Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Québec

QUÉBEC, le 29 mars 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

136681-32-0004

148148-32-0010

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Lise Langlois

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Jean-Guy Verreault

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Céline Leclerc

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

109485581-6

109485581-7

AUDIENCE PRÉVUE LE :

15 février 2001

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

QUÉBEC

 

 

 

 

DÉCISION SUR DOSSIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ghislaine Thibault

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lucien Paré et Fils Ltée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

Dossier no 136681-32-0004

 

[1]               Le 19 avril 2000, madame Ghislaine Thibault (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue à la suite d’une révision administrative le 14 mars 2000.

[2]               Par cette décision la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 24 janvier 2000 et déclare qu’il n’y a pas de relation entre le diagnostic de lombalgie et la lésion professionnelle du 14 avril 1995 (tendinites de la coiffe des rotateurs aux deux épaules), ni d’aggravation de cette dernière et que, par conséquent, les traitements de physiothérapie-ergothérapie prescrits le 25 octobre 1999 ne sont pas autorisés.

Dossier no 148148-32-0010

[3]               Le 11 octobre 2000, la travailleuse dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 12 septembre 2000 à la suite d’une révision administrative.

[4]               Par cette décision la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 4 juillet 2000 et déclare que la travailleuse n’a pas droit au versement d’intérêts sur les montants des frais d’aide personnelle à domicile qui ont été ajustés pour la période du 1er juin 1999 au 9 avril 2000.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

Dossier no 136681-32-0004

[5]               La travailleuse demande de déclarer qu’il y a une relation entre l’événement du 14 avril 1995 et le diagnostic de lombalgie posé le 26 octobre 1999, aggravation de la condition de ses épaules et que, par conséquent, elle a droit au remboursement de ses frais de traitements de physiothérapie-ergothérapie prescrits le 25 octobre 1999.

Dossier no 148148-32-0010

[6]               La travailleuse demande de déclarer qu’elle a droit au versement d’intérêts sur l’allocation d’aide personnelle à domicile qui lui a été versée, rétroactivement, pour la période du 1er juin 1999 au 9 avril 2000, conformément à la décision de la Commission des lésions professionnelles du 29 mars 2000.

[7]               Les parties ont été dûment convoquées à l’audience du 15 février 2001; ni l’une ni l’autre n’est présente ni représentée à l’audience; le 14 février 2001, le représentant de la travailleuse a confirmé leur absence et demandé à la Commission des lésions professionnelles de rendre une décision sur dossier pour les deux requêtes mentionnées ci-dessus; au dossier, l’employeur n’est pas représenté.

LES FAITS

[8]               Le 21 juin 1990, la docteure C. Grondin, rhumatologue, dans le cadre d’une consultation demandée par le médecin traitant de la travailleuse, le docteur F. Cantin, conclut à la présence de  polyarthralgies aux membres supérieurs ainsi qu’à une lombalgie occasionnelle à caractère mécanique. La radiographie de la colonne lombo-sacrée démontre une scoliose plus importante qu’elle n’apparaissait cliniquement ainsi que de discrets changements dégénératifs multiétagés à la région lombaire, alors qu’au niveau de la colonne cervicale, il y a un redressement de la lordose physiologique cervicale, un pincement de l’espace intervertébral C5-C6 modéré avec de légers changements dégénératifs associés.  

[9]               Le 14 avril 1995, la travailleuse, âgée de 46 ans, subit une lésion professionnelle alors qu’elle exerce les fonctions d’aide-bouchère à temps partiel. Elle s’inflige une tendinite bilatérale de la coiffe des rotateurs laquelle est reconnue, par la CSST, à titre d’aggravation d’une condition personnelle. À la suite d’une chirurgie à l’épaule gauche, elle développe une capsulite; cette lésion est consolidée le 8 juillet 1997 avec une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Elle est admise en réadaptation, le 24 mars 1998.

[10]           Le 26 octobre 1999, le docteur P. Filteau, complète un rapport médical où il pose un diagnostic de tendinite chronique aux épaules et de lombalgie secondaire et prescrit des traitements de physiothérapie.

[11]           Le 3 décembre 1999, la travailleuse produit une réclamation à la CSST indiquant, le 26 octobre 1999, comme date de rechute, récidive ou aggravation et que, depuis quelques mois, elle ressent des douleurs lombaires secondaires à ses tendinites chroniques aux épaules.

[12]           Le 24 janvier 2000, la CSST refuse la demande d’autorisation logée par la travailleuse, à savoir donner suite à la prescription du docteur Filteau du 26 octobre 1999 et recevoir des traitements de physiothérapie, et ce,  au motif qu’il n’y a pas d’évidence d’aggravation.

