Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier
COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Abitibi-Témiscamingue

ROUYN-NORANDA, le 20 mars 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIERS :

143967-08-0008

145805-08-0009

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Me Pierre Prégent

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Rodney Vallière

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Michel Paquin

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

109863639

AUDIENCE TENUE LE :

2001-01-24

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Val-d’Or

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LAURENT BELISLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ENT. TRANS. JACQUES LAPOINTE INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

DOSSIER 143967-08-0008

 

[1]               Le 1er août 2000, monsieur Laurent Bélisle (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 6 juillet 2000 à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme une décision déjà rendue le 17 septembre 1999 et refuse de rembourser ou de verser une compensation monétaire concernant l’achat d’un véhicule à transmission automatique.

DOSSIER 145805-08-0009

[3]               Le 30 août 2000, le travailleur dépose une seconde requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 16 août 2000 à la suite d’une révision administrative.

[4]               Par cette décision, la CSST confirme sa décision initialement rendue le 5 juin 2000 et refuse de rembourser le coût d’achat et de cordage de bois de chauffage suite à la demande du travailleur.

[5]               À l’audience, le travailleur est présent et il est représenté.

LES OBJETS DES CONTESTATIONS

[6]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer les décisions rendues par la CSST, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer qu’il a droit au remboursement de l’équivalent du coût de la conversion de la transmission manuelle à une transmission automatique sur sa camionnette et du coût d’achat et de cordage du bois de chauffage.

LES FAITS

[7]               De la preuve documentaire et du témoignage du travailleur, la Commission des lésions professionnelles retient les faits pertinents suivants.

[8]               Le travailleur subit un accident du travail le 8 juin 1995 à la suite duquel il est traité pour une tendinite de la coiffe des rotateurs à l’épaule droite et pour un syndrome d’accrochage.  Le 11 septembre 1996, le travailleur subit une reprise d’acromioplastie avec réparation simple de la coiffe des rotateurs.

[9]               Le 4 août 1997, la CSST informe le travailleur qu’il a droit à des services de réadaptation puisqu’il conserve une atteinte permanente à son intégrité physique de sa lésion professionnelle.  Le 6 août 1997, la CSST précise que son atteinte permanente est équivalente à 10,35 %.

[10]           Un rapport du Centre de réadaptation La Maison, produit à la demande de la CSST le 6 juillet 1998, indique que le travailleur n’a plus la capacité requise pour faire un travail quel qu’il soit à cause des douleurs trop importantes qui l’affectent aux épaules, et plus particulièrement à l’épaule droite.

[11]           Le 20 août 1997, la CSST accorde au travailleur une somme de 500,00 $ en paiement de travaux d’entretien courant du domicile pour son bois de chauffage.  Le 10 août 1998, elle lui rembourse 530,00 $ également pour l’achat de bois de chauffage.  La CSST, le 10 novembre 1998, confirme au travailleur qu’il ne peut plus exercer son emploi de chauffeur de camion de bois en longueur ni retourner chez son employeur.  De plus, il est impossible de déterminer un emploi qu’il serait capable d’occuper à plein temps.  En conséquence, conformément à la loi, le versement de l’indemnité de remplacement du revenu sera versé jusqu’à 68 ans.

[12]           Le 13 juillet 1999, suite à la réception d’un rapport médical du docteur Rivest qui confirme que le travailleur, à cause des douleurs importantes résultant de sa lésion professionnelle, ne peut plus conduire un véhicule avec transmission manuelle, la Société de l’assurance automobile du Québec suspend les classes 1, 2, 3, 4A, 4B, 4C, 6A, 6D et 8 du permis de conduire du travailleur à compter du 1er août 1999.  Cependant, il conserve le privilège de conduire des véhicules correspondant au permis de classe 5, conditions A, J et K.  La condition J vise la conduite d’un véhicule avec transmission automatique.  Ainsi, le travailleur se voit interdire la conduite de son propre camion personnel dont la transmission est manuelle (Mazda 1992, 4 x 4).

