Beaulieu et Université Laval |
2007 QCCLP 3478 |
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[1] Le 28 février 2007, monsieur Michel Beaulieu (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), le 31 janvier 2007, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme la décision initialement rendue le 30 octobre 2006, à l’effet de refuser de rembourser les coûts suivants, soit ceux requis à l’exécution de la tonte de la pelouse, à l’été 2005 ainsi que les coûts d’achat d’une souffleuse à neige pour l’hiver 2005-2006, d’une tondeuse électrique et d’une débroussailleuse, pour l’été 2006.
[3] Une audience est tenue à Québec, le 6 juin 2007, en présence du travailleur et de son représentant. L’Université Laval (l’employeur) est absent, bien que dûment convoqué. Des représentations écrites sont toutefois soumises, en date du 4 juin 2007. Le témoignage du travailleur est entendu.
[4] La cause est mise en délibéré le 6 juin 2007.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[5] Le représentant du travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision rendue le 31 janvier 2007 et de déclarer que le travailleur a droit au remboursement des frais encourus pour faire effectuer l’entretien de sa pelouse au cours de l’été 2005 ainsi qu’au remboursement des déboursés effectués pour l’achat d’une tondeuse électrique, d’une débroussailleuse et d’une souffleuse à neige.
L’AVIS DES MEMBRES
[6] Le membre issu des associations de travailleurs et le membre issu des associations d’employeurs sont d’avis que la Commission des lésions professionnelles devrait maintenir la décision rendant le 31 janvier 2007 à l’effet de refuser le remboursement des frais encourus pour faire effectuer les travaux d’entretien de la pelouse au cours de l’été de 2005.
[7] En effet, la CSST n’est pas en mesure d’apprécier, pour cette période, si la lésion professionnelle subie par le travailleur permet l’octroi d’une atteinte permanente grave. En effet, le rapport final ne fut complété qu’en avril 2006.
[8] De plus, tel que plus amplement précisé au rapport d’évaluation médicale complété par le docteur Belzile, le 31 mars 2006, la lésion ne fut consolidée qu’en date du 27 mars 2006. La limitation fonctionnelle alors énoncée par le docteur Belzile est la suivante : le travailleur doit éviter tout travail répétitif à la hauteur ou au-dessus de son épaule gauche et ce, en ajout à l’octroi d’une atteinte permanente de 7,4 %.
[9] Manifestement, la CSST ne pouvait déterminer, pour l’été 2005, et ce, en respect des conditions énoncées à l’article 165 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), si la lésion professionnelle subie par le travailleur avait généré une atteinte permanente grave.
[10] Or, il s’agit d’une condition essentielle qui fut prévue par le législateur aux fins de déterminer si le travailleur a droit au remboursement des frais engagés pour faire exécuter les travaux d’entretien courant de son domicile.
[11] Les membres sont tous deux d’avis, par contre, que le travailleur s’avère incapable d’effectuer, à compter de 2006, les travaux d’entretien courant de son domicile.
[12] Aussi, considèrent-ils que le travailleur aurait pu avoir droit au remboursement des frais encourus pour faire effectuer la tonte de la pelouse, par un tiers, pour l’été 2006 et le déneigement à l’hiver 2005-2006, à la condition, toutefois, de présenter, à l’appui, des factures justifiant les déboursés encourus. Or, tel n’est pas le cas, en l’espèce.
[13] Aussi, le libellé de l’article 165 de la loi requiert que de telles pièces justificatives soient présentées annuellement.
[14] Le membre issu des associations de travailleurs est d’avis, pour sa part, que le travailleur a droit au remboursement des frais encourus pour l’acquisition de l’appareillage suivant, soit une tondeuse électrique, une débroussailleuse et une souffleuse à neige. À l’appui, il réfère aux articles 151 et suivants de la loi, soit plus particulièrement à l’article 152 de la loi. À son avis, cet appareillage permet assurément au travailleur de redevenir autonome dans l’accomplissement de ses activités habituelles.