[13]           Le 23 mars 2000, la commissaire G. Tardif de la Commission des lésions professionnelles déclare que la travailleuse a droit à des prestations pour aide personnelle à domicile du 1er juin 1999 au 9 avril 2000 calculées sur un pointage de 19,5.

[14]           Le 4 juillet 2000, en réponse à la demande de la travailleuse datée du 7 juin 2000, la CSST informe cette dernière que le paiement d’intérêts prévu à l’article 364 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, L.R.Q. c. A-3.001 (la LATMP) (la loi) s’applique aux indemnités et non aux prestations qu’elle verse et que, par conséquent, aucun intérêt ne lui sera payé sur les frais d’aide à domicile accordés par la Commission des lésions professionnelles.

[15]           Le 12 octobre 2000, la travailleuse obtient de la Commission des lésions professionnelles la remise de l’audience prévue pour le 15 novembre 2000 au motif qu’une consultation doit avoir lieu, le 22 novembre 2000, avec un orthopédiste dont les conclusions pourraient avoir des conséquences importantes sur l’objet de sa contestation du 19 avril 2000 relativement à sa lésion lombaire alléguée.

L'AVIS DES MEMBRES

Dossier 136681-32-0004

[16]           Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs sont d’avis qu’il y a absence de preuve médicale prépondérante établissant une aggravation de la condition de santé des épaules de la travailleuse ou une relation entre le diagnostic de lombalgie et l’événement du 14 avril 1995.

Dossier 148148-32-0010

[17]           Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs sont d’avis de rejeter la requête de la travailleuse compte tenu de l’interprétation constante de la jurisprudence appliquant l’article 364 de la loi aux seules indemnités de remplacement du revenu et non aux autres prestations prévues à cette loi, par exemple les frais d’entretien de domicile.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[18]           La Commission des lésions professionnelles doit d’abord décider s’il y a une aggravation de la condition de santé des épaules de la travailleuse et une relation entre l’événement du 14 avril 1995 et le diagnostic de lombalgie posé le 26 octobre 1999 justifiant le paiement de traitements de physiothérapie-ergothérapie.

[19]           Pour avoir gain de cause, en ce qui concerne la relation entre la lombalgie et la lésion initiale reconnue et, également, en ce qui concerne l’aggravation de la condition de santé de ses épaules, la travailleuse doit démontrer, par une preuve médicale prépondérante, qu’il y a eu reprise ou recrudescence de sa symptomatologie aux épaules et que le diagnostic de lombalgie  est relié à l’événement du 14 avril 1995.

[20]           L’article 2 de la loi définit la notion de lésion professionnelle comme suit :

 2. (…)

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l’occasion d’un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l’aggravation  ; »

 

1985, c. 6, a. 2.

 

[21]           Le lien de causalité entre l’événement du 14 avril 1995 et le diagnostic de lombalgie ainsi que l’aggravation des tendinites aux épaules doivent être établis de façon prépondérante et la seule allégation de la travailleuse ne suffit pas en l’absence d’une preuve médicale prépondérante.

[22]           La Commission des lésions professionnelles n’a pas trouvé d’éléments probants lui permettant de conclure à une aggravation de la condition de santé des épaules de la travailleuse; la seule mention, par son médecin qui a charge le 26 octobre 1999, de l’existence d’une tendinite chronique bilatérale ne suffit pas à faire la preuve d’une aggravation objective de cette condition, par ailleurs, personnelle et aggravée le 14 avril 1995, lors de la lésion initiale.

[23]           En effet, la preuve révèle que la travailleuse souffre de polyarthralgies aux membres supérieurs et de lombalgie mécanique occasionnelle, depuis le mois de juin 1990, et que la lésion professionnelle du 14 avril 1995 a été reconnue à titre d’aggravation de cette condition personnelle en ce qui concerne les tendinites bilatérales de la coiffe des rotateurs seulement.

[24]           La simple allégation par la travailleuse, lors de sa réclamation du 3 décembre 1999, à l’effet que, depuis quelques mois, elle ressent des douleurs lombaires, qu’elle croit être la conséquence de ses tendinites chroniques aux deux épaules, est insuffisante pour établir la relation requise, entre le diagnostic de lombalgie et l’événement du 14 avril 1995, et constituer une preuve médicale prépondérante.

[25]           Il en est de même de l’affirmation du docteur P. Filteau sur le rapport médical du 26 octobre 1999 lorsqu’il mentionne la présence de lombalgie qu’il qualifie de secondaire car celle-ci n’est  aucunement documentée ni circonstanciée.

[26]           Quant à l’expertise en orthopédie annoncée, lors de la demande de remise, rien n’indique au dossier si une telle consultation a eu lieu.