[13]           Après discussion avec la CSST, le travailleur s’informe du coût pour convertir la transmission manuelle en une transmission automatique sur sa camionnette.  Les réponses qu’il obtient des garagistes visités indiquent que le coût de conversion (10 000,00 $) sera plus élevé que la valeur de sa camionnette ou que la conversion est impossible à réaliser et qu’il serait mieux d’acheter un véhicule à transmission automatique.  Le 19 juillet 1999, il informe la CSST de ses démarches et demande l’équivalent du coût de la conversion.

[14]           Le 16 septembre 1999, la CSST rembourse au travailleur la somme de 530,00 $ pour l’achat de bois de chauffage selon les dispositions de l’article 165 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[15]           Le 17 septembre 1999, la CSST informe le travailleur qu’elle ne peut donner suite à sa demande relative aux modifications à apporter sur sa camionnette.  La politique de la CSST ne prévoit pas une telle aide.

[16]           Le travailleur écrit à la CSST le 15 octobre 1999.  Il conteste la décision rendue le 17 septembre 1999.  Puisqu’il ne peut faire effectuer la conversion requise sur sa camionnette, il  achète une voiture à transmission automatique au coût de 23 900,00 $.  Il obtient 7 000,00 $ pour sa camionnette 1992.

[17]           Le 24 mai 2000, le travailleur demande le remboursement du coût d’achat, de livraison et de cordage de 15 cordes de bois de chauffage à son domicile.

[18]           La CSST refuse sa demande le 5 juin 2000 au motif qu’elle ne considère plus les activités afférentes au bois de chauffage comme étant des travaux d’entretien courant du domicile en vertu des dispositions de l'article  165 de la loi.  Cette décision est contestée le 8 février 2000.

[19]           Le 6 juillet 2000, à la suite d’une révision administrative, la CSST confirme sa décision du 17 septembre 1999.  À la suite d’une révision administrative le 16 août 2000, la CSST confirme sa décision du 5 juin 2000 d’où les requêtes devant la Commission des lésions professionnelles.

[20]           À l’audience, le travailleur explique à la Commission des lésions professionnelles que, pour changer de vitesse lors de la conduite de sa camionnette, il utilise un genou pour maintenir son volant et il change de vitesse avec son membre supérieur gauche.

[21]           Ne voulant pas perdre son autonomie personnelle, il déclare avoir demandé à la CSST l’équivalent de la conversion de la transmission manuelle à une transmission automatique sur sa camionnette.

[22]           Quant au bois de chauffage, le travailleur déclare qu’il chauffe au bois depuis 1983.  Après avoir obtenu un permis de coupe du gouvernement, il coupait, transportait et cordait lui - même son bois de chauffage.  Il ne peut plus exécuter lui-même de tels travaux à cause des séquelles de sa lésion professionnelle.

L’ARGUMENTATION DU TRAVAILLEUR

[23]           Le représentant du travailleur allègue que, suite à l’accident du travail subi en 1995, le travailleur est porteur de séquelles douloureuses aux épaules comme le confirme son dossier médical.  La CSST considère qu’elle ne peut lui déterminer un emploi convenable vu sa condition médicale.  Pour le même motif, la Société de l’assurance automobile du Québec suspend son permis de conduire un véhicule à transmission manuelle.

[24]           Le représentant du travailleur est d’avis que la Commission des lésions professionnelles doit reconnaître que le travailleur rencontre les conditions de l’article 155 de la loi et qu’il doit bénéficier du remboursement du coût équivalent à la conversion de la transmission manuelle à la transmission automatique sur sa camionnette tel que requis par le travailleur.

[25]           Quant au bois de chauffage, le représentant du travailleur prétend que la CSST doit continuer à rembourser le coût d’achat du bois de chauffage, comme elle le fait depuis 1997, puisque le travailleur rencontre les conditions de l’article 165 de la loi.

