Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Laval

LAVAL, le 21 septembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

136575-61-0004

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Lucie Nadeau

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Alain Crampé

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Gaétan Forget

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

110312121

AUDIENCE TENUE LE :

20 juillet 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Laval

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

GINETTE GAGNÉ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROVIGO DISTRIBUTION INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE

LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 24 avril 2000, madame Ginette Gagné (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 16 mars 2000, à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a rendue initialement le 16 décembre 1999 dans laquelle elle déclarait que la travailleuse a droit à la réadaptation, à une série d’aides techniques et, à compter du 3 novembre 1999, à une allocation pour aide personnelle à domicile.

[3]               La travailleuse est présente à l’audience et est accompagnée de son mari.  L’employeur a avisé la Commission des lésions professionnelles de son absence à l’audience.  La CSST est intervenue au dossier et est représentée à l’audience.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[4]               La travailleuse conteste uniquement le point de départ du droit à l’aide personnelle à domicile.  Elle demande de reconnaître son droit à l’aide personnelle à compter du 10 juin 1997, date de sa sortie de l’hôpital après l’intervention chirurgicale qu'elle a subie.  L’évaluation de ses besoins et les montants auxquels elle a droit ne sont pas contestés.

LES FAITS

[5]               La travailleuse, actuellement âgée de 58 ans, a subi un accident du travail le 3 octobre 1995 qui a été reconnu par la CSST.  Elle travaillait comme commis-caissière et elle a fait une chute dans un escalier  lorsque le talon de sa chaussure s’est accroché dans un morceau de caoutchouc qui était brisé.  Un diagnostic d’entorse lombaire a d’abord été posé.  Le 29 janvier 1996, le docteur Hany Daoud, orthopédiste, membre du Bureau d’évaluation médicale, rend un avis dans lequel il conclut à un diagnostic de radiculite S1 gauche et lombalgie probable à L3-L4 et considère que la lésion n’est pas encore consolidée.  Il rapporte que la travailleuse a déjà subi, en 1991, une discoïdectomie L4-L5 et L5-S1, et, en 1992, une greffe basse probablement de L4 à S1.  La travailleuse serait retournée à son travail régulier en octobre 1993.  Le 16 février 1996, la CSST rend une décision faisant suite à cet avis précisant qu’il y a relation entre l’événement du 3 octobre 1995 et le diagnostic établi et elle continue de verser des prestations.

[6]                Un second avis du Bureau d’évaluation médicale est rendu, le 28 août 1996, par le docteur Hubert Labelle, orthopédiste.  Il retient comme diagnostics une entorse lombaire, une irritation radiculaire L5 ou S1 gauche, un status post-discoïdectomie et post-greffe lombo-sacrée antérieur à l’événement du 3 octobre 1995.  Selon lui, la lésion n’est pas encore consolidée.

[7]               Une discographie effectuée le 5 septembre 1996 révèle au niveau L3-L4 une fissure annulaire complète et une hernie discale.  Après différentes consultations médicales, la réflexion de la travailleuse elle-même et une évaluation demandée par la CSST au docteur Pierre R. Dupuis, orthopédiste, sur l’opportunité d’une troisième intervention chirurgicale telle que suggérée par son orthopédiste traitant le docteur Gilles Maurais, la travailleuse subit, le 2 juin 1997, une discoïdectomie antérieure et une greffe L3-S1 puis, dans un second temps, en postérieur une fusion L3 à S1 avec instrumentation de type euro.  La travailleuse entreprend des traitements de physiothérapie le 3 novembre 1997.

[8]               Le 5 décembre 1997, la travailleuse est évaluée par le docteur Jacques Gariépy, neurochirurgien, à la demande de la CSST.  Il rapporte qu’après l’intervention chirurgicale, la travailleuse fut immobilisée dans un corset pendant plus de quatre mois et a présenté un problème au niveau de sa plaie, ce qui l’a obligée à être traitée avec mèches et antibiothérapie pendant plus d’un mois et demi.  Il conclut qu’il n’est pas possible de penser à une consolidation de la lésion au moins avant six mois.  Il conclut toutefois qu’il «existe une atteinte permanente qu’il est impossible de quantifier à l’heure actuelle» et qu’il y aura sûrement des limitations fonctionnelles résultant de la lésion. Il ajoute même qu’il serait «surpris également de voir cette patiente faire un travail rémunérateur quelconque». Il évalue une atteinte permanente à l’intégrité physique «temporaire» à 29% pour les séquelles suivantes :

«Greffe lombosacrée, 3 espaces greffés:                       9%

 

Perte de 60° de la flexion antérieure:                 7%

 

Perte de 30° de l'extension:                              3%

 

Perte de 20° de la latéralisation droite:               2%

 

Perte de 20° de la latéralisation gauche:            2%

 

Perte de 20° de la rotation droite:                      3%

 

Perte de 20° de la rotation gauche:                    3%

 

                                                                      / 29%»

 

 

[9]               Le 26 janvier 1998, la CSST rend une décision par laquelle elle verse à la travailleuse une indemnité de 16 215$ qui correspond au montant minimal pour les séquelles de sa lésion étant donné qu’il est toujours médicalement impossible de déterminer toutes les séquelles deux ans après la manifestation de la lésion.  Elle ajoute que cette indemnité sera rajustée à la hausse, s’il y a lieu, dès qu’il sera possible de le faire.