[27]           La Commission des lésions professionnelles conclut donc à l’absence de preuve médicale prépondérante permettant d’établir une aggravation des tendinites bilatérales de la coiffe des rotateurs dont souffre la travailleuse ou une relation entre le diagnostic de lombalgie posé le 26 octobre 1999 et l’événement du 14 avril 1995.

[28]           La Commission des lésions professionnelles ne reconnaissant pas la présence d’une aggravation de l’état de santé des épaules de la travailleuse ni sa lésion de lombalgie à titre de lésions professionnelles, il va de soi que les traitements de physiothérapie-ergothérapie prescrits pour cette pathologie ne sauraient lui être autorisés ou remboursés.

[29]           D’autre part, la Commission des lésions professionnelles doit aussi décider si la travailleuse a droit au versement d’intérêts sur le paiement rétroactif de frais d’aide personnelle à domicile, pour la période du 1er juin 1999 au 9 avril 2000.

[30]           Les articles de la loi pertinents en l’instance sont les articles 159 et 364 qui se lisent comme suit :

159. L'aide personnelle à domicile comprend les frais d'engagement d'une personne pour aider le travailleur à prendre soin de lui - même et pour effectuer les tâches domestiques que le travailleur effectuerait normalement lui‑même si ce n'était de sa lésion.

 

Cette personne peut être le conjoint du travailleur.

________

1985, c. 6, a. 159.

 

 

364. Si une décision rendue par la Commission, à la suite d'une demande faite en vertu de l'article 358, ou par la Commission des lésions professionnelles reconnaît à un bénéficiaire le droit à une indemnité qui lui avait d'abord été refusé, ou augmente le montant d'une indemnité, la Commission lui paie des intérêts à compter de la date de la réclamation.

 

Le taux de ces intérêts est déterminé suivant les règles établies par règlement. Ces intérêts se capitalisent quotidiennement et font partie de l'indemnité.

________

1985, c. 6, a. 364; 1993, c. 5, a. 20; 1997, c. 27, a. 20; 1996, c. 70, a. 42.

 

 

 

[31]           De plus la notion de «prestation » est définie à l’article 2 de la loi :

«  prestation » : une indemnité versée en argent, une assistance financière ou un service fourni en vertu de la présente loi.

 

 

[32]           La jurisprudence constante de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles ainsi que celle de la Commission des lésions professionnelles applique l’article 364 aux seules indemnités de remplacement du revenu, les frais d’engagement d’une personne pour aider la travailleuse à prendre soin d’elle-même ou à effectuer les tâches domestiques qu’elle effectuerait normalement elle-même si ce n’était de sa lésion constituant une prestation versée en tant qu’assistance financière ou pour obtenir de tels services domestiques.

[33]           Tel que la Commission d’appel l’indiquait dans l’affaire Tardif et C.S.S.T. et Entreprises Réjean Turgeon Inc.[1], on ne retrouve que trois sortes d’indemnités dans la loi, soit une prestation versée en argent pour le remplacement du revenu, pour compenser un dommage corporel subi ou un décès et, à l’article 364, le législateur se limite à ce qu’il qualifie d’indemnité sans référer aux autres prestations qu’il a définies à l’article 2.

[34]           Les frais d’engagement de personnel pour l’aide personnelle à domicile ne peuvent être assimilés à une indemnité et ne constituent donc pas une indemnité au sens de l’article 364 de la loi. Ils sont plutôt couverts par la définition de « prestation » soit par la notion d’assistance financière ou celle de service fourni.

[35]           La Commission des lésions professionnelles conclut donc que les frais d’aide personnelle à domicile ne sont pas des indemnités au sens de l’article 364 de la loi et que cette disposition qui vise le paiement d’intérêts sur de telles indemnités n’est pas applicable à la demande de la travailleuse.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

Dossier no 136681-32-0004

REJETTE la requête de madame Ghislaine Thibault, la travailleuse ;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 14 mars 2000 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE qu’il n’y a pas d’aggravation de la lésion professionnelle du 14 avril 1995 ni de relation entre l’événement du 14 avril 1995 et le diagnostic de lombalgie posé le 26 octobre 1999 et que les traitements de physiothérapie-ergothérapie ne sont pas autorisés ni remboursés.

Dossier no 148148-32-0010

REJETTE la requête de la travailleuse ;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 12 septembre 2000 à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas droit au paiement d’intérêts sur l’allocation d’aide personnelle à domicile pour la période du 1er juin 1999 au 9 avril 2000.

 

 

 

 

LISE LANGLOIS

 

Commissaire

 

 

 

 

 

D.A.T.A.Q.

(M. Martin Cadieux)

3107, avenue des Hôtels

Sainte-Foy (Québec)

G1W 4W5

 

Représentant de la partie requérante

 

 



[1]           C.A.L.P. 70437-03-9506, 30 octobre 1995, J.M. Dubois

AVIS :
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