Décision

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Zinga Ditomene c. Boulanger

2013 QCCQ 842

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LONGUEUIL

LOCALITÉ DE

LONGUEUIL

« Chambre Civile »

N° :

505-22-017552-102

 

DATE :

Le  8 février 2013

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

CLAUDE LAPORTE, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

DAVID ZINGA DITOMENE

Partie demanderesse

c.

Me LOUISE BOULANGER

          Partie défenderesse

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]   David Zinga Ditomene réclame 65 000,00 $ en dommages-intérêts de la défenderesse à qui il reproche d'avoir manqué à ses obligations à titre d'enquêteur dans le cadre d'une enquête relative à des plaintes pour harcèlement psychologique  portées contre lui.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[2]   Le dossier soulève les questions suivantes :

1.  Me Boulanger était-elle tenue, dans le cadre de l'enquête qu'elle a menée, de respecter les principes de l'équité procédurale envers le demandeur?  Si oui, dans quelle mesure?

2.  La défenderesse a-t-elle respecté les règles de l'équité procédurale?

3.  Dans l'éventualité d'une réponse positive à cette dernière question, Ditomene pouvait-il poursuivre en dommages la défenderesse?  Celle-ci bénéficie-t-elle d'une immunité?

4.  Le demandeur a-t-il démontré le lien causal entre les fautes alléguées et les dommages qu'il prétend avoir subis?

5.  À quels dommages a droit le demandeur, le cas échéant?

 

LES FAITS

(a) Contexte général

[3]   En 2002 le gouvernement du Québec adoptait de nouvelles dispositions législatives concernant le harcèlement psychologique en milieu de travail, le tout tel qu'il appert des articles 81.18 à 81.20 de la Loi sur les Normes du Travail (la Loi) :

 

«81.18. Pour l'application de la présente loi, on entend par «harcèlement psychologique» une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l'intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne, pour celui-ci, un milieu de travail néfaste.

 

Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et produit un effet nocif continu pour le salarié.



81.19. Tout salarié a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique.

 

L'employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu'une telle conduite est portée à sa connaissance, pour la faire cesser.



81.20. Les dispositions des articles 81.18, 81.19, 123.7, 123.15 et 123.16 sont réputées faire partie intégrante de toute convention collective, compte tenu des adaptations nécessaires. Un salarié visé par une telle convention doit exercer les recours qui y sont prévus, dans la mesure où un tel recours existe à son égard.

 

En tout temps avant le délibéré, une demande conjointe des parties à une telle convention peut être présentée au ministre en vue de nommer une personne pour entreprendre une médiation.

 

Les dispositions visées au premier alinéa sont aussi réputées faire partie des conditions de travail de tout salarié nommé en vertu de la Loi sur la fonction publique (chapitre F-3.1.1) qui n'est pas régi par une convention collective. Ce salarié doit exercer le recours en découlant devant la Commission de la fonction publique selon les règles de procédure établies conformément à cette loi. La Commission de la fonction publique exerce à cette fin les pouvoirs prévus aux articles 123.15 et 123.16 de la présente loi.

 

Le troisième alinéa s'applique également aux membres et dirigeants d'organismes.»

 

[4]   L'article 123.15 de la loi se lit tel que suit :

«Si la Commission des relations du travail juge que le salarié a été victime de harcèlement psychologique et que l'employeur a fait défaut de respecter ses obligations prévues à l'article 81.19, elle peut rendre toute décision qui lui paraît juste et raisonnable, compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, notamment:

 

 1° ordonner à l'employeur de réintégrer le salarié;

 

 2° ordonner à l'employeur de payer au salarié une indemnité jusqu'à un maximum équivalant au salaire perdu;

 

 3° ordonner à l'employeur de prendre les moyens raisonnables pour faire cesser le harcèlement;

 

 4° ordonner à l'employeur de verser au salarié des dommages et intérêts punitifs et moraux;

 

 5° ordonner à l'employeur de verser au salarié une indemnité pour perte d'emploi;

 

 6° ordonner à l'employeur de financer le soutien psychologique requis par le salarié, pour une période raisonnable qu'elle détermine;

 

 7° ordonner la modification du dossier disciplinaire du salarié victime de harcèlement psychologique.»

 

[5]   En 2006 le Cegep de Sherbrooke (le Cegep) adoptait une Politique visant à contrer le harcèlement psychologique dans son établissement[1] (la Politique).

(b)  Trame factuelle

[6]   De 1993 à septembre 2007 Ditomene enseigne au Cegep où il obtient sa permanence en 2006.

[7]   Me Louise Boulanger est reçue avocate en 1988.  En 2004 elle se spécialise en harcèlement psychologique après avoir suivi un cours donné par le Barreau du Québec (Formation Permanente du Barreau), en l'occurrence par Me Marie-France Chabot.

[8]   Même avant l'adoption des nouvelles dispositions de la Loi, Me Boulanger avait déjà participé à une dizaine d'enquêtes visant des cas de harcèlement.

[9]   À l'automne 2006 un appel de candidatures est lancé par le Cegep pour lui permettre de se constituer une banque d'enquêteurs.

[10]        Un premier mandat est confié à Me Boulanger en décembre 2006.  Il a trait à la plainte du 22 novembre 2006 pour harcèlement psychologique de Henri Beauregard contre Ditomene.

[11]        Me Boulanger relate qu'un comité d'enquête est alors formé, lequel est composé entre autres personnes de Jean-François Lafleur qui agira comme coordonnateur-ressources humaines du Cegep, Suzanne Gosselin sera sa co-enquêtrice, Guy Lemire  représente le corps professoral et elle-même.

[12]        Elle soutient que ses services ont été retenus pour "assurer l'impartialité de la démarche et à cause de son expertise".  Elle ajoute qu'il s'agit d'une enquête administrative qui obéit à des règles différentes de celles qui régissent la Commission sur les normes du travail "mais qu'il y a des incontournables" comme, par exemple, le respect de l'équité et de la confidentialité.

[13]        Des contrats interviennent entre elle et le Cegep le 28 mars 2007 concernant les cas Beauregard et Létourneau.  Dans ces contrats il y est indiqué que le Cegep mandate Me Boulanger pour recueillir la version des faits des plaignants de même que des personnes visées, plus celle des témoins.  Elle a aussi la tâche d'analyser le bien-fondé des allégations et de présenter un rapport contenant son analyse, ses conclusions et ses recommandations.

[14]        Me Boulanger relate que toutes les enquêtes débutent par la réception d'un formulaire de plainte complété par le plaignant selon le formulaire prévu à l'annexe III de la Politique.  Une rencontre a lieu par la suite avec le plaignant à qui on demande sa version des faits et s'il a des précisions à apporter à sa plainte écrite.  La personne visée par la plainte est ensuite rencontrée afin qu'elle donne son point de vue.  Si nécessaire on fera de même avec les témoins.

 

 (i)  Version du demandeur

[15]        Ditomene relate que le 22 février 2007 vers 16h00, il reçoit un appel de Me Louise Boulanger qui l'informe que deux plaintes avaient été déposées contre lui par Henri Beauregard et Thérèse Létourneau.  Il rapporte que les propos de Me Boulanger laissent d'abord à entendre qu'il s'agissait d'harcèlement sexuel puis, après ses protestations,  elle lui parle de harcèlement psychologique.  Il informe alors Me Boulanger qu'il est malade et qu'il prend des médicaments.

[16]        Le demandeur rapporte que cet appel, "long et pénible," l'a beaucoup perturbé.

[17]        Entre le 22 février et le 27 avril il reçoit quatre lettres et courriels de Me Boulanger qu'il qualifie d'"incomplets" puisque ni la Politique du Cegep ni les plaintes n'accompagnaient ces envois.  Ceci le perturbe car il n'est pas en mesure de lui donner une date de disponibilité rapprochée.

[18]        Il prétend que la Politique stipule qu'il faut transmettre une copie des plaintes et que ce qu'il reçoit éventuellement de Me Boulanger n'est pas conforme à la Politique ni à l'annexe III.  Il s'agirait, selon lui, d'une "faute grave" de sa part.

[19]        La lettre du 19 mars 2007 - qui prévoit une rencontre avec le comité le 23 mars - arrive le 23 mars au bureau de poste du Marché Jovi  à Gatineau.  Ditomene en prend connaissance en après-midi seulement.  Ceci l'amène à communiquer avec Me Boulanger et une autre date est fixée par Boulanger, soit le 30 mars. 

[20]        L'avis de convocation du 23 mars[2], pour une rencontre le 30 mars à Montréal est reçu le 26 mars mais la situation médicale de Ditomene, qui s'est empirée, ne lui permet pas de se rendre de Gatineau à Montréal, ce dont il informe la défenderesse.

[21]        La lettre du 27 mars[3] - pour une rencontre le 30 mars à Gatineau cette fois - est reçue le 30 mars de sorte qu'il ne peut se présenter.  Il ajoute ne pas avoir pris connaissance de l'envoi par courriel de cette même lettre.

[22]        Il communique de nouveau avec Me Boulanger et lui fait savoir qu'il n'est pas très content.  Celle-ci ne l'était guère plus se souvient-il.  Elle lui suggère de communiquer avec St-Cyr, ce qu'il fait vers le 10 avril.  Il prend alors l'engagement de se présenter le 27 avril devant le comité, à Sherbrooke cette fois-ci.

[23]        Lors de la rencontre du 27 à laquelle sont présents Claude Tétreault (qui accompagne Ditomene), Marier, Lemire et Me Boulanger, Ditomene a en sa possession une enregistreuse car il entend enregistrer sa propre déposition, ce à quoi Me Boulanger s'objecte, question de "confidentialité" relate-t-il.  Ditomene insiste mais accepte finalement un compromis : elle lui montrera ses notes de sa déposition ce qui l'amène à ne prendre lui-même aucune note.  Il ajoute que  Me Boulanger n'a  cependant pas respecté son engagement.

[24]        Il refuse de signer l'engagement à la confidentialité parce que ce n'est pas prévu à la Politique.

[25]        Il précise que l'objet de la rencontre du 27 avril était de traiter des deux plaintes logées à son égard et de ses propres plaintes.

[26]        Le comité commence par les plaintes logées contre Ditomene. 

[27]        Ditomene prend d'entrée de jeu la position qu'elles sont "sans droit" car, au moment où elles sont déposées, en novembre 2006 et en décembre 2006, la Politique n'est pas encore en vigueur. 

[28]        Il soumet une seconde objection basée sur le fait que les plaintes ne lui ont pas été remises : il exige qu'on lui en fournisse une copie conforme, ce que refuse la défenderesse.  Malgré son insistance la défenderesse refuse toujours.  Elle lui aurait néanmoins furtivement exhibé une partie de la plainte originale. 

[29]        Il fait également part au Comité que la mention des "25, 26 et 27 novembre" (re : manque de collaboration de sa part - dossier Létourneau) sur la plainte est fausse car ces jours-là correspondent à une fin de semaine.

[30]        Il rapporte aussi que la plainte de Beauregard porte la date du 22 novembre mais contient un événement du 23 novembre.

[31]        Il indique au comité qu'il n'y a eu qu'une seule poursuite pour libelle diffamatoire contrairement à ce qu'on peut lire sur le document qui lui fut remis (concernant la plainte de Thérèse Létourneau).

[32]        Compte tenu de la position adoptée par le comité ( refus de lui remettre une copie des plaintes et nécessité de signer un document de confidentialité) il refuse de donner sa version des faits malgré l'insistance du comité. "J'ai refusé de continuer ce jeu-là" précise-t-il à l'audience.

[33]        Le comité se retire et lui demande de nouveau de s'expliquer, ce qu'il refuse, ajoutant qu'il n'avait pas toute l'information nécessaire.

[34]        En ce qui a tait à ses propres plaintes il rapporte les incidents à leur base et  les conséquences qui en ont résulté pour lui.

[35]        À l'audience il se plaint du fait que Suzanne Gosselin a enquêté et que rien ne transpire de cela dans les rapports.

[36]        C'est vers le 4 juin suivant que Ditomene reçoit les rapports des enquêteurs.  Il communique immédiatement avec les autorités du Cegep pour leur faire part qu'il n'est pas d'accord avec les conclusions.

[37]        Le 4 juillet 2007 Ditomene est informé par son employeur qu'il est suspendu.  Le 19 juillet suivant il est congédié au moyen d'une lettre (D-5) qui lui est transmise par huissier :

«Monsieur,

Conformément aux prescriptions de la clause 5-18.02 de la convention collective et suite à votre suspension pour enquête qui vous fut imposée le 4 juillet 2007.

Suite au CRT du 11 juillet 2007 auquel vous avez dûment été convoqué pour faire valoir votre position relativement aux actes reprochés dans la lettre de suspension, vous avez décidé volontairement de na pas participer à ce CRT, mais plutôt de faire parvenir aux membres de celui-ci votre version des faits.

Conformément à la convention collective, le Cégep, après l'étude du cas, vous communique sa décision.

Lors de sa rencontre tenue le 19 juillet 2007, le comité exécutif du Cégep de Sherbrooke, sur proposition dûment appuyée, a résolu à l'unanimité de mandater le Service des ressources humaines de prendre les mesures nécessaires afin de mettre en œuvre votre congédiement.