L’AVIS DES MEMBRES

[26]           Le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d'employeurs sont d’avis que le travailleur rencontre les conditions de l’article 155 de la loi.  Il doit donc bénéficier du remboursement du coût d’adaptation de son véhicule jusqu’à concurrence de la valeur de sa camionnette au moment de l’échange, soit 7 000,00 $.

[27]           Quant au remboursement du coût d’achat du bois de chauffage, le membre issu des associations syndicales est d’avis que l’économie générale de la loi vise la réparation de la lésion professionnelle et de ses conséquences.  Il y a donc lieu de rembourser le travailleur du coût d’achat de son bois de chauffage.

[28]           Pour sa part, le membre issu des associations d'employeurs est d’avis que le remboursement du coût d’achat du bois de chauffage n’est pas visé par les dispositions de l’article 165 de la loi.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[29]           Pour l’adaptation du véhicule du travailleur, la Commission des lésions professionnelles réfère particulièrement aux articles suivants :

151. La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.

________

1985, c. 6, a. 151.

 

 

152. Un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment :

 

  des services professionnels d'intervention psychosociale;

  la mise en oeuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle;

  le paiement de frais d'aide personnelle à domicile;

  le remboursement de frais de garde d'enfants;

  le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.

________

1985, c. 6, a. 152.

 

 

155. L'adaptation du véhicule principal du travailleur peut être faite si ce travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique et si cette adaptation est nécessaire, du fait de sa lésion professionnelle, pour le rendre capable de conduire lui‑même ce véhicule ou pour lui permettre d'y avoir accès.

________

1985, c. 6, a. 155.

 

 

156. La Commission ne peut assumer le coût des travaux d'adaptation du domicile ou du véhicule principal du travailleur visé dans l'article 153 ou 155 que si celui‑ci lui fournit au moins deux estimations détaillées des travaux à exécuter, faites par des entrepreneurs spécialisés et dont la teneur est conforme à ce qu'elle exige, et lui remet copies des autorisations et permis requis pour l'exécution de ces travaux.

________

1985, c. 6, a. 156.

 

 

157. Lorsque la Commission assume le coût des travaux d'adaptation du domicile ou du véhicule principal d'un travailleur, elle assume aussi le coût additionnel d'assurance et d'entretien du domicile ou du véhicule qu'entraîne cette adaptation.

________

1985, c. 6, a. 157.

 

 

[30]           La preuve prépondérante faite à l’audience révèle que le travailleur conserve de sa lésion professionnelle une atteinte permanente telle qu’il ne peut plus conduire un véhicule avec transmission manuelle.  Il devient donc nécessaire de faire modifier sa camionnette 4 x 4 de l’année 1992.

[31]           Les garagistes visités estiment que le coût des modifications est supérieur à la valeur résiduelle de la camionnette ou que la conversion de la transmission manuelle à une transmission automatique n’est pas réalisable.

[32]           Suite aux informations reçues, le travailleur s’est acheté un véhicule avec transmission automatique.  Il requiert maintenant le remboursement de l’équivalent du coût de la conversion de la transmission manuelle à une transmission automatique (10 000,00 $).

[33]           Au moment du dépôt de sa demande pour faire modifier sa camionnette, le travailleur est porteur d’une atteinte permanente grave c’est-à-dire une atteinte permanente telle qu’il ne peut plus conduire son véhicule à transmission manuelle de façon sécuritaire.  En effet, il doit maintenir le volant avec un genou et changer de vitesse avec sa main gauche.

[34]           L’adaptation du véhicule est donc nécessaire pour rendre le travailleur capable de conduire lui-même son véhicule personnel.

[35]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que les conditions prévues à l’article 155 de la loi sont rencontrées par le travailleur le 19 juillet 1999.  Le travailleur a donc droit au remboursement du coût des modifications.  Toutefois, la Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il y a lieu d’apporter une nuance importante.  En effet, le remboursement du coût des modifications ne doit pas dépasser la valeur résiduelle de la voiture au moment de la demande.