[15] Sur cet aspect, le membre issu des associations d’employeurs est d’avis contraire. Celui-ci maintient que l’article 165 de la loi prévoit, de façon spécifique, le droit au remboursement des frais engagés pour faire effectuer les travaux d’entretien courant du domicile et qu’il faut référer aux conditions y prévues pour statuer sur l’admissibilité de la réclamation.
[16] Cette disposition est d’ailleurs insérée dans le chapitre de la réadaptation au sein duquel l’article 152 de la loi ne fait qu’annoncer, au préalable, ce que peut comprendre un programme de réadaptation sociale, soit, entre autre, le remboursement du coût des travaux d’entretien courant du domicile.
[17] Or, cette disposition ne permet pas, à elle seule, de statuer sur le droit au remboursement car il faut ensuite référer aux conditions énoncées à l’article 165 de la loi.
[18] Aussi, tel qu’établi par la jurisprudence qui évolue au sein de la Commission des lésions professionnelles, l’article 165 de la loi ne prévoit pas le remboursement des frais requis pour l’achat d’équipement, mais plutôt pour faire effectuer, par un tiers, les travaux d’entretien courant du domicile.
[19] Aussi, seul le remboursement des frais réellement encourus pour l’exécution de ces travaux, par un tiers, peut être effectué par la CSST. De plus, la loi prévoit un montant maximum que la CSST est tenue de rembourser.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[20] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a droit au remboursement des frais encourus pour faire effectuer la tonte de sa pelouse, au cours de l’été 2005. Elle doit ensuite apprécier si le travailleur a droit au remboursement des frais encourus pour l’achat d’une tondeuse électrique, d’une débroussailleuse et d’une souffleuse à neige.
[21] Aux fins de l’apprécier, la Commission des lésions professionnelles retient de l’ensemble de la preuve documentaire et testimoniale, les éléments pertinents suivants :
[22] Par le biais d’une décision rendue le 2 juin 2005, la CSST reconnaît que le travailleur est atteint d’une maladie professionnelle (une capsulite à l’épaule gauche), à compter du 6 février 2005.
[23] À cette date, le travailleur occupe un emploi de peintre en bâtiments, soit un emploi par le biais duquel il a développé des douleurs au niveau de son épaule gauche et ce, après avoir manipulé plus spécifiquement des plaques métalliques.
[24] Le travailleur est gaucher et la lésion, telle que spécifiée au cours du suivi médical initié depuis février 2005, est une tendinopathie au niveau de la coiffe des rotateurs avec bursite sous-acromiale et ce, au niveau de l’épaule gauche.
[25] Le 27 mars 2006, le travailleur est évalué par le docteur Sylvain Belzile, chirurgien orthopédiste. Celui-ci conclut que la lésion professionnelle est consolidée en date du 27 mars 2006. À l’examen, il constate que la tendinite a généré une légère ankylose des amplitudes articulaires en élévation antérieure, en abduction et en rotation interne.
[26] Aussi, octroie-t-il un déficit anatomophysiologique total de 6,5 % et retient la limitation fonctionnelle permanente suivante : le travailleur devrait éviter tout travail répétitif à la hauteur ou au-dessus de son épaule gauche.
[27] Le 1er mai 2006, la CSST rend une décision par le biais de laquelle elle reconnaît que la lésion professionnelle a généré une atteinte permanente à l’intégrité physique de 7,4 %.
[28] Le 13 juillet 2006, le représentant du travailleur, monsieur Martin Genest, adresse une lettre à la CSST, au sein de laquelle il expose ce qui suit :
« (…)
Durant la saison estivale 2005, M. Beaulieu a utilisé les services d’une personne extérieure pour effectuer la tonte de pelouse et le débroussaillage. Nous vous avons déjà présenté la facture datée du 13 juin 2006 au montant de 400.00$.