Les motifs aux soutiens de votre congédiement sont les suivants :

·         dans le dossier de votre plainte de harcèlement psychologique (grief 4016) l'enquêteur rejette votre plainte et arrive à la conclusion que madame Thérèse Létourneau, madame Jocelyne Lacasse, monsieur Henri Beauregard, monsieur Yves Groleau, et monsieur Paul Lavoie ont subi du harcèlement psychologique de votre part;

·         dans le dossier de la plainte de harcèlement psychologique du 22 novembre 2006 déposée par monsieur Henri Beauregard, les enquêteurs arrivent à la conclusion que monsieur Henri Beauregard a subi du harcèlement psychologique de votre part;

·         dans le dossier de la plainte de harcèlement psychologique du 22 décembre 2006 déposée par madame Thérèse Létourneau, les enquêteurs arrivent à la conclusion que madame Thérèse Létourneau a subi du harcèlement psychologique de votre part;

Il s'agit de comportements graves et inacceptables en vertu de la mission éducative du Cégep de Sherbrooke et des obligations légales de celui-ci envers ses employés.

Ces comportements causent au Cégep et à certains de ses employés des préjudices qui par leur nature et leur gravité, nécessitent une intervention immédiate.

En conséquence et en vertu des dispositions pertinentes de la convention collective, nous vous informons que votre lien d'emploi avec le Cégep de Sherbrooke se termine le 19 juillet 2007.  Toutes les sommes dues vous seront versées lors de la paie du jeudi 16 août 2007.»

[38]        Il  conteste les deux mesures disciplinaires par des griefs qui sont "soumis" par son Syndicat mais qui ne sont pas "déposés".

[39]        À la suite de son congédiement il se présente à la Commission de l'Assurance-Emploi qui conclut après enquête qu'il n'y a pas eu "inconduite" de sa part.

[40]        Après la réception des rapports et des mesures disciplinaires il loge deux griefs.

[41]        Le 19 septembre 2008 il obtient une copie de la plainte originale produite par Beauregard.

[42]        Il ajoute que les rapports lui ont causé beaucoup de stress et que l'employeur les a utilisés, d'abord pour le suspendre, puis pour le congédier.

[43]        Il suggère enfin que le Syndicat aurait utilisé les rapports de Me Boulanger pour ne pas poursuivre ses griefs. 

 

(ii)  Version de Me Boulanger

[44]        Me Boulanger explique ne pas avoir remis l'original des plaintes à Ditomene compte tenu que ces documents contenaient des renseignements personnels et confidentiels.  Elle argue qu'elle a l'obligation de respecter la Loi sur la Protection des Renseignements Personnels Dans le secteur Privé[4].  Elle se confiera d'ailleurs à Lafleur à ce sujet en lui faisant valoir que la partie de la plainte concernant l'identité des témoins et l'enquête interne devait être retirée de l'envoi à Ditomene car cela pourrait s'avérer "dangereux".

[45]        La preuve révèle aussi que la défenderesse n'a reproduit aucun des éléments que l'on retrouve dans la section "témoins/éléments" des plaintes.

[46]        Dans la même optique, ajoute-t-elle, elle fait toujours signer des engagements à la confidentialité.  Ceci a été fait tant dans le cas de Beauregard que dans celui de Létourneau.

[47]        Peu de temps après le début de l'enquête Boulanger est informée que sa co-enquêtrice Gosselin ne peut plus agir et qu'il faut la remplacer, ce qui est fait à la mi-février[5] avec l'engagement de Jean-Pierre Marier.

[48]        Par la suite des rencontres ont lieux entre Boulanger, Lemire et Marier.  Elle fait part à ce dernier de l'information qu'elle a déjà colligée.  Lemire, quant à lui, fait état du fonctionnement du département où travaille Ditomene.

[49]        Avant de transmettre une première lettre à Ditomene Me Boulanger prend la décision de communiquer avec lui par téléphone car, dit-elle, elle "n'est pas confortable car le demandeur est en arrêt de travail", et elle veut "établir un contact humain". 

[50]        Lors de cet entretien du 22 février 2007 avec le demandeur elle commence par se présenter puis elle l'informe qu'il y a deux plaintes le concernant mais n'entre pas dans les détails des plaintes.  Elle nie avoir parlé de "harcèlement sexuel", à tout le moins, "pas d'entrée de jeu".

[51]        Selon elle une autre de ses tâches est de s'assurer de la capacité de témoigner de la personne visée par la plainte.  Elle reçoit en mars cette confirmation de la part du médecin traitant de Ditomene, de même que d'un psychiatre.

[52]        Le premier avis de convocation qu'elle transmet à Ditomene est sa lettre du 19 mars où le demandeur, qui réside à Gatineau, est convoqué pour le 23 mars à Montréal.  À la question de savoir pourquoi un si court délai a été donné à Ditomene elle répondra :

«Il n'y a pas de délai de prévu.  Il faut procéder avec célérité.» 

[53]        Elle joint avec sa lettre du 23 mars un résumé des plaintes de Beauregard et de Létourneau.  Selon elle, en vertu de la Politique, il faut informer la personne concernée des faits reprochés en même temps qu'il faut protéger la confidentialité.  Elle ne transmet pas de copie de la Politique parce que, selon elle, Ditomene ne lui aurait pas demandé.

[54]        Elle précise qu'à l'occasion certains faits sont ajoutés à la plainte puisqu'il s'agit d'informations additionnelles qu'elle reçoit ou de faits qui surviennent postérieurement à la plainte.  Ce fut précisément le cas dans le dossier Beauregard (une mention additionnelle) et le dossier Létourneau (deux mentions additionnelles).  De même, certains faits peuvent être retirés s'ils ne sont pas considérés comme étant des comportements hostiles.

[55]        Ditomene ne se présente pas à cette rencontre.  Vérification faite, Me Boulanger constate que sa lettre n'avait pas été reçue en temps utile par le demandeur.

[56]        La deuxième "assignation" est pour le 30 mars : elle est signifiée cette fois-ci par huissier.  La rencontre doit se tenir à Montréal.  Ditomene communique avec elle et l'informe que sa condition physique l'empêche de se rendre à Montréal.

[57]        Elle convainc le Cegep que la prochaine réunion devrait être tenue à Gatineau et transmet le 28 mars à Ditomene un courriel pour une rencontre le 30 en avant-midi.

[58]        Ditomene ne se présente pas à la rencontre du 30 mars à laquelle il est convoqué par le courriel transmis le matin du 28 mars.  Comme il ne se présente pas Me Boulanger lui laisse un message sur sa boite vocale. 

[59]        St-Cyr est informé de la situation et demande à Boulanger de mettre un terme à l'enquête et de préparer son rapport.

[60]        Rejointe par  Ditomene, Boulanger l'informe qu'il doit communiquer avec St-Cyr.   Ce dernier avise Me Boulanger le 23 avril que Ditomene souhaitait rencontrer le comité.   St-Cyr "veut lui donner une dernière chance" aux dires de la défenderesse.

[61]        La convocation est fixée au 27 avril, à Sherbrooke cette fois.

[62]        Boulanger est alors mise au courant des plaintes de Ditomene envers Jean-François Lafleur et Thérèse Létourneau.  On l'informe aussi qu'il faut traiter ensembles les quatre dossiers.

[63]        Ditomene se présente à la rencontre du 27 avril accompagné de Claude Tétreault, son représentant syndical.

[64]        Boulanger débute la rencontre par une mise en contexte où elle explique le processus qui sera suivi.  Tous acceptent de signer les engagements à la confidentialité qu'elle a préparés, sauf Ditomene qui exige également que le tout soit enregistré, ce que refuse Me Boulanger qui lui propose de lui remettre les notes qu'elle va prendre durant son témoignage.  Elle précise qu'elle demande toujours aux personnes impliquées se signer un tel document, que c'est prévu dans la Politique.

[65]        Elle demande ensuite à Ditomene de présenter son point de vue concernant les plaintes de Beauregard et Létourneau.  D'entrée en matière Ditomene remet en question la validité du processus et dénonce l'absence de professionnalisme de Me Boulanger.

[66]        Le comité se réunit en caucus où on constate le refus de Ditomene de présenter son point de vue.  Il est décidé de lui donner une dernière chance mais Ditomene refuse toujours.  C'est ainsi que se termine la rencontre du comité concernant les plaintes de Beauregard et Létourneau.

[67]        L'après-midi du 27 avril est consacré aux plaintes de Ditomene contre Lafleur et Létourneau : Ditomene élabore sur tous les faits qu'il énonce dans sa plainte.

[68]        Boulanger explique ensuite comment se fait la rédaction des rapports : on détermine d'abord si la conduite reprochée est vexatoire et, dans l'affirmative, on vérifie quels en sont les effets sur le plaignant et sur son milieu de travail.  Me Boulanger précise que s'il n'y a pas de conduite vexatoire on ne procède pas aux étapes subséquentes.  Ce fut incidemment le cas pour les plaintes de Ditomene alors que dans les cas des plaintes de Beauregard et de Létourneau, toutes les étapes ont été franchies et, ajoute-t-elle, "tous les critères étaient rencontrés".

[69]        Les rapports sont préparés et signés par les deux enquêteurs.  Celui concernant les plaintes de Beauregard et Létourneau porte la date du 20 mai 2007 et celui concernant la plainte de Ditomene, le 21 mai 2007.

[70]        À la question de savoir quelles sont les recommandations que Me Boulanger présente elle répond que lorsqu'il y a conclusion de harcèlement "il est assez délicat de suggérer une mesure car c'est à l'employeur, qui a le portrait global de l'employé, de décider", elle ne "s'avance pas là-dessus".

[71]        Elle ajoute, enfin, n'avoir jamais été consultée par le Cegep pour les sanctions à prendre contre Ditomene.

 

(iii)  Témoignage de Létourneau

[72]        Thérèse Létourneau a été entendue à la demande de Ditomene.  C'est en 1987 qu'elle entre au service du Cegep.

[73]        Elle dit avoir refusé que sa plainte soit remise au demandeur en raison des informations confidentielles qui s'y trouvent.  Les informations confidentielles ont trait, entre autre, aux conséquences du harcèlement de Ditomene sur son état de santé.

[74]        En ce qui a trait "au refus de collaborer de Ditomene", elle admet s'être trompée sur les dates mais réitère que les événements décrits se sont bel et bien produits.  Elle admet également ne pas avoir avisé la défenderesse des erreurs de dates.

(IV) Témoignage de Marier

[75]        Marier explique avoir été engagé par le Cegep pour faire partie de la banque de médiateurs.  Il reçoit un appel de Lafleur qui lui demande d'agir comme enquêteur même s'il ne fait pas partie de la banque d'enquêteurs.

[76]        Il confirme que Boulanger était la coordonnatrice du comité et qu'elle l'a "briefé" sur le dossier.

[77]        Il ajoute que c'est la défenderesse qui a rédigé le rapport qu'il a cosigné mais, ajoute-t-il, "on en a discuté abondamment".

[78]        Selon Marier le demandeur ne "collaborait pas" avec le comité.  Il ajoute : "Il ne semblait pas de bonne foi".

[79]        En contre-interrogatoire il admet n'avoir rencontré ni Beauregard ni Létourneau, mais avoir "profité des notes de Me Boulanger".  Il prétend avoir dit (présumément à Me Boulanger) qu'il fallait donner à Ditomene un délai suffisant, ajoutant :

«On a fait tous les efforts pour accommoder le demandeur» 

 

(V) Les conclusions des rapports 

[80]        Le rapport de la défenderesse concernant les plaintes logées contre Ditomene,  co-signé par Jean-Pierre Marier, contient les conclusions suivantes :

«Mme Létourneau et M. Beauregard ont subi du harcèlement psychologique de la part de M. Ditomene.  Par ailleurs, l'employeur n'a pas engagé sa responsabilité à cet égard.»

[81]        Le second contient les suivantes :

«6.2.2  Conclusions

Les enquêteurs sont d'avis que la plainte de M. David Zinga Ditomene "la personne plaignante" à l'endroit de Mme Thérèse Létourneau "la personne mise en cause" est non fondée parce que M. Ditomene a agi de mauvaise foi pour les raisons suivantes :

·         M. Ditomene est absent du travail depuis le 22 novembre 2007.

·         Les faits allégués dans la partie A de la plainte ont été obtenus uniquement par ouï-dire lors d'échanges téléphoniques avec M. Olivier Charrette, le mercredi 29 novembre 2007 en soirée; autour de la mi-février 2007 en soirée et le samedi 24 février 2007.  Ces faits sont vagues et peu crédibles.  D'ailleurs le 27 avril 2007, M. Ditomene n'a pu apporter davantage d'informations relativement à ces faits.  Ces faits ne peuvent être retenus.

·         M. Ditomene a confirmé à la rencontre du 27 avril 2007 que les faits allégués à la partie B de la plainte sont ou seront chose jugée par un tribunal administratif ou judiciaire.

·         Enfin, après avoir été débouté par les conclusions de l'enquête de Me Plamondon en février 2007, M. Ditomene tente par des manœuvres dilatoires à obtenir gain de cause (être reconnu qu'il a été victime de harcèlement).

·         M. Ditomene multiplie indûment les recours et cette plainte s'inscrit dans la même foulée.

6.2.3  Recommandations

·         Que l'employeur applique les mesures disciplinaires qu'il juge appropriées.

·        Que l'employeur évalue à la lumière des articles 7 et 2087 du CcQ, de l'article 81.19 de la LNT et l'article 51 de la LSST, la limite des droits de M. Ditomene à intenter des recours.»

 

(VI)  Autres éléments pertinents

[82]        Parmi les autres documents déposés en preuve on retrouve les suivants : (a) Rapport d'enquête de Me Marc Plamondon du 27 janvier 2007; (b) Décision du Juge administratif Jean Lalonde du 11 mars 2009 et (c) Décision du 18 novembre 2009 des Commissaires Pierre Flageole, Michel Denis et Guy Roy (C.R.T.).

