Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

10 février 2006

 

Région :

Richelieu-Salaberry

 

Dossier :

217112-62C-0310-R2

 

Dossier CSST :

117088484

 

Commissaire :

Claude-André Ducharme

 

Membres :

Guy-Paul Hardy, associations d’employeurs

 

Carmen Surprenant, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

Johanne Ricard

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Liquidation Choc

 

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 7 juillet 2005, madame Johanne Ricard (la travailleuse) dépose une requête par laquelle elle demande à la Commission des lésions professionnelles de révoquer une décision qu'elle a rendue le 14 juin 2005 (rectifiée le 30 juin 2005).

[2]                Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles accueille la requête de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), révise la décision qu'elle a rendue le 30 juillet 2004 et déclare que l'emploi de caissière de billetterie constitue un emploi convenable pour madame Ricard.

[3]                La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience le 26 janvier 2006 à Salaberry-de-Valleyfield. Madame Ricard était présente à l'audience et elle était représentée. Liquidation Choc (l'employeur) n'était pas représenté. La CSST était représentée.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[4]                Madame Ricard demande à la Commission des lésions professionnelles de révoquer la décision rendue le 14 juin 2005 au motif qu'elle comporte un vice de fond qui est de nature à l'invalider et de rétablir celle rendue le 30 juillet 2004.

LES FAITS

[5]                Le 1er août 1999, dans l'exercice de son emploi de commis-caissière chez l'employeur, madame Ricard fait une chute en descendant d'un escabeau. Elle est alors âgée de 45 ans. Cet accident lui cause une entorse cervicale. Le 4 octobre 1999, elle reprend son travail bien que sa lésion ne soit pas consolidée, mais elle arrête à nouveau de travailler le 4 mai 2000. Le diagnostic d'entorse cervicolombaire est alors posé.

[6]                Le 8 mai 2002, la Commission des lésions professionnelles confirme les décisions rendues par la CSST à la suite de révisions administratives et déclare que madame Ricard a subi une lésion professionnelle le 1er août 1999 et une récidive, rechute ou aggravation le 4 mai 2000.

[7]                Cette dernière lésion entraîne une atteinte permanente à l'intégrité physique et des limitations fonctionnelles qui amènent la CSST à reconnaître à madame Ricard le droit à la réadaptation professionnelle.

[8]                À la suite de l'arrêt de travail du 4 mai 2000, madame Ricard subit des pertes de conscience, des vertiges et des céphalées pour lesquels elle est suivie par des médecins et passe des examens. Un examen du cerveau par résonance magnétique révèle, selon le radiologiste, la présence d'hémangiomes caverneux auxquels des médecins associent les problèmes de madame Ricard.

[9]                En plus de ces symptômes, elle a de la difficulté à se concentrer (à lire), elle présente des problèmes d'élocution et elle est limitée dans ses activités.

[10]           La CSST reconnaît que les problèmes que connaît madame Ricard l'empêchent de déterminer un emploi convenable, mais elle considère qu'elle n'a pas à tenir compte de cette condition personnelle, malgré la prétention de celle-ci.

[11]           Le 14 avril 2003, la CSST retient l'emploi convenable de caissière de billetterie après avoir évalué que cet emploi respectait les critères de l'emploi convenable et notamment, les limitations fonctionnelles qui résultaient de la lésion professionnelle. Elle confirme sa décision le 26 septembre 2003 à la suite d'une révision administrative, d'où l'appel de madame Ricard à la Commission des lésions professionnelles.

[12]           Le 30 juillet 2004, la Commission des lésions professionnelles donne raison à madame Ricard. Le commissaire qui rend la décision (le premier commissaire) motive sa conclusion comme suit :

[32]      N’eût été de la condition personnelle de la travailleuse, la preuve présentée à l’audition ne permettrait pas de déclarer que l’emploi de préposée à la billetterie ne constitue pas un emploi convenable. En effet, cette travailleuse avait plus de 20 ans d’expérience dans le commerce, la vente et le maniement des caisses enregistreuses. Elle disait ne pas pouvoir utiliser l’ordinateur ni parler anglais mais la preuve à l’audience n’a pas démontré que la maîtrise de l’anglais était une condition essentielle à l’exercice de l’emploi de préposée à la billetterie.

 

[33]      Toutefois, pour la Commission des lésions professionnelles, même si en fonction des strictes séquelles des lésions de 1999 et 2000 la travailleuse pouvait exercer l’emploi de préposée à la billetterie, cet emploi ne constitue pas un emploi convenable au sens de la loi puisqu’il ne permet pas à la travailleuse d’utiliser sa capacité résiduelle qui est un élément essentiel et que doit permettre la détermination d’un emploi pour que, en vertu de la loi, on puisse le qualifier d’emploi convenable. Or, dans le présent cas, la fonction de préposée à la billetterie ne permet pas de rencontrer cet élément ou critère essentiel lorsqu’on évalue la condition globale de la travailleuse, c’est-à-dire sa condition résultant tant de ses lésions professionnelles que de sa condition personnelle au moment de la détermination de cet emploi de préposée à la billetterie le 1er avril 2003.

