Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Abitibi-Témiscamingue

ROUYN-NORANDA, le 8 juillet 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

163232-08-0106-C

PAR LE COMMISSAIRE :

Me Pierre Prégent

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

118762418

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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RECTIFICATION D’UNE DÉCISION EN VERTU DE L'ARTICLE 429 .55 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (L.R.Q., c. A-3.001)

 

 

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DANIEL PERRON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TRANSPORT MARCEL ST-PIERRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

RECTIFICATION D’UNE DÉCISION

 

 

[1]        La Commission des lésions professionnelles a rendu le 25 juin 2003, une décision dans le présent dossier;

[2]        Cette décision contient une erreur d’écriture qu’il y a lieu de rectifier;

[3]        À la page 15, nous lisons :

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 13 juin 2001 à la suite d’une révision administrative;

[4]        Alors que nous aurions dû lire :

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 26 mai 2001 à la suite d’une révision administrative;

 

 

 

 

 

Me Pierre Prégent

 

Commissaire

 

 

 

 

 

GIROUARD, ADAM ET ASSOCIÉS

(Me Josée Audet)

 

Représentante de la partie requérante

 

 

 

BEAUVAIS, TRUCHON ET ASSOCIÉS

(Me Richard Gauthier)

 

Représentant de la partie intéressée

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Abitibi-Témiscamingue

ROUYN-NORANDA, le 25 juin 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

163232-08-0106

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Me Pierre Prégent

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Rodney Vallière

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Jean-Pierre Valiquette

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

118762418

AUDIENCE TENUE LE :

12 mars 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Val-d’Or

 

 

 

 

 

 

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DANIEL PERRON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TRANSPORT MARCEL ST-PIERRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]   Le 13 juin 2001, monsieur Daniel Perron (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 26 mai 2001 à la suite d’une révision administrative.

[2]   Par cette décision, la CSST infirme sa décision déjà rendue le 9 novembre 2000.  Elle déclare que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 1er septembre 1999.  Elle déclare aussi que la demande de révision du travailleur déposée à l’encontre d’une décision rendue le 21 février 2001 est sans objet.

[3]   À l’audience, le travailleur et l’employeur sont présents et sont représentés par procureurs.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]   Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a subi une lésion professionnelle qui n’est pas consolidée malgré l’opinion contraire de son médecin qui a charge.

QUESTION PRÉLIMINAIRE

[5]   Le procureur de l’employeur soulève le fait que le travailleur ne peut contredire par une preuve factuelle l’opinion médicale de son médecin qui a charge qui est d’accord avec le docteur Renaud quant à la consolidation de la lésion professionnelle.

LES FAITS

[6]   De la preuve documentaire et testimoniale, la Commission des lésions professionnelles retient les faits pertinents à la question préliminaire.

[7]   Le 6 septembre 2000, le travailleur consulte le docteur Lafontaine qui diagnostique une récidive de lombalgie depuis trois semaines.  Un arrêt de travail et des anti-inflammatoires sont prescrits.

[8]   Le travailleur consulte son médecin de famille, le docteur Corriveau, le 11 septembre 2000.  Une entorse lombaire est diagnostiquée.

[9]   L’arrêt de travail est poursuivi jusqu’au 24 septembre 2000.  Des traitements de physiothérapie sont requis.  Le 18 septembre 2000, le docteur Corriveau maintient le même diagnostic et le même traitement conservateur.

[10]           La radiographie de la colonne lombaire, faite le 6 octobre 2000, montre une anomalie transitionnelle lombosacrée.  Il n’y a pas de pincement discal.  Il existe de légers phénomènes de spondylose multi-étagée sans lésion osseuse.

[11]           Le même jour, le docteur Corriveau pose le même diagnostic.  Le traitement conservateur se poursuit.  Toutefois, le 18 octobre 2000, il cesse les traitements de physiothérapie car ils ne procurent pas d’amélioration.

[12]           Le 15 novembre 2000, le docteur Corriveau produit un rapport final.  Il consolide une entorse lombaire et une spondylose lombaire avec atteinte permanente à l’intégrité physique et limitations fonctionnelles.  Il indique qu’il ne produira pas le bilan des séquelles.  Il réfère plutôt le travailleur en orthopédie.

