Circuit Ford Lincoln ltée et Reda |
2009 QCCLP 6634 |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Montréal |
23 novembre 2009 |
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Région : |
Montréal |
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291869-71-0606 293347-71-0607 330787-71-0710 344538-71-0804 |
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Dossier CSST : |
126769009 130314115 |
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Commissaire : |
Danièle Gruffy, juge administratif |
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291869-71-0606 330787-71-0710 |
293347-71-0607 |
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344538-71-0804 |
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Le Circuit Ford Lincoln ltée |
Luigi Reda |
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Partie requérante |
Partie requérante |
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Luigi Reda |
Le Circuit Ford Lincoln ltée |
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Partie intéressée |
Partie intéressée |
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RECTIFICATION D’UNE DÉCISION
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[1] La Commission des lésions professionnelles a rendu le 30 septembre 2009, une décision dans les dossiers 291869-71-0606 et 293347-71-0607. Cette décision contient une erreur qu’il y a lieu de rectifier en vertu de l’article 429.55 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, (L.R.Q., c. A-3.001).
[2] À la page 23, nous lisons :
MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 1er juin 2006 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une lésion professionnelle;
DÉCLARE que le diagnostic de cette lésion professionnelle est celui d’une encéphalopathie toxique aux solvants.
[3] Alors que nous aurions dû lire :
MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 1er juin 2006 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une lésion professionnelle;
DÉCLARE que le diagnostic de cette lésion professionnelle est celui d’une encéphalopathie toxique aux solvants;
DÉCLARE que le travailleur a droit aux prestations prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en regard de ce diagnostic.
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Danièle Gruffy |
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Me Émilie Lessard |
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Béchard, Morin et ass. |
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Représentante de l’employeur |
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Me Pasquale Di Prima |
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Di Prima, Piccolino, avocats |
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Représentant du travailleur |
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Circuit Ford Lincoln ltée et Reda |
2009 QCCLP 6634 |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Montréal |
30 septembre 2009 |
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Région : |
Montréal |
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Dossiers : |
291869-71-0606 293347-71-0607 330787-71-0710 344538-71-0804 |
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Dossier CSST : |
126769009 130314115 |
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Commissaire : |
Danièle Gruffy, juge administratif |
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Membres : |
Jean-Marie Trudel, associations d’employeurs |
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Normand Deslauriers, associations syndicales |
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Assesseur : |
Dr Christian Hemmings, médecin |
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291869-71-0606 330787-71-0710 |
293347-71-0607 |
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344538-71-0804 |
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Le Circuit Ford Lincoln ltée |
Luigi Reda |
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Partie requérante |
Partie requérante |
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et |
et |
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Luigi Reda |
Le Circuit Ford Lincoln ltée |
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Partie intéressée |
Partie intéressée |
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Dossier 291869-71-0606
[1] Le 15 juin 2006, l’employeur, Le Circuit Ford Lincoln ltée, dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 1er juin 2006 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST déclare d’abord que la décision initiale rendue le 26 mai 2005 est sans effet. Par cette décision initiale, la CSST concluait que le 7 novembre 2004, le travailleur, monsieur Luigi Reda, avait subi une maladie professionnelle soit une encéphalopathie.
[3] Également, par sa décision du 1er juin 2006, la CSST infirme la décision qu’elle a initialement rendue le 29 mars 2006 donnant suite à l’avis d’un membre du Bureau d’évaluation médicale en date du 25 novembre 2005 et à l’avis complémentaire de celui-ci en date du 27 janvier 2006. La CSST déclare que le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une maladie professionnelle soit une intoxication transitoire et réversible aux produits toxiques. Elle déclare aussi que cette lésion professionnelle est dûment consolidée depuis le 16 juillet 2005, sans atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique du travailleur et sans limitations fonctionnelles. Elle conclut que le droit à l’indemnité de remplacement du revenu prend fin le 16 juillet 2005, date à laquelle le travailleur peut exercer son emploi.
Dossier 293347-71-0607
[4] Le 5 juillet 2006, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste, lui aussi, la décision de la CSST précédemment mentionnée, rendue le 1er juin 2006 à la suite d’une révision administrative.
Dossier 330787-71-0710
[5] Le 19 octobre 2007, l’employeur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 17 septembre 2007 à la suite d’une révision administrative.
[6] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 22 juin 2007 donnant suite à l’avis émis par le Comité spécial des présidents le 26 avril 2007. Elle se déclare liée par cet avis quant au diagnostic d’asthme professionnel au styrène et quant aux autres conclusions émises. Elle déclare que le travailleur est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire, qu’il a droit aux prestations prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) et qu’il a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique.
