COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Montréal

MONTRÉAL, le 30 mai 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

124912-71-9910

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Huguette Rivard

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Claude White

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

François Patry

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

115949810-1

AUDIENCE TENUE LE :

3 mai 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Montréal

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

FARADHIA MERLIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CINÉPLEX ODÉON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CSSTt - Montréal 4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 30 septembre 1999, madame Faradhia Merlin (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 21 septembre 1999 à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 22 avril 1999 et déclare que la travailleuse n’a pas subi une lésion professionnelle le premier décembre 1998.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[3]               Après s’être présentées à l’audience tenue devant la Commission des lésions professionnelles le 3 mai 2000, les parties ont demandé à la Commission des lésions professionnelles de rendre une décision selon les éléments contenus au dossier et au rapport d’enquête effectué par monsieur Raymond Fournier, enquêteur de la CSST, produit sous la cote E-1.

[4]               La travailleuse demande donc à la Commission des lésions professionnellesde reconnaître qu’elle a subi une lésion professionnelle le premier décembre 19998.

LES FAITS

[5]               Il appert du dossier constitué d’un rapport de police, du rapport d’enquête de monsieur Fournier, tel que plus haut mentionné, avec les versions de la gérante de l’établissement où travaillait la travailleuse de même que des employés qui étaient présents le soir de l’événement et du dossier de la CSST tel que constitué que la travailleuse était préposée au comptoir à bonbons depuis trois ans chez l’employeur et que le premier décembre 1998, elle a été victime d’une agression sur les lieux du travail. 

[6]               Il appert du dossier que la travailleuse avait une amie du nom de Mélissa qui lui avait parlé de son nouveau copain.  Ce copain s’avérait être le frère d’une collègue de travail de la travailleuse.  La collègue en question a fait part à la travailleuse de propos concernant les activités illicites de son frère et la travailleuse en a fait part à son amie par téléphone qui ne semblait pas avoir apprécié.  Un soir, la travailleuse a rencontré le frère de sa collègue de travail et copain de son amie et ce dernier s’est adressé à elle d’une façon très agressive à l’effet qu’elle disait à tout le monde des choses à son sujet.  Il l’aurait alors menacé en lui disant qu’il savait où elle demeurait et avait son numéro de téléphone.

[7]               La travailleuse a tenté par la suite de rejoindre son amie mais elle n’a pu le faire et a dû passer par l’intermédiaire de quelqu’un d’autre.  Son amie lui a laissé un message sur son répondeur téléphonique à l’effet qu’elle ne voulait plus entendre parler d’elle.

[8]               Le premier décembre 1998, l’amie de la travailleuse est venue au cinéma en compagnie de son copain.  La travailleuse est allée voir son amie et a voulu lui parler mais celle-ci ne voulait rien savoir.  Son copain a alors menacé la travailleuse en lui disant de se fermer et en menaçant aussi de la frapper.

[9]               Son amie et le copain de cette dernière sont allés voir le film de 9 heures.  Vers 9.50 heures la travailleuse a commencé à fermer la boutique de bonbons.  Alors qu’elle est en train de remettre les bouteilles de boisson gazeuse dans le réfrigérateur, elle voit passer son amie accompagnée de son copain.  Ce dernier demande à la travailleuse de sortir.  Celle-ci répond « non ».  Il est alors rentré au comptoir de bonbons et la travailleuse avait des bouteilles de boisson gazeuse dans les mains.  Elle a déposé une bouteille mais a gardé l’autre dans sa main.  Il en a pris une également.  Des propos se sont échangés et il l’a bousculée.  Elle a tenté d’éviter ses poussées et ils sont sortis du comptoir.  Il l’a giflée, il l’a tenue par le col de sa chemise et la bagarre a commencé.  Deux collègues de travail sont intervenus afin d’éloigner le type en question.  Lorsqu’une personne a finalement réussi à les séparer, il a sorti son couteau et a lacéré la travailleuse au visage.  L’amie de la travailleuse n’a rien fait pour intervenir.

[10]           La travailleuse était ensuite sous le choc et ne pouvait pas vraiment parler.  Elle n’a pas rempli de rapport de police et les ambulanciers sont arrivés.  Elle ne voulait pas partir en ambulance.  Les ambulanciers lui ont alors fait signer un papier et sont partis.  Un peu plus tard, elle s’est levée pour partir mais elle a perdu connaissance.  À son réveil, quelques minutes plus tard, elle a fait une crise d’asthme et les ambulanciers ont été rappelés.  Elle a été transportée à l’hôpital Royal Victoria où on lui a fait quatre points de suture.

