Décision

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Modèle de décision CLP - octobre 2008

S.C. et Compagnie A

2009 QCCLP 4368

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Joliette

30 juin 2009

 

Région :

Lanaudière

 

Dossier :

329870-63-0710

 

Dossier CSST :

108766486

 

Commissaire :

Luce Morissette, juge administrative

 

Membres :

Jacynthe Fortin, associations d’employeurs

 

Robert P. Morissette, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

 

S... C...

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

[Compagnie A] (fermée)

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 11 octobre 2007, S... C... (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles (le tribunal) une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 25 septembre 2007, à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celles qu’elle a initialement rendues les 22, 26, 27 et 28 juin 2007. Elle déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des dépenses reliées à l’approvisionnement en bois de chauffage, au remboursement des frais d’électricité de son domicile, au remboursement des taxes municipales et au remboursement des frais d’achat et d’installation d’un système de filtrage d’eau, d’analyse de l’eau et d’entretien du système.

[3]           L’audience s’est tenue le 15 décembre 2008 à Joliette en présence du travailleur qui était représenté. La compagnie A est une entreprise fermée.

[4]           La cause a été mise en délibéré le 7 avril 2009 après que des documents manquants aient été produits.

 

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[5]           Le travailleur demande de reconnaître qu’il a droit au remboursement des dépenses reliées à l’approvisionnement en bois de chauffage et au remboursement des frais d’électricité de sa résidence. Il ne conteste plus le refus relié au remboursement des taxes municipales et celui d’un système de filtrage d’eau comprenant l’analyse et l’entretien du système.

 

LA PREUVE

[6]           À l’audience, le travailleur n’a pu témoigner du fait qu’il doit être étendu sur une civière et que cet appareillage ne pouvait être placé dans la salle d’audience. En conséquence, le tribunal a suggéré qu’il témoigne par le biais d’un affidavit, ce qui fut fait le 6 avril 2009.

[7]           Il convient de rapporter ce qui suit de cet affidavit puisqu’il décrit bien certains faits entourant la réclamation du travailleur :

1.     Le 16 janvier 1995, j’ai été victime d’un accident de travail au cours duquel j’ai chuté de trois étages lorsqu’un balcon sur lequel je prenais place a cédé;

 

2.     Cet accident m’a laissé quadriplégique et en raison de cette quadriplégie je souffre, entre autres, de frilosité excessive, tel que l’indique mon médecin à la page 348 du dossier de la Commission des lésions professionnelles;

 

3.     En juin 2002, j’ai fait l’acquisition de ma maison actuelle et au cours du printemps 2003 la Commission de la santé et de la sécurité du travail a défrayé les coûts d’adaptation de cette maison;

 

4.     Je n’ai pas habité la maison pendant les travaux d’adaptation et je suis retourné habiter dans ma maison en juillet 2003;

 

5.     Étant donné ma condition, ma maison est une maison à aire ouverte, c’est-à-dire, que je n’ai pas de chambre close, cela pour faciliter mon transport d’une pièce à l’autre, entre autres à la salle de bain;

 

6.     Pour palier à ma frilosité excessive, je dois, pendant les mois d’hiver surchauffer ma maison;

 

 

7.     Ma maison est équipée d’un chauffage au bois et d’un système de chauffage électrique;

 

8.     Il est pour moi insuffisant de surchauffer ma maison seulement avec le système électrique. D’abord, c’est un processus long, inconfortable et coûteux de surchauffer ma maison et d’obtenir un niveau de chaleur acceptable en utilisant seulement le système électrique car la maison étant à aire ouverte, je ne peux concentrer la chaleur à une seule pièce et je dois surchauffer la maison au complet avant d’obtenir une chaleur qui me convient dans ma chambre à coucher;

 

9.     Il est aussi très inconfortable pour moi de surchauffer ma maison seulement avec le système électrique étant donné que l’air ambiant devient très sec lorsque je surchauffe la maison seulement avec le système électrique;

 