[13]           À la demande de l’employeur, le docteur Renaud examine le travailleur le 29 novembre 2000.  Le travailleur se plaint de douleurs lombaires particulièrement lorsqu’il se penche souvent.  Au repos, il a moins de symptômes.  Il n’a pas d’antécédent au niveau lombaire.  Le travailleur présente une obésité et une hypotonie abdominale surtout avec hernie ombilicale.  La cyphose dorsale et la lordose lombaire sont présentes et normales.  Il marche normalement sans boiterie.  Il peut marcher sur la pointe des pieds et sur les talons.  Il peut prendre une position accroupie.  Il descend jusqu’à ce que ses quadriceps fléchissent à 80 degrés à cause d’un problème de force musculaire en relation avec son poids (232 livres).

[14]           Les amplitudes articulaires de la colonne lombaire montrent une flexion antérieure qui atteint 80 degrés avec un indice de Schoeber allongé à 21/15.  Les flexions latérales et les rotations atteignent 30 degrés.  L’extension est mesurée à 30 degrés.

[15]           L’examen neurologique montre la présence de réflexes rotuliens et achilléens normaux et symétriques.  Les cutanées plantaires sont en flexion.  La force musculaire de dorsiflexion du premier orteil et du pied est normale et égale de chaque côté.  Les manœuvres du Tripode et du Straight leg raising sont négatives à 90 degrés d’élévation de chaque côté.

[16]           Il n’existe aucun déficit sensitif aux membres inférieurs.  Le travailleur présente un œdème à godet aux deux jambes plus prononcé à droite.

[17]           À l’analyse des radiographies, faites le 6 octobre 2000, le docteur Renaud constate une sacralisation complète de L5 particulièrement.

[18]           Il conclut que le travailleur ne présente pas d’évidence de maladie ou de lésion au niveau de la colonne lombaire.  Son problème principal est l’obésité et l’hypotonie à la paroi abdominale.

[19]           Il considère qu’il n’y a pas de relation entre les plaintes du travailleur et un épisode fugace de lombalgie survenu un an auparavant.

[20]           Il retient donc comme diagnostic une lombalgie sans évidence de lésion à la colonne lombaire et une obésité exogène avec hypotonie de la paroi abdominale.  Il consolide la lésion au 6 septembre 2000 au plan administratif et au 29 novembre 2000 au plan médical.  Il est d’avis que le seul traitement à considérer est la perte de poids avec tonification de la paroi abdominale.  Il ne détermine aucune atteinte permanente à l’intégrité physique ni limitations fonctionnelles.

[21]           Le 15 décembre 2000, le docteur Corriveau pose le diagnostic d’entorse à la colonne lombaire.  Il note que le travailleur est en attente d’une évaluation en orthopédie.  Le 18 janvier 2001, le docteur Corriveau autorise des travaux légers à la condition que le travailleur évite les flexions répétées de la colonne lombaire et qu’il ne soulève pas de poids de plus de 10 kilogrammes.

[22]           La représentante du travailleur dépose les notes de consultation médicale du docteur Corriveau.  Les notes médicales du 12 janvier 2001 et du 18 janvier 2001 montrent ce qui suit.

[23]           Au 12 janvier 2001, l’examen objectif montre une manœuvre de Lasègue positive à 45 degrés de chaque côté.  La flexion et l’extension sont limitées.  La force, les réflexes et la sensibilité sont normales.  Le docteur Corriveau rapporte les résultats de l’expertise du docteur Renaud.  Puis, il pose comme diagnostic une lombalgie secondaire à une paroi abdominale hypotonique et à l’obésité du travailleur.  Il rapporte également une hypertension artérielle.  À titre de traitement, le docteur Corriveau recommande le retour au travail régulier à compter du 15 janvier 2001, la perte de poids et le renforcement abdominal.  Le travailleur précise que le docteur Corriveau partage avec lui le contenu de l’expertise du docteur Renaud.