[10]           La travailleuse poursuit ses traitements de physiothérapie et les rapports d’évolution indiquent une progression très lente en raison de la persistance des douleurs jusqu’au 20 mai 1998, date à laquelle le docteur Maurais met fin aux traitements devant un constat de détérioration. 

[11]           Le 13 avril 1999, le docteur Georges L'Espérance, neurochirurgien, examine la travailleuse à la demande de la CSST.  Il conclut à un diagnostic de «failed back surgery syndrome».  Il consolide la lésion à la date de son examen car aucun traitement actif ne peut apporter une amélioration de son état.  Il évalue l’atteinte permanente à 35%  soit 6% de plus que l’évaluation du docteur Gariépy en date du 5 décembre 1997 et, en précisant, que l’évaluation en relation avec la laparotomie et les cicatrices devra être faite en chirurgie.  Puis il détermine que la travailleuse conserve des limitations fonctionnelles qu’il qualifie de très sévères correspondant à une classe 4 de l’IRSST[1].

[12]           Le 14 juillet 1999, le docteur Yvon Drainville, médecin traitant de la travailleuse, écrit dans un rapport complémentaire qu’il est d’accord avec la date de consolidation déterminée par le docteur L'Espérance ainsi qu’avec son bilan des séquelles.  Il signale que la travailleuse ne peut rien faire de valable à la maison c’est-à-dire qu’elle ne peut préparer les repas et faire le ménage.

[13]            Le 3 septembre 1999, un autre avis est rendu par le docteur Hany Daoud, orthopédiste, membre du Bureau d’évaluation médicale sur les questions de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.  Il évalue les séquelles actuelles à 44 % soit  15% de plus que l’atteinte évaluée, à titre provisoire, par le docteur Gariépy en décembre 1997 et il recommande une évaluation en chirurgie pour la cicatrice abdominale. Les séquelles identifiées sont les suivantes :

«Description                                                                Dap%

Discoïdectomie chirurgicale trois espaces L3-L4,

L4-L5 et L5-S1                                                                       9 %

Trois espaces greffés L3-L4, L4-L5 et L5-S1               9 %

Flexion antérieure 30° retenus                                      7 %

Extension 0° retenu                                                     3 %

Flexion latérale droite 10° retenues                               2 %

Flexion latérale gauche 10° retenus                               2 %

Rotation droite 10° retenus                                           3 %

Rotation gauche 10° retenus                                         3 %

Déficit moteur classe II racine L5 gauche                     5 %

Déficit sensitif classe II racine L5 gauche                     1 %

                                                                                  44 %»

[14]           Le docteur Daoud  retient également les limitations fonctionnelles suivantes :

«- éviter de soulever, porter, pousser ou tirer seule de façon répétitive ou fréquente des charges dépassant 5 kilos à la fois ;

 

- éviter la marche de plus de 10 à 15 minutes à la fois ;

 

- éviter le travail en position de flexion du rachis lombo-sacré ;

 

- éviter les mouvements de flexion ou de torsion du rachis lombo-sacré.»

 

 

[15]           Le 21 octobre 1999, la CSST rend une décision par laquelle elle verse à la travailleuse une indemnité pour dommages corporels pour le 15% de déficit anatomo-physiologique auquel s’ajoute 8,15% pour douleurs et perte de jouissance de la vie. 

[16]           Le 10 novembre 1999, le docteur Sophie Lacharité, chirurgienne, évalue les séquelles pour la cicatrice abdominale à 3%.  Le 24 février 2000, la CSST rend une décision sur l’indemnité supplémentaire à laquelle a droit la travailleuse pour ces séquelles.

[17]           Le 3 novembre 1999, l’agent de réadaptation de la CSST rend visite à la travailleuse pour évaluer ses besoins d’aide personnelle à domicile.  Il mandate une ergothérapeute pour compléter l’évaluation de l’autonomie de la travailleuse et estimer ses besoins d’aide technique.

[18]           Le 22 novembre 1999, madame Élaine Tremblay, ergothérapeute, rend visite à la travailleuse et procède à l’évaluation.  Dans son rapport, elle note que la travailleuse vit avec son conjoint et son petit-fils de 20 ans.  Elle note que, pendant les six premiers mois en postopératoire, la travailleuse utilisait une marchette et portait un corset rigide. Elle évalue les besoins de la travailleuse pour la période faisant suite à la chirurgie et la situation actuelle pour les différentes activités de la vie quotidienne : se lever/se coucher, hygiène personnelle, habillage/déshabillage, soins intestinaux et vésicaux, alimentation, préparation des repas, entretien des vêtements, entretien ménager, approvisionnement/commodités de l’environnement.  Elle suggère l’acquisition de différents équipements susceptibles d’améliorer le fonctionnement et l’implication de la travailleuse dans ses soins de base et les tâches domestiques tout en évaluant que celle-ci ne sera pas capable de réaliser seule toutes ces activités.  Voici pour chacune des activités, l'évaluation faite par l'ergothérapeute :

«8.1     Se lever- se coucher

 

Après la chirurgie, la cliente allègue qu'elle était incapable de dormir dans son lit; elle utilisait un fauteuil et dormait en position semi-couchée.  Elle nécessitait de l'aide pour s'asseoir au fauteuil et pour se positionner adéquatement.  Graduellement, la cliente a pu commencer à dormir dans son lit mais elle nécessitait l'aide de son conjoint pour adopter la position couchée, pour se relever du lit, pour changer de position, pour placer la bassine, etc.  Elle aurait ainsi été dépendante à partiellement dépendante de son mari pendant les 6 premiers mois au cours duquel le niveau d'autonomie de la cliente s'est graduellement amélioré.