Puis durant la saison hivernale suivante, le travailleur qui pelletait sa neige auparavant, a du se résoudre à acheter une souffleuse à neige avec démarreur électrique au montant de 1378.00$, à la place de payer une compagnie de déneigement.
Durant la présente saison estivale de 2006, à la place de payer une compagnie pour faire la tonte de pelouse et le débroussaillage, M. Beaulieu a remplacé ses équipements à gaz et s’est acheté une tondeuse électrique (avec son fil de coupe correspondant) au montant total de 293.26$.
Ces trois appareils ont été achetés dans le but de permettre au travailleur de lui laisser l’opportunité de faire lui-même ses travaux d’entretien courant à son domicile, travaux qu’il faisant auparavant avant sa lésion professionnelle. Les appareils sont électriques, ne nécessitent pas d’effort pour les démarrer et respectent ainsi ses limitations fonctionnelles. »
[29] La grille d’évaluation des besoins d’aide pour les travaux d’entretien courant du domicile, telle que complétée par l’agente au dossier, fournit les informations suivantes : le travailleur est propriétaire de sa résidence et le terrain à entretenir est plat; ainsi, les exigences pour y effectuer la tonte de la pelouse sont évaluées à faibles. Elle considère donc que les mouvements nécessaires pour ratisser et utiliser le coupe bordure ne requièrent pas de maintenir une position à la hauteur ou au-dessus de la hauteur des épaules.
[30] Enfin, elle considère que le travail de la tonte de pelouse peut s’effectuer en ayant recours à des micro pauses. Sa conclusion est à l’effet que la CSST ne peut pas rembourser les frais encourus pour faire effectuer les travaux de tonte de pelouse, durant l’état 2005, et ce, au motif que le travailleur avait la capacité de le faire.
[31] Quant à l’activité de déneigement, l’agente convient que celle-ci contrevient aux limitations fonctionnelles émises. Par contre, la CSST n’a pas à rembourser les frais encourus pour l’achat d’équipement. Aussi, conclut-elle qu’elle doit refuser le remboursement des frais requis pour l’achat d’une souffleuse à neige, avec démarreur électrique.
[32] Aussi, retient-elle que le travailleur n’a pas fait appel, au cours de l’hiver 2005-2006, à un tiers et ce, pour faire effectuer le déneigement; par conséquent, les frais encourus pour le déneigement pour l’hiver 2005-2006 ne peuvent être remboursés.
[33] Quant à la tonte de la pelouse pour l’été 2006, le travailleur a décidé d’acheter de l’équipement électrique et ce, pour remplacer les équipements à gaz qu’il possédait. Le travailleur invoque qu’il est ainsi devenu capable d’effectuer lui-même la tonte de la pelouse puisqu’il dispose d’un équipement muni d’un démarreur électrique.
[34] L’agente note, par la même occasion, que le travailleur allègue qu’il n’est pas capable de démarrer manuellement ses vieux appareils. Or, pour la même raison que celle énoncée aux fins de refuser le remboursement de la souffleuse à neige, l’agente refuse également le remboursement des frais encourus pour l’achat d’une tondeuse électrique et d’une débroussailleuse.
[35] Par le biais de la note évolutive complétée le 4 novembre 2005, l’agente d’indemnisation rapporte le message qu’elle a laissé au travailleur.
« Je retournai appel et laisser message que la situation était identique à celle concernant la tonte de pelouse. T doit obtenir 2 soumissions, choisir la plus basse. Je recommande qu’il garde sa facture. La demande sera étudiée sur réception du RMF qui confirmera si T porteur d’a… donc admissible à la réadaptation. »
[36] Or, malgré cette information fournie au travailleur, ce dernier décide tout de même de procéder à l’achat d’appareillage électrique. Selon les factures produites, les achats ont été effectués aux dates suivantes : achat de la souffleuse, 11 novembre 2005; achat de la tondeuse et de la débroussailleuse, le 18 mai 2006.
[37] Dans la loi, le remboursement du coût des travaux d’entretien courant du domicile est prévu au sein du chapitre de réadaptation et ce, plus précisément dans le cadre de la réadaptation sociale.
