Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Saint-Jérôme

9 décembre 2005

 

Région :

Laurentides

 

Dossier :

253880-64-0501

 

Dossier CSST :

121836530

 

Commissaire :

Me Thérèse Demers

 

Membres :

Alain Allaire, associations d’employeurs

 

Normand Stampfler, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Normand Berthiaume

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Villa Val des Arbres

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 25 janvier 2005, monsieur Normand Berthiaume (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue le 19 janvier 2005 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST rejette la demande de révision soumise par le travailleur, confirme sa décision initiale du 19 novembre 2004 et refuse de lui rembourser les frais relatifs à l’achat futur d’un abri d’auto (un Tempo) au motif que cet acquisition n’est pas autorisée par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[3]                La Commission des lésions professionnelles convoque ensuite les parties à une audience devant avoir lieu le 24 octobre 2005 à 11 heures.  À cette date, ni le travailleur ni l’employeur, la société Villa Val des Arbres, s’y présente, ne justifie son absence et ne demande à être entendue à une autre date.  En pareilles circonstances, la commissaire et les membres issus des associations syndicales et d’employeurs désignés à cette affaire procèdent sur dossier.

[4]                Quelques heures plus tard, le travailleur, par voie téléphonique, demande une suspension du délibéré dans le but de produire le dernier Rapport d’évaluation médicale qu’il détient.  Le tribunal accueille sa demande et le 31 octobre 2005, sur réception dudit rapport, recueille l’avis des membres issus des associations syndicales et d’employeurs et prend le tout en délibéré.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[5]                Dans sa requête, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître qu’il a droit au remboursement des frais qu’il pourrait éventuellement encourir pour l’achat d’un abri d’auto.

LES FAITS

[6]                Le 31 décembre 2001, le travailleur, âgé de 36 ans, occupe un emploi d’aide à l’entretien ménager lorsqu’il est victime d’un accident du travail.  Le lit d’hôpital qu’il s’affaire à déplacer, bascule et lui écrase la main droite.

[7]                En raison de cette lésion professionnelle, le travailleur subit une exploration et un drainage des tendons extenseurs des 2e, 3e, 4e et 5e doigts et développe une ténosynovite et une algodystrophie réflexe à la main droite.

[8]                Le 18 juillet 2002, l’ergothérapeute I. Roy évalue le travailleur et recommande diverses mesures dont certaines visent à adapter son véhicule car elle estime qu’il ne peut pas conduire et l’opérer de manière sécuritaire compte tenu de l’impotence de son bras droit.  Elle précise que la conduite avec un seul membre, surtout s’il s’agit du  gauche, accroît le risque d’accidents puisque les commandes se situent principalement à droite.

[9]                Le 30 juillet 2002, le docteur B. Chartrand produit un Rapport final et un Rapport d’évaluation médicale.  Il estime que la contusion, l’hématome, le sérome, l’algodystrophie réflexe et la ténosynovite subis par le travailleur à la main droite entraînent une impotence complète et permanente de cette main.  Il octroie un déficit anatomophysiologique de 17,05 % et un préjudice esthétique de 8 % auxquels s’ajoutent des déficits de 3,6 % et de 1,2 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie, le tout pour une atteinte permanente à l’intégrité physique globale de 29,85 %.

[10]           La CSST rend ensuite une décision confirmant ces atteintes et limitations fonctionnelles et verse au travailleur une indemnité pour dommages corporels de 19 029,67 $.

[11]           La CSST reconnaît également que le travailleur a droit à la réadaptation que requiert son état, et ce, conformément au chapitre IV, articles 145 et suivants de la loi.

[12]           La CSST retient notamment que le travailleur a besoin d’une aide partielle à domicile et lui alloue une somme de 234 $ à chaque deux semaines pour obtenir les services d’une personne de son choix, et ce, selon l’horaire qui lui convient.  Divers équipements et aides techniques lui sont également fournis pour faciliter l’accomplissement d’activités de la vie quotidienne.  Les frais déboursés relativement à l’entretien courant du domicile qu’il habite, tel le déneigement de l’entrée, du trottoir et du balcon, lui sont également remboursés en vertu de l’article 165 de la loi.

[13]           La CSST autorise également le travailleur à suivre un programme visant un transfert de dominance afin d’améliorer sa dextérité de la main gauche.  Il était droitier auparavant.  Malheureusement, dans le cadre de cet exercice, il développe une capsulite à l’épaule gauche.  De plus en plus restreint dans ses gestes et activités, le travailleur se décourage et doit également être suivi pour une dépression.