[24]           Le travailleur reprend le travail le 15 janvier 2001.  Toutefois, la tentative est infructueuse.

[25]           La note du 18 janvier 2001 montre également que le docteur Corriveau examine le travailleur.  L’examen objectif est superposable à celui réalisé le 12 janvier 2001.  Le diagnostic retenu par le docteur Corriveau est similaire à celui retenu lors de l’examen précédent.  Il autorise une assignation temporaire pour un mois au lieu du travail régulier, car la tentative de retour au travail régulier est infructueuse.

[26]           Au 6 février 2001, le docteur Corriveau note qu’il reçoit un appel de l’agente de la CSST qui traite le dossier du travailleur.  Elle lui demande de compléter un rapport complémentaire même s’il est d’accord avec les conclusions médicales du docteur Renaud.  Aucun examen objectif n’est rapporté et le travailleur ne peut se rappeler d’un quelconque examen à cette date.  De plus, le docteur Corriveau ne l’avise pas du contenu du rapport complémentaire qu’il produit à la CSST.

[27]           La note médicale du 12 février 2001 montre que la condition du travailleur s’est dégradée.  Tous les mouvements du rachis lombaire sont maintenant limités.  Toutefois, le docteur Corriveau maintient le diagnostic de lombalgie secondaire à une paroi abdominale hypotonique et à l’obésité.  L’hypertension artérielle est retenue également.

L’ARGUMENTATION DES PARTIES

[28]           La procureure du travailleur prétend qu’il ne peut être tenu compte du rapport complémentaire  produit par le docteur Corriveau le 6 février 2001 car il n’est pas conforme aux règles de l’art et aux dispositions de l’article 212.1 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).  En effet, le docteur Corriveau n’a pas examiné le travailleur et ne l’avise pas du contenu du rapport complémentaire.  Elle prétend également qu’il n’est pas conforme à la réalité clinique du travailleur.  Les notes de consultation médicale montrent des mouvements limités du rachis lombaire lors des examens objectifs réalisés avant le 6 février 2001.

[29]           La procureure du travailleur requiert que le dossier soit retourné à la CSST afin qu’il soit procédé à la détermination de la consolidation de la lésion professionnelle et au bilan des séquelles.

[30]           Le procureur de l’employeur allègue que le docteur Corriveau est le médecin qui a charge du travailleur.  Il est aussi son médecin de famille depuis huit ans.  Lorsqu’il produit le rapport complémentaire, contesté par le travailleur, le docteur Corriveau tient compte des opinions médicales qu’il exprime les 12 janvier 2001 et 18 janvier 2001 après l’examen objectif du travailleur et la lecture de l’expertise du docteur Renaud.

L’AVIS DES MEMBRES

[31]           Le membre issu des associations syndicales est d’avis que le rapport complémentaire produit par le médecin qui a charge du travailleur doit être invalidé car il ne respecte pas les dispositions de la loi.  Il est produit à l’insu du travailleur alors que le médecin qui a charge change complètement son opinion médicale.

[32]           Dans ce contexte, la CSST devait acheminer le dossier au Bureau d’évaluation médicale afin de faire trancher les opinions différentes du médecin qui a charge et du médecin désigné.  De plus, le travailleur pouvait contester l’opinion médicale de son médecin dans les circonstances.

[33]           Pour sa part, le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que le rapport complémentaire produit par le médecin qui a charge est valide.  En effet, il ressort des éléments au dossier que le travailleur a été avisé par le médecin qui a charge qu’il le considérait consolidé et apte à reprendre son travail suite à des examens objectifs réalisés dans les semaines précédentes.

[34]           La CSST n’avait donc pas à acheminer le dossier du travailleur au Bureau d’évaluation médicale.  De plus, le travailleur ne pouvait pas contester l’opinion médicale de son médecin.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LA QUESTION PRÉLIMINAIRE

[35]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur peut contester le rapport complémentaire de son médecin qui a charge ou si le rapport est caduc.

