travaux réclamés à savoir les travaux de coupe et de cordage de bois de chauffage, de déneigement de sa toiture et de déneigement du chemin du Geai bleu jusqu’à son écurie.

[38]        D’abord, il ne fait aucun doute que le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique, à savoir 21,20 % limitant ce dernier de façon très importante pour l’accomplissement de ses activités quotidiennes.

1-        COUPE DE BOIS DE CHAUFFAGE ET CORDAGE DE BOIS DE CHAUFFAGE :

[39]        Le tribunal retient le témoignage du travailleur attestant qu’avant la survenance de sa lésion professionnelle du 15 mai 2009, il procédait lui-même à la coupe et au cordage du bois de chauffage. Il s’agit pour le travailleur d’un mode de chauffage d’appoint et non un mode de chauffage principal de son domicile.

[40]        C’est d’ailleurs pour cette raison que la révision administrative a plus particulièrement refusé au travailleur le droit au remboursement des coûts de ces travaux.

[41]        Le tribunal est d’avis toutefois qu’il n’y a pas lieu de faire de distinction particulière entre le chauffage d’appoint et le chauffage principal puisque la jurisprudence permet le remboursement de tels frais même à l’égard d’un système de chauffage d’appoint.

[42]        Le tribunal partage l’avis du tribunal dans l’affaire Alain Lacasse et Les industries de la Rive Sud ltée[2].

« […]

 

[70]      Il reste donc à la Commission des lésions professionnelles de déterminer si le bois de chauffage constitue des travaux d'entretien courant du domicile et, si tel est le cas, quel montant le travailleur a droit.

 

[71]      Sur ce point, la Commission des lésions professionnelles doit reconnaître qu'il existe une controverse au sein de son tribunal.

 

[72]      Pour certains2, l'achat du bois, pour entretenir un système de chauffage d'appoint, ne peut être assimilé à des travaux d'entretien courant du domicile bien que le travailleur soit porteur d'une atteinte permanente grave. Alors que pour d'autres commissaires3, le travailleur peut être remboursé des frais d'achat du bois de chauffage puisqu'il s'agit ici de travaux d'entretien courant du domicile.

 

[73]      Le soussigné a déjà eu l'occasion de prendre position sur le sujet et admet être le tenant de la thèse voulant que le remboursement des frais d'achat du bois de chauffage peut être assimilé à des travaux d'entretien courant du domicile.

 

[74]      Les principaux motifs qui sous-tendent cette position résident dans l'objet même de la loi qui vise la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elle entraîne pour les bénéficiaires.

 

[75]      Comme cette loi en est une à caractère social, il faut alors reconnaître que son interprétation doit être large et libérale afin que l'on puisse atteindre cet objectif.

 

[76]      Par ailleurs, le chauffage au bois, même à titre de chauffage auxiliaire, est un choix personnel du travailleur sur lequel le présent tribunal n'entend pas revenir.

 

[77]      Toutefois, si le travailleur ne bénéficie pas de ce chauffage d'appoint, sa facture de chauffage à l'électricité sera augmentée d’autant puisque ce dernier ne paye pas son bois de chauffage.

 

[78]      L'utilisation du bois de chauffage par le travailleur est donc un moyen économique de maintenir une température adéquate dans sa maison tant pour le confort des personnes qui y résident que pour la protection des matériaux qui la  compose.

                                                                                      

2           Champagne et Métallurgie Noranda inc., 144899-08-0008, 2001-03-01, P. Prégent;

                Hamel et Mines Agnico Eagle ltée, 134627-08-0002, 2001-07-10, M. Lamarre.

3           Martel et Les entreprises G. St-Amant inc., 07955-03-8806, 1990-10-26,          B. Dufour;

                Alarie et Industries James Maclaren inc., [1995], C.A.L.P., 1233;

                Entreprises Bon conseil ltée et Bezeau, 57905-09-9412, 1995-08-07, J.M. Dubois;

                Lemieux et ministère des Transports du Québec, 118805-02-9906, 2000-03-06, P. Simard.

 

[…] »

 

 

[43]        Le tribunal est d’avis que les principes énoncés dans la décision précitée sont applicables à la présente affaire et le travailleur a donc droit sur présentation des pièces justificatives au remboursement des frais de coupe et de cordage de bois de chauffage pour son système de chauffage d’appoint.

2-        DÉNEIGEMENT DE LA TOITURE :

[44]        Le tribunal souligne que le témoignage du travailleur permet d’établir qu’il effectuait lui-même le déneigement de sa toiture.

[45]        La CSST est d’avis que les travaux de déneigement d’une toiture ne sont pas considérés comme étant des travaux d’entretien courant du domicile.

[46]        Toutefois, la jurisprudence du présent tribunal est plutôt à l’effet contraire et le tribunal est d’avis que ces frais de déneigement concernent des travaux habituels dans un pays de neige comme le Québec. Plus particulièrement dans l’affaire Éric Bonneville et Arrondissement Rivière-des-Prairies/Pointe-aux-Trembles[3]. Le tribunal énonçait ce qui suit :

« […]

 

[14]      Reste à déterminer si le déneigement d’une toiture relève de l’entretien courant du domicile et si le travailleur présente une atteinte permanente grave à son intégrité physique.