Actuellement, Mme Gagné est capable de se coucher et de se lever seule, de se retourner, de positionner des oreillers pour soutenir ses jambes, de se rendre à la toilette la nuit sans assistance.  Elle n'utilise pas d'aides techniques et nous n'avons identifié aucun besoin particulier à ce niveau.

 

Par ailleurs, la cliente allègue que son sommeil est très perturbé par la douleur ce qui l'amène à se recoucher le jour pour récupérer.

 

 

8.2       Hygiène personnelle

 

Après la chirurgie, soit dans les premières semaines, Mme Gagné était incapable de transférer au bain même avec assistance et était incapable d'effectuer seule une toilette partielle au lavabo.  Elle nécessitait une assistance importante de son mari dans cette sphère.  Graduellement, la cliente a été en mesure d'entrer - sortir du bain avec assistance, en utilisant les aides techniques dont elle disposait.  L'hygiène était effectuée par le conjoint de madame.

 

Après environ 6 mois en postopératoire, le niveau d'autonomie de la cliente avait augmenté et elle était en mesure de transférer et de se laver seule à l'exception du dos et des cheveux.  Après environ 1 an en postopératoire, la cliente était complètement autonome pour son hygiène.

 

Actuellement, Mme Gagné est donc autonome pour son transfert au bain et son hygiène, en utilisant une barre de bain, un banc de bain et une brosse à long manche pour faciliter l'atteinte des régions corporelles éloignées.  La douche-téléphone a été relocalisée afin de faciliter son utilisation en position assise.  Cependant, la cliente attend systématiquement la présence de son mari pour effectuer ses activités d'hygiène car elle se dit insécure à cause de l'instabilité du banc de bain.

 

Nous avons vérifié la méthode de transfert au bain utilisée par la cliente.  Elle enjambe le bain en position debout et s'assoit ensuite sur le banc de bain qui est effectivement peu sécuritaire.

 

Afin d'améliorer la sécurité de la cliente et lui permettre de vaquer à ses activités d'hygiène sans nécessiter la présence de son conjoint, nos recommandations sont les suivantes :

 

            - Banc de transfert (Sammons Preston #6545)

            - Tapis de bain anti-dérapant

            - Relocalisation de la barre d'appui.

 

Ainsi, nous privilégions un transfert au bain en position assise, sur un équipement très stable et beaucoup mieux adapté aux dimensions de son bain, une surface non-glissante et une prise d'appui plus fonctionnelle et sécuritaire.

 

 

8.3       Habillage - Déshabillage

 

Après la chirurgie, soit dans les premiers mois, Mme Gagné nécessitait une assistance complète puis partielle dans cette sphère.  Après environ 6 mois, elle était plus autonome dans cette activité et était en mesure de mettre-retirer ses sous-vêtements, pantalons, chandails, etc.

 

Actuellement, madame est autonome pour l'habillage et le déshabillage à l'exception des bas et des chaussures lacées.  Elle affirme également qu'il lui est difficile d'insérer ses sous-vêtements et son pantalon dans ses jambes puisque ceci requiert une flexion du tronc ou encore des hanches.

 

Afin de rendre complètement autonome et réduire le niveau de difficulté de cette activité, nos recommandations sont les suivantes :

 

 

            - Enfile-bas (Sammons Preston #2082)

            - Lacets élastiques (Sammons Preston # 6067 et 6067-01)

            - Corne à chaussure à long manche (Sammons Preston # 2062)

            - Bâton d'habillage (Sammons Preston # 2109).

 

 

8.4       Soins intestinaux et vésicaux

 

Après la chirurgie, Mme Gagné utilisait un siège de toilette surélevé et son mari devait lui fournir de l'assistance pour son hygiène intestinale et vésicale.

 

Après 6 mois, la cliente était capable de vaquer à ses besoins sans aide mais elle a continué d'utiliser le siège de toilette adapté pendant environ 1 an suivant la chirurgie.

 

Actuellement, la cliente est complètement autonome dans cette sphère sans usage d'aide technique.

 

 

8.5       Alimentation

 

Madame a toujours été autonome dans cette sphère.

 

 

8.6       Préparation des repas

 

Après la chirurgie, Mme Gagné ne participait à aucune étape de préparation des repas.  Son niveau d'autonomie a peu évolué depuis.

 

Actuellement, elle se réchauffe des plats préparés, elle participe à la préparation des légumes en position assise.  Les difficultés qui entravent son implication dans notre sphère sont la faible tolérance en position debout statique (environ 4-5 min), la faible tolérance aux déplacements, l'incapacité d'atteindre les rangements inférieurs et supérieurs nécessitant de s'abaisser au sol ou de s'étirer avec les membres supérieurs en élévation.