[36]           La Commission des lésions professionnelles considère que le docteur Corriveau est le médecin qui a charge du travailleur.  Il est son médecin de famille depuis huit ans et, au dossier, c’est lui qui assure le suivi médical et qui prescrit le plan de traitement après les examens objectifs auxquels il procède.

[37]           Il est de jurisprudence constante et abondante, tant à la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) qu’à la Commission des lésions professionnelles, que le travailleur ne peut contester le rapport médical de son médecin qui a charge.  Il existe des exceptions à ce principe.  C’est le cas notamment lorsque le médecin qui a charge omet d’évaluer un des aspects de la condition du travailleur ou s’il commet une erreur d’interprétation du Barème des dommages corporels[2].

 

 

[38]           Dans le cas qui nous concerne, le médecin qui a charge du travailleur produit, à la demande de la CSST, un rapport complémentaire sans l’examiner.  De plus, il ne l’avise pas du contenu de ce rapport comme l’article 212.1 de la loi, dont le texte suit, l’exige :

212.1. Si le rapport du professionnel de la santé obtenu en vertu de l'article 212 infirme les conclusions du médecin qui a charge du travailleur quant à l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de cet article, ce dernier peut, dans les 30 jours de la date de la réception de ce rapport, fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport complémentaire en vue d'étayer ses conclusions et, le cas échéant, y joindre un rapport de consultation motivé.  Le médecin qui a charge du travailleur informe celui - ci, sans délai, du contenu de son rapport.

 

La Commission soumet ces rapports, incluant, le cas échéant, le rapport complémentaire au Bureau d'évaluation médicale prévu à l'article 216.

________

1997, c. 27, a. 5.

 

 

[39]           La Commission des lésions professionnelles infère des dispositions de l’article 212.1 de la loi que le médecin qui a charge n’est pas tenu d’examiner le travailleur.  Il peut joindre un rapport de consultation motivé pour étayer ses conclusions contenues au rapport complémentaire.

[40]           L’article 212.1 prescrit que le médecin qui a charge informe sans délai le travailleur du contenu de son rapport complémentaire.  Le docteur Corriveau a omis de le faire le 6 février 2001.

[41]           Cela est-il suffisant pour permettre au travailleur de contester le rapport complémentaire ou est-ce que cette omission est suffisante pour rendre caduc le rapport complémentaire?

[42]           La réponse à ces deux questions est non.  Il y a lieu d’examiner le contexte particulier dans lequel est produit le rapport complémentaire pour bien comprendre cette position.

[43]           La preuve médicale révèle que le 15 novembre 2000, le docteur Corriveau consolide une entorse lombaire et une spondylose lombaire avec séquelles.  Il ne produit pas le bilan des séquelles.  Il réfère le travailleur en orthopédie.

[44]           Puis, le docteur Renaud, orthopédiste, examine le travailleur à la demande de l’employeur.  Son examen objectif est complètement normal.  La lésion professionnelle est consolidée sans séquelle au plan médical au jour de son examen fait le 29 novembre 2000.  Au plan administratif, la lésion est consolidée le 6 septembre 2000.

[45]           Le docteur Corriveau prend connaissance de l’expertise du docteur Renaud.  Il reçoit le travailleur le 12 janvier 2001.  Il partage avec lui le contenu de l’expertise du docteur Renaud.  Il examine le travailleur.  Il constate des limitations de mouvements du rachis lombaire.  Toutefois, il autorise un retour au travail dès le 15 janvier 2001.

[46]           La Commission des lésions professionnelles en infère que, à l’instar du docteur Renaud, le docteur Corriveau considère que la condition du travailleur n’est pas reliée au travail.  Il le confirme en indiquant sur sa note de consultation que la lombalgie est secondaire à une paroi abdominale hypotonique et à l’obésité du travailleur.

[47]           La Commission des lésions professionnelles considère que la tentative de retour au travail régulier du travailleur le 15 janvier 2001 constitue une indication que le docteur Corriveau a partagé avec lui ses propres conclusions sur sa condition.