10.  J’utilise donc le chauffage au bois, car j’ai la possibilité d’obtenir une chaleur qui m’est acceptable et confortable plus rapidement et plus efficacement étant donné qu’un des conduits du poêle à bois passe dans une garde-robe près de mon lit et qu’en gardant cette porte ouverte j’obtiens un niveau de chaleur suffisant et confortable;

 

11.  Étant donné que je passe la majeure partie de mon temps dans mon lit, le chauffage à bois me permet d’obtenir, dans la partie de la maison où est situé mon lit, un niveau de chaleur qui me permet de surmonter ma frilosité excessive et ce sans assécher l’air ambiant et sans devoir surchauffer le reste de la maison avec le système électrique;

 

12.  Je considère donc que le chauffage au bois est essentiel pour m’aider à surmonter les conséquences de ma lésion professionnelle.

 

 

 

[8]           Le dossier contient une note dans laquelle nous lisons que le travailleur est paralysé du milieu de la poitrine jusqu’au bout des orteils. La moitié inférieure du long de ses bras est paralysée ainsi que ses doigts. Le pourcentage de son atteinte permanente à l’intégrité physique a été établi à 312,10 %. Il y a lieu d’ajouter que la condition physique du travailleur ne s’est pas améliorée au fil des ans étant donné qu’il se déplace maintenant en civière comme le tribunal a pu lui-même le constater.

[9]           Il va sans dire que le fait d’être alité pratiquement tout le temps a des conséquences physiques, dont un problème de frilosité[1] diaphorèse[2] comme il a été noté par la docteure Céline Gaudet dans une note du 20 février 2004.

 

[10]        À ce sujet, le travailleur a demandé à la CSST de lui payer les frais associés à un séjour dans un pays chaud l’hiver. Cette demande a été refusée et la Commission des lésions professionnelles a maintenu ce refus dans une décision rendue le 7 juin 2006.[3] Toutefois, dans cette décision, le commissaire prend soin de noter qu’un système de chauffage bien contrôlé lui permettrait vraisemblablement de répondre à son besoin de surchauffer son domicile.

[11]        Le contenu de certaines notes évolutives de la CSST, et en particulier celles du 12 avril et 16 juin 2006, indique ce qui suit :

12 avril 2006

 

Une pompe circulatrice sera ajoutée afin que la chaleur du poêle à bois soit mieux redistribuée au rez-de-chaussée et surtout dans la chambre du travailleur.

 

 

16 juin 2006

 

Concernant le chauffage au bois, considérant que le travailleur a de la difficulté à contrôler sa température corporelle et a besoin d’une source de chaleur supplémentaire, considérant la décision de la CLP de juin 2006, nous acceptons de lui rembourser l’achat annuel de 12 cordes de bois.

 

 

[12]        Donc, la CSST avait accepté, en 2006, de rembourser les frais liés au chauffage au bois, mais lors du renouvellement de la demande du travailleur pour l’année 2007, elle refuse. Dans une note évolutive du 27 juin 2007, elle justifie ce refus par le fait que le chauffage au bois n’est pas le système de chauffage principal, tel que confirmé par la police d’assurance-habitation concernant le domicile du travailleur.

[13]        Le contrat d’assurance qui est au dossier démontre effectivement que le poêle à combustion lente n’est pas le moyen de chauffage principal.

[14]        Le 22 juin 2007, la CSST rend une décision refusant le remboursement des frais d’achat des cordes de bois de chauffage en indiquant qu’une telle demande ne répond pas à ses critères d’attribution. Cette décision a été contestée par le travailleur en révision administrative.

[15]        Dans sa décision rendue le 25 septembre 2007 à la suite d’une révision administrative, la CSST déclare, entre autres, que les coûts du bois de chauffage ne peuvent être remboursés parce que, d’une part, le chauffage au bois n’est pas admissible à titre de travaux d’entretien courant du domicile puisqu’il s’agit d’un chauffage d’appoint.