 

Nos recommandations afin d'améliorer l'implication de la cliente dans la préparation des repas sont :

 

            - Banc assis/debout (Smith & Nephew # AA 1536) ou sit-sand

            - Desserte pliante (Sammons Preston # 6587)

            - Pince à long manche pliante (Sammons Preston # 4108)

 

Ainsi, la cliente pourra compenser son manque d'endurance debout statique par l'usage du banc assis-debout, réduire les déplacements lors de la préparation des repas par l'usage d'une desserte et pallier à l'incapacité d'atteindre des objets en s'abaissant au sol ou en s'étirant avec les bras en élévation par l'usage de la pince.

 

Nous suggérons cependant une période d'essai pour le banc assis-debout afin de s'assurer que la cliente y est confortable.  Dans la négative, d'autres types de banc pourront être essayés.

 

 

8.7       Entretien des vêtements

 

Dans les 6 premiers mois en postopératoire, Mme Gagné ne participait pas à cette tâche ayant déjà de la difficulté à assumer ses soins de base.

 

Par la suite, la cliente s'est graduellement impliqué dans cette activité bien qu'elle ne puisse pas l'accomplir de façon autonome encore aujourd'hui.

 

Actuellement, les difficultés rencontrées par la cliente sont l'atteinte du fond de la laveuse (réf.: flexion du tronc), retirer les vêtements de la sécheuse (réf. : abaissement au sol ou flexion du tronc), plier les grands morceaux (réf.: mouvements d'accompagnements du tronc et maintien de la position debout).

Nous recommandons d'utiliser la pince à long manche pour faciliter l'atteinte des appareils de lavage et d'effectuer le pliage en position assise, à son rythme.  Elle pourra également utiliser la desserte pour le rangement du linge afin de réduire les déplacements.

 

 

8.8       Entretien ménager

 

Depuis la chirurgie, la cliente participe très peu aux activités d'entretien.  Madame allègue assumer moins de 5 % des tâches d'entretien, soit laver le lavabo de la salle de bain et la tablette au-dessus du lavabo, épousseter partiellement les surfaces à sa hauteur.

 

Nous avons discuté des principes de conservation d'énergie et d'hygiène posturale avec Mme Gagné lors de l'exécution des tâches d'entretien et également pour l'ensemble des tâches domestiques.  La desserte pourra être utilisée dans cette activité par exemple pour placer des objets et bibelots lors de l'époussetage, pour transporter les produits de nettoyage, un sceau d'eau, etc.

 

Cependant, la condition de la cliente ne lui permet pas d'être complètement autonome dans les activités d'entretien ménager léger alors que les tâches d'entretien lourdes sont tout à fait incompatibles avec son état.

 

 

8.9       Approvisionnement - Commodités de l'environnement

 

Depuis la chirurgie, Mme Gagné est assez dépendante de son conjoint dans cette sphère.

 

Elle évite de sortir seule à cause de sa tolérance aux déplacements qui est très réduite, de même que sa tolérance debout statique (ex. : attendre à la caisse) et sa capacité de manutentionner des paquets.

 

Pour promouvoir son autonomie dans cette sphère, nous recommandons de faire une demande de vignette de stationnement pour personnes handicapées.  En réduisant les déplacements dans les aires de stationnement, madame conservera son énergie pour se déplacer et effectuer ses achats.

 

Nous envisageons également l'utilisation d'un déambulateur pliant, muni d'un siège et d'un panier; cet équipement permettrait à Mme Gagné de prendre des périodes de récupération en position assise selon ses besoins lors des sorties extérieures.  Une période d'essayage des différents modèles est suggérée avant de procéder à l'achat.»

 

 

[19]           Sur la base de cette évaluation, l’agent de la CSST complète la «Grille d’évaluation des besoins d’aide personnelle à domicile» en distinguant les besoins selon que la travailleuse bénéficie ou non des aides techniques suggérées.  Pour chacune des activités ou tâches, l’agent évalue suivant le règlement applicable le nombre de points correspondant aux besoins, la cote «A» signifie un besoin d’assistance complète pour réaliser l’activité en question, la cote «B » signifie un besoin d’assistance partielle et «C» équivaut à aucun besoin d’assistance. Le pointage total obtenu correspond à un pourcentage du montant maximum mensuel d’aide prévu à la loi et revalorisé annuellement. L’agent précise que les services sont dispensés par le conjoint de la travailleuse et par son petit-fils.  Son évaluation est la suivante:

 

 

Besoins

                                                  

Au moment de l’évaluation

 

Avec les aides techniques

Le lever

C  - 0

C  - 0

Le coucher

C  - 0

C  - 0

Hygiène corporelle

C  - 0

C  - 0

Habillage

B  - 1.5

C  - 0

Déshabillage

C  - 0

C  - 0

Soins vésicaux

N/A

N/A

Soins intestinaux

N/A

N/A

Alimentation

C  - 0

C  - 0

Utilisation des commodités

C  - 0

C  - 0

Préparation du déjeuner

B  - 1

C  - 0

Préparation du dîner

A  - 4

B  - 2

Préparation du souper

A  - 4

B  - 2

Ménage léger

B  - O.5

C  - 0

Ménage lourd

A  - 1

A  -1

Lavage du linge

B  - 0.5

C  - 0

Approvisionnement

A  - 3

B  -1.5

Total

15.5 points /48 points

6.5 points / 48

 