[36]           Ainsi, la Commission des lésions professionnelles considère que le travailleur a droit à un remboursement de 7 000,00 $ qui constitue l’équivalent de la valeur résiduelle du véhicule au moment de la demande présentée à la CSST en vertu des dispositions de l’article 155 de la loi.

[37]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit au remboursement du coût d’achat de bois de chauffage.

[38]           En matière de réadaptation sociale, pour l’objet de la contestation, la Commission des lésions professionnelles doit également référer aux articles suivants :

151. La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.

________

1985, c. 6, a. 151.

 

 

152. Un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment :

 

  des services professionnels d'intervention psychosociale;

  la mise en oeuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle;

  le paiement de frais d'aide personnelle à domicile;

  le remboursement de frais de garde d'enfants;

  le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.

________

1985, c. 6, a. 152.

 

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui‑même si ce n'était de sa lésion

peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[39]           L’article 165 de la loi encadre le droit au remboursement des frais d’entretien courant du domicile.  Les conditions particulières d’ouverture à ce droit y sont énoncées et la limite de la responsabilité financière de la CSST.

[40]           Les conditions d’ouverture au remboursement des frais d’entretien courant du domicile sont :

-           le travailleur doit avoir subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d’une lésion professionnelle;

 

-           il est incapable d’effectuer des travaux d’entretien courant de son domicile qu’il effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion professionnelle;

 

-           les frais dont le remboursement est requis doivent être engagés pour faire exécuter des travaux d’entretien courant du domicile.

 

 

[41]           La notion de bois de chauffage et ses activités afférentes (coupe, transport, cordage) a fait l’objet de plusieurs décisions de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) et de la Commission des lésions professionnelles.

[42]           La grande majorité des décisions accordent le remboursement du coût d’achat du bois de chauffage ou des activités afférentes aux conditions que le travailleur coupait lui-même son bois de chauffage et s’adonnait aux activités inhérentes avant son accident du travail et qu’il conserve, de sa lésion professionnelle, une atteinte permanente telle qu’elle l’empêche d’effectuer lui-même lesdits travaux.

[43]           Ainsi, à chaque fois que le travailleur rencontrait les deux conditions énoncées au paragraphe précédent, on accueillait sa demande et, par automatisme, les activités reliées au bois de chauffage devenaient des travaux d’entretien courant du domicile sans autre motivation.

[44]           Toutefois, dans Rioux et Scabus inc.[2] et dans Dumont et Centre hospitalier de Matane[3], la Commission d’appel décidait que les frais de livraison et de manutention du bois de chauffage constituaient davantage des frais d’exploitation du domicile et ne tombaient pas sous l’application de l’article 165 de la loi.

[45]           La Commission des lésions professionnelles arrive à la même conclusion dans Marcel Paquet et Pavillon de l’Hospitalité inc.[4]

[46]           Le Petit Larousse illustré[5] donne les définitions suivantes des mots « entretien » et « courant » :

« entretien : n. m. 1. Action de maintenir une chose en bon état, de fournir ce qui est nécessaire pour y parvenir.  L’entretien d’un moteur.  Frais d’entretien.  2. Service d’une entreprise chargé de maintenir en état et de réparer des équipements et des matériels.  3. Conservation suivie.  Solliciter un entretien. »  (sic)

 

« courant,e : adj. (de courir)  1. Qui est habituel; ordinaire, banal.  Les dépenses courantes.  C’est un mot tellement courant !  Un modèle courant.  2. Qui a cours.  Monnaie courante.  Franc courant.  C’est monnaie courante : c’est habituel, cela se produit souvent […] »  (sic)

 

 

[47]           Dans l’affaire Lévesque et Mine Northgate[6], la Commission d’appel concluait que, bien que la loi ne précise pas le sens qui doit être donné à l’expression « entretien courant », il faut comprendre qu’il s’agit de travaux d’entretien habituels, ordinaires du domicile par opposition à des travaux d’entretien inhabituels ou extraordinaires.

