Décision

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Normand et Georges Julien & Bédard inc.

2010 QCCLP 1311

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Québec

16 février 2010

 

Région :

Chaudière-Appalaches

 

Dossier :

390349-03B-0909

 

Dossier CSST :

126233634

 

Commissaire :

Monique Lamarre, juge administratif

 

Membres :

Alexandre Beaulieu, associations d’employeurs

 

Gilles Lamontagne, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Ronald Normand

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Georges Julien & Bédard inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 25 septembre 2009, monsieur Ronald Normand (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 11 septembre 2009 à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST maintient deux décisions qu’elle a initialement rendues les 8 juin et 15 juillet 2009 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais réclamés pour son déplacement chez l’audioprothésiste. Elle déclare également que le travailleur n’a pas droit au remboursement du coût d’achat d’un deuxième téléphone amplifié.

[3]                Une audience se tient à Lévis le 10 février 2010 en présence du travailleur.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit au remboursement de ses frais de déplacement chez l’audioprothésiste. Par ailleurs, il précise qu’il ne réclame plus le remboursement du coût d’achat d’un deuxième téléphone.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[5]                Le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d’employeurs sont tous les deux d’avis que le travailleur a droit au remboursement des frais de déplacement chez l’audioprothésiste. Ils retiennent de la preuve soumise à l’audience et qui est non contredite que, dans le passé, la CSST a toujours remboursé au travailleur les frais relatifs à ses déplacements pour les réparations de ses prothèses auditives. Or, étant donné l’importance de son atteinte auditive, le travailleur ne peut se passer de ses prothèses auditives et il doit nécessairement se déplacer pour les faire réparer. Il s’agit donc de frais remboursables en vertu des articles 115 et 198.1 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

 

LES FAITS ET LES MOTIFS

[6]                La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit au remboursement de ses frais de déplacement engagés pour la réparation de ses prothèses auditives.

[7]                Les dispositions pertinentes de la loi sont les suivantes :

115.  La Commission rembourse, sur production de pièces justificatives, au travailleur et, si son état physique le requiert, à la personne qui doit l'accompagner, les frais de déplacement et de séjour engagés pour recevoir des soins, subir des examens médicaux ou accomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation, selon les normes et les montants qu'elle détermine et qu'elle publie à la Gazette officielle du Québec.

__________

1985, c. 6, a. 115.

 

 

188.  Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.

__________

1985, c. 6, a. 188.

 

 

189.  L'assistance médicale consiste en ce qui suit :

 

1° les services de professionnels de la santé;

 

2° les soins ou les traitements fournis par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5);

 

3° les médicaments et autres produits pharmaceutiques;

 

4° les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons et la disposition des cadavres (chapitre L-0.2), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;

 

5° les soins, les traitements, les aides techniques et les frais non visés aux paragraphes 1° à 4° que la Commission détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.

__________

1985, c. 6, a. 189; 1992, c. 11, a. 8; 1994, c. 23, a. 23; 1999, c. 89, a. 53; 2001, c. 60, a. 166.

 

 

198.1.  La Commission acquitte le coût de l'achat, de l'ajustement, de la réparation et du remplacement d'une prothèse ou d'une orthèse visée au paragraphe 4° de l'article 189 selon ce qu'elle détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.

 

Dans le cas où une orthèse ou une prothèse possède des caractéristiques identiques à celles d'une orthèse ou d'une prothèse apparaissant à un programme administré par la Régie de l'assurance maladie du Québec en vertu de la Loi sur l'assurance maladie (chapitre A-29) ou la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec (chapitre R-5), le montant payable par la Commission est celui qui est déterminé dans ce programme.

__________

1992, c. 11, a. 11; 1999, c. 89, a. 53.

 

 

 

[8]                Les normes et montants auxquels fait référence l’article 115 de la loi sont contenus au Règlement sur les frais de déplacement et de séjour[2] (le règlement) dont voici des extraits :

1. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit au remboursement, selon les normes prévues au présent règlement et les montants prévus à l'annexe 1, des frais de déplacement et de séjour qu'il engage pour recevoir des soins, subir des examens médicaux ou accomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation conformément à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001).