[38] Les articles pertinents à considérer sont les suivants :
145. Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.
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1985, c. 6, a. 145.
146. Pour assurer au travailleur l'exercice de son droit à la réadaptation, la Commission prépare et met en oeuvre, avec la collaboration du travailleur, un plan individualisé de réadaptation qui peut comprendre, selon les besoins du travailleur, un programme de réadaptation physique, sociale et professionnelle.
Ce plan peut être modifié, avec la collaboration du travailleur, pour tenir compte de circonstances nouvelles.
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1985, c. 6, a. 146.
151. La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.
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1985, c. 6, a. 151.
152. Un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment:
1° des services professionnels d'intervention psychosociale;
2° la mise en oeuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle;
3° le paiement de frais d'aide personnelle à domicile;
4° le remboursement de frais de garde d'enfants;
5° le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.
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1985, c. 6, a. 152.
165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.
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1985, c. 6, a. 165.
[39] L’une des premières conditions énoncées par le législateur et ce, aux fins de pouvoir bénéficier du droit au remboursement des frais requis pour faire effectuer les travaux d’entretien courant du domicile est à l’effet que la lésion subie ait généré une atteinte permanente grave à l’intégrité physique ou psychique.
[40] Tel qu’établi par la Cour supérieure dans l’affaire Nova PD inc[2]. et C.A.L.P., l’article 145 prévoit que pour avoir droit à la réadaptation, le travailleur doit subir une atteinte permanente. En l’absence de cet élément essentiel, le droit s’avère inexistant.
[41] Par conséquent, le droit à la réadaptation naît à compter de la date de la consolidation de la lésion professionnelle et ce, si celle-ci génère une atteinte permanente.
[42] Or, cette atteinte permanente doit nécessairement être établie après consolidation de la lésion et ce, dans le cadre d’une évaluation médicale effectuée par le médecin traitant ou par celui désigné par ce dernier.
[43] La Commission des lésions professionnelles souscrit ainsi à la thèse selon laquelle le point de départ du droit à la réadaptation se situe juridiquement à la date à laquelle il est médicalement possible de déterminer l’existence de séquelles permanentes.[3]
[44] Enfin, tel que le rappelle la commissaire Louise Desbois dans l’affaire Gilles Langelier et Les entreprises André et Ronald Guérin ltée et CSST[4]. Il faut être en mesure de conclure que l’existence de séquelles permanentes ne pourra pas raisonnablement être remise en question, ultérieurement, dans le cadre de la procédure d’évaluation médicale. Son ampleur, sa description et le pourcentage d’atteinte permanente exact peuvent l’être sans que cela ne porte à conséquence quant au droit à la réadaptation mais il ne doit pas être raisonnablement prévisible que l’existence même d’une atteinte permanente puisse finalement être niée.
[45] Cela implique donc un certain degré de certitude quant au fait que le travailleur conservera une quelconque séquelle permanente des suites de sa lésion.
[46] Donc, en ce qui concerne plus particulièrement la mesure de réadaptation sociale prévue à l’article 165 de la loi, force est de constater que la présence non seulement d’une atteinte permanente est requise, mais il doit s’agir d’une atteinte permanente grave pour donner ouverture au droit qui y est prévu. La lecture des articles 145, 152 et 165 de la loi impose cette conclusion.
[47] En fait, pour avoir droit au remboursement du coût des travaux d’entretien courant du domicile, le travailleur doit démontrer :
· qu’il a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d’une lésion professionnelle;
et
· qu’il est incapable d’effectuer les travaux d’entretien courant de son domicile qu’il effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion.
[48] Or, cette notion d’atteinte permanente grave doit être interprétée en fonction de la capacité résiduelle du travailleur, à la suite de sa lésion professionnelle.
[49] En d’autres termes, la question est de savoir si l’atteinte permanente affectant le travailleur à la suite de sa lésion se traduit notamment par des limitations fonctionnelles assez graves pour l’empêcher d’exécuter lui-même les travaux.
