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[1] Le 11 février 2004, monsieur André Lavoie (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 21 janvier 2004 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST maintient celle qu’elle a initialement rendue le 31 juillet 2003 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais encourus pour les travaux relatifs à la tonte de gazon et à la réparation des galeries situées à l’avant et à l’arrière du domicile.
[3] Une audience a lieu à Rouyn-Noranda le 17 mai 2003. Le travailleur est présent à l’audience et il n’est pas représenté.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit au remboursement des frais engagés pour la tonte de gazon et pour la réparation des galeries de son domicile pour l’année 2003.
L’AVIS DES MEMBRES
[5] Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais engagés pour la tonte de la pelouse. Il retient que le terrain est plat et représente une petite surface de gazon à tondre. Le travailleur peut le faire à son rythme.
[6] Il est également d’avis que les frais relatifs aux travaux de réparation des galeries ne sont pas remboursables. Il retient de la preuve qu’il s’agit plutôt de travaux de construction d’une nouvelle galerie devenus nécessaires pour répondre aux exigences de la compagnie d’assurance du travailleur. Selon lui, ces travaux ne constituent pas des travaux d’entretien au sens de l’article 165 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).
[7] Le membre issu des associations syndicales est d’avis que le but de la loi est de réparer les conséquences d’une lésion professionnelle. La preuve non contredite démontre que, avant son accident, le travailleur effectuait lui-même la tonte de gazon et les travaux relatifs à l’entretien de ses galeries. Suite à son accident du travail, il n’est plus capable d’effectuer ses travaux. Dans ces circonstances, les frais relatifs à la main-d’œuvre pour la tonte de pelouse et à l’entretien des galeries sont remboursables pour l’année 2003.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[8] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a droit au remboursement des frais engagés pour la tonte de pelouse et pour la réparation des galeries du domicile du travailleur pour l’année 2003.
[9] L’article 165 de la loi prévoit ce qui suit :
165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.
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1985, c. 6, a. 165.
[10] Il ressort de cette disposition que les conditions d’ouverture au remboursement des frais d’entretien courant du domicile sont :
- le travailleur doit avoir subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d’une lésion professionnelle;
- il est incapable d’effectuer des travaux d’entretien courant de son domicile qu’il effectuerait normalement lui-même si ce n’était pas de sa lésion professionnelle;
- les frais dont le remboursement est requis doivent être engagés pour faire exécuter des travaux d’entretien courant du domicile.
[11] En l’espèce, la preuve démontre que le travailleur a subi un accident du travail au dos le 1er décembre 1989. Suite à cet accident, le travailleur subit quatre chirurgies au dos. La CSST accepte six réclamations pour récidive, rechute ou aggravation dont la dernière survient le 24 avril 1997.
[12] Suite à cette dernière lésion, il subsiste un déficit anatomo-physiologique total, excluant le préjudice esthétique, de 33 %. Le travailleur se voit reconnaître des limitations fonctionnelles de classe IV, soit :
- éviter de soulever, porter, tirer, pousser de façon répétitive ou fréquente des charges de plus de cinq kilogrammes;
- éviter de marcher longtemps;
- éviter de garder la même posture, debout ou assise, plus de 30 à 60 minutes;
- éviter de travailler en position instable (échafauds [sic], échelles, escaliers);
- éviter les mouvements répétitifs des membres inférieurs;
- éviter de marcher sur un terrain accidenté;
- éviter de faire des activités qui demandent une concentration continue.
[13] Le 12 novembre 1998, la CSST décide qu’elle n’est pas en mesure de déterminer un emploi convenable au travailleur. Dans ces circonstances, elle conclut qu’il a droit aux indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de 68 ans, celles-ci diminuant graduellement à partir de l’âge de 65 ans.
[14] Au mois de juin 2003, le travailleur demande à la CSST de lui rembourser les frais encourus pour l’entretien de la pelouse et pour les travaux de réparation et de peinture des galeries situées à l’avant et à l’arrière de sa maison.
[15] La preuve non contredite démontre que le travailleur est propriétaire de sa maison depuis plus de vingt ans. Avant son accident du travail en 1989, il tondait lui - même le gazon. Suite à son accident du travail, c’est son garçon qui l’aidait à faire ces travaux. Son fils est déménagé depuis peu à l’extérieur de la région. C’est pour cette raison qu’il n’avait pas fait une telle réclamation à la CSST avant 2003.
[16] La CSST refuse le remboursement des frais relatifs à la tonte de pelouse au motif que le travailleur peut le faire à son rythme. Elle considère donc qu’il ne rencontre pas la deuxième condition pour l’application de l’article 165 de la loi.
[17] La Commission des lésions professionnelles est plutôt d’avis que le travailleur n’a pas la capacité de tondre lui-même le gazon. Elle considère que cette activité contrevient à différentes limitations fonctionnelles du travailleur dont celles d’éviter de tirer et de pousser de façon répétitive ou fréquente des charges de plus de cinq kilogrammes, d’éviter de faire des mouvements répétitifs des membres inférieurs et d’éviter de faire des activités qui demandent une concentration continue.
[18] Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles considère que la décision de la CSST est mal fondée et que le travailleur a droit au remboursement des frais engagés pour la tonte de la pelouse.
[19] Par ailleurs, en ce qui concerne le remboursement des frais engagés pour les travaux de réparation des galeries, la CSST décide que le travailleur n’y a pas droit au motif qu’il s’agit de frais de rénovation qui ne constituent pas des frais d’entretien courant du domicile.
[20] La preuve testimoniale non contredite démontre que le domicile du travailleur comporte deux galeries en bois. Celles-ci font partie intégrante des sorties avant et arrière de la maison. Au fil des ans, le travailleur changeait des planches ou des morceaux usés des galeries afin de les conserver en bon état.
[21] Avant son accident du travail, il faisait lui-même ces travaux et après son accident, son fils l’aidait à les faire.
[22] À l’été 2003, la preuve démontre que le travailleur a fait réparer sa galerie arrière et a fait appliquer une teinture. En ce qui concerne la galerie située à l’avant de son domicile, le bois était pourri. Il a dû faire reconstruire et reteindre la galerie. Le travailleur affirme qu’il s’agit de deux issus de secours qui doivent être tenus en bon état. Le montant total pour les travaux de réparation des deux galeries s’élève à 225,00 $.
[23] Dans ces circonstances, contrairement à la CSST, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que les travaux de réparation et de teinture des galeries de son domicile constituent des travaux d’entretien courant du domicile.
[24] Pour ces raisons, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a droit au remboursement des frais relatifs à la main-d’œuvre pour la tonte de la pelouse et pour la réparation des galeries de sa maison pour l’année 2003, dans le respect de la limite monétaire annuelle imposée par la loi.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête de monsieur André Lavoie (le travailleur);
INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 21 janvier 2004 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement des frais engagés pour la tonte de pelouse et la réparation des galeries de son domicile dans le respect de la limite monétaire annuelle imposée par la loi.
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Me Monique Lamarre |
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Commissaire |
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