[48]           La Commission des lésions professionnelles considère qu’il faut comprendre de l’expression « travaux d’entretien courant du domicile » des travaux qui sont exécutés pour maintenir en bon état le domicile du travailleur et dont la nature même des travaux fait qu’ils sont habituels, ordinaires et banals.

[49]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’achat de bois de chauffage et ses activités afférentes (coupe, transport, cordage) ne constituent pas ou ne peuvent être assimilés à des travaux exécutés pour garder en bon état le domicile du travailleur lorsque le chauffage au bois ne constitue pas le principal ou l’unique mode de chauffage du domicile du travailleur.

[50]           Dans un tel cas, rembourser le coût d’achat du bois de chauffage et de ses activités afférentes constituerait pour le demandeur un avantage dont ne pourrait bénéficier un autre travailleur, conservant également une atteinte grave de sa lésion professionnelle, et dont le mode de chauffage ne serait qu’à l’électricité, à l’huile ou au gaz.

[51]           La Commission des lésions professionnelles, à l’instar de la CSST, considère que, lorsque le chauffage au bois est le principal ou l’unique moyen de chauffage du domicile du travailleur, il y a lieu d’assimiler l’achat de bois de chauffage et ses activités afférentes (coupe, transport et cordage) à des travaux d’entretien courant du domicile.

[52]           En effet, considérant nos hivers rigoureux en Abitibi-Témiscamingue, le refus de rembourser à un travailleur, porteur d’une atteinte permanente telle qu’il ne peut plus couper, transporter et corder son bois de chauffage, risquerait de le priver de pouvoir chauffer son domicile.  À très court terme, cela provoquerait la détérioration du domicile, comme le bris des conduites d’eau par exemple, et l’empêcherait de pouvoir y habiter tout simplement, ce qui contribuerait également à la détérioration pendant environ 7 mois par année (octobre à avril inclusivement).

[53]           Dans la présente affaire, il ressort de l’analyse des éléments mis en preuve qu’il n’a pas été démontré que le chauffage au bois constitue le moyen principal ou unique de chauffage du domicile du travailleur.

[54]           Dans les circonstances, la Commission des lésions professionnelles considère que l’achat du bois de chauffage, pour entretenir un système de chauffage d’appoint, ne peut être assimilé à des travaux d’entretien courant du domicile bien que le travailleur soit porteur d’une atteinte permanente telle qu’elle l’empêche de couper lui-même son bois de chauffage, de le transporter et de le corder.

[55]           La Commission des lésions professionnelles conclut donc que le travailleur ne peut bénéficier du remboursement du coût d’achat de son bois de chauffage puisqu’il ne rencontre pas toutes les conditions de l’article 165 de la loi.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

DOSSIER 143967-08-0008

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Laurent Belisle, le travailleur;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 6 juillet 2000;

DÉCLARE que le travailleur a droit à un remboursement de 7 000,00 $ en vertu des dispositions de l’article 155 de la loi.

 

 

DOSSIER 145805-08-0009

REJETTE la réclamation du travailleur;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 16 août 2000 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur ne peut bénéficier du remboursement du coût d’achat de son bois de chauffage.

 

 

 

 

 

Me Pierre Prégent

 

Commissaire

 

 

 

 

 

CSN

(Donald Bernier)

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 



[1]           L.R.Q., chapitre A-3.001

[2]           CALP 55397-01-9311, 1994-08-22, R. Jolicoeur

[3]           CALP 34213-01-9111, 1994-01-31, R. Chartier

[4]           CLP, 142213-03B-0007, 2000-12-12, R. Savard

[5]           Larousse, Bordas 1998, pages 387 et 273

[6]           [1990], CALP 683

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.