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Dossier 224932-62A-0401
[1] Le 5 janvier 2004, monsieur Serge André Fiset (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 19 décembre 2003 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 3 septembre 2003 à l’effet d’accepter de payer divers frais d’adaptation du domicile du travailleur soit, la salle de bain, l’escalier intérieur et extérieur ainsi que la cuisine, pour un coût total maximal de 10 500 $.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[3] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision contestée uniquement quant aux frais d’adaptation de la salle de bain de son domicile, les modifications concernant les escaliers et la cuisine ayant été complétées à sa satisfaction.
Dossier 228293-62A-0402
[4] Le 27 février 2004, le travailleur dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision rendue par la CSST le 21 janvier 2004 à la suite d’une révision administrative.
[5] Par cette décision, la CSST confirme deux décisions qu’elle a initialement rendues le 25 août 2003, et déclare que le coût d’achat d’une prothèse fémorale aquatique ainsi que les frais de travaux de construction de clôture ne sont pas remboursables par la CSST.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[6] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision contestée, et de reconnaître que la CSST est tenue au coût d’achat d’une prothèse fémorale aquatique et aux frais d’installation de la clôture de son domicile.
[7] À l’audience fixée et tenue devant la Commission des lésions professionnelles le 15 juillet 2004, le travailleur est présent. Transport Meloche inc. (l’employeur) est absent. La CSST est représentée par Me Guy Marengère. La présente affaire a été mise en délibéré le 15 juillet 2004.
L’AVIS DES MEMBRES
[8] Conformément à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles,(L.R.Q. ch. A-3.001) ci-après appelée (la loi), le commissaire soussigné a reçu l’avis des membres issus des associations syndicales et d’employeurs qui ont siégé auprès de lui dans la présente affaire.
Dossier 224932-62A-0401
[9] Le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d'employeurs comprennent difficilement qu’un tel dossier se retrouve devant la Commission des lésions professionnelles puisqu’il semble bien que le montant de 10 500 $ alloué par la CSST en paiement des frais d’adaptation du domicile du travailleur soit amplement suffisant pour permettre les modifications nécessaires pour adapter le domicile du travailleur et incluant la salle de bain. Ils suggèrent à la CSST d’envisager la réalisation des modifications de la salle de bain prévues au rapport de l’ergothérapeute, et suggèrent au travailleur de présenter une réclamation si des ajustements étaient nécessaires par la suite.
Dossier 228293-62A-0402
[10] Le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d'employeurs considèrent que le travailleur n’a pas droit aux frais d’installation de la clôture de son domicile puisque à leur avis ces frais constituent des frais de construction qui ne sont pas couverts par la loi. Concernant l’achat d’une prothèse fémorale aquatique, ils sont d’avis que le travailleur rencontre les prescriptions de la loi et qu’il y a lieu d’accorder sa demande.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[11] Concernant les frais d’adaptation du domicile, le tribunal retient que les modifications apportées aux escaliers et à la cuisine conviennent tout à fait et ne sont pas remises en question par le travailleur. Seules les modifications projetées pour la salle de bain sont contestées par le travailleur, en ce que le prix demandé par l’entrepreneur ayant présenté une soumission à la CSST - soumission qui fut acceptée mais dont les travaux n’ont pas encore été réalisés en raison de la contestation du travailleur - est beaucoup trop élevé eu égard aux travaux proposés, lesquels dans certains cas sont inappropriés selon le travailleur eu égard à ses besoins.
[12] À l’audience tenue devant la Commission des lésions professionnelles, le travailleur a expliqué sa contestation et le procureur de la CSST a soumis que la position de la CSST repose sur le rapport de madame Caroline Tétreault, ergothérapeute, à la suite de rencontres tenues au domicile du travailleur en présence de ce dernier, de monsieur Serge Fortin conseiller en réadaptation à la CSST et de madame Caroline Tétrault ergothérapeute.
[13] Aussi, le tribunal a pu examiner la soumission numéro 1863 de la compagnie Escalateur Atlas inc. pour un montant total de 11 550 $ plus les taxes afin d’exécuter les modifications proposées par l’ergothérapeute concernant la salle de bain, les escaliers, la cuisine et l’ajout de rampes d’accès. Tel que susdit, seules les modifications à la salle de bain n’ont pas été réalisées en raison de la contestation du travailleur. Il apparaît aussi que la rampe d’accès à l’arrière de la résidence, au prix estimé de 3 200 $, a été annulée ; son prix estimé doit donc être déduit du montant total de la soumission numéro 1863.
[14] À l’audience, le travailleur explique qu’il est nécessaire d’élever la toilette de la salle de bain. Il rapporte aussi que sa conjointe accepte difficilement que les articles de la salle de bain soient de couleur différente; toutefois, le travailleur retire cet argument de sa contestation. Enfin, il semble que la contestation du travailleur repose sur un choix de céramique inapproprié et sur l’accessibilité de la pièce en fauteuil roulant de même que sur la circulation en fauteuil roulant à l’intérieur de la salle de bain, particulièrement près de la vanité. Le travailleur soumet qu’il pourrait facilement faire exécuter les travaux nécessaires à un coût bien en deçà des coûts proposés qui n’ont pas encore été utilisés. Le travailleur indique qu’il pourrait inclure à ces travaux l’achat et l’installation d’un bain thérapeutique sans encore dépasser les montants alloués, et qu’il pourrait assumer personnellement la partie du dépassement de coût le cas échéant.