[48]           Suite à la tentative de retour au travail infructueuse, le docteur Corriveau examine à nouveau le travailleur.  L’examen du 18 janvier 2001 est identique à celui réalisé le 12 janvier 2001.  Le diagnostic retenu est le même.  La relation avec le travail n’est pas confirmée.  Le plan de traitement diffère.  Une assignation à des travaux légers est autorisée.

[49]           La Commission des lésions professionnelles conclut que, dans les semaines avant la production du rapport complémentaire à la CSST, le docteur Corriveau partage ses propres conclusions médicales avec le travailleur.  Le fait qu’il transmette ses informations par écrit à la CSST sans le faire savoir au travailleur ne constitue pas une omission grave qui, à elle seule, est suffisante pour rendre le rapport complémentaire caduc ou pour permettre au travailleur de le contester.

[50]           L’appréciation de la gravité de l’omission par la Commission des lésions professionnelles aurait pu être bien différente si le docteur Corriveau n’avait jamais partagé avec le travailleur ses propres conclusions, c’est-à-dire son accord avec les conclusions médicales de l’orthopédiste Renaud.

[51]           Dans les circonstances, la Commission des lésions professionnelles est d’avis d’accueillir l’objection préliminaire soulevée par l’employeur.  Le travailleur ne peut contester le rapport complémentaire du docteur Corriveau.  Elle conclut également que l’omission du docteur Corriveau n’est pas si grave au point de rendre caduc son rapport complémentaire.

SUR LA QUESTION PRINCIPALE

LES FAITS

[52]           De la preuve documentaire et testimoniale, la Commission des lésions professionnelles retient les faits pertinents qui suivent.

[53]           Le 1er septembre 1999, le travailleur ressent une douleur au bas du dos en serrant les boulons de la jante d’une roue du camion qu’il conduit.  Il effectue un effort physique en position penchée vers l’avant.  Il utilise une clé et une barre de métal qu’il insère dans le trou au bout de la clé pour mieux forcer.  Il n’a pas d’antécédent lombaire.

[54]           Il décrit la douleur comme un pincement, une sensation de chaleur au niveau de la ceinture au bas du dos.

[55]           Le lendemain, il avertit le contremaître Jacques Simard de l’événement.  Le travailleur ne consulte pas un médecin.  Il poursuit son travail jusqu’au 6 septembre 2000 malgré une douleur persistante qui est exacerbée à chaque fois qu’il doit serrer les boulons des jantes des roues ou qu’il lance les attaches par-dessus les charges à fixer à sa remorque.  Le travailleur précise qu’il est toujours réveillé la nuit par la douleur depuis l’événement.

[56]           Le travailleur ne se sent pas capable de serrer les boulons des roues de son camion le 6 septembre 2000.  Averti, son contremaître lui indique d’aller consulter un médecin à l’hôpital de Lebel-sur-Quevillon.  Le travailleur y consulte le docteur Lafontaine.  Il diagnostique une récidive de lombalgie depuis trois semaines.  Il rapporte sur sa note de consultation que le travailleur a subi une entorse lombaire il y a un an.  Il le retourne à son médecin traitant, le docteur Corriveau.

[57]           Le 11 septembre 2000, le docteur Corriveau examine le travailleur.  La flexion antérieure est diminuée.  L’extension est normale à 30 degrés.  Les flexions latérales et les rotations le sont également à 30 degrés.  La manœuvre de Lasègue est négative.  La force, les réflexes et la sensibilité sont normaux.  Il n’est pas rapporté de spasme ou d’inflammation.  Le diagnostic d’entorse lombaire est retenu.

[58]           Les notes d’évolution de la CSST au 14 septembre 200 indiquent que le travailleur déclare l’événement, survenu le 1er septembre 1999, deux jours plus tard à son contremaître. Il ajoute que la douleur s’est estompée mais elle a persisté.  Il n’a pas vu de médecin et « ça s’est passé tout seul ».  Les douleurs sont réapparues le printemps suivant.

[59]           Le 11 octobre 2000, le travailleur déclare qu’il ne se souvient plus quand l’événement s’est produit.

[60]           Le 6 novembre 2000, monsieur Jacques Simard confirme que le travailleur s’est plaint de maux de dos à l’automne 1999 sans préciser de date exacte.