[14]           Le 16 octobre 2002, la CSST reconnaît que ces lésions apparues le ou vers le 10 septembre 2002 constituent des récidives, rechutes ou aggravations de sa lésion initiale.

[15]           Au cours des années 2002 et 2003, le travailleur requiert à moultes reprises que la CSST défraie les coûts relatifs à l’adaptation de son véhicule automobile.  Le 17 janvier 2003, la CSST refuse catégoriquement de donner suite à cette demande.  Elle considère que le travailleur ne devrait plus conduire en raison des effets secondaires engendrés par sa médication et soutient que les médecins partagent son avis.  Rien n’indique que cette décision a été contestée par le travailleur.

[16]           Le 28 janvier 2003, le docteur B. Chartrand complète le Rapport d’évaluation médicale relativement à la capsulite de l’épaule gauche et octroie un déficit anatomophysiologique de 10 % pour les ankyloses que le travailleur conserve à cette épaule, un pourcentage équivalent pour l’atteinte bilatérale dont il est porteur, de même qu’un pourcentage visant à le compenser pour la douleur et la perte de la jouissance de la vie qu’il a subies.  Quant aux limitations fonctionnelles, le docteur Chartrand indique que le travailleur ne doit plus faire un travail qui implique de manière fréquente des mouvements plus haut que l’horizontale ni un travail avec des poids de plus de 5 à 10 livres.  La CSST accepte cet avis et verse au travailleur l’indemnité pour dommages corporels correspondant à ces atteintes, soit une somme de 28 381,96$.

[17]           Le 8 février 2003, le docteur C. Nowakowski alloue une atteinte permanente à l’intégrité psychique de 18 % pour la dépression dont le travailleur a souffert.  Le 27 février 2003, la CSST verse au travailleur l’indemnité pour dommages corporels de 11 663,82 $ relativement à cette atteinte psychologique.

[18]           Le 1er mai 2003, la CSST reconnaît que le travailleur ne peut plus occuper un emploi à temps plein complet et s’engage à poursuivre le versement de l’indemnité de remplacement du revenu qu’il reçoit depuis son accident, et ce, jusqu’à ce qu’il est atteint l’âge de 68 ans.

[19]           Le 3 juillet 2003, le travailleur demande une avance de 15 000 $ à la CSST pour acquérir une nouvelle voiture.  Une attestation médicale de son médecin traitant à l’effet qu’il peut conduire sans aucune restriction est alors exigée par la CSST.  Cela fait, la CSST l’accommode et lui verse une avance de 8 800 $.  Il n’y a aucune preuve au dossier visant à établir que le véhicule acquis par le travailleur ait pu faire l’objet d’une mesure d’adaptation de quelque nature que ce soit.

[20]           Les 3 septembre, 20 novembre et 3 décembre 2003, le travailleur connaît des épisodes de récidive, rechute ou aggravation de ses lésions physiques et de sa lésion psychologique.

[21]           Plusieurs évaluations médicales sont ensuite produites relativement à l’augmentation de l’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique subie par le travailleur à ces occasions.

[22]           Les 3 et 23 février 2004, la CSST rend des décisions par lesquelles elle reconnaît que le travailleur conserve des atteintes physique et psychique de 97,80 % et de 42,75 % respectivement et verse au travailleur des indemnités pour dommages corporels additionnelles de 27 769,55 $ et 36 514,51 $.

[23]           Il ressort des évaluations médicales considérées aux fins de ces décisions que le travailleur présente alors des ankyloses très importantes aux niveaux des membres supérieurs.  Dans le Rapport d’évaluation médicale produit le 17 septembre 2003, le docteur Chartrand relate la condition du travailleur au niveau des membres supérieurs en ces termes :

« Monsieur tient son bras droit constamment en flexion avec des doigts qui nous apparaissent immobiles, et le coude près de son corps […].

 

Le poignet, lui, est complètement ankylosé.  La flexion du coude a une perte de 40 degrés, l’extension a une perte de 110 degrés et la pronation a une perte de 65 degrés.

 

Au niveau de l’épaule droite, les mouvements sont fortement diminués, l’abduction a une perte de 150 degrés, il en va de même de l’élévation.  La rotation interne a une perte de 20 degrés et la rotation externe est inexistante.  La rétropulsion est à 0 degré.