[16]        D’autre part, concernant l’application de l’article 184.5 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[4] (la loi), la CSST indique que cet article ne confère pas un droit au travailleur. Il s’agit d’un droit discrétionnaire et la CSST l’a utilisé dans le dossier.

[17]        Concernant les coûts d’électricité, le tribunal constate que la représentante du travailleur a produit simplement un relevé d’Hydro-Québec montrant la consommation d’électricité pour des périodes de temps distinctes.

[18]        Elle n’a soumis aucune évaluation d’un électricien concernant la consommation d’électricité engendrée par l’utilisation de certains appareils électriques ajoutés après les modifications au domicile, comme un lève-personne, un lit électrique, un ascenseur, etc.

[19]        Il y a lieu de rappeler que le travailleur a acheté sa maison au mois de juin 2002. Le 1er avril 2003, il la quitte temporairement pour cause de rénovations, et ce, jusqu’au 14 juillet 2003. C’est durant cette période que les équipements électriques auraient été installés.

[20]        Le document fourni par Hydro-Québec montre ce qui suit :

  DÉBUT             FIN                         PUISS.         PUISS.           PUISS.

PÉRIODE        PÉRIODE                  MAX APP     MAX APP     FACTUREE        CONSOM.      TOTAL

 

AA/MM/JJ      AA/MM/JJ      JRS        (KW)          (KVA)            (>50KW)          (KWH)         VENTES       TPS        TVQ       FACTURE

 

———————                  ———————    ———         ——————-   ——————-           ————————-     ———————-  ——————                      ———           ———   ———————-

 

03/10/31        04/01/12          73          .0                 .0                     .0                 7600          457.49         32.02     36.71         562.22

03/09/09        03/10/31          52          .0                 .0                     .0                 3020          181.38         12.70     14.56         208.64

03/07/14        03/09/09          57          .0                 .0                     .0                 2370          142.68           9.99     11.45         164.12

03/05/13        03/07/14          62          .0                 .0                     .0                 1960          118.31           8.28       9.49         136.08

03/03/14        03/05/13          60          .0                 .0                     .0                 5090          305.13         21.36     24.49         350.98

03/01/15        03/03/14          58          .0                 .0                     .0                 5650          338.53         23.70     27.17         389.40

02/11/05        03/01/15          71          .0                 .0                     .0                 5500          329.84         23.09     26.47         379.40

02/09/06        02/11/05          60          .0                 .0                     .0                 3070          184.54         12.92     14.81         212.27

02/07/09        02/09/06          59          .0                 .0                     .0                 2250          135.57           9.49     10.88         155.94

02/06/01        02/07/09          38          .0                 .0                     .0                 1470            88.56           6.20       7.11         101.87

 

 

        GRAND TOTAL           590                                                                        37980        2282.03       159.75   183.14       2624.92

 

 

 

[21]        Selon la représentante du travailleur, du 9 juillet 2002 au 15 janvier 2003, la consommation moyenne d’électricité quotidienne était de 57 kilowattheures. À compter du 14 juillet 2003 et jusqu’au 12 janvier 2004, elle s’établit plutôt à 71 kilowattheures. Elle qualifie cette augmentation de considérable.

L’AVIS DES MEMBRES

[22]        Le membre issu des associations d'employeurs et le membre issu des associations syndicales ont un avis unanime.

[23]        Ils accueilleraient la requête du travailleur concernant sa demande d’être remboursé pour les dépenses reliées à l’approvisionnement en bois de chauffage.

[24]        Ils retiennent que le travailleur a prouvé que cette demande n’est pas un caprice ou une demande futile. Il a démontré que le remboursement des frais pour le chauffage au bois lui permettra d’atténuer les conséquences de sa lésion professionnelle.

[25]        Toutefois, concernant le remboursement des coûts d’électricité que le travailleur demande, ils sont d’avis qu’il n’a pas fait la preuve que les installations ou les adaptations faites à son domicile ont causé une hausse des frais d’électricité. En conséquence, faute de preuve, sa demande à ce sujet doit être rejetée.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[26]        Dans un premier temps, la Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit au remboursement des dépenses liées à l’approvisionnement en bois de chauffage.