 

[20]           Le 16 décembre 1999, la CSST rend une décision par laquelle elle reconnaît d’abord le droit à la réadaptation de la travailleuse ainsi que le droit aux aides techniques suivantes : nouveau banc de transfert pour le bain; tapis de bain antidérapant; relocalisation de la barre d’appui; enfile-bas; lacets élastiques; corne à chaussures à long manche; bâton d’habillage; desserte pliante; pince à long manche pliante; déambulateur pour les sorties extérieures; tabouret ajustable ou siège assis-debout.

[21]           La CSST reconnaît également dans cette décision, le droit à l’aide personnelle à domicile et libelle ainsi sa décision :

«Ainsi, à compter du 3 novembre 1999, vous avez droit à une allocation de 169.40$ par 2 semaines. Pour la période du 14 janvier au 31 décembre 2000, cette aide sera ramenée à 72.24$ par deux semaines, afin de tenir compte de l’amélioration de votre autonomie à la suite d’aides techniques qui seront mises à votre disposition.  À la fin de cette période, nous réévaluerons vos besoins pour tenir compte de l’évolution de votre situation personnelle et de votre santé.»

 

 

[22]           Le 11 janvier 2000, la travailleuse demande la révision de cette décision en précisant qu’elle conteste uniquement la date de départ de cette allocation et, en rapportant, qu’en 1997 lorsqu’elle a fait une demande à son agent à cet effet, celui-ci aurait répondu qu’étant donné qu’elle reçoit l’aide de son conjoint, elle n’a droit à aucune compensation.  Le 16 mars 2000, la révision administrative confirme la décision du 16 décembre 1999, d’où le présent litige.

[23]           À l’audience, la travailleuse témoigne et décrit comment elle avait besoin d’aide «24 heures sur 24» après son opération  pour se lever, pour sortir du lit, pour se laver, pour s’habiller. Depuis l’été 1998, elle dit être en mesure de demeurer seule à la maison mais que son mari doit lui préparer les repas à l’avance afin qu’elle ait seulement à les réchauffer.  Elle explique qu’elle ne peut pas faire grand chose au niveau des tâches domestiques.  Elle réitère qu'elle avait demandé à son agent de l'aide en 1997, après l'opération, mais qu'il lui aurait répondu qu'elle n'y avait pas droit.

[24]           Son mari, monsieur George Nadeau, témoigne sur l’aide qu’il a dû apporter à sa conjointe après l’intervention chirurgicale.  Il dit qu’elle était complètement dépendante de lui, de son aide à cette époque et qu’elle devait toujours être en mesure de le rejoindre.  Il relate que, depuis l’été 1998, elle va mieux mais qu’elle ne fait pratiquement rien au niveau des tâches ménagères.

L'ARGUMENTATION DES PARTIES

[25]           La travailleuse prétend qu’elle a besoin d’aide personnelle à domicile depuis sa sortie de l’hôpital et elle réclame que l’allocation lui soit versée à compter de cette date soit le 10 juin 1997.

[26]           La représentante de la CSST soutient que l’on ne peut accorder rétroactivement le droit à l’aide personnelle.  Elle fait valoir que ce droit découle de l’article 158 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001, la loi) et qu’il constitue une mesure de réadaptation qui ne peut prendre effet tant qu’il n’y a pas de décision sur l’admissibilité en réadaptation.  Elle dépose deux décisions[2] de la Commission des lésions professionnelles  au soutien de ses prétentions.  En l’espèce, elle souligne que la décision sur le droit à la réadaptation a été rendue le 16 décembre 1999 mais que la CSST a reconnu le droit à l’aide personnelle à compter de la date d’évaluation des besoins, soit le 3 novembre 1999.

L'AVIS DES MEMBRES

[27]           Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis d’accueillir en partie la contestation de la travailleuse et de reconnaître qu’elle a droit à l’aide personnelle à compter du 5 décembre 1997, date où le docteur Gariépy a évalué provisoirement son atteinte permanente, atteinte permanente qui a été acceptée et payée par la CSST et qui donne ouverture au droit à la réadaptation en vertu de l’article 145 de la loi.

[28]           Le membre issu des associations syndicales est d'avis de reconnaître à la travailleuse le droit à l'aide personnelle à domicile dès sa sortie de l'hôpital en juin 1997.  À cette date, la travailleuse conservait déjà une atteinte permanente qui lui donnait droit à la réadaptation.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[29]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer à partir de quel moment la travailleuse a droit à l’aide personnelle à domicile. L’admissibilité de la travailleuse à cette aide a été reconnue par la CSST et n’est pas remise en question. 

[30]           L’aide personnelle à domicile est une des mesures de la réadaptation sociale qui est, elle-même, un des éléments de la réadaptation.  Les dispositions pertinentes de la loi sont les suivantes :

145. Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.

________

1985, c. 6, a. 145.