 

[34]      La jurisprudence de la Commission d’appel des lésions professionnelles (CALP) et de la Commission des lésions professionnelles soutient une telle interprétation. En effet, la jurisprudence considère que la capacité résiduelle du travail est une notion large qui doit prendre en compte non seulement les limitations fonctionnelles découlant de la lésion professionnelle, mais aussi les autres limitations physiques ou psychologiques personnelles connues au moment de l’évaluation de la capacité résiduelle du travailleur.

 

 

[13]           Après avoir passé en revue certaines décisions de la jurisprudence qui supportent son approche, il conclut comme suit :

[39]      Ainsi, lorsque survint le moment de se questionner sur les données à prendre en compte pour la détermination de l’emploi convenable, la CSST devait considérer la condition globale de la travailleuse et ce, même si elle ne pouvait déterminer le jour où la travailleuse serait apte à exercer un emploi. Dans le présent cas, la CSST savait pertinemment qu’elle ne pouvait déterminer un emploi convenable, la condition globale de la travailleuse empêchant cette dernière d’exercer, pour l’heure, un emploi rémunérateur. Cependant, rien ne garantissait et ne garantit encore aujourd’hui la CSST qu’il n’en sera pas autrement dans l’avenir. Pour la Commission des lésions professionnelles, tant qu’il ne sera pas possible de déterminer un emploi convenable à la travailleuse, cette dernière a le droit, en vertu de l’article 47 de la loi, de continuer à recevoir une indemnité de remplacement du revenu.

[14]           Enfin, il explique les raisons pour lesquelles il estime qu'il n'y a pas lieu de suivre les approches adoptées dans les deux décisions que le représentant de la CSST a déposées au soutien de son argumentation et il termine en formulant le commentaire suivant :

[44]      Les tribunaux supérieurs, considérant que la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est une loi sociale, ont toujours favorisé une interprétation libérale de la loi et ce, principalement en vertu de l’article 1 de cette loi. L’interprétation de la loi qui veut que la capacité résiduelle de travail s’évalue en tenant compte de la condition globale du travailleur va dans le sens de cette interprétation libérale.

 

 

[15]           Le 17 septembre 2004, la CSST demande la révision de cette décision au motif qu'elle comporte des erreurs manifestes d'interprétation des dispositions de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), notamment des articles 1 et 47.

[16]           Le 14 juin 2005, la Commission des lésions professionnelles accueille sa requête. Elle révise la décision du 30 juillet 2004 et déclare que l'emploi de caissière à la billetterie constitue un emploi convenable pour madame Ricard.

[17]           Dans les motifs qu'elle énonce au soutien de sa conclusion, la commissaire qui rend cette décision (la deuxième commissaire) prend appui sur la définition suivante de l'emploi convenable que l'on retrouve à l'article 2 de la loi :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:

 

« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27.

 

 

[18]           Elle écrit :

[13]      Le décideur initial considère donc que la lésion professionnelle dont fut victime la travailleuse ne rend pas cette dernière inapte à exécuter l’emploi convenable retenu.

 

[14]      Or, les mots « compte tenu de sa lésion » de l’article 2 précité, font référence, sans ambiguïté, aux conséquences d’une lésion professionnelle sur la capacité résiduelle d’un travailleur à exécuter un emploi déterminé.

[15]      Il est exact, comme le mentionne le décideur initial, que l’évaluation de la capacité d’un travailleur à exercer un emploi doit tenir compte de limitations physiques ou psychologiques de nature personnelle, en vertu de la règle du crâne fragile, mais ce sont des éléments qui entrent en ligne de compte uniquement s’ils existent au moment de la survenance de la lésion professionnelle et non au moment de l’évaluation de la capacité d’un travailleur à exercer un emploi convenable.

 

[16]      Pour le tribunal, il s’agit de la seule interprétation logique compte tenu de l’objectif de la loi tel qu’édicté à l’article 1 :

 

1. La présente loi a pour objet la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires.

 

Le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d'une lésion, la réadaptation physique, sociale et professionnelle du travailleur victime d'une lésion, le paiement d'indemnités de remplacement du revenu, d'indemnités pour préjudice corporel et, le cas échéant, d'indemnités de décès.

 

La présente loi confère en outre, dans les limites prévues au chapitre VII, le droit au retour au travail du travailleur victime d'une lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 1; 1999, c. 40, a. 4.

 

[17]      Si le tribunal prend en considération une incapacité personnelle développée à la suite de la survenance d’une lésion professionnelle, un travailleur bénéficierait de droits prévus par la loi qui ne sont pas reliés de façon directe ou indirecte à une lésion professionnelle.