[61]           La note de consultation médicale du 18 septembre 2000 montre que l’examen objectif est identique à celui fait le 11 septembre 2000.

[62]           Puis, le 15 novembre 2000, le docteur Corriveau consolide une entorse lombaire et une spondylose lombaire avec séquelles.  Il ne produit pas de bilan des séquelles.  Il réfère le travailleur en orthopédie.

[63]           L’examen réalisé par l’orthopédiste Renaud, à la demande de l’employeur, est complètement normal, tel que décrit à la question préliminaire, le 29 novembre 2000.  Le diagnostic retenu est celui de lombalgie sans évidence de lésion à la colonne lombaire et d’obésité exogène avec hypotonie de la paroi abdominale.  Le diagnostic n’est pas relié à un événement survenu au travail.

[64]           Le docteur Corriveau partage les conclusions du docteur Renaud après avoir lu son expertise le 6 février 2001.

[65]           L’examen objectif du 12 février 2001 montre que tous les mouvements du rachis lombaire sont maintenant limités.

[66]           Le travailleur est reconnu invalide par la Régie des rentes du Québec.

[67]           À l’audience, le docteur Grégoire fait la revue des éléments médicaux au dossier du travailleur.  À son avis, la position adoptée par le travailleur le 1er septembre 1999, telle que mimée à l’audience, pour serrer les boulons de la jante de la roue du camion, n’est pas susceptible de provoquer la symptomatologie invoquée.  Il n’y a pas eu d’effort anormal ou très exigeant exécuté dans une position non ergonomique.

[68]           Il faut retenir, à son avis, que le travailleur est porteur d’une sacralisation à L5.  Cela a pour effet de répartir sur les niveaux supérieurs mobiles tout stress additionnel.

[69]           Enfin, il considère que l’entorse lombaire, diagnostiquée en septembre 2000, ne peut être reliée à l’événement allégué du 1er septembre 1999.  Il n’y a pas de mécanisme de production d’une entorse qui est survenu.  Il n’y a pas eu d’examen médical à l’époque également.

[70]           Enfin, il ne peut expliquer comment un travailleur peut travailler avec une entorse lombaire pendant une année complète.

L’ARGUMENTATION DES PARTIES

[71]           La procureure du travailleur allègue que la présomption de lésion professionnelle de l’article 28 de la loi doit s’appliquer dans la présente affaire.

[72]           Elle allègue également que le travailleur est asymptomatique au niveau lombaire avant le 1er septembre 1999 même s’il est porteur d’une sacralisation à L5.  Or, selon l’expert de l’employeur, cela crée un stress additionnel aux quatre segments mobiles supérieurs.  L’effort exigeant effectué pour visser les boulons a aggravé la condition personnelle du travailleur qui se plaint de douleurs depuis.

[73]           Devant le témoignage livré de bonne foi par le travailleur, la Commission des lésions professionnelles doit déclarer qu’il a subi une lésion professionnelle le 1er septembre 1999.

[74]           Pour sa part, le procureur de l’employeur allègue que la crédibilité du travailleur est entachée.  Le fait de consulter tardivement un an après le fait accidentel allégué impose au travailleur un fardeau de preuve qu’il n’a pas surmonté.

[75]           Le travailleur n’a pas démontré qu’il est survenu un événement imprévu et soudain le 1er septembre 1999.  Il n’a pas prouvé non plus qu’il a effectué un geste brusque ou un faux mouvement.  La douleur est apparue dans l’exercice habituel des activités du travail.  Il apparaît impossible, compte tenu des tâches qu’il doit effectuer, que le travailleur poursuive ses tâches pendant toute une année avec une entorse lombaire.  Il est tout aussi improbable que le geste effectué par le travailleur puisse être le fait générateur d’une entorse lombaire diagnostiquée un an après le fait allégué.

[76]           Il requiert de la Commission des lésions professionnelles qu’elle confirme la décision de la CSST.