[83]        Me Marc Plamondon a fait enquête à la suite d'un grief pour harcèlement psychologique déposé par le demandeur le 1er décembre 2005.  Six personnes sont mises en cause dans ce grief, soit : Sylvain St-Cyr, Paul Lavoie, Henri Beauregard, Yves Groleau, Thérèse Létourneau et Jocelyne Lacasse.

[84]        L'enquêteur conclut comme suit :

«Conclut que m. Ditomene a pratiqué de manière grave et continue contre mmes Thérèse Létourneau, Jocelyne Lacasse et mrs Henri Beauregard Groleau et Paul Lavoie par des paroles, des gestes, des écrits, des plaintes et des procédures du harcèlement qui a rendu le milieu de travail néfaste;

Conclut que devant la gravité et le caractère continu du harcèlement et le refus de m. Ditomene de reconnaître les faits et de modifier sa conduite et des conséquences graves pour la santé et l'intégrité des personnes et le maintien de la vie départementale et dans l'intérêt du collège et de sa mission.»

[85]        La décision du juge administratif Jean Lalonde découle d'une plainte déposée par le demandeur en vertu de l'article 47.3 du Code du travail[6].

[86]        La plainte reprochait au Syndicat du personnel enseignant du Cegep de Sherbrooke - CSN d'avoir été négligent, ou d'avoir agi de mauvaise foi ou de façon discriminatoire ou d'avoir fait preuve d'une conduite arbitraire à son endroit dans le traitement de ses griefs qui contestent le harcèlement psychologique dont il prétend avoir été l'objet et son congédiement par le Cegep de Sherbrooke (l'employeur).

 

[87]        Cette plainte est rejetée en ces termes : 

«[75]  En ce qui a trait à la discrimination, mauvaise foi ou conduite arbitraire du syndicat, il n'y aucune preuve suffisante qui pourrait amener la Commission à conclure en ce sens. Le plaignant avait le fardeau de la preuve de convaincre la Commission de tels agissements. L'analyse des faits démontre au contraire que le délégué syndical a consacré beaucoup d'énergie à défendre le plaignant. Il a même tenté d'infléchir les décisions de l'employeur à plusieurs reprises. C'est l'absence de collaboration du plaignant et la rupture de l'entente prise le 15 mai qui a amené le syndicat à ne plus soutenir les griefs du plaignant.

[76]  Le plaignant reproche au syndicat d'avoir fait preuve de négligence grave en se présentant à la rencontre du 11 juillet sans avoir en main les rapports d'enquête. La Commission constate d'abord que le délégué syndical a tout fait ce qui était en son pouvoir pour reporter cette rencontre. Il a contesté l'urgence invoquée par l'employeur et a expliqué l'absence du plaignant. L'employeur a décidé de maintenir cette convocation et on ne peut faire de reproche au syndicat à ce sujet. La Commission ne voit aucune négligence dans le comportement du délégué. Il n'a été aucunement surpris par la position de l'employeur puisqu'il avait recueilli les versions de tous les témoins et qu'il avait pris connaissance des conclusions des rapports d'enquête. Il ne lui manquait que la version du plaignant qui s'obstine à ne la donner qu'à un arbitre de grief.

[77]  La Commission en arrive à la conclusion que le syndicat n'a manqué d'aucune façon à son obligation de représentation. Il est évident à la lecture du dossier constitué par le syndicat qui comporte plus de 250 documents (certains comportent plusieurs pages) qu'il n'a pas omis de considérer chacun des faits pertinents. Au contraire, le plaignant a fait preuve d'un manque flagrant de collaboration avec le syndicat en prétextant vouloir donner sa version des faits à un arbitre. Lorsque l'occasion lui est donnée de faire toute la lumière, il se retranche derrière des moyens de procédure. Le plaignant a brisé l'entente du 15 mai et le syndicat était justifié de retirer le grief no 4016 et de ne pas porter à l'arbitrage les griefs no 4026 et 4027. Le plaignant qui ne peut retenir qu'une interprétation, celle qui est la sienne, ne collabore pas avec le syndicat. Dans ces circonstances, le syndicat qui doutait déjà des chances de succès du grief du plaignant qui ne collaborait pas avec lui n'avait pas à pousser plus loin l'affaire»

[88]        La Commission des Relations du Travail est saisie d'une demande de révision présentée par le demandeur, demande qu'elle rejette :

«[51]  En se fondant sur les énergies déployées par le syndicat pour défendre le requérant malgré son manque flagrant de collaboration, la Commission a prononcé une décision motivée par la preuve. Pour réussir dans son recours en révision, le requérant devait démontrer l'existence d'un vice de fond de nature à invalider la décision rendue. Il n'a pas satisfait ce fardeau.»

 

(VII)  Réclamation monétaire

[89]        La réclamation de Ditomene s'articule autour des pôles suivants : pour le stress subi, le manque de temps passé avec ses enfants, (qui étaient alors âgés de 7 et 12 ans) les rapports difficiles qu'il a eus avec sa conjointe (surtout en raison du fait que Boulanger lui a parlé de "harcèlement sexuel"),  le sentiment d'injustice profonde et une perte de revenus.

[90]        Au moment de son congédiement ses revenus annuels étaient de quelque 70 000,00 $.  Il n'a pu recommencer à travailler à temps plein qu'à partir de 2009.

[91]        Il réclame également des dommages punitifs.  Selon lui l'envoi des avis démontre l'intention malicieuse de Boulanger.

 

 

 

REPROCHES

[92]        Pour l'essentiel les reproches formulés par Ditomene à l'intention de la défenderesse se résument comme suit :

(a) Communications téléphoniques par la défenderesse (alors que  la Politique ne le prévoit pas);

(b) Implication de madame Gosselin et son remplacement en cours de mandat;

(c)  Non-transmission de la plainte originale et de la Politique;

(d) Non-transmission de la version des faits des témoins et plaignants;

(e)  Engagement par écrit requis à la confidentialité;

(f)   Date de rencontres trop rapprochées (avis insuffisants);

(g)  Ajouts par Me Boulanger sur les plaintes;

(h)  Ajouts non véridiques;

(i)   Enregistrement refusé;

 

 

ANALYSE ET DÉCISION

(1)  Me Boulanger était-elle tenue de respecter  les principes de l'équité procédurale?

 

(a)  L'équité procédurale

[93]        Jean-Pierre Villaggi[7] écrit ceci sur la nature de l'équité procédurale :

«L'équité procédurale, que certains qualifient de "nouvelle justice naturelle", est un construit de règles élaborées par la jurisprudence de common law qui s'imposent, selon le contexte, avec plus ou moins d'intensité à l'Administration gouvernementale.  À l'origine, les règles issues de la jurisprudence de Common Law que l'administration devait respecter étaient regroupées sous le concept de règles de "justice naturelle".  La justice naturelle ne s'appliquait qu'aux situations où le pouvoir exercé était un pouvoir quasi judiciaire…  La jurisprudence a peu à peu créé un nouveau concept : "l'équité procédurale".  Ce nouveau concept régissait  les situations où un organisme administratif rendait une décision administrative qui, bien qu'elle ne puisse être qualifiée de quasi judiciaire, avait des répercussions suffisamment importantes pour le justiciable pour que les tribunaux jugent opportun d'assujettir cet organisme à certaines règles minimales de comportement.  On lui imposait alors "d'agir équitablement"

[…]

Les règles de conduite circonscrites sous la notion d'équité procédurale s'articulent autour de deux grands concepts : la règle "audi alteram partem" qui se traduit par un ensemble de principes permettant de conclure que l'administré a pu être entendu par l'Administration (…) et la règle "nemo judex in sua causa" qui constitue le droit d'être "jugé" par un décideur impartial et indépendant».

[94]        L'équité procédurale fait partie des règles de la justice naturelle.  Elle vise le respect de certaines formalités qui doivent être suivies tout au long du processus d'enquête.  Le fait qu'elle soit enchâssée dans la Charte des Droits et Libertés de la Personne[8] démontre l'importance qu'on lui accorde.

 

(b)  Analyse

[95]        Plusieurs décisions ont traité de la question de savoir dans quelles circonstances une personne ou un organisme devait agir conformément à l'équité procédurale[9].  Le Tribunal s'attardera au jugement de la Cour suprême dans l'affaire Knight[10] où une question similaire s'est posée.

[96]        Voici comment la juge Claire L'Heureux-Dubé introduit le litige :

«L'intimé, directeur de l'enseignement de l'appelant, The Board of Education of the Indian Head School Division No. 19 of Saskatchewan (ci-après le "Conseil"), fut démis de ses fonctions sur préavis de trois mois.  Alléguant un manquement à l'équité procédurale, l'intimé a poursuivi le Conseil pour congédiement injustifié et illégal.  Ce litige soulève la question de la relation entre le contrat d'emploi, The Education Act de la Saskatchewan (R.S.S. 1978, ch. E-0.1) et l'existence et l'étendue du devoir général d'agir équitablement qui incombe à un organisme public dans le contexte de la relation employeur-employé.»

 

[97]        Dans Knight la Cour suprême en est venue à la conclusion que ni la loi ni le contrat ne conféraient à Knight un droit à l'équité procédurale.  Elle procéda néanmoins à l'analyse de différents facteurs[11] pour déterminer s'il existe un droit similaire de nature générale et en arriva à cette conclusion après cet examen.

[98]        Comme la Politique fait partie du contrat d'emploi du demandeur de même que du contrat entre le Cegep et Boulanger[12] - à tout le moins par référence nécessaire - et qu'elle contient moultes règles visant à assurer l'équité procédurale, le Tribunal n'a aucune hésitation à conclure que les membres du comité d'enquête - dont la défenderesse - créé par l'employeur pour précisément mettre à exécution sa Politique, devaient agir en respectant l'équité procédurale.

[99]        Cette conclusion s'impose d'autant plus que la défenderesse et Jean-Pierre Marier avaient le devoir de déterminer s'il y a eu de la part de Ditomene des gestes répréhensibles et qu'ils avaient également le pouvoir d'imputer une faute et de présenter des recommandations.

[100]     Cette obligation est limitée à ce qui est prévu à la Politique.

[101]     La Politique prévoit certaines règles précises visant à assurer l'équité procédurale.  La plus notoire[13] toutefois se retrouve à l'annexe VI où il y est  spécifiquement prévu que le coordonnateur du comité (la défenderesse en l'occurrence) doit s'assurer de "l'équité du processus" :

«Déroulement de l'enquête

Le coordonnateur du comité d'enquête s'assure de l'équité du processus.  À ce titre, il lui revient notamment de :

a)  convoquer le comité d'enquête dans les meilleurs délais;

b)  transmettre les avis de convocation aux personnes mises en cause et aux témoins nommés par la victime;

c)  signer la déclaration de non conflit d'intérêt;

d)  permettre que les personnes mises en cause puisse se faire accompagner par une personne de leur choix;

e)  assurer l'ordre de présentation des personnes convoquées en entendre séparément les personnes mises en cause et les témoins;

f)   voir à ce que l'enquête se déroule à huis clos;

g)  voir à ce que le rapport d'enquête soit transmis au directeur du service des ressources humaines dans les délais prévus.»

(caractères gras ajoutés)

[102]     Il est intéressant de noter que l'obligation d'agir selon "l'équité procédurale" est pratiquement écrite mot pour mot dans la Politique et qu'aucune restriction (ce que suggère l'utilisation du mot "notamment") n'a été apportée.

[103]     Le Tribunal conclut en conséquence que la défenderesse était contractuellement tenue d'agir en respectant l'équité procédurale dans le cadre de son mandat.

 

 (2)  Me Boulanger a-t-elle respecté le principe de l'équité procédurale?

 

[104]     Le Tribunal reprendra ici chacun des reproches formulés par le demandeur.

 

(a) Communications téléphoniques par la défenderesse alors que la Politique ne le prévoit pas

[105]     Ditomene prétend que les appels de Boulanger "ont été faits pour le perturber" et qu'ils ne sont pas prévus à la Politique.

[106]     Le Tribunal n'est pas en mesure de conclure que l'intention de Boulanger était de porter noise au demandeur.

[107]     Les communications téléphoniques à l'initiative de l'enquêteur ne sont pas interdites par la Politique.  Elles n'ont pas remplacé les avis qui devaient être transmis à Ditomene.

[108]     Il n'y a eu ici aucune violation des devoirs qui incombaient à la défenderesse.

 

 

 

(b) Implication de Gosselin et son remplacement en cours de mandat

[109]     Les tribunaux ont souvent rappelé le principe voulant que "Celui qui entend doit trancher".  Bien que le processus en cause n'était pas de nature judiciaire le même principe s'applique.

[110]     Dans Ellis-Don Ltd[14] on peut lire :

 

[66]  «Rien n'est plus fondamental en droit administratif que le principe voulant que celui qui entend doit décider.  L'arrêt Consolidated-Bathurst, précité, a confirmé l'importance de cette règle générale tout en reconnaissant l'existence d'une exception s'appliquant aux réunions plénières de la Commission et visant à donner de la « qualité et de [la] cohérence » à ses politiques (p. 324)…»

 

[111]     La preuve démontre que l'enquête a été entreprise tant par la défenderesse que par Suzanne Gosselin.  Cette dernière a été remplacée à pied levé par Jean-Pierre Marier qui n'a pas repris l'enquête à zéro mais s'est fait "briefé" par Boulanger.

[112]     Le demandeur était en droit de s'attendre à ce que l'enquête soit menée de A à Z par ceux qui allaient éventuellement signer le rapport d'enquête.