 

[18]      Par contre, si le travailleur a des incapacités d’ordre personnel lorsque survient une lésion professionnelle, ces incapacités entrent en ligne de compte pour la détermination d’un emploi convenable puisqu’au moment de la lésion professionnelle, ces incapacités ne le rendaient pas inapte à exécuter l’emploi qu’il occupait.

 

[19]      La Commission des lésions professionnelles considère ainsi que le décideur initial a erré en droit de façon manifeste et qu’il y a lieu de réviser la décision du 30 juillet 2004 et de rendre la décision qui aurait dû être rendue.

 

 

[19]           Au soutien de sa requête, madame Ricard prétend que la deuxième commissaire a commis une erreur de droit manifeste et déterminante en substituant son interprétation de la notion de capacité résiduelle à celle retenue par le premier commissaire.

L’AVIS DES MEMBRES

[20]           Le membre issu des associations d'employeurs et la membre issue des associations syndicales sont d'avis que la requête doit être accueillie. Ils estiment que la prétention de madame Ricard est bien fondée et qu'il y a lieu de révoquer la décision rendue le 14 juin 2005.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[21]           La Commission des lésions professionnelles doit décider s'il y a lieu de révoquer la décision rendue le 14 juin 2005.

[22]           Le pouvoir de la Commission des lésions professionnelles de réviser ou révoquer une décision qu'elle a rendue est prévu par l'article 429.56 de la loi, lequel se lit comme suit :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1°   lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

2°   lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3°   lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[23]           Cet article apporte une dérogation au principe général énoncé par l'article 429.49 de la loi voulant qu’une décision de la Commission des lésions professionnelles soit finale et sans appel. La décision ne peut être révisée ou révoquée que si l’un des motifs prévus par l’article 429.56 est établi.

[24]           Madame Ricard invoque le troisième motif, soit que la décision rendue le 30 juillet 2004 comporte un vice de fond qui est de nature à l'invalider.

[25]           La jurisprudence assimile cette notion de « vice de fond qui est de nature à invalider une décision » à une erreur manifeste de fait ou de droit qui a un effet déterminant sur le sort du litige[2]. Elle précise par ailleurs qu’il ne peut s'agir d'une question d'appréciation de la preuve ni d'interprétation des règles de droit, parce que le recours en révision n'est pas un second appel[3].

[26]           Dans l'arrêt Bourassa c. Commission des lésions professionnelles[4], la Cour d'appel rappelle ces règles comme suit :

[21]      La notion (de vice de fond de nature à invalider une décision) est suffisamment large pour permettre la révocation de toute décision entachée d'une erreur manifeste de droit ou de fait qui a un effet déterminant sur le litige. Ainsi, une décision qui ne rencontre pas les conditions de fond requises par la loi peut constituer un vice de fond.

 

[22]      Sous prétexte d'un vice de fond, le recours en révision ne doit cependant pas être un appel sur la base des mêmes faits. Il ne saurait non plus être une invitation faite à un commissaire de substituer son opinion et son appréciation de la preuve à celle de la première formation ou encore une occasion pour une partie d'ajouter de nouveaux arguments1.

_______________

1.       Voir: Y. OUELLETTE, Les tribunaux administratifs au Canada, Procédure et Preuve, Montréal, Les Éditions Thémis, 1997, p. 506-508.  J.P. VILLAGI, dans Droit public et administratif, Vol. 7, Collection de droit 2002-2003, Éditions Yvon Blais, 2002, p. 127-129.

 

 

[27]           Récemment, dans l'arrêt CSST c. Fontaine[5] (l'arrêt Fontaine), la Cour d'appel réitère sa position. Pour le juge Morissette qui rédige les motifs de l'arrêt, l'exercice trop libéral du pouvoir de révision peut compromettre les objectifs de qualité, de célérité et d'accessibilité poursuivis par la justice administrative et cette situation commande de ne pas recourir à la légère à la notion de vice de fond pour réviser une décision. Il écrit :

[41]      […] La jurisprudence de notre Cour, sur laquelle je reviendrai, est à juste titre exigeante sur ce point. La faille que vise cette expression dénote de la part du décideur une erreur manifeste, donc voisine d'une forme d'incompétence, ce dernier terme étant entendu ici dans son acceptation courante plutôt que dans son acceptation juridique.

 

 

[28]           Après avoir fait état des positions adoptées dans certaines décisions, il conclut dans les termes suivants :

On voit donc que la gravité, l'évidence et le caractère déterminant d'une erreur sont des traits distinctifs susceptibles d'en faire un «vice de fond de nature à invalider [une] décision».