[27]        Il n’est pas contesté que le travailleur est lourdement handicapé et que la CSST lui fournit, depuis plusieurs années, différents types d’aide pour amoindrir les conséquences de sa lésion professionnelle qui, rappelons-le, a été grave.

[28]        Le chapitre IV de la loi prévoit aux articles 145 et 151 qu’un travailleur qui subit une atteinte permanente à son intégrité physique a droit à la réadaptation que requiert son état, dont des mesures de réadaptation sociale. À cet égard, l’article 152 de la loi prévoit ce qui suit :

152.  Un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment :

 

1° des services professionnels d'intervention psychosociale;

 

2° la mise en oeuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle;

 

3° le paiement de frais d'aide personnelle à domicile;

 

4° le remboursement de frais de garde d'enfants;

 

5° le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.

__________

1985, c. 6, a. 152.

 

 

[29]        De son côté, le paragraphe 5 de l’article 184, qui fait également partie du chapitre IV de la loi, énonce que :

184.  La Commission peut :

 

1° développer et soutenir les activités des personnes et des organismes qui s'occupent de réadaptation et coopérer avec eux;

 

 

2° évaluer l'efficacité des politiques, des programmes et des services de réadaptation disponibles;

 

3° effectuer ou faire effectuer des études et des recherches sur la réadaptation;

 

4° prendre toute mesure qu'elle estime utile pour favoriser la réinsertion professionnelle du conjoint d'un travailleur décédé en raison d'une lésion professionnelle;

 

5° prendre toute mesure qu'elle estime utile pour atténuer ou faire disparaître les conséquences d'une lésion professionnelle. (Notre soulignement)

 

Aux fins des paragraphes 1°, 2° et 3°, la Commission forme un comité multidisciplinaire.

__________

1985, c. 6, a. 184.

 

 

[30]        La jurisprudence du tribunal, que la soussignée partage, a indiqué que la « combinaison » des articles 145, 152 et 184 de la loi permet d’envisager une mesure sociale qui n’est pas spécifiquement énumérée à la loi, mais qui répond à l’objectif de la réadaptation sociale.[5]

[31]        Comme il a été rapporté dans la décision de la CSST rendue à la suite d’une révision administrative, celle-ci estime que le 5e alinéa de l’article 184 de la loi ne donne pas de droit au travailleur. Cela est vrai. Toutefois, comme la jurisprudence du tribunal l’a plus d’une fois rappelé, ce pouvoir discrétionnaire est sujet à être contesté en vertu de l’article 358 et éventuellement en vertu de l’article 359 de la loi.[6]

 

[32]        Également, la jurisprudence du tribunal indique que l’exercice de ce pouvoir n’est pas discrétionnaire. Cela signifie que la CSST n’est pas obligée d’accorder à un travailleur ce qu’il demande, mais elle doit tout au moins se demander si elle le fera.[7]

[33]        Or, dans le présent dossier, le tribunal est d’avis que la CSST, en rendant les décisions contestées comme elle l’a fait, et en particulier en indiquant simplement qu’elle avait « utilisé » son pouvoir discrétionnaire, n’a pas véritablement exercé ce pouvoir. En fait, le tribunal retient que la CSST ne s’est pas vraiment demandé si elle accorderait ou non au travailleur le remboursement des frais de chauffage au bois en regard du 5e alinéa de l’article 184 de la loi. Or, elle avait le devoir de rendre une décision en vertu de cet article.[8]

[34]        En regard de ce constat, la Commission des lésions professionnelles doit rendre la décision qui aurait dû être rendue, le tout en regard de l’article 377 de la loi qui prévoit ce qui suit :

377. La Commission des lésions professionnelles a le pouvoir de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l'exercice de sa compétence.

 

Elle peut confirmer, modifier ou infirmer la décision, l'ordre ou l'ordonnance contesté et, s'il y a lieu, rendre la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui, à son avis, aurait dû être rendu en premier lieu.