 

 

146. Pour assurer au travailleur l'exercice de son droit à la réadaptation, la Commission prépare et met en œuvre, avec la collaboration du travailleur, un plan individualisé de réadaptation qui peut comprendre, selon les besoins du travailleur, un programme de réadaptation physique, sociale et professionnelle.

 

        Ce plan peut être modifié, avec la collaboration du travailleur, pour tenir compte de circonstances nouvelles.

________

1985, c. 6, a. 146.

 

 

151. La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.

________

1985, c. 6, a. 151.

 

 

152. Un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment :

      1° des services professionnels d'intervention psychosociale ;

      2° la mise en œuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle ;

      3° le paiement de frais d'aide personnelle à domicile ;

      4° le remboursement de frais de garde d'enfants ;

      5° le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.

________

1985, c. 6, a. 152.

 

 

158. L'aide personnelle à domicile peut être accordée à un travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, est incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement, si cette aide s'avère nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.

________

1985, c. 6, a. 158.

 

 

159. L’aide personnelle à domicile comprend les frais d’engagement d’une personne pour aider le travailleur à prendre soin de lui-même et pour effectuer les tâches domestiques que le travailleur effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion.

Cette personne peut être le conjoint du travailleur.

________

1985, c. 6, a. 158.

 

 

160. Le montant de l'aide personnelle à domicile est déterminé selon les normes et barèmes que la Commission adopte par règlement et ne peut excéder 800 $ par mois.

________

1985, c. 6, a. 160; 1996, c. 70, a. 5.

 

 

161. Le montant de l'aide personnelle à domicile est réévalué périodiquement pour tenir compte de l'évolution de l'état de santé du travailleur et des besoins qui en découlent.

________

1985, c. 6, a. 161.

 

 

162. Le montant de l'aide personnelle à domicile cesse d'être versé lorsque le travailleur :

      1° redevient capable de prendre soin de lui-même ou d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il ne pouvait effectuer en raison de sa lésion professionnelle ; ou

      2° est hébergé ou hospitalisé dans une installation maintenue par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ou par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5).

 

________

1985, c. 6, a. 162; 1992, c. 21, a.79; 1994, c. 23, a. 23.

 

 

163. Le montant de l'aide personnelle à domicile est versé une fois par deux semaines au travailleur.

 

      Ce montant est rajusté ou annulé, selon le cas, à compter de la première échéance suivant l'événement qui donne lieu au rajustement ou à l'annulation.

________

1985, c. 6, a. 163.

 

 

[31]           Il faut également référer au «Règlement sur les normes et barèmes de l’aide personnelle à domicile», (1997) G.O. II,  7365 (ci-après, le règlement).  L’article 1 du règlement pose trois conditions d’ouverture au droit à l’aide personnelle à domicile :

1.         Conformément aux articles 145 et 158 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c.A-3.001), l'aide personnelle à domicile peut être accordée à un travailleur qui en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, satisfait aux conditions suivantes:

 

  il a une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique;

 

  il est incapable de prendre soin de lui-même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement;

 

  cette aide s'avère nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.

 

 

[32]           L’article 5 du règlement prévoit que l’évaluation des besoins du travailleur se fait suivant la grille d’évaluation prévue à l’annexe 1, grille effectivement utilisée par la CSST dans le présent dossier.  Il est intéressant de noter qu’à la section «Bilan médical du travailleur» de cette grille, on prévoit les rubriques suivantes sur la date de consolidation et l’atteinte permanente :

«Date de consolidation : Prévue                        Oui _______   Connue ______________

                                                                                              année  mois  jour

                                                           Non _______

 

Atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique :      Prévue       

 Confirmée   ____%»

 

 

[33]           Il est clair de la lecture de ces dispositions que l’aide personnelle à domicile est une mesure de réadaptation, l’article 158 de la loi se retrouve à la section 3 «Réadaptation sociale» du chapitre IV de la loi intitulé «Réadaptation».  L’article 145 de la loi reconnaît le droit à la réadaptation au travailleur qui subit une atteinte permanente en raison de sa lésion professionnelle.  L’article 1 du règlement pose également, comme condition d’ouverture au droit à l’aide personnelle, l’existence d’une atteinte permanente. 

[34]           On peut d’emblée constater que les mesures de réadaptation ne visent pas les situations temporaires de travailleurs momentanément incapables de prendre soin d’eux-mêmes. 

[35]           La difficulté surgit lorsque l’on se demande à quel moment on peut établir l’existence d’une atteinte permanente.  La revue de certaines décisions de la Commission des lésions professionnelles et, avant elle, de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles,  révèle que différents points de départ sont retenus :

§         Dans l’affaire Paquet et Ville de Rimouski[3] ainsi que dans St-Denis et Excel Personnel inc.[4], les commissaires concluent que le droit à la réadaptation découle de l’atteinte permanente et, qu’une fois établie l’existence de l’atteinte permanente, le droit à la réadaptation coïncide avec la date où le travailleur a subi la lésion responsable de l’atteinte permanente;

§         Dans Gentleman et Hôpital général juif Mortimer B. Davis[5], la Commission des lésions professionnelles retient la date de la décision reconnaissant le droit du travailleur à la réadaptation;