[50] Quant à la notion de travaux d’entretien courant du domicile, il doit s’agir de travaux habituels ordinaires d’entretien par opposition à des travaux extraordinaires.
[51] Donc, concernant le moment à partir duquel le travailleur aurait subi une atteinte permanente grave, la Commission des lésions professionnelles doit référer au rapport d’évaluation médicale complété par le docteur Belzile, le 31 mars 2006.
[52] À la lueur de ce rapport, non seulement le déficit anatomophysiologique est suffisamment important, soit 6,5 %, mais la limitation fonctionnelle en cause traduit manifestement une incapacité du travailleur à pouvoir effectuer des travaux d’entretien courant du domicile, tels la tonte de la pelouse et le déneigement.
[53] En effet, cette limitation fonctionnelle est la suivante : soit que le travailleur doit éviter tout travail répétitif à la hauteur ou au-dessus de son épaule gauche. Or, tel que démontré par le travailleur, le démarrage manuel de ses anciens appareils impliquait de tirer de façon répétitive sur une corde et d’exécuter, par la même occasion, des mouvements contrevenant à la limitation fonctionnelle ci-haut.
[54] Compte tenu que ce rapport d’évaluation médicale qui donne les précisions nécessaires pour apprécier si l’atteinte permanente en cause présente un certain degré de gravité est postérieur à la période réclamée pour la tonte de la pelouse, soit l’été 2005, il apparaît évident que le travailleur ne peut avoir droit au remboursement des frais engagés, en 2005, pour faire effectuer ces travaux, par un tiers.
[55] En somme, la réclamation pour cette période s’avère prématurée. Par contre, si le travailleur s’était prévalu des services d’un tiers pour faire effectuer la tonte de la pelouse, en 2006, il apparaît évident que le droit au remboursement des frais encourus pour de tels services, pouvaient lui être reconnus. Or, tel n’est pas le cas soumis.
[56] En effet, le travailleur n’a pas été en mesure de fournir des pièces justificatives. Pour l’été 2006, il a préféré faire l’acquisition d’une tondeuse électrique ainsi que d’une débroussailleuse déclarant, par la même occasion, qu’il était ainsi redevenu capable d’effectuer lui-même la tonte de sa pelouse.
[57] Par conséquent, l’activité exercée à l’aide de cet appareillage ne se veut plus contraire à la limitation fonctionnelle émise par le docteur Belzile. Or, la Commission des lésions professionnelles rappelle que l’article 165 de la loi prévoit le remboursement pour les frais encourus pour l’exécution des travaux d’entretien courant par un tiers mais nullement le remboursement des frais encourus pour l’achat d’équipement.
[58] La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles a décidé dans ce sens, à maintes reprises,[5] D’ailleurs, la soussignée considère que l’article 165 de la loi comporte un libellé très clair.
[59] La Commission des lésions professionnelles considère donc que cette disposition ne permet nullement au travailleur d’obtenir le remboursement qu’il demande puisque le législateur a uniquement prévu le remboursement des frais engagés pour obtenir les services d’un tiers.
[60] Aussi, doit-on être en mesure de fournir à la CSST les pièces justificatives nécessaires. Une limite du montant est toutefois prévue. Le montant de 1 500 $ était celui qui était initialement prévu par la loi, en 1985. Toutefois, ce montant fut depuis revalorisé et ce, tel que le permet l’article 119 de la loi qui se lit comme suit :
119. La revalorisation est faite en multipliant le montant à revaloriser par le rapport entre l'indice des prix à la consommation de l'année courante et celui de l'année précédente.
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1985, c. 6, a. 119.
[61] Ainsi, le montant maximum, en 2005, pour les frais d’entretien courant du domicile, s’élevait à 2 597 $. À l’appui référence est faite à la décision rendue dans l’affaire Roch Plante et René Plante[6].