 

Au niveau de l’épaule gauche, l’abduction a une perte de 90 degrés ; l’élévation a une perte de 110 degrés ; la rotation interne est normale et la rotation externe a une perte de 50 degrés.  Il y a une faiblesse assez importante contre résistance à toutes les articulations du membre supérieur gauche.

 

 

[24]           Le docteur Chartrand ajoute que le travailleur est très perturbé à cause de cette perte additionnelle de capacité et « qu’il se demande comment cela va finir, s’il va paralyser des deux bras comme il a l’impression de l’être du membre supérieur droit ».

[25]           Le 6 avril 2004, le travailleur soumet un projet à la CSST alléguant qu’il cherche à s’assurer d’un revenu annuel au moins équivalent aux indemnités annuelles qu’il perçoit.  Il désire acquérir 4 immeubles, dont la résidence qu’il habite, louer le tout par la suite et vivre de ses revenus de location.  Pour mener son projet à terme, il demande à la CSST de capitaliser l’indemnité de remplacement du revenu qu’elle s’est engagée à lui verser pour les trente prochaines années et de lui verser une somme de 378 000 $.  La décision rendue par la CSST, si elle existe, n’est pas versée au dossier.

[26]           Le 30 septembre 2004, l’ergothérapeute I. Roy réévalue le travailleur.  Elle conclut que l’aide partielle à domicile précédemment accordée n’est plus suffisante et doit être augmentée puisque le travailleur n’est même plus capable de s’occuper de son hygiène personnelle ni de ses repas, même ceux préparés à l’avance.  Elle note que le travailleur n’utilise pas du tout son bras droit et que tous les mouvements accomplis avec le bras gauche entraînent une douleur estimée à 10/10 et que ceux impliquant l’épaule gauche sont particulièrement limités.  Quant à la conduite automobile, elle relate que le travailleur déclare utiliser son auto à chaque jour sur de courte distance, mais que dans 70 % des cas ce n’est pas lui qui conduit.  Quant au déneigement de ce véhicule, elle rapporte l’incapacité complète du travailleur à effectuer cette opération.  Cela étant, elle recommande que cette tâche soit effectuée par un tiers ou que le travailleur bénéficie d’un abri d’auto.

[27]           À la suite de ce rapport, la CSST augmente à 354,61 $ l’allocation d’aide à domicile versée à chaque deux semaines au travailleur.  Le tribunal ne dispose de la grille de calcul utilisée par la CSST dans ce dossier et ne peut vérifier si une partie de cette somme a été allouée en tenant compte des besoins de déneigement du véhicule du travailleur par l’entremise de l’aide à domicile.

[28]           Le 2 novembre 2004, le docteur Y. Martel rédige une petite note qui se lit comme suit : « En raison de ses limitations fonctionnelles, le travailleur devrait avoir un abri d’auto pour ne pas avoir à déneiger sa voiture ».

[29]           Après l’audience, le travailleur soumet un Rapport d’évaluation médicale signé par le docteur N. Taillefer le 2 juillet 2005 relativement à des cervicalgies secondaires à la capsulite de l’épaule gauche et suggère l’octroi d’une atteinte permanente à l’intégrité physique additionnelle de 2 %.

[30]           Dans ce rapport, le docteur Taillefer mentionne que les malaises à l’épaule gauche accompagnés de cervicalgies secondaires auraient été exacerbés au cours des 2 ou 3 opérations de déneigement de véhicule effectuées par le travailleur au cours de l’hiver 2004.

L’AVIS DES MEMBRES

[31]           Le membre issu des associations syndicales estime que le travailleur a droit au remboursement demandé puisque l’objectif principal de la loi est de voir à la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elles entraînent et qu’il est établi que le travailleur n’est plus en mesure de déneiger sa voiture, en raison des limitations fonctionnelles qu’il conserve.  Il accueillerait donc sa requête en vertu de l’article 1 de la loi.

[32]           Le membre issu des associations d’employeurs considère, pour sa part, que l’abri pour lequel le travailleur demande un remboursement n’est pas couvert par l’article 165 ni par un autre article de la loi et rejetterait sa requête.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[33]           Le tribunal doit déterminer si le travailleur a droit au remboursement des frais qu’il souhaite engager pour acheter un abri d’auto.

[34]           Dans ses écrits, le travailleur ne précise pas plus amplement les motifs soutenant sa demande ni sur quelle disposition de la loi elle repose.  Dans la décision qu’il conteste, il est toutefois indiqué qu’il prétend qu’un abri d’auto est recommandé par son médecin et par l’ergothérapeute mandaté par la CSST, qu’il s’agit de la solution idéale pour pallier à son entière incapacité à déneiger sa voiture et que cette solution s’avèrerait économique puisqu’elle réduirait les frais d’entretien courant de son espace de stationnement à domicile.