[113]     Le Tribunal y voit là un accroc à la règle de l'équité procédurale.

 

(c)  Non-transmission d'une copie de la plainte originale et de la Politique

[114]     La Politique est limpide sur cette question :

«11.7  Personne à qui des faits sont reprochés ou contre qui une plainte a été déposée :

Droits :

Recevoir par écrit une copie de la plainte (niveau II)

[115]     Quant à la formule de plainte (Annexe III) elle indique, tout juste avant la signature du plaignant :

"Je reconnais avoir été formellement avisé que la personne mise en cause recevra une copie conforme de ma plainte"»

(soulignement ajouté)

[116]     La transmission d'une copie intégrale (ce que suggère le mot "conforme") de la plainte originale est, aux yeux du Tribunal, une composante et une condition sine qua non de l'équité procédurale et tient du principe qu'une personne doit savoir ce qui lui est reproché pour être en mesure de se défendre de façon pleine et entière.  Amputer une partie de la plainte contrevient nettement à ce principe.  A cela la défenderesse répond  laconiquement à une question du demandeur :

«Ceci ne vous empêchait pas de donner votre point de vue»

[117]     Le Tribunal note que la défenderesse n'a pas transmis la plainte (ni même des extraits) avec sa lettre du 2 mars, ni avec sa lettre du 19 mars qui était pourtant un avis de convocation pour le 23 mars : est-ce à dire qu'elle avait prévu la rencontre - où Ditomene devait s'expliquer - sans qu'il n'ait au préalable connu ce qu'on lui reprochait…?

[118]     Il en est de même de la transmission d'une copie de la Politique : comment se défendre adéquatement quand on ignore la cadre dans lequel le processus prendra place (la Politique, faut-il le rappeler, spécifie les droits et les obligations des parties)?

[119]     Par ailleurs toute personne qui dépose une plainte sait pertinemment que la personne qui en fait l'objet en obtiendra une copie : la formule de plainte le mentionne textuellement. 

[120]     Le plaignant est aussi censé connaître la Politique, et donc, l'article 11.7 précité.

[121]     Le concept de justice naturelle et, par extension, de l'équité procédurale, comprend le droit, que certains qualifient "d'absolu", de connaître préalablement les griefs soulevés contre une personne, et son pendant, celui de pouvoir y répondre.  C'est ainsi que Patrice Garant, Philippe Garant et Jérôme Garant[15] écriront :

«Jusqu'ici, diverses modalités d'application de la règle ont surtout été mises en lumière.  Il a été décidé qu'une autorité administrative exerçant des pouvoirs disciplinaires ou pouvant prendre des sanctions doit faire connaître à l'administré ce qu'elle lui reproche et lui offrir la possibilité de se faire entendre (Nicholson c. Haldimand-Norfolk Reginal Commissionner Police, [1979], RCS 311).»

(soulignement ajouté)

[122]     Dans l'affaire Teasdale[16] on y lit :

 

«On ne donne pas à un individu l'occasion de se faire entendre si on ne l'informe pas de ce sur quoi il a intérêt de se faire entendre.  Comme peut-il se préparer adéquatement à l'audition, s'il ne sait pas ce qui l'attend?»

 

[123]     Dans Confederation Broadcasting[17] on y énonce :

 

«Il est très clair que la justice naturelle exige qu'une personne connaisse parfaitement et complètement les accusations portées contre elle et qu'elle a l'occasion de répondre à ces accusations.»

[124]     Bien que sensible à la dimension "confidentialité" du dossier le Tribunal estime que la défenderesse n'était pas justifiée d'éliminer certaines parties de la plainte.

[125]     En ce qui a trait à la confidentialité, Patrice Garant écrit[18] :

 

«En matière de déontologie policière, la Cour d'appel a souligné que le Commissaire était tenu de transmettre en temps utile au policier faisant l'objet d'une citation devant le Comité tous les éléments pertinents à la préparation de sa cause. La confidentialité du processus sanctionnée par la Loi ne pouvait être maintenu au détriment du droit des policiers cités d'invoquer toutes les défenses offertes par la loi.»

 

[126]     Le Tribunal estime de plus qu'il y a renonciation implicite à la confidentialité alors  qu'on dépose une plainte, un peu à l'instar d'une poursuite en dommages qui soulève une question d'incapacité physique : il est maintenant acquis que dans ces cas il n'y a plus de confidentialité en ce qui a trait au dossier médical du demandeur.

[127]     Quant à la confidentialité, elle peut être assurée par d'autres moyens, dont l'engagement verbal des parties.  Fait à remarquer, la défenderesse avait informé Ditomene dès le mars 2007[19] que le processus était confidentiel.

[128]     Il s'agit ici d'un accroc très significatif à la Politique.

 

(d)  Non-transmission de la version des faits des témoins et plaignants

[129]     La Politique[20] prévoit "qu'une copie de la version des faits est acheminée aux personnes mises en cause". 

[130]     La version des faits des témoins n'a pas été transmise au demandeur.  La défenderesse dira à ce sujet à l'audience : "Il y a une confusion entre la version des faits sur la plainte et la version des faits…".

[131]     Ce que Ditomene recevra, finalement, n'est qu'une partie des allégations.

[132]     Dans May[21] la Cour suprême de décider :

 

«… l'obligation d'équité procédurale exige généralement, en matière administrative, que le décideur communique les renseignements sur lesquels il se fonde.  Elle exige que l'administré connaisse les faits qu'on entend lui opposer.  Si le décideur ne lui fournit pas l'information suffisante, sa décision est frappée de nullité pour défaut de compétence.»

(soulignement ajouté)

[133]     Dans Ruby[22], voici comment s'est exprimée la Cour suprême :

40  En règle générale, le droit d'une partie à une audience équitable emporte celui de prendre connaissance de la preuve de la partie adverse afin de pouvoir répondre à tout élément préjudiciable à sa cause et apporter des éléments de preuve au soutien de celle-ci : voir, généralement, Wade et Forsyth, op. cit., p. 506; S. A. de Smith, J. Jowell et H. Woolf, Judicial Review of Administrative Action (5e éd. 1995), p. 441; D. P. Jones et A. S. de Villars, Principles of Administrative Law (3e éd. 1999), p. 261.  L'exclusion de l'appelant pendant l'audition de certains arguments de l'État constitue une dérogation exceptionnelle à cette règle générale.  L'appelant se trouve de ce fait désavantagé, étant privé de données susceptibles de servir à contester la légitimité des exceptions invoquées.  Toutefois, la règle générale souffre certaines exceptions. Comme je l'ai dit précédemment, le secret s'impose parfois, notamment en cas de demandes d'autorisation d'écoute électronique ou de mandat de perquisition.  En pareils cas, l'équité est assurée par d'autres garanties procédurales telles que la communication subséquente de la preuve, le contrôle judiciaire et le droit d'appel.  Dans d'autres situations, par exemple lorsque le secret professionnel est invoqué avec succès, la teneur des renseignements en litige peut ne jamais être dévoilée (voir R. c. Brown, [2002] 2 R.C.S 185 , 2002 CSC 32 ; R. c. McClure, [2001] 1 R.C.S. 445 , 2001 CSC 14 ).

[134]     Les commentaires ci-hauts (paragraphe [114] à [128]) s'appliquent mutatis mutandi au défaut d'avoir transmis la version des faits des témoins et des plaignants.

 

(e)  Demande d'un engagement par écrit à la confidentialité

[135]     La Politique ne prévoit pas un tel engagement contrairement à ce que soutient Boulanger. 

[136]     Bien qu'il puisse s'agir d'une mesure de prudence, ou qui visait tout simplement à informer le demandeur de l'aspect confidentiel du processus, la défenderesse ne pouvait forcer Ditomene à signer un tel engagement : il suffisait de lui rappeler que la Politique prévoyait que le processus est confidentiel. 

 

(f)  Dates de rencontres trop rapprochées et avis insuffisants

[137]     Une autre composante fondamentale de l'équité procédurale est l'obligation de transmettre des avis en temps utile pour permettre à la personne concernée de pouvoir se défendre.

[138]     Patrice Garant[23] dira à ce propos :

«L'avis doit naturellement être envoyé à temps, c'est-à-dire suffisamment à l'avance pour que l'administré puisse se préparer adéquatement».

[139]     Il est pour le moins surprenant que des avis si courts[24] aient été transmis par la défenderesse au demandeur.  Ces avis étaient clairement insuffisants et  de nature à brimer les droits du demandeur qui ne pouvait se préparer adéquatement.  Ceci est d'autant plus critique que le demandeur était alors malade.

[140]     Il y a clairement eu accroc aux règles de l'équité procédurale.

 

(g)  Ajouts par Me Boulanger sur les formulaires de plaintes

[141]     La preuve démontre que la défenderesse a fait des ajouts au contenu des plaintes lorsqu'elle était informée de faits additionnels par les plaignants.

[142]     Les intentions de la défenderesse étaient certes légitimes, cependant, ces ajouts ne sont pas du cru des plaignants et pouvaient être de nature à induire en erreur le demandeur.  Comme, cependant, ils auraient pu être ajoutés dans la "version des faits" le Tribunal n'y voit qu'une technicalité de peu d'importance.

[143]     Le Tribunal ne voit pas dans ce geste une contravention aux règles de l'équité procédurale.

 

h)  Ajouts non véridiques

[144]     Ce sous-chapitre concerne des ajouts apportés sur la plainte de Létourneau : l'un qui fait état d'une deuxième requête en libelle diffamatoire, alors qu'il n'y en a eu qu'une.  L'autre concerne la question du "manque de collaboration" de Ditomene durant trois jours, dont une fin de semaine.

[145]     Pour se justifier Boulanger dira, en parlant du fait qu'il était fait mention de deux requêtes pour libelle diffamatoire :

«C'était la même requête mais associée à deux conséquences différentes pour madame Létourneau.»

[146]     Il ne s'agit pas ici d'un accroc à la Politique, ni aux règles de l'équité procédurale même si le Tribunal estime que la défenderesse aurait pu être plus prudente, notamment en ce qui concerne la mention à l'effet qu'il y a eu deux recours en libelle diffamatoire alors qu'il n'y en avait qu'un, ce qui était facilement vérifiable.

 

(i)  Enregistrement refusé

[147]     Le demandeur n'a pas démontré qu'il possédait un droit à l'enregistrement des dépositions.

[148]     Aucun droit n'a été bafoué ici.

 

 

(j)  Autres considérations

[149]     Même si l'argument n'a pas été soulevé par Ditomene, le Tribunal note que le rapport préparé par la défenderesse, pour ce qui concerne les plaintes contre Ditomene, n'analyse pas les éléments de preuve recueillis chez les plaignants Létourneau et Beauregard.  L'analyse ne comporte en fait que deux maigres paragraphes : 

«Après l'analyse des faits, les enquêteurs sont d'avis que les critères énoncés à l'article 81.18 de la LNT et concernant une conduite vexatoire sont rencontrés.

 

Une personne raisonnable placée dans la même situation que Mme Létourneau et M. Beauregard, aurait considéré que M. Ditomene a adopté à leur égard une conduite vexatoire et hostile, qui portait atteinte à leur intégrité physique et psychologique et qui aurait entraîné un milieu de travail néfaste pour eux.  Ces comportements hostiles, belliqueux dépassent ce qu'une personne raisonnable estime être acceptable dans l'accomplissement de son travail.»

[150]     De plus, il est remarquable, pour ne pas dire suspect, de constater que dans son rapport la défenderesse traite plus longtemps de la validité du processus suivi et de son souci de respecter la règle de l'équité procédurale que du bien fondé des plaintes en tant que tel, alors que c'est tout le contraire qu'on retrouve dans le rapport concernant les plaintes de Ditomene.

[151]     Aussi, pourquoi soumettre des recommandations dans le cas des plaintes formulées par Ditomene et ne pas le faire dans le cas des plaintes contre ce dernier alors que Boulanger a déclaré haut et fort qu'il ne lui appartenait pas de faire de telles recommandations[25]?

[152]     Ce rapport est nettement déficient.

*     *     *     *

[153]         Les règles de l'équité procédurale ne sont pas que de simples règles de procédure puisqu'elles se rattachent directement au fond.  L'expression a d'ailleurs parfois été traduite comme the duty to act fairly.  Si la procédure est la "servante" du droit, en matière d'équité procédurale, elle en constitue une assise fondamentale. 

[154]     Ces règles sont à ce point importantes que leur violation peut entraîner une déclaration d'illégalité.  En ce qui a trait aux effets juridiques des manquements, voici ce qu'écrivent Patrice Garant, Philippe Garant et Jérôme Garant[26] :

«La violation des principes de la justice naturelle est considérée par la jurisprudence comme un excès de compétence, un acte ultra vives.  Tout manquement entache la légalité des actes ou comportements sans qu'il soit nécessaire de soulever leur caractère déraisonnable…»

[155]     Le rôle premier de Me Boulanger était d'assurer le respect intégral de ces règles.  Elle était en quelque sorte la gardienne du processus.  Elle le reconnaîtra d'ailleurs à l'audience quand elle dira que "les règles d'équité sont essentielles"… "un incontournable".

[156]     La transmission d'avis suffisants, de même que la communication d'une copie intégrale des plaintes, de la preuve et de la Politique  constituent le b.a.-ba du processus compte tenu que ces règles sont directement issues de la règle audi alteram partem.

[157]     Force est au Tribunal de constater que la défenderesse a failli à sa tâche, à telle enseigne qu'il est légitime de se demander si elle n'a pas agi par simple complaisance pour la personne qui a retenu ses services. 