L’AVIS DES MEMBRES

[77]           Quant au fond, le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d’employeurs sont d’avis que le travailleur n’a pas démontré par une preuve prépondérante qu’il a subi une lésion professionnelle le 1er septembre1999.  Le délai d’un an à consulter empêche l’application de la présomption de lésion professionnelle.  L’absence d’un événement imprévu et soudain ne permet pas de retenir que le travailleur a subi un accident du travail.  Enfin, il n’a pas été démontré que le travailleur a subi une maladie professionnelle.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[78]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a subi une lésion professionnelle le 1er septembre 1999.

 

[79]           La lésion professionnelle est ainsi définie à l’article 2 de la loi :

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation.

 

 

[80]           L’accident du travail l’est également comme suit :

« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle.

 

 

[81]           L’article 28 de la loi, dont le texte suit, édicte une présomption de lésion professionnelle qui facilite le fardeau de preuve du travailleur.

28. Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.

________

1985, c. 6, a. 28.

 

 

[82]           Afin de bénéficier de cette présomption, le travailleur doit démontrer qu’il a subi une blessure sur les lieux du travail alors qu’il effectue son travail.

[83]           Le travailleur est camionneur.  Il doit vérifier l’état de son camion et faire les ajustements appropriés avant d’utiliser son camion et durant son quart de travail.

[84]           Le 1er septembre 1999, il se penche pour serrer les boulons d’une jante de roue de son camion.  Il utilise une clé et une barre de fer qu’il insère dans un trou au bout de la clé pour forcer plus adéquatement.

[85]           En forçant, il ressent une douleur lombaire qui donne l’impression d’une chaleur au niveau de la ceinture au bas du dos.

[86]           Le 6 septembre 2000, le travailleur consulte pour la première fois un médecin à la suite de cet épisode.  Il est fait état d’une lombalgie qui récidive depuis trois semaines.

[87]           Puis, le 11 septembre 2000, le docteur Corriveau diagnostique une entorse à la colonne lombaire.

[88]           Il s’est donc écoulé une année entre l’événement allégué et la première consultation médicale.

[89]           La Commission des lésions professionnelles considère que la question du délai de consultation médicale constitue un élément qui doit être analysé dans l’application de la présomption de lésion professionnelle.  Elle doit s’apprécier avec d’autres éléments tels la déclaration immédiate à l’employeur, la vraisemblance des explications fournies par le travailleur pour justifier le retard à consulter, l’étroite relation entre le diagnostic retenu et le travail exécuté durant le délai analysé.

[90]           Il n’est pas contredit que le travailleur déclare l’événement survenu le 1er septembre 1999 à son contremaître.  L’événement n’est pas corroboré par témoin.  Seul son témoignage l’indique et une mention que le travailleur s’est plaint de maux de dos à l’automne 1999.

[91]           À la CSST, il précise qu’il a déclaré l’événement deux jours plus tard à son contremaître.  Devant la Commission des lésions professionnelles, l’événement est déclaré le lendemain.

[92]           Que l’événement soit déclaré dans les 24 ou 48 heures qui suit sa survenance n’est pas suffisant pour empêcher l’application de la présomption.

[93]           Un autre facteur à analyser est la vraisemblance des explications fournies par le travailleur pour justifier le retard à consulter un médecin.  À la CSST, le travailleur indique que la douleur, d’abord persistante, est disparue d’elle-même pour réapparaître le printemps suivant.  À l’audience, la douleur n’est jamais disparue.  Elle est présente depuis le 1er septembre 1999.  Il y a contradiction entre les déclarations faites à la CSST et son témoignage devant la Commission des lésions professionnelles.

[94]           Cette contradiction est accentuée par la déclaration du travailleur qui soutient devant la Commission des lésions professionnelles que, depuis le 1er septembre 1999, il est constamment réveillé la nuit par ses douleurs.

[95]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que ces contradictions entachent la crédibilité à accorder à son témoignage.

[96]           Enfin, il y a lieu d’examiner, comme autre facteur, la relation étroite entre le diagnostic retenu en septembre 2000 et le travail exécuté par le travailleur.