 

Si l'état physique du travailleur le requiert, la personne qui doit l'accompagner a droit au remboursement des frais de déplacement et de séjour qu'elle engage, selon les mêmes normes et montants.

_________

 

Décision, 93-06-07, a. 1

 

 

[9]                Dans le présent cas, la preuve démontre que, le 7 février 2005, la CSST reconnaît que la surdité bilatérale dont est atteint le travailleur constitue une maladie professionnelle.

[10]           Le 8 février 2005, la CSST rend une décision par laquelle elle détermine que le travailleur demeure avec une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique de 64,80 %. L’évaluation de cette atteinte permanente est basée sur l’opinion du docteur Thériault qui précise que le travailleur présente une perte auditive très importante.

[11]           La preuve démontre que le travailleur porte des prothèses auditives dont le coût d’achat est assumé par la CSST. À l’audience, le travailleur déclare que ses prothèses auditives sont très fragiles et qu’elles ont régulièrement besoin d’être réparées. Il déclare que, dans le passé, la CSST a toujours remboursé ses frais de déplacement chez l’audioprothésiste pour la réparation de ses prothèses. Il précise qu’il ne peut se passer de ses prothèses auditives et qu’il n’a pas le choix de se déplacer pour les faire réparer. De plus, il ajoute qu’il fait affaire avec l’audioprothésiste qui est situé le plus près de son domicile.

[12]           Le 9 juillet 2009, selon la note évolutive au dossier, le travailleur indique à l’agente d’indemnisation qu’il ne comprend pas pourquoi la CSST refuse de payer tout à coup ses frais de déplacement chez l’audioprothésiste pour la réparation de ses prothèses alors qu’ils ont toujours été remboursés dans le passé. L’agente de la CSST explique au travailleur que les frais de déplacement chez l’oto-rhino-laryngologiste et chez l’audiologiste pour passer un audiogramme sont payables, mais pas ceux engagés pour aller chercher les prothèses auditives et pour les faire ajuster.

[13]           Dans le cadre de la décision de la CSST faisant suite à la révision administrative, la réviseure retient que le travailleur réclame des frais de déplacement pour l’ajustement de ses prothèses auditives et que ce type de frais n’est pas remboursable selon la loi et les règlements pertinents.

[14]           Or, la Commission des lésions professionnelles retient que, selon l’article 198.1 de la loi, la CSST acquitte le coût de l'achat, de l'ajustement, de la réparation et du remplacement d'une prothèse ou d'une orthèse visée au paragraphe 4° de l'article 189 de la loi.

[15]           Dans le présent cas, la preuve démontre que le travailleur présente une surdité très importante. En outre, la CSST a reconnu qu’il demeurait avec une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique de 68,80 % pour sa surdité professionnelle. Le travailleur déclare qu’il ne peut se passer de ses prothèses et que lorsque l’une d’elles se brise, il n’a d’autre choix que de se déplacer pour la faire réparer.

[16]           Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a droit au remboursement des frais de déplacement qui lui a été refusé pour la réparation d’une de ses prothèses. En effet, d’une part, la preuve non contredite démontre que, dans le passé, la CSST a toujours payé pour les frais de déplacement du travailleur lorsqu’il devait faire réparer une prothèse auditive. Par ailleurs, le tribunal retient de la preuve que le travailleur n’a d’autre choix que de se déplacer pour faire réparer sa prothèse auditive. Dans ce contexte, la Commission des lésions professionnelles estime que les frais de déplacement font partie des coûts de réparation d’une prothèse visée au paragraphe 4° de l'article 189 de la loi que la CSST doit acquitter en vertu des articles 198.1 et 115 de la loi .

[17]           Par conséquent, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a droit au remboursement de ses frais pour le déplacement chez l’audioprothésiste sur production des pièces justificatives.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

 

ACCUEILLE la requête de monsieur Ronald Normand, le travailleur;

MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 11 septembre 2009, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement des frais réclamés pour son déplacement chez l’audioprothésiste sur production des pièces justificatives.

 

 

 

 

 

Monique Lamarre

 

 

 

 

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]     (1993) 125 G.O. II 4257.

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