[158]      Le droit de Ditomene à une défense pleine et entière n'a pas été respecté. 

[159]     La défenderesse doit répondre de ses fautes.

 

(3)  Ditomene pouvait-il poursuivre en dommages la défenderesse?  Celle-ci bénéficie-t-elle d'une quelconque immunité?

[160]     S'il est exact que les contrats n'ont d'effets qu'entre les parties contractantes (1440 C.c.Q.) l'inexécution d'un contrat peut, dans certaines circonstances, entraîner la responsabilité d'un co-contractant vis-à-vis des tiers.

[161]     La Cour Suprême du Canada dira à ce sujet dans Bail[27] :

"Il va sans dire qu'une partie à un contrat doit se conduire tout aussi raisonnablement et avec la même bonne foi à l'égard des tiers qu'à l'égard des autres parties contractantes".

et :

« Les parties à un contrat sont donc délictuellement responsables des dommages qu'elles pourraient causer aux tiers dans le cadre de leur relation contractuelle, de par leur manquement à la norme de conduite raisonnable dans les circonstances de cette relation. »

[162]     Dans cet arrêt la Cour Suprême donnait son aval à l'opinion du juge Pratte rendue dans l'affaire Boucher[28] :

"L'opinion du juge Pratte dans Boucher c. Drouin, me paraît juste à cet égard.  Il écrit à la p. 822 :

"La règle d'après laquelle les contrats n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes. ne fait point obstacle à ce qu'un tiers, se prévalant de l'inexécution d'un contrat comme d'un pur fait lui causant préjudice, intente au contractant en défaut une action délictuelle, sil le fait dont il se plaint n'est pas simplement un manquement à une obligation contractuelle, mais constitue lui-même une faute.  Dans ce cas, le tiers ne cherche pas à s'approprier le bénéfice d'une obligation qui n'a pas été stipulée en sa faveur, mais il demande réparation du préjudice lui résultant duquel du contractant; il ne fonde pas son droit sur le contrat mais sur la faute dont ce contrat n'a été que l'occasion.

Or, dans le cas sous examen, la preuve révèle clairement que le défendeur n'a pas seulement manqué à son contrat, mais qu'il s'est aussi rendu coupable d'une faute délictuelle, en créant une situation de fait dont il eût dû prévoir qu'elle pourrait facilement être cause de dommage pour les tiers."

(soulignement ajouté)

[163]     Il faut retenir que c'est Ditomene qui était la personne directement concernée  par l'enquête de Me Boulanger.

[164]     Il était prévisible que le défaut de la défenderesse de respecter les règles d'équité procédurale pourrait causer un dommage à Ditomene.  Ceci entraînait l'obligation pour Boulanger d'éviter de lui causer un préjudice. 

[165]     Dans ces conditions le demandeur avait un recours direct à faire valoir contre la défenderesse. 

[166]     Pour que la défenderesse puisse bénéficier d'une immunité encore faut-il que la loi le prévoit expressément.

[167]     C'est le cas, par exemple, de la Loi sur les commissions d'enquête[29], de la Loi sur la justice administrative[30], de la Loi sur les normes du travail[31] ou du Code des Professions[32], la loi de Police[33].

[168]     La défenderesse ne bénéficie d'aucune telle immunité.

[169]     La défenderesse ne bénéficie pas plus du privilège de l'immunité relative de l'avocat.

 

(4 et 5)  Y a-t-il un lien causal entre les fautes prouvées et les dommages que Ditomene prétend avoir subis?  Quels sont les dommages auxquels a droit le demandeur le cas échéant?

[170]     La réclamation de Ditomene s'articule autour de trois pôles :

(a)  Les dommages causés par son congédiement.

(b)  Les dommages moraux.

(c)  Les dommages punitifs

 

[171]     Selon la preuve[34] le congédiement de Ditomene est le résultat combiné de cinq (5) décisions.

[172]     Les manquements aux règles de l'équité procédurale par Boulanger, n'ont trait qu'à deux dossiers.  Me Boulanger n'a pas été impliquée dans les autres.

[173]     Il appartenait à Ditomene de démontrer par prépondérance de preuve qu'il n'aurait pas été congédié n'eut été des fautes commises par la défenderesse dans le cadre de ces deux dossiers.

[174]     La preuve ne soutient aucunement cette conclusion.

[175]     Qui plus est, le demandeur s'est soumis à la juridiction du comité dont faisait partie la défenderesse.  Il n'a présenté aucune preuve pour contrer les allégations des plaignants, et ce, ni devant le comité ni à l'audience.  

[176]     Il est difficile - voire impossible - dans ces circonstances de conclure que, n'eut été des fautes reprochées à Boulanger, l'enquête aurait été différente, de même que son rapport et, bien sûr, quel impact un rapport différent aurait eu dans la décision du Cegep de congédier Ditomene.

[177]     Le demandeur n'a pas convaincu le Tribunal qu'il y avait un rapport de cause à effet entre les fautes de la défenderesse et les dommages qu'il réclame.

[178]     Le demandeur réclame aussi des dommages pour le stress et autres dommages moraux qu'il attribue aux violations par la défenderesse des règles de l'équité procédurale.

[179]     Il est indéniable que les actions fautives de la défenderesse furent source de préoccupations importantes pour le demandeur et lui ont causé un stress additionnel, voire une anxiété considérable.  Le demandeur s'est senti diminué en raison du sentiment d'injustice qu'il a éprouvé durant tout le processus.

[180]     Le Tribunal évalue à 3 000,00 $ les dommages moraux subis par le demandeur.

[181]     Les violations n'ont pas été faites de mauvaise foi ou dans le dessein de nuire.

[182]     Il n'y a donc pas lieu à l'octroi de dommages exemplaires.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[183]     ACCUEILLE pour partie l'action du demandeur;

[184]     CONDAMNE la défenderesse Me Louise Boulanger à payer au défendeur David Zinga Ditomene la somme de 3 000,00 $ au taux légal plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q. à compter de l'assignation.

[185]     LE TOUT AVEC DÉPENS.

 

 

__________________________________

CLAUDE LAPORTE, J.C.Q.

 

David Zinga Ditomene

Personnellement

 

Me Marie-Josée Bélainsky

Procureur de la défenderesse

 

CÉGEP

De Sherbrooke

 

ANNEXE

 

 

Politique pour contrer le harcèlement psychologique

en milieu de travail

 

06.08.30.03

 

 

1.  Préambule

 

Le Cégep reconnaît l’importance de ses ressources humaines et leur apport dans la poursuite de sa mission.

 

En qualité d’institution, le Cégep de Sherbrooke veut promouvoir un milieu de travail sain et sécuritaire dans lequel les personnes sont traitées avec respect et dignité. 

 

Chacun des groupes visés par la politique du Cégep adhère à la Déclaration contre le harcèlement psychologique en milieu de travail. Cette déclaration signifie qu’ensemble nous ne tolérerons pas de harcèlement psychologique dans notre milieu et que nous prendrons les moyens pour le prévenir et l’enrayer, s’il y a lieu.

 

Chacun des employés du Cégep adopte envers les autres un comportement marqué par la politesse, le respect et la modération. En ce sens, le respect comporte à la fois un caractère de droit et d’obligation.

 

2.  Objectifs

 

Par cette politique, le Cégep vise à :

 

·        promouvoir un milieu qui assure l’intégrité physique et psychologique des personnes qui y travaillent;

 

·        prévenir toute forme de harcèlement psychologique au travail;

 

·        informer les personnes à l’emploi du Cégep du phénomène de harcèlement psychologique au travail et les sensibiliser à ses effets néfastes;

 

·        doter le Cégep d’un cadre d’intervention afin de prévenir toute forme de harcèlement psychologique, de traiter les cas émergents et d’en assurer le suivi;

 

·        prendre les moyens raisonnables pour faire cesser le harcèlement psychologique;

 

·        accompagner et soutenir toutes les personnes concernées par une telle situation;

 

·        procéder avec diligence au règlement des plaintes.

 

3.  Champ d’application

 

Cette politique pour contrer le harcèlement psychologique s’applique à toutes les personnes qui sont à l’emploi du Cégep. On peut se prévaloir de cette politique à titre individuel et non de groupe. 

 

La présente politique s’applique à tout incident survenu en relation directe avec des événements reliés au travail ou au déroulement des activités du Cégep. 

 

La politique pour contrer le harcèlement sexuel demeure en vigueur et les cas en découlant sont régis par ladite politique ainsi que par les dispositions des conventions collectives.

 

4.  Définition

 

Harcèlement psychologique au travail

 

«Une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique de la personne et qui entraîne, pour celle-ci, un milieu de travail néfaste».

 

Conduite grave :

 

«Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte atteinte et produit un effet nocif continu pour le salarié»[35]

 

 

 

 

5.  Principes

 

Toute personne a droit à la protection de sa dignité et de son intégrité psychologique et physique.

 

Il incombe au Cégep d’assurer un milieu de travail exempt de harcèlement et de prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu’une telle conduite est portée à sa connaissance, pour la faire cesser.

 

Toute personne qui croit subir du harcèlement psychologique au travail doit pouvoir entreprendre des démarches, déposer une plainte ou prendre un recours sans aucun préjudice ou sans qu’elle fasse l’objet de représailles.

 

Les parties s’assurent que :

 

·        que les personnes concernées par la situation soient traitées en toute équité;

·        que les informations recueillies dans toutes situations portées à son attention dans le cadre de cette politique demeurent confidentielles;

·        que les personnes concernées ne subissent aucun préjudice tout au long du traitement de la situation;

·        qu'il n’y ait aucun conflit ou apparence de conflit d’intérêts dans le traitement des plaintes.

 

Toute allégation de harcèlement doit être prise au sérieux et être traitée avec diligence, célérité et équité.

 

Toute situation de harcèlement psychologique au travail peut entraîner des mesures administratives ou disciplinaires adaptées à la gravité des gestes posés.

 

Tous les groupes visés dans l’application de la politique doivent en être informés.

 

6          Niveau I : Procédures informelles

 

Le niveau I vise à permettre à la personne qui croit subir du harcèlement psychologique au travail de mieux cerner la situation, de déterminer s’il s’agit ou non d’une situation de harcèlement psychologique et de recevoir de l’information et du soutien en toute confidentialité. Cette étape vise également à mettre fin au harcèlement le cas échéant, à rétablir la dignité ou l’intégrité psychologique ou physique des personnes et à corriger, si nécessaire, l’environnement de travail.

 

6.1 La personne qui croit subir du harcèlement psychologique au travail peut, dans un premier temps, contacter une personne-ressource identifiée à cette fin. Il est possible d’obtenir les coordonnées de la personne-ressource en consultant soit le document relatif à la Politique pour contrer le harcèlement psychologique en milieu de travail du Cégep, soit le site Web du Cégep, soit en communiquant directement avec le directeur du Service des ressources humaines ou un représentant des différentes instances syndicales.

 

 

6.2 La personne qui se croit victime de harcèlement peut s’adresser à son supérieur immédiat, au représentant de son syndicat ou à son association ou à  toute autre personne qui la réfère à la présente Politique pour centrer le harcèlement psychologique au travail en vigueur. (voir Annexe IX)

 

6.3 La personne-ressource informe la personne qui croit subir du harcèlement psychologique au travail de ses droits et de ses obligations et explore avec elle des pistes de solutions selon les recours possibles (annexe IX), afin de mettre un terme à la situation.

 

6.4 Si la situation s’y prête, et à la demande de la personne qui croit subir du harcèlement, les services d’un médiateur peuvent être demandés auprès de la direction du Service des ressources humaines.

 

6.5 Si les personnes concernées y consentent, le médiateur ou la médiatrice pourra entreprendre, de manière confidentielle, un processus de résolution de problèmes qui a pour but de résoudre la situation.

 

6.6 Si la situation est grave ou si la personne qui croit subir du harcèlement psychologique démontre un état de détresse important et avec l’accord de celle-ci, la personne-ressource en informe le directeur du Service des ressources humaines qui verra à entreprendre les mesures appropriées immédiates dans son meilleur intérêt.

 

6.7 Tout au long du processus, la personne-ressource assure le soutien requis aux personnes concernées dans les limites de son mandat, et les réfère, au besoin, aux ressources appropriées (ex.: programme d’aide au personnel).

 

6.8 Si la situation est résolue à la suite des démarches entreprises avec la personne-ressource de niveau I, le processus prend fin. Cependant, la personne-ressource assure un suivi auprès de la personne qui s’est prévalue de l’article 6.1.

 

6.9 S'il n'y a pas de résolution à la suite des démarches entreprises avec la personne-ressource et que la personne qui se croit victime de harcèlement décide de ne pas déposer une plainte officielle, la personne-ressource doit :

 

- informer la personne qui se croit victime de harcèlement et la personne à qui les faits sont reprochés que des informations sur le déroulement de la démarche seront transmises au directeur du Service des ressources humaines sans fournir de renseignements nominatifs.

 

6.10 Dans le cas où la personne qui croit subir du harcèlement psychologique  désire déposer une plainte officielle, la personne-ressource peut l’aider à rédiger sa plainte et l'accompagner tout au long de sa démarche.

 

7.         Niveau II : Dépôt et de traitement d’une plainte officielle

 

Dans le cas d'une absence de résolution de la situation au niveau I, la personne qui croit victime de harcèlement dépose une plainte officielle, par écrit, au représentant du comité  sur le harcèlement psychologique au travail. 

 

Une procédure de médiation peut être entreprise en tout temps si les personnes concernées y consentent par écrit, ceci afin de tenter de trouver une solution acceptable pour tous. Le fait d’entamer ce processus de médiation a pour conséquence de suspendre temporairement l’enquête.