[11]           Le 4 décembre, elle est retournée au travail.  Elle a commencé à ressentir que les gens avaient l’impression que c’était de sa faute, que même sa gérante faisait des commentaires à l’effet qu’elle avait provoqué son agresseur.  On lui a également demandé de ne pas faire de réclamation à la CSST car sinon elle devrait se trouver un autre emploi.  Elle se sentait mal d’aller travailler mais elle n’avait pas le choix.  Une semaine après son accident, elle est retournée faire enlever ses points de suture au CLSC et a perdu connaissance.  Le médecin l’a informée que c’étaient ses nerfs puisqu’elle était encore sous le choc.  Le 12 décembre, elle est retournée à l’urgence et a rencontré un médecin qui lui a posé des questions sur la CSST et sur le bureau d’indemnisation des victimes d’actes criminels.

[12]           Le 6 janvier, elle a obtenu un rendez-vous avec le docteur Israël.  Elle ne voulait plus retourner au travail puisqu’elle ne se sentait pas bien.  Elle avait peur et se sentait suivie.  Il lui a donné trois semaines de congé de même qu’un papier de CSST pour qu’elle donne à son employeur.  L’accident est arrivé le premier décembre et ses examens commençaient le 7 décembre.  Elle a donc coulé six cours sur 8 et n’a pu rentrer au collège cette cession ce qui lui a fait perdre une année scolaire.

[13]           Il appert au dossier que la travailleuse a été vue le 2 décembre à 1.05 heure du matin pour diagnostic d’une lacération secondaire à un traumatisme, qu’on lui a fait des points de suture et on a noté une sensibilité au maxilaire.

[14]           Le 20 décembre, on diagnostique un syndrome de stress post-traumatique et un peu plus tard, on note des symptômes de dépression.  Le 6 janvier, le docteur Israël diagnostique un syndrome de stress post-traumatique et la réfère en psychothérapie.

L'AVIS DES MEMBRES

[15]           Le membre issu des associations syndicales ainsi que le membre issu des associations patronales sont d’avis que la travailleuse n’a pas subi une lésion professionnelle puisque la preuve a démontré que l’agression n’était pas survenue par le fait ou à l’occasion du travail de travailleuse.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[16]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la travailleuse a subi une lésion professionnelle le premier décembre 1998.

[17]           La lésion professionnelle et l’accident de travail sont définis ainsi à l’article 2 de la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles [1] (LATMP) (la loi) :

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation ;

 

 

«accident du travail» : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;

 

 

[18]           L’article 28 de la loi prévoit une présomption de lésion professionnelle en ces termes :

28. Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.

________

1985, c. 6, a. 28.

 

[19]           Il appert que si le travailleur fait la preuve des trois éléments constitutifs de la présomption, il n’a pas à faire la preuve d’un accident de travail. 

[20]           Cette présomption n’est cependant pas irréfragrable et peut être repoussée par une preuve prépondérante à l’effet que la blessure n’est pas survenue par le fait ou à l’occasion du travail, soit une preuve d’absence de relation.

[21]           Il appert de la preuve que la travailleuse connaissait l’agresseur qui était l’ami de cœur de sa meilleur amie et qu’elle avait eu des discussions avec cette dernière.  La Commission des lésions professionnelles constate que c’est à la suite de propos tenus à l’égard de l’agresseur qu’il y a eu mésentente et que ceci a été le motif de l’agression et la cause de l’événement.

[22]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que bien que survenu sur les lieux du travail, cet événement n’est pas survenu par le fait ou à l’occasion du travail de la travailleuse mais bien par le fait d’un conflit existant entre cette dernière et l’agresseur de même que l’amie de ce dernier.

[23]           Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il n’a pas été démontré qu’il s’agissait d’une lésion professionnelle et qu’en conséquence la travailleuse n’a pas droit aux bénéfices prévus par la loi.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de madame Faradhia Merlin, la travailleuse;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 21 septembre 1999 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle le premier décembre 1998.

 

 

 

Me Huguette Rivard

 

Commissaire

 

 

 

 

 

CENTRE PROFESSIONNEL, C.G.S.S.T.

(M. Yvon Parent)

4929, rue Jarry Est, suite 206

Saint-Léonard (Québec)

H1R 1Y1

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

HEENAN BLAIKIE

(Me Claude Martin)

1250, rue René-Lévesque Ouest,

Montréal (Québec)

H3B 4Y1

 

Représentant de la partie intéressée

 

PANNETON, LESSARD

(Me Marie-Claude Pilon)

1, complexe Desjardins, 31 ième étage

Montréal (Québec)

H5B 1H1

 

Représentant de la partie intervenante

 



[1]           (L.R.Q.c.A.-3.001)

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.