[15] Les propos du travailleur à l’audience et les réponses du procureur de la CSST aux questions du tribunal aident peu à la résolution du présent litige. Le travailleur voudrait que la CSST aille au-delà des recommandations de l’ergothérapeute et discute le coût élevé des travaux suggérés. D’autre part, le procureur de la CSST s’oppose aux demandes du travailleur en s’appuyant sur le rapport d’ergothérapie préparé par madame Caroline Tétrault.
[16] Le tribunal déplore une telle attitude parfois teintée d’agressivité et croit que les parties en l’instance pourraient facilement trouver une solution pratique au présent litige. Considérant toutefois que cette volonté n’était pas présente au moment de l'audience, le tribunal rend la présente décision concernant les modifications à apporter à la salle de bain. Le tribunal considère qu’il y a lieu d’accepter et de procéder aux correctifs recommandés par l’ergothérapeute au dossier et prévues à la soumission 1863; d’ailleurs ces correctifs rencontrent essentiellement les demandes du travailleur. Si par la suite des ajouts étaient nécessaires, les parties pourront voir à s’entendre sinon le travailleur pourra présenter une réclamation écrite avec pièces justificatives au soutien de sa réclamation.
[17] Concernant l’installation de la clôture au domicile du travailleur, le tribunal rappelle qu’un travailleur ayant subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d’une lésion professionnelle et qui est incapable d’effectuer les travaux d’entretien courant de son domicile entretien courant de son domicile peut être remboursé des frais qu’il engage pour faire exécuter ces travaux jusqu’à concurrence de 1 500 $ par année conformément à l’article 165 de la loi.
[18] Bien que le tribunal soit convaincu que le travailleur garde une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison de la lésion professionnelle qu’il a subie, le tribunal estime que les travaux d’installation d’une nouvelle clôture au domicile du travailleur ne font pas partie des travaux d’entretien courants de son domicile. Il s’agit plutôt de travaux de construction ou de réaménagement d’un terrain qui, de l’avis du tribunal ne sont pas couverts par la loi.
[19] Concernant la prothèse fémorale aquatique, la Commission des lésions professionnelles considère que le travailleur, victime d’une lésion professionnelle, a droit à l’assistance médicale que requiert son état en raison de la lésion professionnelle qu’il a subie.
[20] À l’article 189 de la loi, il est indiqué que l’assistance médicale consiste en ce qui suit :
189. L'assistance médicale consiste en ce qui suit:
4° les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons, les services ambulanciers et la disposition des cadavres (chapitre L-0.2), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;
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1985, c. 6, a. 189; 1992, c. 11, a. 8; 1994, c. 23, a. 23; 1999, c. 89, a. 53; 2001, c. 60, a. 166.
[21] Il est exact en l’espèce que la CSST a déjà remboursé l’achat d’une prothèse avec genou C-leg; la CSST considère par ce fait qu’elle s’est déjà acquittée de ses obligations envers le travailleur à ce sujet. Le tribunal constate toutefois au dossier que la prothèse fémorale aquatique a également été prescrite par le médecin du travailleur. Sans que les raisons d’une telle prescription médicale aient été discutées devant le tribunal, le tribunal n’a d’autre choix que de constater que le médecin du travailleur a jugé médicalement important que le travailleur puisse bénéficier d’une telle prothèse lorsqu’il utilise la piscine qu’il avait dans sa cour arrière avant la survenance de son accident. Ainsi, il s’agit en l’espèce d’une prothèse au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux prescrite par un professionnel de la santé; il y a aussi preuve au dossier à l’effet qu’une telle prothèse est disponible chez un fournisseur agréé par la Régie de l’assurance maladie du Québec.
[22] En conséquence, la demande du travailleur rencontre les articles 188 et 189 de la loi, et considère que la CSST doit acquitter son obligation de procurer au travailleur une telle prothèse prescrite par son médecin.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossier 224932-62A-0401
ORDONNE aux parties de procéder aux correctifs recommandés au rapport d’ergothérapie de madame Caroline Tétrault en ce qui concerne les modifications à apporter à la salle de bain du domicile du travailleur, monsieur Serge André Fiset;
Dossier 228293-62A-0402
ACCUEILLE en partie la requête en contestation du travailleur;
INFIRME en partie la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 21 janvier 2004 à la suite de sa révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a droit à l’achat d’une prothèse fémorale aquatique et que la Commission de la santé et de la sécurité du travail est tenue de lui rembourser l’achat d’une telle prothèse;
DÉCLARE que la Commission de la santé et de la sécurité du travail est justifiée de refuser de rembourser au travailleur les coûts d’installation de la clôture de son domicile.
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Me Camille Demers |
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Commissaire |
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Me Guy Marengère |
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PANNETON LESSARD |
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Représentant de la partie intervenante |
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.