 

7.1 La plainte doit :

· comporter les nom, prénom et numéro de téléphone de la personne plaignante;

· être datée;

· identifier la ou les personnes faisant l’objet de la plainte;

· décrire, sur le formulaire prévu à cette fin, la situation reprochée;

· être signée par la personne plaignante.

 

7.2 Composition du comité d’enquête

Le comité d’enquête est formé de deux personnes de l’externe et d’un représentant provenant de la catégorie de personnel de la personne plaignante, choisis par le Comité sur le harcèlement et nommés par le directeur du Service des ressources humaines. Le mandat du comité d’enquête, les rôles et fonctions des membres du comité et le processus d’enquête sont décrits à l’annexe VI.

 

7.3 La personne-ressource est exclue en tout temps du processus d’enquête. La personne plaignante et la personne visée par la plainte peuvent être accompagnées d’une personne de leur choix.  Celui-ci ne représente pas les personnes en cause et ne doit pas intervenir à leur place. Il s’agit d’assurer le soutien dont elles ont besoin.

 

7.4 Le comité d’enquête doit déposer son rapport incluant ses recommandations au directeur du Service des ressources humaines au plus tard 20 jours ouvrables après le déclenchement du processus d’enquête.

 

7.5 La personne plaignante ainsi que les personnes visées par la plainte sont informées par écrit par le directeur du Service des ressources humaines de la décision du comité d’enquête des fondements sur lesquels est basée la décision et du suivi qu’il entend donner au dossier.

 

7.6 Des mesures temporaires à l’égard des personnes concernées peuvent être prises par le directeur du Service des ressources humaines (ex.: mutation, déplacement, etc.) sur recommandation du comité d’enquête.

 

8. Plainte non fondée

 

Si une personne dépose une plainte de bonne foi et que le bien-fondé de cette plainte n’est pas confirmé par les éléments de preuves recueillis lors de l’enquête, cette plainte sera rejetée sans préjudice aux personnes concernées. Même si la plainte est non fondée, la direction du Service des ressources humaines assure un soutien aux personnes concernées.

 

9.  Plainte de mauvaise foi

 

S’il est établi, à la suite de l’enquête, qu’une plainte officielle comporte un mensonge ou a été faite de mauvaise foi ou avec une intention de nuire, la personne plaignante est passible de mesures disciplinaires appropriées pouvant aller jusqu’au congédiement.

 

10.  Délais

 

10.1 Toute situation de harcèlement psychologique au travail doit être signalée dans les 90 jours (calendrier) suivant la dernière manifestation.

 

10.2 La personne-ressource de niveau I doit rencontrer la personne qui se croit victime de harcèlement le plus rapidement possible après en avoir été informée.

 

10.3 Les diverses étapes du niveau I doivent débuter dans les deux jours ouvrables suivant la première rencontre avec la personne-ressource.

 

10.4 Les diverses étapes de l’enquête au niveau II peuvent s’étendre sur une période de 20 jours ouvrables après la réception de la plainte, excluant le temps de la médiation.

 

10.5 Une procédure de grief peut en tout temps être déposée comme prévu aux différentes conventions collectives et aux règlements régissant les conditions de travail du personnel d’encadrement.

 

10.6 Une plainte écrite peut être déposée à la Commission des normes du travail du Québec dans les 90 jours (calendrier) suivant la dernière manifestation de la conduite de harcèlement, selon les dispositions prévues à la Loi sur les normes du travail.

 

11.  Responsabilités, droits et obligations

 

Les responsabilités, droits et autres obligations de tous les acteurs du Cégep en regard de l’application de la présente politique sont les suivants :

 

11.1 Direction générale

Responsabilités :

 

·        La direction générale est responsable de l'application de la présente politique et de sa promotion auprès de l'ensemble des employés du Cégep de Sherbrooke.

·        La direction générale s'assure de la mise à jour de la présente politique.

·        La direction générale doit soutenir les gestionnaires dans la mise en oeuvre de la présente politique.

·        La direction générale planifie les ressources humaines, financières, matérielles et informationnelles nécessaires à l’application de la présente politique.

 

11.2 Direction du Service des ressources humaines

Responsabilités :

 

·        Assurer la gestion de la Politique pour contrer le harcèlement psychologique au travail.

·        Sensibiliser la communauté à l’importance d’un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique.

·        Informer les employés du contenu de la politique.

·        Nommer, en collaboration avec les différentes instances, les personnes-ressources pour intervenir au niveau I ainsi que les membres du comité d’enquête et les médiateurs.

·        S'assurer que toutes les plaintes seront traitées avec célérité et confidentialité.

·        Inciter les différentes instances à adhérer à la présente politique sur le harcèlement psychologique.

·        Assurer l’application des mesures de prévention et de redressement en vue de protéger la victime d’éventuelles représailles.

·        Représenter le comité sur le harcèlement psychologique et en assurer la coordination.

·        Recevoir les recommandations du comité d’enquête, procéder à l’étude de celui-ci et mettre en application les mesures de redressement ou les sanctions qu’il juge nécessaires dans les limites de ses responsabilités (congédiement).

·        Assurer le suivi et le support, dans le cas de déplacement, de réintégration ou d'application de mesures administratives ou disciplinaires ou suite à une entente de médiation, auprès des personnes concernées, du service ou du département d’où elles proviennent.

·        Consulter les syndicats et l’Association du personnel d'encadrement lors de la révision et de la mise à jour de la présente politique.

·        Se comporter de manière à ne pas exercer de harcèlement psychologique au travail.

·        S'efforcer de décourager toute forme de harcèlement psychologique au travail.

·        Collaborer pour prévenir les situations de harcèlement psychologique au travail.

 

 

11.3 Gestionnaire

Responsabilités :

 

·        Connaître et respecter les objectifs et principes de la politique.

·        Contribuer à la prévention du harcèlement psychologique dans son unité.

·        Prendre les dispositions nécessaires afin de mettre un terme à une situation de harcèlement lorsqu’il est mis au courant d’une telle situation.

·        Collaborer à la mise en application des mesures de réparation et des mesures correctives émanant de la direction du Service des ressources humaines.

·        Se comporter de manière à ne pas exercer de harcèlement psychologique.  S'efforcer de décourager toute forme de harcèlement psychologique au travail.

·        Collaborer pour prévenir les situations de harcèlement psychologique au travail.

 

 

11.4 Syndicats et Association des cadres du Cégep de Sherbrooke

Responsabilités :

 

·        Connaître et respecter les objectifs et les principes de la politique.

·        Informer ses membres du contenu de la politique.

·        Appuyer la réalisation des activités de sensibilisation et de prévention du harcèlement psychologique.

·        Encourager leurs membres à utiliser les dispositions prévues et à faire valoir leurs droits dans le cadre de cette politique.

·        Se comporter de manière à ne pas exercer de harcèlement psychologique au travail.

·        S'efforcer de décourager toute forme de harcèlement psychologique au travail.

·        Collaborer pour prévenir les situations de harcèlement psychologique au travail.

 

 

11.5 Employé

Responsabilités :

 

·        Connaître et respecter les objectifs et les principes de la politique.

·        Se comporter de manière à ne pas exercer de harcèlement psychologique au travail.

·        Collaborer avec les personnes concernées, lorsque requis, lors d’une enquête.

·        Signaler toute situation potentielle de harcèlement, lorsqu’il en est témoin, à son supérieur immédiat, au directeur ou un représentant du Service des ressources humaines, à son syndicat ou association cela dans le but premier de faire cesser le harcèlement.

 

 

11.6 Personne qui se croit victime de harcèlement psychologique au travail

Droits :

 

·        Signaler une conduite ou une situation de harcèlement sans crainte de représailles.

·        Être accompagnée d’une personne-ressource tout au long du processus.

·        Être informée, par écrit, de l’issue de l’enquête et recevoir une copie finale du rapport d’enquête.

 

Obligations :

·        Ne pas déposer de plainte de mauvaise foi.

·        Ne pas faire de fausse déclaration. 

·        Collaborer avec les personnes chargées d'étudier la situation de harcèlement, en conformité avec la présent politique.

 

11.7 Personne à qui des faits sont reprochés ou contre qui une plainte a été déposée.

Droits :

 

·        Être informée des faits reprochés (niveau I) si la personne qui se croit victime y consent.

·        Être informée de la politique et de la procédure prévue.

·        Être informée du dépôt de la plainte (niveau II), de ses droits en vertu de la politique ainsi que de la procédure prévue.

·        Recevoir par écrit une copie de la plainte (niveau II)..

·        Être informée, par écrit, de l’issue de l’enquête et du droit de faire valoir ses prétentions.

·        Recevoir une copie finale du rapport.

 

Obligation :

·        Collaborer avec les personnes chargées d'étudier la situation de harcèlement, en conformité avec la présente politique.

 

11.8 Témoin

Droits :

 

·        Être informé du contenu de la politique, de ses droits et de son rôle dans le déroulement de la procédure.

·        Collaborer sans crainte de représailles dans le cadre de l’application de la présente politique.

 

Obligation :

·        Collaborer avec les personnes chargées d'étudier la situation de harcèlement, en conformité avec la présente politique.

 

12.  Les éléments suivants se retrouvent en annexe :

 

Annexe I         Déclaration contre le harcèlement psychologique en milieu de travail

Annexe II         Définitions

Annexe III         Formulaire de plainte

Annexe IV       Rôle et fonctions de la personne-ressource

Annexe V        Rôle et fonctions du médiateur

Annexe VI       Rôle et fonctions du comité d'enquête et processus d'enquête

Annexe VII       Rôle et fonctions du Comité sur le harcèlement psychologique

Annexe VIII      Mesures de réparation et mesure correctives

Annexe IX       Recours possibles

Annexe X        Dossier et délai de conservation

Annexe XI       Déclaration de non-conflit d’intérêts

Annexe XII       Schéma du processus - Niveau I et Niveau II.

 

13.  Programme de prévention

 

Le Cégep s'engage à mettre sur pied un programme de prévention du harcèlement en milieu de travail.

 

 

 

 

ANNEXE I

 

Déclaration contre le harcèlement psychologique en milieu de travail

 

Le Cégep de Sherbrooke et son personnel représenté par le Syndicat des enseignants, le Syndicat du personnel de soutien, le Syndicat du personnel professionnel et l’Association du personnel d’encadrement choisissent de se doter d’un milieu de travail sain, exempt de toute forme de comportements portant atteinte à la santé, à la sécurité de même qu’à l’intégrité physique et psychologique de chaque personne, tout en précisant leur droit au respect, à la dignité et à l’équité, à la sauvegarde de leur honneur et de leur réputation. 

 

La présente déclaration vise à promouvoir un milieu de travail sécuritaire et exempt de toute forme de harcèlement psychologique de quelque origine, qu’elle soit individuelle, collective ou organisationnelle.

 

La présente déclaration vise également à manifester notre intention à tous de contribuer à l’établissement d’un milieu de travail qui favorise la dignité et l’estime de soi en décourageant toute forme de harcèlement psychologique et en collaborant à prévenir les situations de harcèlement psychologique.

 

Objectifs de la déclaration

 

La présente déclaration vise à :

·        reconnaître que le harcèlement psychologique constitue un risque pour la santé et la sécurité des personnes et que des répercussions psychologiques, physiques, sociales et organisationnelles en résultent;

·        briser le silence qui entoure souvent cette problématique et identifier les diverses formes qu’elle peut prendre;

·        cesser de justifier ou de banaliser le harcèlement psychologique commis envers les personnes;

·        prendre position pour la victime et reconnaître à l’agresseur ses responsabilités en regard du harcèlement psychologique;

·        prendre nos responsabilités en tant que partenaire au regard des obligations de maintenir un milieu de vie sain.

 

Principes

 

Toute personne a droit au respect, à la sauvegarde de sa dignité et à la protection de son intégrité physique et psychologique.

 

Lorsqu’une personne croit subir du harcèlement psychologique, elle doit :

·        pouvoir entreprendre des démarches;

·        formuler une plainte ou exercer un recours sans qu’il y ait préjudice ou qu’elle fasse l’objet de représailles.

 

La lutte pour contrer le harcèlement psychologique

 

Le harcèlement psychologique provient d’un ensemble de causes. Une démarche globale et un engagement de tous sont nécessaires pour en assurer la prévention. 

 

La lutte pour contrer le harcèlement psychologique nécessite un engagement de tous. Elle demande l’élaboration et l’application d’une politique pour contrer le harcèlement psychologique, en partenariat avec la direction générale, la direction du Service des ressources humaines, les syndicats et l’Association du personnel d’encadrement. Elle demande également la responsabilisation de tous et particulièrement des gestionnaires pour assurer la sécurité physique et psychologique et intervenir afin de faire cesser les situations de harcèlement psychologique. 

 

Le Cégep de Sherbrooke s’engage donc à ne tolérer aucune forme de harcèlement psychologique en milieu de travail. De ce fait, il prend toutes les mesures dissuasives nécessaires pour éviter cette violation des droits de la personne et apporte, le cas échéant, les mesures qui s’imposent.

 

 

 

___________________________________                         _________________________________

Pour le Syndicat des enseignants                                                     Pour le Syndicat du personnel de soutien

 

_______________________________________                       _____________________________________

Pour le Syndicat du personnel professionnel                                 Pour l'Association du personnel d'encadrement

 

_______________________________________                       ______________________________________

Pour la direction générale du Cégep de Sherbrooke                    Pour la direction du Service des ressources humaines

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE II

 

Définitions

 

Harcèlement psychologique au travail

 «Une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l'intégrité psychologique ou physique de la personne et qui entraîne, pour celle-ci, un milieu de travail néfaste.»