__________

1985, c. 6, a. 377; 1997, c. 27, a. 24.

 

 

 

[35]        Dans le présent litige, le travailleur demande le remboursement des frais qu’il encourt relativement à l’achat du bois de chauffage en expliquant qu’il doit, d’une part, surchauffer son domicile à aire ouverte. Il a bien expliqué les raisons pour lesquelles il utilise le chauffage au bois qui lui procure un confort accru. Il est clair que dans le cas du travailleur, il ne s’agit pas d’un caprice et que le chauffage au bois lui permet simplement de mieux supporter l’une des conséquences de sa paraplégie, soit la frilosité excessive due à une posture couchée à longueur de journée.

[36]        Ainsi, le tribunal est satisfait de la preuve qui a été faite et selon laquelle le fait de chauffer au bois permet au travailleur d’atténuer les conséquences de sa lésion professionnelle. En effet, il mentionne que ce chauffage combiné à celui électrique permet un confort accru dans la maison et en particulier dans sa chambre. Également, en tenant compte que le travailleur surchauffe sa maison à cause de sa frilosité excessive, sa prétention selon laquelle l’air ambiant est moins sec en combinant le chauffage au bois et l’électricité est également retenue.

[37]        Au surplus, le tribunal retient que le chauffage au bois procure une chaleur ciblée à la chambre du travailleur, endroit où il passe le plus clair de son temps puisqu’il est paraplégique.

[38]        Également, le fait de chauffer au bois en plus de chauffer par l’électricité s’inscrit parfaitement dans le sens de la suggestion faite par la Commission des lésions professionnelles au moment où elle rejetait la réclamation du travailleur pour qu’il séjourne au chaud durant la saison froide.

[39]        Finalement, il y a lieu de rappeler que la CSST a accepté de payer, en 2006, les frais encourus pour le chauffage au bois. Il est pour le moins incompréhensible qu’en 2007, elle refuse de le faire alors qu’elle a aussi accepté de payer pour l’installation d’une pompe permettant une meilleure circulation de la chaleur provenant du poêle à combustion lente.

[40]        De ces faits, le tribunal conclut que la demande du travailleur n’est pas un caprice ou une demande futile. Il a démontré que le remboursement des frais pour le chauffage au bois lui permettra d’atténuer les conséquences de sa lésion professionnelle. Il a donc droit au remboursement réclamé pour le chauffage en vertu de l’article 184.5 de la loi.

[41]        Il reste à décider si le travailleur a droit au remboursement des frais d’électricité. La représentante du travailleur invoque l’article 157 de la loi qui prévoit ce qui suit :

157.  Lorsque la Commission assume le coût des travaux d'adaptation du domicile ou du véhicule principal d'un travailleur, elle assume aussi le coût additionnel d'assurance et d'entretien du domicile ou du véhicule qu'entraîne cette adaptation.

__________

1985, c. 6, a. 157.

 

 

 

[42]        La représentante du travailleur est d’avis que cet article ne doit pas être interprété comme étant exclusif. En ce sens, elle dépose de la jurisprudence[9] selon laquelle la Commission des lésions professionnelles a accepté de déclarer que la CSST devait rembourser des frais afférents aux travaux d’adaptation d’un domicile. La soussignée est d’accord avec cette position jurisprudentielle.

[43]        Toutefois, la demande du travailleur ne peut être accueillie sur ce sujet puisqu’il n’a pas réussi à prouver que les coûts d’électricité de son domicile ont, d’une part, augmenté considérablement et que, d’autre part, la hausse qui est alléguée est en lien avec les travaux d’adaptation du domicile.

[44]        En effet, il y a une seule preuve qui a été produite concernant les frais d’électricité, soit la facture d’Hydro-Québec pour des périodes de temps ciblées.