[97]           Le diagnostic retenu en septembre 2000 est celui d’entorse lombaire.  De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, ce diagnostic est incompatible avec les exigences physiques de l’emploi de camionneur.  En effet, ce travail oblige le travailleur à demeurer assis pour de longue période.  Il requiert des efforts physiques en position penchée pour serrer des boulons de jante de roue.  Il exige de travailler les bras en haut des épaules pour lancer des attaches par-dessus les charges afin de les fixer à la remorque.  Il doit aussi monter et descendre de son camion.

[98]           Or, le travailleur n’a pas expliqué de façon prépondérante comment il a pu continuer à accomplir son travail de camionneur tout en alléguant être porteur d’une entorse lombaire pendant un an qui l’oblige à arrêter de travailler dès que le diagnostic est confirmé.

[99]           Le délai d’un an à consulter génère, de l’avis de la Commission des lésions professionnelles, une incohérence qui l’oblige à ne pas appliquer la présomption de lésion professionnelle.

[100]       Il appartient donc au travailleur de démontrer qu’il a subi un accident du travail.  Il déclare qu’en serrant un boulon de la jante d’une roue, une douleur lombaire est apparue.

[101]       La Commission des lésions professionnelles ne retrouve pas dans les déclarations du travailleur, tant à la CSST que devant elle, une quelconque démonstration qu’il est survenu un événement imprévu et soudain par le fait ou à l’occasion du travail qui entraîne pour lui une lésion professionnelle.

[102]       Or, la survenance d’un événement imprévu et soudain constitue un élément essentiel de la définition de l’accident du travail.  En l’absence d’un tel élément, la Commission des lésions professionnelles ne peut retenir que le travailleur a subi un accident du travail le 1er septembre 1999.

[103]       Enfin, il n’a pas été démontré que le travailleur a subi une maladie professionnelle caractéristique du travail de camionneur ou reliée aux risques particuliers de ce travail.

[104]       La Commission des lésions professionnelles conclut donc que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 1er septembre 1999.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

QUESTION PRÉLIMINAIRE

ACCUEILLE l’objection soulevée à l’audience par Transport Marcel St-Pierre, l’employeur;

DÉCLARE que le travailleur ne peut contester le rapport complémentaire produit par son médecin qui a charge;

DÉCLARE que le rapport complémentaire du docteur Corriveau n’est pas caduc.

QUESTION PRINCIPALE

REJETTE la requête de monsieur Daniel Perron, le travailleur, déposée le 13 juin 2001;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 13 juin 2001 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 1er septembre 1999.

 

 

 

 

 

Me Pierre Prégent

 

Commissaire

 

 

 

 

 

GIROUARD, ADAM ET ASSOCIÉS

(Me Josée Audet)

 

Représentante de la partie requérante

 

 

 

BEAUVAIS, TRUCHON ET ASSOCIÉS

(Me Richard Gauthier)

 

Représentant de la partie intéressée

 

 

 


 

JURISPRUDENCE DÉPOSÉE

 

PAR LE TRAVAILLEUR :

 

Frigidaire Canada et Chartrand, CLP, 118381-63-9906, 2000-08-03, L. Desbois

 

Harder-Schof et Centre hospitalier Angrignon (Pavillon Verdun), CALP, 80090-60-9606, 1998‑02-03, T. Giroux

 

Morin et Twinpack inc., CALP, 19070-60-9005, 1992-12-15, T. Giroux

 

Poisson et Urgences Santé, CLP, 109110-71-9901, 1999-09-10, F. Juteau

 

Lavoie et Commission scolaire des Belles Rivières, CALP, 59738-03-9406, 1996-01-12, M. Carignan

 

Chaput et Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, CALP, 03477-60-8706, 1989-06-14, J.-G. Béliveau

 

 

PAR L’EMPLOYEUR :

 

Couture et Construction Impregilo ltée, CALP, 60-00107-8606, 1986-11-24, L. McCutcheon

 

Croteau et Delavage de l’Estrie inc., CLP, 131375-62B-0002, 2000-10-18, N. Blanchard

 



[1]          L.R.Q, c. A-3.001

[2]          Montréal, Commission de la santé et de la sécurité du travail, 1987

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