§         Dans Charron et CHSLD[6], la Commission des lésions professionnelles  affirme que «pour que le droit à la réadaptation s’ouvre, il faut que la lésion soit consolidée»;

§         Dans Février et Win-Sir Textiles inc.[7], la Commission des lésions professionnelles, s’appuyant sur ces deux dernières décisions, énonce que «l’évaluation des besoins de réadaptation ne peut se faire préalablement à l’existence d’une atteinte permanente et que le remboursement de tels frais ne peut être effectué non plus préalablement à l’établissement d’une atteinte permanente»;

§         Dans Thibault et Lucien Paré et fils ltée[8], la Commission des lésions professionnelles  est d’avis que rien dans la loi ne permet de faire rétroagir le moment où l’existence de l’atteinte permanente est établie.  De plus, elle ajoute que le besoin d’aide à domicile doit être évalué et retient comme point de départ la date de l’évaluation des besoins faite par la CSST;

§         Puis dans Brouty et Voyages Symone Brouty[9], après une revue de la jurisprudence et une analyse des dispositions de la loi, la Commission des lésions professionnelles  conclut que le droit à la réadaptation s’ouvre au moment où il devient «médicalement possible» de préciser l’atteinte permanente indifféremment de la consolidation de la lésion.

[36]           Qu'en est-il dans le présent dossier ? À quelle date, la travailleuse a-t-elle droit à l’aide personnelle à domicile ? Dès sa sortie de l’hôpital en juin 1997 ?  Au moment où l'atteinte permanente est évaluée provisoirement par le docteur Gariépy le 5 décembre 1997 ?  À la date de consolidation de sa lésion, le 13 avril 1999 ?  À la date d’évaluation de ses besoins d’aide personnelle à domicile, le 3 novembre 1999 ?  À la date de la décision de la CSST reconnaissant son droit à la réadaptation, le 16 décembre 1999 ?  Même en reconnaissant que le droit à la réadaptation découle de l’existence d’une atteinte permanente, la question du point de départ demeure ouverte.

[37]           La Commission des lésions professionnelles  considère, qu’en l’espèce, la travailleuse a droit à l’aide personnelle à domicile à compter du 10 juin 1997, date de son retour à la maison après l'intervention chirurgicale.  Même si dans bien des cas, ce n’est qu’une fois la lésion consolidée, qu’il y aura évaluation de l’atteinte permanente, la loi ne prévoit nulle part qu’il doit y avoir nécessairement consolidation pour qu'il soit possible d'évaluer une atteinte permanente.  On peut concevoir que dans des situations plus graves, entre autres, une atteinte permanente puisse être déterminée avant la consolidation.  Le présent dossier en est une illustration éloquente.  L’article 88 de la loi ne lie pas l’évaluation des séquelles à la consolidation et le deuxième alinéa, qui a reçu application en l’espèce, prévoit la situation où il est médicalement possible de déterminer des séquelles sans pouvoir encore les déterminer toutes:

88. La Commission établit le montant de l'indemnité pour dommages corporels dès que les séquelles de la lésion professionnelle sont médicalement déterminées.

 

      Lorsqu'il est médicalement impossible de déterminer toutes les séquelles de la lésion deux ans après sa manifestation, la Commission estime le montant minimum de cette indemnité d'après les séquelles qu'il est médicalement possible de déterminer à ce moment.

 

      Elle fait ensuite les ajustements requis à la hausse dès que possible.

________

1985, c. 6, a. 88.

 

 

[38]           Dès qu’il est médicalement possible de déterminer des séquelles permanentes de la lésion, la condition d’ouverture au droit à la réadaptation est rencontrée.  La travailleuse a dès lors droit à l’aide personnelle à domicile si les autres conditions de l'article 158 sont rencontrées.

[39]           De plus, les mentions sur la grille d’évaluation permettant de cocher si la date de consolidation est prévue ou connue et si l’atteinte permanente est prévue ou confirmée est un indicateur qui va dans le sens de cette interprétation.  Cette grille fait partie du règlement et ne constitue pas un simple formulaire.  La grille prévoit des situations où la lésion n'est pas encore consolidée, où l'atteinte permanente n'est pas encore confirmée mais elle est prévue.

[40]           Cette interprétation rencontre également les objectifs de la loi et du règlement.  L'article 151 de la loi énonce que la réadaptation sociale vise à aider un travailleur à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.  L'article 158 de la loi et l'article 1 du règlement réfèrent à une aide nécessaire au maintien ou au retour à domicile.  Lorsqu'il y a une preuve de l'existence d'une atteinte permanente, comme en l'espèce, les objectifs de la réadaptation sociale pourront davantage être atteints si des mesures sont mises en place le plus rapidement possible.

[41]           La Commission des lésions professionnelles  ne peut retenir la prétention de la CSST selon laquelle ce n’est qu’à compter de la décision de la CSST reconnaissant le droit à la réadaptation ou à la date d’évaluation des besoins que débute le droit à l’aide personnelle.  Cette interprétation aurait pour effet de faire dépendre un droit du délai administratif pris pour rendre une décision alors que les conditions d'application de la loi sont rencontrées.  Le présent dossier l'illustre bien.  En décembre 1997, la CSST obtenait une évaluation du docteur Gariépy établissant l'atteinte permanente «provisoire» à 29 % et, ce n'est qu'en décembre 1999, que la CSST rendait une décision reconnaissant le droit à la réadaptation de la travailleuse. 