[45]        En reprenant la chronologie des événements, nous constatons que le travailleur est retourné à son domicile après les rénovations vers le 14 juillet 2003. À compter de cette date et jusqu’au 9 septembre 2003, il a consommé 2370 kWh au coût de 142,68 $ alors que l’année d’avant, pour la même période, il avait consommé 2250 kWh par jour au coût de 135,57 $. La différence monétaire pour cette période s’établit donc à moins de 10 $.

[46]        Par la suite, du mois de septembre au mois de novembre 2002, le travailleur a consommé 3070 kWh alors qu’en 2003, il a consommé 3020 kWh. Il s’agit, à l’évidence, de montants très similaires.

[47]        En fait, c’est au cours de la période de novembre à janvier 2003, alors que le travailleur a consommé 7600 kWh pour un coût de 457,49 $ versus en 2002 où il a consommé 5500 kWh pour un coût de 329,84 $, qu’une hausse des coûts est démontrée.

[48]        Toutefois, cette période correspond aux mois durant lesquels le chauffage électrique est nécessairement plus élevé; il n’y a aucune preuve que c’est l’équipement installé lors des travaux d’adaptation qui a généré la hausse en question. D’ailleurs, le tribunal constate qu’à l’été 2003, la consommation d’électricité ressemblait beaucoup à celle de 2002 avant les travaux. Il y a donc absence de preuve que ce sont les travaux d’adaptation du domicile, dont l’installation d’équipements électriques, qui ont augmenté les coûts d’électricité. La requête du travailleur, à cet égard, doit être rejetée.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE en partie la requête de S... C..., le travailleur;

MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 25 septembre 2007, à la suite d’une révision administrative;

 

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement des dépenses reliées à l’approvisionnement en bois de chauffage;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais d’électricité de sa résidence.

 

 

__________________________________

 

LUCE MORISSETTE

 

 

 

 

Me Annie Robichaud

Laporte, Lavallée

Représentante de la partie requérante

 



[1]           Une frilosité réfère à une grande sensibilité au froid. Le Nouveau Petit Robert : dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, nouv. éd. remaniée et amplifiée, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1996, p. 974.

[2]           Il s’agit d’une transpiration abondante. Le Nouveau Petit Robert : dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, nouv. éd. remaniée et amplifiée, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1996, p. 638.

[3]           C.L.P. 244581-63-0409, J.-P. Arsenault.

[4]           L.R.Q., c. A-3.001.

[5]           Voir entre autres : Lefebvre et Carborundum Canada inc. (fermée), C.L.P. 219710-04-0311, 26 mars 2004, S. Sénéchal.

[6]           Ministère de l'Éducation et Goulet, C.A.L.P. 30349-03A-9107, 17 janvier 1994, M. Beaudoin, (J6-08-08) (décision sur requête en révision); Morin et Lavage camion citerne Universel inc., C.L.P. 130941 - 61-0002, 30 janvier 2001, S. Di Pasquale, (00LP-128); Reeves et Purdel coop agro-alimentaire, C.L.P. 112907-01B-9903, 29 mars 2001, P. Simard.

[7]           Gilmore et Air Canada, C.L.P. 287296-64-0604, 11 mai 2007, D. Armand.

[8]           Bissonnette et Équipement Moore ltée, [2005] C.L.P. 497 (décision sur une requête en révision).

[9]           Latulippe et Groupe de Construction National State inc., C.L.P. 129515-07-0001, 11 avril 2000, S. Lemire; Mathieu et Désourdy-Duranceau Entreprise inc., C.L.P. 130942-62A-0002, 30 mai 2000, C. Demers; Fontaine et Aéroport International de Montréal, C.L.P. 172476-64-0111, 14 février 2003, S. Lemire; Lefebvre et Carborundum Canada inc. (fermée), C.L.P. 219710-04-0311, 26 mars 2004, S. Sénéchal; Fontaine et Aéroport International de Montréal, C.L.P. 221816-64-0311, 26 janvier 2005, J.-F. Martel; Tessier et Métallurgie Noranda inc. (Horne) (fermée) et Noranda inc. (Fonderie Horne), C.L.P. 271409-08-0509, 7 mars 2006, S. Lemire.

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