 

«Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte atteinte et produit un effet nocif continu sur le salarié.»[36]

 

Le harcèlement psychologique au travail peut se présenter de différentes façons. Voici quelques manifestations possibles :

 

·        "Mobbing" ou la tyrannie de groupe renvoie à la réalité d’une persécution collective pratiquée sur une ou des victimes, à la désignation de bouc émissaire.

 

·        "Le harcèlement discriminatoire est une forme de harcèlement psychologique au travail et se caractérise par une conduite se manifestant entre autres par des paroles, des attitudes ou des comportements répétés, à caractère vexatoire ou méprisant, à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de l’un des motifs énumérés à l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne"[37]. (CSN 2003 : 6)

 

·        L’abus de pouvoir ou d’autorité se produit lorsqu’une personne utilise l’autorité ou le pouvoir lié à son poste ou à sa fonction pour compromettre l’emploi d’une personne ou d’un groupe de personnes et qui a comme effet de nuire à son rendement au travail ou à ses conditions d’exercice au travail de façon plus large. Il peut aussi se traduire par un acharnement à pointer les faiblesses ou les lacunes aux seules fins d’humilier ou de diminuer une personne subalterne.

 

 

 

 

 

ANNEXE III

 

FORMULAIRE DE PLAINTE

 

 

 

Identification de la personne plaignante

 

Date :___________________       

Nom : __________________                                  Prénom :__________________

Adresse :____________________________________________________________

Courriel : ________________

Téléphone : Domicile : __________________      Travail : ______________________

Fonction et secteur : ____________________________________________________

 

Identification de la personne visée par la plainte (présumé harceleur)

Nom : ______________________             Prénom : _______________________

Fonction et secteur :____________________________________________________

 

Chronologie des événements

 

Description la plus exacte possible : faits vexatoires à caractère de répétition ou de gravité, fait hostiles ou non désirés, répercussions sur votre dignité ou intégrité psychologique ou physique, répercussion sur votre travail (gestes, paroles).  Indiquez les dates, les heures et les endroits où se sont déroulés les événements.

Note : le verso de la page peut être utilisé si l'espace est insuffisant.

________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

__________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

 

NOTE : À titre indicatif, vous pouvez vous référer à la liste insérée à la fin de cette annexe pour compléter cette section.

 

 

 

 

Veuillez indiquer tout autre commentaire que vous aimeriez faire :

 

_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

Avez-vous des témoins qui ont vu ou entendu ce qui s'est passé?

 

Nom : __________________________                  Téléphone :_____________________

 

Information que cette personne pourrait donner sur le ou les événements :

 

___________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

Nom : __________________________                  Téléphone :_____________________

 

Information que cette personne pourrait donner sur le ou les événements :

 

___________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

Nom : __________________________                  Téléphone :_____________________

 

Information que cette personne pourrait donner sur le ou les événements :

 

___________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

À votre connaissance, la personne visée par la plainte a-t-elle agi avec d'autres personnes?

 

Oui, précisez

Non

 

_________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

Avez-vous fait l'une ou l'autre des démarches suivantes au sujet de cette situation de harcèlement?

           

Signifié votre malaise à la personne concernée

            Parlé avec d'autres personnes de votre entourage

            Parlé avec une personne du Service des ressources humaines

            Parlé avec un représentant de votre association ou de votre instance syndicale

            Parlé avec votre supérieur immédiat

            Rencontré une personne-ressource

            Participé à une médiation

            Rencontré une personne du PAP

            Déposé un grief

            Autre : Précisez :

____________________________________________________________________________________________________________________________________________

____________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

Que souhaitez-vous pour régler cette situation?

 

Je veux signaler le problème et tenter de le régler moi-même.  J'accepte que l'on communique avec moi, oui _______                               non ______

J'aimerais entreprendre une démarche de médiation

Je veux porter plainte auprès du Cégep de Sherbrooke et qu'il y ait enquête

J'autorise ___________________________________________________

                         (nom de la ou des personne(s) contactée(s))

à transmettre toute information pertinente au responsable du comité d'enquête.

 

Autre : Précisez :

 

__________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________

 

 

 

Je déclare que la plainte telle que libellée dans le présent document correspond bien à ma volonté et que les faits à l'origine de ma plainte sont véridiques, que je les ai volontairement divulgués en toute connaissance de cause et sans contrainte d'aucune part.

 

 

 

Je suis conscient qu'une fausse déclaration pourrait entraîner des recours contre moi par la ou les personnes mises en cause et par le Cégep de Sherbrooke.

 

Je reconnais avoir été formellement avisé de ne pas discuter de la présente plainte avec la personne mise en cause.

 

Je reconnais avoir été formellement avisé que la personne mise en cause recevra une copie conforme de ma plainte.

 

 

Signature :_____________________________________        Date : _______________

 

 

 

 

 

Acheminez ce formulaire confidentiel à l'attention du représentant du comité sur le harcèlement psychologique au travail.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Liste [38],[39],[40] indicative de termes pour faciliter la rédaction de la plainte

 

Cette liste vous est présentée à titre indicatif et peut vous aider à mieux cerner et décrire la situation de harcèlement que vous vivez. Rien ne vous empêche d’utiliser d’autres mots et adjectifs pour décrire votre situation de harcèlement.

 

Comment s’est-elle manifestée? Quelles répercussions a-t-elle eues sur votre situation de travail, sur votre santé physique ou psychologique?

 

Geste hostile                                                                           Empêcher de s’exprimer

Conduite humiliante                                                                Déstabiliser

Baisse d’estime de soi                                                          Discréditer

Parole hostile                                                                          Absentéisme

Problème de concentration ou rendement faible                Doute

Problème de santé (insomnie, maux de tête…)                  Confusion de rôles

Perte d’intérêt et d’engagement envers le travail   Conduite vexatoire

Isolement                                                                                  Gestion inefficace des conflits

Ignorance des conflits                                                             Menace

Surcharge de travail                                                  Propos dénigrant

Abus de pouvoir                                                                      Mobbing

Représailles                                                                            Intimidation

Manque de considération                                                      Favoritisme

Conditions de travail difficiles                                               Horaire de travail

Manque de ressources matérielles                          Atteinte à la réputation

Découragement                                                                      Surveillance excessive

Rumeur                                                                                     Sarcasme

Complicité silencieuse d’employés                                      Peur

Révolte

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE IV

 

Rôle et fonctions de la personne-ressource

 

Les personnes-ressources sont au nombre de quatre.  Le comité sur le harcèlement souhaite et favorise une représentativité de chacune des instances du Cégep.

 

Mandat

Accueillir et écouter la personne qui croit subir du harcèlement, l’informer de ses droits et explorer avec elle les différentes avenues possibles.

 

Durée du mandat

Le mandat de la personne-ressource est d’une durée de deux ans et renouvelable. Elle assure ses fonctions jusqu’à son remplacement.

 

Fonctions

·        Assurer la confidentialité des démarches.

·        Signer le formulaire de non-conflit d’intérêts.

·        Effectuer les démarches immédiates selon la situation.

·        Explorer avec la personne plaignante les solutions selon les recours possibles (annexe IX) pour mettre un terme à la situation.

·        À la demande de la personne plaignante, requérir les services d’un médiateur auprès de la direction du Service des ressources humaines.

·        Assurer le suivi de la démarche auprès de la personne plaignante.

·        Assurer le soutien à la rédaction et à l’acheminement de la plainte au représentant du comité sur le harcèlement psychologique.

·        Accompagner la personne plaignante dans le processus d'enquête.

·        Tenir à jour un dossier confidentiel sur chacune des consultations.

·        Déposer annuellement, un rapport au comité sur le harcèlement psychologique incluant ses recommandations :

Nombre de personnes qui ont consulté

Sexe, âge, statut des personnes concernées par la plainte

Nature de la plainte

Objet de la consultation : information, référence

Type de processus choisi ainsi que le résultat

Nombre de rencontres effectuées par la personne-ressource

Provenance : no de pavillon, classe d'emploi

 

·        Participer à des rencontres de personnes-ressources.

·        Participer à l’évaluation de la Politique pour contrer le harcèlement psychologique en milieu de travail.

·        Participer à des formations portant sur le harcèlement psychologique.

 

 

Profil de la personne-ressource

 

Compte tenu de l’importance du rôle et des fonctions de la personne-ressource, voici le profil recherché chez ces personnes :

 

·        intérêt pour la problématique du harcèlement psychologique;

·        crédibilité et habiletés de relations interpersonnelles reconnues;

·        engagement dans l’organisation;

·        capacité d’accueil et d’empathie envers les personnes qui consultent;

·        capacité d’écoute;

·        capacité de juger les situations avec calme, objectivité et impartialité;

·        capacité à mener les dossiers dont elle est responsable, et ce, dans le respect des personnes avec qui elle chemine;

·        grande discrétion afin d’assurer le respect de la confidentialité : ne pas émettre de commentaires pouvant permettre d’établir des liens avec des situations précises;

·        capacité d’analyse et de synthèse dans le soutien à la rédaction d’une plainte et la rédaction du rapport;

·        capacité de travailler en équipe;

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE V

Rôle et fonctions du médiateur

 

Objectif de la médiation

La médiation est offerte dans le but de faire cesser la situation perçue comme harcelante et d’éviter les mesures de sanction tout en permettant de préserver les liens entre les parties. Il s’agit d’un processus par lequel les personnes en cause conviennent de demander à un tiers, le médiateur, de les aider à trouver une solution négociée à leur conflit. La médiation est souple et flexible, les personnes concernées conservent le plein contrôle du déroulement et du résultat final. En plus d’être un processus totalement volontaire, la médiation est rapide et confidentielle.  Elle peut faire ressortir également les facteurs organisationnels contribuant à une telle situation.

 

Mandat

Le mandat du médiateur est de s’assurer tout au long du processus que chacune des personnes en cause communique librement et pleinement ses besoins et ses attentes à l’autre. L’objectif est de permettre une base de négociation équitable et éclairée afin d’arriver à une solution voulue et acceptée par les parties et de faire cesser les conduites perçues comme harcelantes. 

 

Les médiateurs sont nommés par le comité sur le harcèlement psychologique. 

 

Le processus de médiation s’enclenche au moment où le représentant du comité sur la harcèlement contacte le médiateur.

 

Rôle et fonctions

·         Le médiateur est un tiers neutre et impartial.

·         Le médiateur n’est pas un arbitre, il ne prend aucune décision à la place des parties.

·         Il doit expliquer clairement en quoi consiste la médiation et quelles sont les règles de fonctionnement et les différentes étapes de la médiation.

·         Assurer la confidentialité des démarches.

 

Le Déroulement de la médiation

Après avoir signé une convention de médiation, le médiateur propose aux personnes en cause un plan de travail pour chacune des rencontres avec un échéancier. 

 

Pour ce faire, le médiateur rencontre séparément chacune des personnes en cause. Par la suite, elles sont invitées à exprimer leur version des faits, à définir la problématique, à explorer les différentes solutions visant à résoudre le conflit de façon acceptable, à choisir une solution voulue par les parties, etc. Finalement, le médiateur propose une entente écrite aux personnes en cause et effectue, si nécessaire, un suivi.

 

 

 

 

 

 

ANNEXE VI

 

Rôle et fonctions du comité d’enquête et processus d’enquête

 

Le processus d'enquête est un processus auquel la personne plaignante peut avoir recours en formulant une demande écrite transmise à l’attention de la personne qui représente le comité sur le harcèlement psychologique.

 

Composition du comité d’enquête

·        Deux enquêteurs provenant de l’extérieur, dont un est responsable de la coordination du comité.

·        Un représentant provenant de la catégorie de personnel de la personne plaignante excluant les membres des exécutifs des instances. Ce représentant n’a pas droit de vote. Son rôle consiste à fournir de l’information contextuelle pertinente à la situation.

 

Mandat

Procéder à l'enquête à la suite du dépôt d'une plainte écrite au comité sur le harcèlement psychologique.

·        Le représentant du comité de harcèlement psychologique transmet la plainte reçue au coordonnateur du comité d'enquête dans les délais prévus à la politique.

·        La durée du mandat des membres du comité est d'un an.

·        Le responsable du comité d'enquête avise par écrit les personnes mises en cause de la tenue d'une enquête.

·        Une copie de la version des faits est acheminée aux personnes mises en cause.

·        Assurer la confidentialité des informations et des démarches.

·        Déroulement de l'enquête

 

·        Le coordonnateur du comité d’enquête s’assure de l’équité du processus.  À ce titre, il lui revient notamment de :

 

a)  convoquer le comité d’enquête dans les meilleurs délais;

b) transmettre les avis de convocation aux personnes mises en cause et aux témoins nommés par la victime;

c)  signer la déclaration de non-conflit d'intérêts;

d) permettre que les personnes mises en cause puissent se faire accompagner par une personne de leur choix;

e) assurer l’ordre de présentation des personnes convoquées et entendre séparément les personnes mises en cause et  les témoins;

f) voir à ce que l’enquête se déroule à huis clos;

g) voir à ce que le rapport d'enquête soit transmis au directeur du Service des ressources humaines dans les délais prévus.

 

·        Dans le cours de son enquête, le coordonnateur du comité d’enquête peut s’adresser à toute personne pouvant offrir de l’information complémentaire ou poser toute autre action pertinente dans le cadre de son rôle et de ses responsabilités, jugée utile à la poursuite de l’enquête.