[35]           La CSST soutient, pour sa part, qu’elle ne peut pas faire droit à cette demande puisqu’il ne s’agit pas d’une mesure prévue à la loi.  Elle précise que l’article 165 de la loi vise le remboursement exclusif des frais qu’un travailleur engage, pour faire exécuter par un tiers, les travaux d’entretien courant de son domicile, qu’il est incapable d’effectuer par lui-même à la suite de sa lésion professionnelle, ce qui exclurait l’achat de biens.

[36]           La CSST ne conteste pas le fait que le travailleur présente une atteinte permanente grave et que les limitations fonctionnelles qu’il conserve sont suffisamment importantes pour l’empêcher d’accomplir divers travaux et tâches qu’il effectuait avant la survenance de sa lésion professionnelle, dont le déneigement de sa voiture.  Bien au contraire, elle reconnaît qu’il a droit à la réadaptation que requiert son état et lui octroie une allocation significative pour qu’il bénéficie en tout temps d’une aide personnelle à domicile.  Elle le rembourse également des frais qu’il engage pour voir à l’entretien courant de son domicile, dont ceux reliés au déneigement de son stationnement, de son balcon et de sa galerie.

[37]           Le litige porte exclusivement sur la demande soumise par le travailleur quant au remboursement relatif à l’achat d’un abri d’auto en vertu de l’article 165 ou d’une autre disposition de la loi.

[38]           L’article 165 de la loi se lit comme suit :

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[39]           Compte tenu de la clarté du libellé de cette disposition, le présent tribunal retient les prétentions de la CSST à l’effet qu’elle ne permet pas au travailleur d’obtenir le remboursement qu’il demande et conclut qu’elle ne couvre que les frais engagés pour obtenir les services d’un tiers.

[40]           Le fait que l’article 165 de la loi ne vise pas les frais engagés pour la location ou l’acquisition d’un bien est d’ailleurs déjà été établi par l’affaire Cardinal et Maranda Labrecque[2] où un travailleur, porteur de limitations fonctionnelles importantes au niveau des membres supérieurs, s’est vu refuser le remboursement des frais engagés pour la location d’un abri d’auto.

[41]           Tel que le mentionne la jurisprudence[3] majoritaire de la Commission des lésions professionnelles, cette disposition de la loi permet toutefois à un travailleur d’obtenir le remboursement des frais engagés pour l’installation automnale et la désinstallation printanière d’un abri d’auto qu’il avait l’habitude d’effectuer par lui-même avant de subir une lésion professionnelle.  Ce n’est toutefois pas ce que le travailleur demande en cette instance et à tout événement, la preuve au dossier ne permet de croire qu’il a déjà effectué de tels travaux auparavant ni, à l’évidence, qu’il possède déjà cet équipement.

[42]           Dans le présent dossier, la preuve révèle toutefois que le travailleur a droit au remboursement des frais qu’il engage pour faire déneiger son entrée, sa galerie et son balcon.  Cela étant, le tribunal se demande pourquoi, ce dernier ne formule pas une demande similaire relativement au déneigement de son véhicule car, sous réserve des critères, conditions et limites monétaires prévues à l’article 165 de la loi, il pourrait peut - être obtenir de l’aide à cet égard.  En pareilles circonstances, il appartiendrait en premier lieu à la CSST de décider du bien-fondé de sa démarche et comme ce n’est pas l’objet du débat, le présent tribunal ne peut pas actuellement se prononcer à cet égard.

[43]           Le présent tribunal considère également que la demande formulée par le travailleur ne peut être accueillie sous l’égide d’un autre article de la loi.

[44]           L’acquisition d’un abri d’auto ne saurait constituer, contrairement aux abris recouvrant les rampes d’accès à la porte principale d’une résidence[4], une mesure d’adaptation du domicile car cet équipement n’est pas nécessaire et ne constitue pas la solution appropriée pour permettre au travailleur en l’espèce d’entrer et de sortir de manière autonome de sa résidence.  Elle ne répond pas, de ce fait, aux critères exigés par l’article 153 de la loi qui se lit comme suit :

153. L'adaptation du domicile d'un travailleur peut être faite si:

 

1°   le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique;

 

2°   cette adaptation est nécessaire et constitue la solution appropriée pour permettre au travailleur d'entrer et de sortir de façon autonome de son domicile et d'avoir accès, de façon autonome, aux biens et commodités de son domicile; et

 

3°   le travailleur s'engage à y demeurer au moins trois ans.