 

[15]      Sur la question du déneigement, la jurisprudence du tribunal et de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la C.A.L.P.) qui l’a précédé a déjà abordé la question et reconnu qu’il faisait partie des travaux d’entretien courant du domicile :

 

-       Déneiger fait partie des travaux d'entretien courant: Brousseau et Protection d'incendie Viking ltée, 18374-61-9004, 92-09-15, L. Boucher, (J4-18-25); Chevrier et Westburne ltée, 16175-08-8912, 90-09-25, M. Cuddihy, (J2-15-19); Lévesque et Mines Northgate inc., [1990] C.A.L.P. 683 ; Lagassé et Construction Atlas inc., 58540-64-9404, 95-10-31, F. Poupart; Pinard et Russel Drummond, 145317-02-0008, 00-11-29, R. Deraiche; Paquet et Pavillon de l'Hospitalité inc., 142213-03B-0007, 00-12-12, R. Savard.

 

-       Le déneigement de la toiture et le ramonage de la cheminée sont des travaux d'entretien courant que le travailleur aurait exécutés lui-même n'eût été de sa capacité résiduelle: Mercier et Les contrôles A.C. inc., 130934-31-0002, 01-01-29, P. Simard.

 

-       Les travaux de déneigement constituent au Québec une activité qui s'assimile à de l'entretien courant du domicile, et ce, pendant les mois que dure l'hiver: Lalonde et Mavic Construction, 146710-07-0009, 01-11-28, M. Langlois.

 

-       Le déneigement d’un toit en hiver au Québec constitue un travail d’entretien courant puisqu’il s’agit d’une tâche habituelle et ordinaire même si sa fréquence est d’une importance relative: Bacon et General Motors du Canada ltée, [2004] C.L.P. 941 .

 

[16]      La présente formation partage cette opinion et estime que de tels travaux font partie des travaux d’entretien courant du domicile.

 

[…] »

 

 

[47]        Le tribunal confirme donc que le travailleur a droit au remboursement des frais de déneigement de sa toiture.

3-        DÉNEIGEMENT DU CHEMIN DU GEAI BLEU JUSQU’À L’ÉCURIE DE LA PROPRIÉTÉ DU TRAVAILLEUR :

[48]        Le tribunal retient le témoignage du travailleur attestant qu’il a toujours effectué lui-même le déneigement de cette portion du chemin qui mène de sa maison jusqu’à son écurie qui fait partie intégrante de sa propriété. Le travailleur effectuait lui-même ces travaux à l’aide d’une souffleuse sur chenilles qu’il manœuvrait à l’aide de ses deux mains puisqu’il s’agit d’un appareil muni de poignées. 

[49]        Comme le travailleur effectuait lui-même cette tâche auparavant, le critère exigé par l’article 165 à cet égard est donc satisfait.

[50]        La révision administrative, à tort, énonce que les frais de déneigement de cette partie de chemin ne sont pas remboursables puisqu’il s’agit d’un chemin d’une dimension trop importante pour être déneigé à la main ou à l’aide d’une souffleuse. Or, cette affirmation est inexacte puisque le travailleur par son témoignage non contredit sur cet aspect a précisément affirmé le contraire. Il effectuait lui-même ce travail à l’aide d’une souffleuse.

[51]        Le travailleur a donc droit au remboursement des frais de déneigement du chemin du Geai bleu menant jusqu’à son écurie suite à la présentation des pièces justificatives appropriées à la CSST.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

Dossiers 439558-31-1105 et 445115-31-1107

ACCUEILLE en partie les contestations de monsieur Simon Bédard, le travailleur, déposées les 24 mai 2011 et 21 juillet 2011;

MODIFIE en partie les décisions rendues par la révision administrative les 14 avril 2011 et 14 juillet 2011;

DÉCLARE que le travailleur conserve une atteinte permanente à son intégrité physique de 21,70 % donnant droit à une indemnité pour préjudice corporel de 14 845,62 $;

DÉCLARE que le travailleur conserve une limitation fonctionnelle supplémentaire qui s’ajoute à celles déjà émises par le Bureau d’évaluation médicale sous la plume du docteur Jean-Pierre Dalcourt le 12 janvier 2011 à savoir que le travailleur doit aussi éviter la station debout prolongée;

Dossier 445932-31-1108

ACCUEILLE la contestation de monsieur Simon Bédard, le travailleur, déposée le 4 août 2011;

INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 22 juillet 2011, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur a droit sur présentation des pièces justificatives et en conformité avec la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles au remboursement des frais de coupe de bois de chauffage et de cordage du bois;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement des frais de déneigement de sa toiture sur présentation des pièces justificatives et conformément aux prescriptions de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ;

DÉCLARE que le travailleur a également droit aux frais de déneigement du chemin du Geai bleu jusqu’à son écurie sur présentation des pièces justificatives et selon les paramètres de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

 

 

 

 

 

 

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JEAN-LUC RIVARD

 

 

 

 

Me Murielle Drapeau

BOULET, DRAPEAU AVOCATS

Représentante de la partie requérante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           CLP 205129-03B-0304, 23 juin 2005, C. Lavigne

[3]           CLP 372850-63-0903, 8 mars 2010, J.-P. Arseneault

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