 

[51]      En ce qui concerne la raison d'être de la révision pour un vice de fond de cet ordre, la jurisprudence est univoque. Il s'agit de rectifier les erreurs présentant les caractéristiques qui viennent d'être décrites. Il ne saurait s'agir de substituer à une première opinion ou interprétation des faits ou du droit une seconde opinion ni plus ni moins défendable que la première [51].

_______________

[51]         Voir l'arrêt Godin, supra, note 11, paragr. 47 (le juge Fish) et 165 (le juge Chamberland) et l'arrêt Bourassa, supra, note 10, paragr. 22.

[29]           La Cour d'appel reprend cette notion d'erreur grave, évidente et déterminante dans l'arrêt CSST c. Toulimi rendue subséquemment[6] :

[5]        Il ressort nettement de l’arrêt Fontaine qu’une décision attaquée pour motif de vice de fond ne peut faire l’objet d’une révision interne que lorsqu’elle est entachée d’une erreur dont la gravité, l’évidence et le caractère déterminant ont été démontrés par la partie qui demande la révision.

 

 

[30]           Comme l'indique la Commission des lésions professionnelles dans la décision Savoie et Camille Dubois (fermé)[7], ces décisions de la Cour d'appel n'ont pas pour effet de modifier le critère de l'erreur manifeste et déterminante adopté par la jurisprudence pour définir la notion de vice de fond, mais ils invitent à une très grande retenue dans l'exercice du pouvoir de révision.

[31]           La commissaire qui rend cette décision écrit à ce sujet :

[17]      La soussignée estime qu’effectivement le critère du vice de fond, défini dans les affaires Donohue et Franchellini comme signifiant une erreur manifeste et déterminante, n’est pas remis en question par les récents arrêts de la Cour d’appel. Lorsque la Cour d’appel écrit que «la gravité, l’évidence et le caractère déterminant d’une erreur sont des traits distinctifs susceptibles d’en faire «un vice de fond de nature à invalider une décision», elle décrit la notion en des termes à peu près identiques. L’ajout du qualificatif «grave» n’apporte rien de nouveau dans la mesure où la Commission des lésions professionnelles a toujours recherché cet élément aux fins d’établir le caractère déterminant ou non de l’erreur.

 

[18]      Toutefois, l’invitation à ne pas utiliser la notion de vice de fond à la légère et surtout l’analyse et l’insistance des juges Fish et Morrissette sur la primauté à accorder à la première décision et sur la finalité de la justice administrative, invitent et incitent la Commission des lésions professionnelles à faire preuve d’une très grande retenue. La première décision rendue par la Commission des lésions professionnelles fait autorité et ce n'est qu'exceptionnellement que cette décision pourra être révisée.

 

 

[32]           Ce devoir de retenue est particulièrement imposé à la Commission des lésions professionnelles lorsque ce qui est visé par la requête concerne une question d'appréciation des faits ou d'interprétation du droit.

[33]           Comme dans l'arrêt Fontaine, la présente affaire soulève essentiellement une question d'interprétation des dispositions de la loi et plus particulièrement, de la notion de capacité résiduelle que la CSST doit prendre en compte lorsqu'elle détermine un emploi convenable pour un travailleur.

[34]           L'approche adoptée par le premier commissaire s'appuie sur la jurisprudence. La deuxième commissaire ne pouvait écarter son interprétation et y substituer la sienne, parce qu'elle n'était d'accord avec les conclusions auxquelles en vient le premier commissaire.

[35]           Le tribunal estime qu'en ce faisant, la deuxième commissaire commet une erreur manifeste et déterminante de droit, ce qui justifie de révoquer la décision du 14 juin 2005.

[36]           En conséquence, la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 30 juillet 2004, laquelle déclare que l'emploi de caissière de billetterie ne constitue pas un emploi convenable pour madame Ricard, est rétablie.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête en révocation de madame Johanne Ricard;

RÉVOQUE la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 14 juin 2005;

RÉTABLIT la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 30 juillet 2004.

 

 

 

__________________________________

 

Claude-André Ducharme

 

Commissaire

 

 

 

 

Me Michel Cyr, avocat

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Sonia Sylvestre

PANNETON LESSARD

Représentante de la partie intervenante

 



[1]          L.R.Q. c. A-3.001.

[2]          Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733 ; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783 .

[3]          Sivaco et C.A.L.P., [1998] C.L.P. 180 ; Charrette et Jeno Neuman & fils inc., C.L.P. 87190-71-9703, 26 mars 1999, N. Lacroix.

[4]          C.A. Montréal, 500-09-011014-016, 28 août 2003, jj. Mailhot, Rousseau-Houle, Rayle.

[5]          [2005] C.L.P. 626 (C.A.).

[6]          C.A. 500-09-015132-046, 6 octobre 2005, jj. Robert, Morissette, Bich, 05LP-159.

[7]          C.L.P., 224235-63-0401, 12 janvier 2006, L. Nadeau.

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