 

·        Les deux enquêteurs sont désignés pour interroger les personnes concernées par la plainte. Il est de leur responsabilité de recueillir tous les faits nécessaires à l’établissement de la preuve. Il est de leur devoir de demander toute explication nécessaire pendant la séance d’enquête.

 

·        La décision finale du comité d’enquête doit être prise sur la base d’un consensus.

 

·        Le coordonnateur du comité d’enquête a pour fonction de rédiger un rapport qui sera soumis et signé par lui-même et l’autre enquêteur. Le rapport doit être objectif, clair, net et concis. Il doit exposer :

 

·         Les faits retenus : la version des deux parties et des témoins;

·         Les preuves recueillies;

·         La démarche effectuée.

 

·        Le rapport doit présenter :

 

·         Les éléments de reproche (s’il y a lieu);

·         Les éléments de preuve qui s’y rattachent;

·         Les éléments organisationnels s'il y a lieu.

 

·        Le rapport doit émettre un jugement quant à :

 

·         L’objet de l’enquête, c’est-à-dire la plainte ou la situation ayant justifié l’enquête, fondée ou non fondée;

·         La valeur probante de la preuve.

 

·        L’enquête et le rapport doivent permettre de dégager :

 

·         Les problèmes identifiés;

·         Les responsables (s’il y a lieu) et leur degré de responsabilité;

·         Les dommages et conséquences identifiés ou pressentis.

 

 

 

Profil de l’enquêteur

 

Qualités personnelles

Objectivité

Disponibilité

Reconnaissance et crédibilité

Habileté d’écoute et d’empathie

Esprit d’analyse et de synthèse

Impartialité

Souci du détail

Rigueur

Tolérance au stress

Tact, discrétion, jugement

Respect et professionnalisme

 

Connaissances

Aspects liés aux relations de travail, conventions collectives, aspects légaux, Loi sur les normes du travail concernant le harcèlement psychologique

Principes d’équité procédurale

Culture et contexte organisationnel

Techniques d’enquête

 

 

Compétences et capacités

Être capable d’agir avec diligence

Recueillir des renseignements

Cerner les questions et faits importants

Avoir de l’expérience d’enquête ou être formé dans le domaine

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE VII

 

Rôle et fonctions du Comité sur le harcèlement psychologique

 

Composition

 

Le Comité sur le harcèlement psychologique est composé d’un représentant et d’un substitut de chacune des catégories de personnel enseignant, soutien, professionnel et personnel cadre nommés par chacune des instances et par le directeur ou un représentant du Service des ressources humaines.

 

Les personnes-ressources peuvent assister, au besoin, aux réunions du comité.

 

Mandat

 

Le mandat du comité est d’assurer la mise en oeuvre de la politique visant à contrer le harcèlement psychologique. Rappelons que le comité n’a pas d’assise légale et n’a donc pas de pouvoir de sanction. L’assise de son pouvoir en est une de recommandation à l’administration du Cégep.

 

Durée du mandat

 

La durée du mandat du comité est de trois ans pour deux des membres et de deux ans pour les deux autres membres pour le début de l’application de la politique. Par la suite, le mandat est de deux ans pour tous les membres excluant le directeur du Service des ressources humaines, ceci pour éviter que tous les mandats arrivent à échéance en même temps.

 

 

Rôles et fonctions du comité

 

·        S’assurer de la mise en place du comité et du recrutement des personnes-ressources, des médiateurs et des enquêteurs.

·        Préparer un plan d’action annuel et le déposer au comité de la Qualité de vie au travail (QVT).

·        En collaboration avec le comité de santé mentale, élaborer et mettre en œuvre le programme d'information et de prévention pour contrer le harcèlement psychologique au travail.

·        Soutenir le comité de santé mentale dans la prévention du harcèlement et dans l'information concernant la politique pour contrer le harcèlement.

·        Recevoir annuellement le rapport d’activité et le rapport statistique des personnes-ressources et soumettre ce rapport à la direction du Service des ressources humaines.

·        S’assurer de la confidentialité du traitement des informations.

·        Produire annuellement un rapport d’activités aux différentes instances. Ce rapport doit être rédigé dans le respect de la confidentialité.

·        Assurer la coordination et le soutien aux personnes-ressources.

·        Informer la Direction générale du suivi de l’application de la politique.

·        Réviser annuellement la politique.

·        Tenir annuellement un minimum de deux rencontres.

·        Recommander un budget de fonctionnement annuel.

·        Voir à la conformité des informations diffusées concernant la Politique pour contrer le harcèlement psychologique en milieu de travail.

 

Rôle et fonctions du représentant du comité

Le directeur du Service des ressources humaines est le représentant du comité sur le harcèlement psychologique.

 

·        Recevoir les plaintes en lien avec le harcèlement psychologique et déclencher le processus de résolution de la situation.

·        Assurer le suivi du processus de résolution de niveau II.

·        Organiser la formation des personnes-ressources.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE VIII

Mesures de réparation et mesures correctives

 

Les mesures de réparation à l’égard de la personne aux prises avec le harcèlement  visent à faire cesser la situation de harcèlement psychologique à son égard, à éviter une répétition de tels événements et à la compenser pour les préjudices qu’elle a subis. Voici quelques exemples :

 

·        soutien psychologique via le programme d’aide au personnel;

·        modification de l’horaire de travail avec l'accord de la personne harcelée;

·        déplacement ou nouvelle affectation avec l'accorde de la personne harcelée;

·        promotion ou obtention du poste précédemment refusé;

·        remboursement du salaire perdu, le cas échéant;

·        paiement d’honoraires professionnels;

·        compensation financière pour la perte d’avantages sociaux;

·        soutien et suivi auprès du service, département ou secteur;

·        modification des facteurs organisationnels qui ont contribué.

 

Les mesures correctives s’adressent à l’auteur du harcèlement. Elles visent à la fois à le dissuader et à le sanctionner. En voici une liste non exhaustive :

 

·        ne par être en présence de la victime dans les activités organisées dans le cadre du travail dans le respect de la personne harcelée;

·        réprimande verbale ou écrite;

·        excuses aux personnes concernées;

·        suspension temporaire avec ou sans traitement;

·        rétrogradation;

·        déplacement dans un autre poste;

·        congédiement;

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE IX

 

Recours possibles

 

 

Le personnel syndiqué peut :

 

Consulter une personne-ressource

Consulter son supérieur immédiat

Consulter le Programme d’aide au

personnel

Consulter un représentant de son

instance syndicale

Consulter le directeur ou un

représentant du Service des ressources

humaines

Rencontrer la personne mise en cause

Participer à un processus de médiation

Poser un grief

Autres

Le personnel non syndiqué peut :

 

Consulter une personne-ressource

Consulter son supérieur immédiat

Consulter le Programme d’aide au personnel

 

Consulter un représentant de son

instance syndicale

Consulter le directeur ou un

représentant du Service des ressources

humaines

Rencontrer la personne mise en cause

Participer à un processus de médiation

Déposer une plainte à l’Association

Déposer une plainte à la Commission

des normes du travail du Québec

Autres

                         

Recours externes possibles

 

Plainte à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse

Plainte à la Commission des normes du travail du Québec

Plainte au civil

Plainte au criminel

Autres

 

                        

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE X

Dossier et délai de conservation

 

Tous les documents reliés à l'application de la présent politique doivent être conservés en conformité avec les différentes conventions collectives ou les décrets en vigueur en matière de mesures disciplinaires ou administratives et selon la Loi sur les archives du Québec[41].

 

Aucun document n'est déposé au dossier personnel de la personne plaignante sans son consentement à moins qu'elle soit reconnue coupable d'une plainte de mauvaise foi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE XI

 

Déclaration de non-conflit d’intérêts

 

Nom : ______________________________________________________________

 

Adresse : ___________________________________________________________

 

Téléphone : bureau : ____________________     domicile : _________________

 

 

Toute personne membre du comité d'enquête ou qui agit comme médiateur ou agit comme personne-ressource doit :

 

·        éviter de me placer dans une situation de conflit entre mon intérêt[42] personnel, incluant celui de l’un de mes proches et celui du Cégep;

·        respecter l’obligation du devoir de réserve[43];

·        éviter les situations de complaisance, par exemple, envers les personnes impliquées dans le dossier.

·        et, à cet effet, doit signer le formulaire de non-conflit d'intérêts.

 

En foi de quoi, je déclare par la présente ne pas être en conflit d’intérêts dans la présente situation.

 

Signature : ________________________________      Date : ________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE XII

SCHÉMA DU PROCESSUS[44]

 

 

          Niveau I        

 

Médiation

 

 

  Niveau II     

 

 

Consultation auprès

d'une personne-ressource

 

 

 

Médiation*

 

 

Résolution   ou  Non résolution

 

 

 

 

Suivi

 

 

 

 

 

 

 

 

Dépôt d'une plainte écrite

auprès du représentant du comité

sur le harcèlement psychologique

 

ou

 

Processus                                     Processus

De médiation* d'enquête

 

 

Rapport                                      Rapport

 

 

 

DRH                                           DRH

 

 

Intervention                                 Mesures

 

 

Suivi                                             Suivi

 

 



[1] Voir ANNEXE.

[2] C'est avec cette lettre que la défenderesse transmet sa version des faits reprochés (confectionnée à partir des plaintes reçues).

[3] Boulanger a reconnu à l'audience que cette lettre fut postée le 28 mars.

 

[4] L.R.Q. ch. P-39.1.

[5] À cette époque Beauregard et Létourneau avaient déjà été rencontrés par Gosselin.

[6] L.R.Q. ch. C-27.

[7] Jean-Pierre VILLAGGI, L'Administration Publique Québécoise et le Processus Décisionnel, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2005, page 114.

[8] L.R.Q. ch. c-12.

[9] Voir également la décision de la Cour d'appel dans l'affaire P.G. du Québec et al. c. Marc-André Bouliane et al. du 8 avril 2004 (200-09-004231-020) où la Cour examine le rôle du juge enquêteur nommé en vertu de l'article 14 de la Loi sur la recherche des causes et circonstances de décès (L.R.Q. ch. R.0-2), plus particulièrement son devoir d'agir selon les règles de l'équité procédurale et de façon impartiale.

[10] Knight c. Indian Head School Division no 19, [1990] 1 RCS 653 .

[11] «L'existence d'une obligation générale d'agir équitablement dépendra de l'examen de trois facteurs:  (i) la nature de la décision qui doit être rendue par l'organisme administratif en question, (ii) la relation existant entre cet organisme et le particulier, et (iii) l'effet de cette décision sur les droits du particulier…» 

 

[12] La défenderesse a reconnu à l'audience que son mandat était fonction de la Politique.

[13] Voir également page 3 de la Politique et l'Annexe I du document.

[14] Ellis-Don Limited c. La Commission des relations de travail de l'Ontario et al. [2001] 1 RCS 221 .

[15] Patrice GARANT, Philippe GARANT, et Jérôme GARANT, Précis de Droit des Administrations Publiques, 5ième édi., Les Éditions Yvon Blais, Cowansville, 2011, page 277.

 

[16] Teasdale c. CCPAQ, [1974] CS 319 , 323.

 

[17] Confederation Broadcasting c. CRTC, [1971] RCS 906 , 924.

[18] Patrice GARANT, Droit administratif, 6ème Éditions Yvon Blais, Cowansville, page 660.

[19] Lettre du 2 mars pièce P-20.

 

[20] Voir Annexe (annexe VI).

[21] May c. Établissement Ferndale [2005] 3 RCS, 809.

[22] Ruby c. Canada [2002] 4 RCS 3 , para 40.

[23] Préc. Note 18, page 618.

[24] Voir para. [19] et suivants.

[25] Paragraphe [70].

 

[26] Patrice Garant, Philippe Garant et Jérôme Garant, Précis de droit des administrations publiques, 5ième édition, Éditions Yvon Blais) page 274.

[27] Banque de Montréal c. Bail Limitée [1992] 2 RCS page 583.

[28] Boucher c. Drouin, 1959, BR 814 .

[29] L.R.Q. ch. c-37, art. 16

[30] L.R.Q. ch. J-3, art. 74

[31] L.R.Q. ch. N-1.1, art. 108

[32] L.R.Q. ch. c-26, art. 193

[33] L.R.Q. ch. c-13.1, art.225

[34] Voir D-5, para. [37].

[35] Commission des normes du travail.  Loi sur les normes du travail, article 81.18 2004.

[36] Commission des normes du travail.  Loi sur les normes du travail, article 81.18,2004.

[37] Les motifs de la Charte des droits et libertés font référence à la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap.

[38] Travail Québec, Une stratégie de prévention du harcèlement psychologique au travail et de soutien aux victimes, 2002.

[39] Commission des normes du travail, Guide de sensibilisation à l'intention des employeurs et des salariés, 2003.

[40] CSN, Politique de prévention de la violence et du harcèlement au travail, 2004.

[41] Pour plus de renseignements, on peut consulter les différents sites concernant les conventions collectives et la loi sur les archives du Québec.

[42] Un lien d'intérêts signifie tirer un avantage d'une situation soit par un lien de parenté, un lien d'amitié ou un lien d'affaires.

[43] Le devoir de réserve signifie s'abstenir d'exprimer ou de manifester son opinion en lien avec les responsabilités dévolues à son rôle.

[44] Toute personne peut prendre de l'information concernant une situation vécue auprès de son supérieur immédiat ou des personnes-ressources, du Programme d'aide au personnel, du Services des ressources humaines de des instances syndicales ou Association du personnel d'encadrement.

* La médiation est toujours facultative.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.