[62] Quant aux frais de déneigement auxquels le travailleur aurait pu avoir droit et ce, sur présentation de pièces justificatives démontrant qu’il ait fait appel aux services d’un tiers, force est de conclure que la Commission des lésions professionnelles doit confirmer la décision de la CSST lorsqu’elle refuse, en l’espèce, le remboursement du coût d’achat d’une souffleuse à neige et ce, aux lieu et place de frais déboursés pour faire effectuer le déneigement.
[63] Lors de son témoignage, le travailleur a expliqué qu’après vérification auprès de personnes effectuant de tels travaux de déneigement, les coûts requis s’élevaient à au moins 700 $ annuellement. Le travailleur a affirmé qu’il n’avait pas les moyens de débourser une telle somme et qu’il a donc préféré acheter une souffleuse à neige. Il précise que les modalités prévues pour s’acquitter du montant total de cet achat faisaient en sorte qu’il n’avait qu’à verser un montant minimum par mois.
[64] Le travailleur a affirmé, par la même occasion, qu’il s’est toujours occupé d’effectuer seul le déneigement et ce, avant la survenance de sa lésion professionnelle, en février 2005.
[65] Tout comme la tonte de la pelouse, la Commission des lésions professionnelles convient que l’activité de pelleter est une activité qui contrevient manifestement à la limitation fonctionnelle émise par le docteur Belzile.
[66] Aussi, y a-t-il lieu de considérer que la lésion professionnelle subie par le travailleur, en février 2005, comporte une atteinte permanente grave qui empêche le travailleur d’effectuer lui-même le déneigement qu’il aurait normalement effectué, n’eut été la survenance de sa lésion.
[67] Or, le travailleur n’a, en l’espèce, fourni aucune pièce justificative permettant de démontrer qu’il a engagé des frais pour faire exécuter les travaux de déneigement par un tiers. Au contraire, la facture soumise englobe plutôt les frais requis à l’achat d’une souffleuse à neige.
[68] Tel que préalablement motivé par la Commission des lésions professionnelles pour les fins de l’acquisition d’équipement nécessaire à la tonte de la pelouse, il y a lieu de conclure, à nouveau, que le travailleur n’a aucunement droit au remboursement des frais requis pour l’acquisition de la souffleuse à neige.
[69] La CSST n’a donc pas à défrayer le coût d’achat de cette souffleuse, son obligation se limitant à rembourser des frais raisonnables encourus pour faire effectuer le déneigement par un tiers.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête de monsieur Michel Beaulieu, le travailleur;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 31 janvier 2007, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que monsieur Michel Beaulieu n’a pas droit au remboursement des frais encourus pour effectuer l’entretien de sa pelouse, à l’été 2005;
DÉCLARE que monsieur Michel Beaulieu n’a pas droit au remboursement des frais encourus pour l’achat de l’équipement électrique nécessaire (tondeuse électrique, débroussailleuse et souffleuse à neige) pour effectuer la tonte de sa pelouse et le déneigement.
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CAROLE LESSARD |
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Commissaire |
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M. Éric-Jean Zubrzycki |
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S.C.F.P. |
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Représentant de la partie requérante |
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[1] L.R.Q., c. A-3.001.
[2] (1993) C.A.L.P. 327.
[3] Février et Win-Sir Textiles inc., 116590-73-9905, 11 novembre 1999, Y. Ostiguy; Thibault et Lucien Paré et Fils ltée, 115773-32-9905, 29 mars 2000, G. Tardif.
[4] 126249-01B-9910, 15 mars 2001.
[5] Daniel Cardinal et Maranda & Labrecque ltée, 124999-31-9910, 24 août 2000, H. Thériault; Normand Berthiaume et Villa Val des Arbres, 253880-64-0501, 9 décembre 2005, T. Demers; Charles Dallaire et Location R.S. Perfomax inc. et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 187577-07-0207, 31 juillet 2003, M. Langlois.
[6] 285719-31-063, 8 novembre 2006, H. Thériault.
AVIS :
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