 

Lorsque le travailleur est locataire, il doit fournir à la Commission copie d'un bail d'une durée minimale de trois ans.

__________

1985, c. 6, a. 153.

 

 

[45]           Rien n’indique au surplus que le travailleur possède un bail d’une durée minimale de 3 ans pour la résidence qu’il habite.  Bien au contraire, le dernier projet soumis par le travailleur auprès de la CSST tend à démontrer que cette résidence est à vendre et qu’il espère l’acquérir pour la louer par la suite.

[46]           L’acquisition d’un abri d’auto ne saurait également constituer une mesure accessoire à une mesure principale antérieurement accordée au travailleur, notamment, à une mesure visant l’adaptation de son véhicule en application de l’article 152 de la loi, car rien n’indique qu’un tel droit lui fut reconnu.  Tel qu’il appert de la décision rendue le 17 janvier 2003, cela lui a, au contraire, été refusé.

[47]           À tout événement, le tribunal considère que l’acquisition d’un abri « Tempo » n’augmenterait pas l’autonomie de conduite du travailleur, ce qui est le but de cette mesure de réadaptation, puisque cela ne pourrait pas pallier aux faits qu’il ne présente presque plus de mobilité au niveau des membres supérieurs, étant porteur d’une atteinte permanente à l’intégrité physique de près de 100 %.  Le travailleur a d’ailleurs admis que ces atteintes et limitations de mouvements l’empêchent maintenant de conduire dans plus de 70 % de ses déplacements.

[48]           Finalement, même dans le cas où le travailleur possèderait encore une certaine capacité de conduite malgré les importantes limitations fonctionnelles qu’il conserve, ce qui n’est pas démontré de manière probante par ailleurs par le bref avis fourni par le docteur Martel, le tribunal considère que l’acquisition d’un abri Tempo ne lui permettrait pas d’éviter tout forme d’opération de déneigement de son véhicule car, au Québec, la neige tombe partout, n’importe quand et souvent sans prévenir et il est fort probable qu’elle risque de surprendre le travailleur lors de ses déplacements hivernaux.

[49]           Puisque la solution proposée par le travailleur, pour éviter d’avoir à déneiger son véhicule, n’apparaît pas appropriée à l’ensemble de ses besoins et, n’est pas suffisante pour pallier en tout temps à son entière incapacité, le tribunal conclut que la CSST était justifiée de ne pas l’accorder sous le couvert du pouvoir discrétionnaire qu’elle détient en vertu de l’article 184, paragraphe 5 de la loi.

[50]           Cette conclusion s’avère d’autant plus pertinente dans le contexte où la dernière récidive, rechute ou aggravation alléguée par le travailleur aurait, selon le docteur Taillefer, été engendrée par les 2 ou 3 activités de déneigement effectuées par le travailleur au cours de l’hiver 2004.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requêtesoumise le 25 janvier 2005, par monsieur Normand Berthiaume ;

CONFIRME la décision rendue le 19 janvier 2005 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais relatifs à l’achat d’un abri d’automobile.

 

 

 

__________________________________

 

Me Thérèse Demers

 

Commissaire

 

 



[1]          L.R.Q., c.A-3.001

[2]          (C.L.P., 2004-07-07) AZ-50262117 7

[3]          Julien et Construction Nationair inc., (C.L.P. 2000-08-07) AZ-00302304, C.L.P.E. 2000 LP-54 ; Canada ltée, Frigault et Commission scolaire de Montréal (C.L.P., 2001-05-25) AZ-01300986  ; Falduto et Outillage 7 Matrice Emmanuel inc. (C.L.P., 2003-03-31) AZ-02307302  ; Fatterly et Dynea Canada ltée (C.L.P., 2003-10-14) AZ-50207285 .

[4]          Dans l’affaire Julien et Construction Nationair inc., C.L.P., 120819-32-9907, 7 août 2000, Me Guylaine Tardif, il est indiqué que la CSST a défrayé le coût relatif à l’achat d’abris recouvrant les rampes d’accès modifiées de la résidence du travailleur visé et se véhiculant en fauteuil roulant, puisque celui-ci doit pouvoir entrer et sortir en tout temps dans son domicile, et ce, de manière autonome.

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