[42]           En l'espèce, en juin 1997, lorsque la travailleuse retourne à son domicile après avoir subi une importante intervention chirurgicale, les trois conditions d'ouverture  prévues à l'article 1 du règlement sont rencontrées.  Il n'est pas contesté que la travailleuse est incapable de prendre soin d'elle-même, d'effectuer sans aide les tâches domestiques et que cette aide est nécessaire à son maintien, et ici, à son retour à domicile.  Le rapport de l'ergothérapeute ne laisse aucun doute à ce sujet.  Quant à la première condition, la preuve prépondérante établit clairement l'existence d'une atteinte permanente dès ce moment.  Même si en juin 1997, l'atteinte permanente n'était pas quantifiée, elle était existante.  D'ailleurs, le 5 décembre 1997, lorsque le docteur Gariépy évalue provisoirement l'atteinte permanente à 29 %, il écrit qu'il «existe une atteinte permanente qu'il est impossible de quantifier à l'heure actuelle».  Les limitations de mouvement et les déficits moteurs et sensitifs étaient susceptibles d'évoluer selon les traitements jusqu'à la consolidation mais l'existence d'une atteinte permanente découlant d'une discoïdectomie et d'une greffe lombosacrée à 3 espaces était présente dès juin 1997.

[43]           Bien sûr, les besoins de la travailleuse vont évoluer après son retour à la maison et l'article 161 de la loi prévoit que les montants d'aide sont réévalués pour tenir compte de l'évolution de l'état de santé du travailleur et des besoins qui en découlent.

[44]           Pour l’évaluation des besoins, la Commission des lésions professionnelles réfère à l’évaluation faite par madame Tremblay, ergothérapeute.  Celle-ci rapporte que, pendant les six premiers mois en post-opératoire, l’autonomie de la travailleuse était plus réduite pour plusieurs activités ou tâches prévues au règlement.  Si on complète la grille prévue au règlement[10] avec l'évaluation faite par l'ergothérapeute pour chacun des besoins, la Commission des lésions professionnelles arrive à la conclusion que la travailleuse a droit pour les six premiers mois, du 10 juin 1997 au 10 décembre 1997, à une allocation pour aide personnelle à domicile correspondante à une évaluation totalisant 36 points et se détaillant comme suit :

Besoins                                                

 

 

Le lever

A - 3

Le coucher

A - 3

Hygiène corporelle

A - 5

Habillage

A - 3

Déshabillage

A - 3

Soins vésicaux

B - 1.5

Soins intestinaux

B - 1.5

Alimentation

C - 0

Utilisation des commodités

C - 0

Préparation du déjeuner

A - 2

Préparation du dîner

A - 4

Préparation du souper

A - 4

Ménage léger

A - 1

Ménage lourd

A - 1

Lavage du linge

A - 1

Approvisionnement

A - 3

 

Total

 

36 points /48 points

 

 

[45]           Après les six premiers mois en postopératoire, l'autonomie de la travailleuse s’est améliorée et stabilisée.  L’évaluation faite en novembre 1999 peut donc être retenue également à compter de décembre 1997.  Un total de 15.5 points sur 48 était attribué à la travailleuse et, sur cette même évaluation, la travailleuse a droit à l’allocation pour aide personnelle à domicile correspondante à compter du 10 décembre 1997.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de madame Ginette Gagné, la travailleuse;

MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 16 mars 2000 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que la travailleuse a droit de recevoir une allocation d’aide personnelle à domicile pour un montant correspondant à l’évaluation de ses besoins totalisant 36 points sur 48 pour la période du 10 juin 1997 au 10 décembre 1997, pour un montant correspondant à 15.5 points/48 pour la période du 10 décembre 1997 au 14 janvier 2000 et à 6.5 points/48 du 14 janvier 2000 au 31 décembre 2000, date de la réévaluation des besoins.

 

 

 

 

 

Lucie Nadeau

 

Commissaire

 

 

 

Panneton, Lessard

( Me Martine St-Jacques )

1700, boul. Laval, 2e étage

Laval (Québec)

H7S 2G6

 

Représentante de la partie intervenante

 



[1] Institut de recherche en santé et sécurité du travail

[2] Février et Win-Sir Textiles inc., 116590-73-9905, 99-11-11, Y. Ostiguy;

Gentleman et Hôpital général juif Mortimer B. Davis, 91424-60C-9709, 98-11-12, J.D. Kushner.

[3] 10797-01-8902, 91-04-05, S. Lemire.

[4] 108338-72-9812, 99-05-28, N. Lacroix.

[5] Précitée, note 2.

[6] 114870-64-9904, 99-07-27, Y. Lemire.

[7] Précitée, note 2.

[8] 115773-32-9905, 00-03-29, G. Tardif.

[9] 120748-31-9907, 00-06-15, P. Simard.

[10]          Pour l'année 1997, il faut référer au «Règlement sur les normes et barèmes de l'aide personnelle à domicile pour l'année 1997», (1996) G.O. II, 6616.   La grille d'évaluation est la même.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.