Dossier 344538-71-0804
[7] Le 7 avril 2008, l’employeur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 26 février 2008 à la suite d’une révision administrative.
[8] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 22 juin 2007 et déclare que, conformément à l’avis donné par le Comité spécial des présidents en date du 26 avril 2007, le travailleur conserve une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique de 3,30 % lui donnant droit à une indemnité pour préjudice corporel de 1 524,04 $.
[9] À l’audience tenue à Montréal le 7 novembre 2008, le travailleur et son procureur sont présents; l’employeur est également représenté.
[10] Tel que convenu, des documents médicaux complémentaires ont été produits après audience. Les parties ont aussi déposé une argumentation écrite. Le 26 juin 2009, le procureur du travailleur produit un dernier commentaire en réponse à la réplique de la procureure de l’employeur. Le dossier est mis en délibéré le 27 juin 2009.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
Dossiers 291869-71-0606 et 293347-71-0607
[11] L’employeur demande de déclarer que le diagnostic d’encéphalopathie toxique aux solvants ou celui d’intoxication transitoire et réversible aux produits toxiques ne peuvent être retenus et que le 7 novembre 2004, le travailleur n’a pas subi une lésion professionnelle.
[12] Pour sa part, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que le diagnostic à retenir est celui d’une encéphalopathie toxique aux solvants.
[13] Les autres sujets faisant l’objet de la décision de la CSST rendue le 1er juin 2006 à la suite d’une révision administrative ne sont pas contestés.
Dossiers 330787-71-0710 et 344538-71-0804
[14] Dans l’éventualité où la Commission des lésions professionnelles ne retient pas le diagnostic d’encéphalopathie toxique aux solvants, l’employeur demande de retourner le dossier au Comité des maladies professionnelles pulmonaires (CMPP) afin que des tests de provocation spécifique au styrène soient effectués. Il demande de suspendre le délibéré quant à l’évaluation de l’atteinte permanente en lien avec l’asthme au styrène, le temps que le travailleur subisse les tests de provocation requis. L’employeur indique, par ailleurs, que si la Commission des lésions professionnelles conclut que les tests ont bien été administrés, il n’a aucune représentation à faire.
L’AVIS DES MEMBRES
Dossiers 291869-71-0606 et 293347-71-0607
[15] Le membre issu des associations syndicales est d’avis que le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une lésion professionnelle soit une encéphalopathie toxique aux solvants. Il tient compte des éléments suivants :
— le travailleur a travaillé plus de 30 ans comme débosseleur et il a, pendant toutes ces années, été exposé à des solvants ayant des propriétés toxiques;
— la loi ne prévoit aucun seuil minimal d’exposition;
— il n’y a pas d’équipement de protection personnelle;
— le travailleur travaillait avec d’autres travailleurs qui utilisaient, eux aussi, des solvants; il y avait de la poussière dans l’atelier.
[16] Le membre issu des associations syndicales est donc d’avis de rejeter la requête de l’employeur et d’accueillir celle du travailleur.
[17] Le membre issu des associations d’employeur est plutôt d’avis d’accueillir la requête de l’employeur et de rejeter celle du travailleur. Il estime donc que le 7 novembre 2004, le travailleur n’a pas subi une lésion professionnelle. Il tient compte des éléments suivants :
— l’étude environnementale ne démontre aucune concentration de substances toxiques au-dessus des limites inscrites au Règlement sur la santé et la sécurité du travail [2]. Il n’y a, en l’espèce, aucune exposition importante et soutenue aux solvants;
— la preuve médicale prépondérante démontre l’absence d’une encéphalopathie toxique aux solvants de même que celle d’une intoxication transitoire et réversible aux produits toxiques (examens neurologiques normaux, tests paracliniques normaux);
— le travailleur éprouve toujours les mêmes symptômes et un déficit cognitif important même après deux ans et demi de retrait du travail;
— le docteur Roy n’explique pas le diagnostic qu’il retient;
— l’opinion du docteur Isler, basée sur l’évaluation neuropsychologique de madame Lassonde, ne peut être retenue;
— l’utilisation par le travailleur de « primer » et de peinture n’est que très sporadique.
Dossiers 330707-71-0710 et 344538-71-0804
[18] Le membre issu des associations syndicales est d’avis de rejeter les requêtes de l’employeur, compte tenu des conclusions auxquelles il en arrive concernant l’encéphalopathie toxique du travailleur et compte tenu de l’opinion plus que probante de l’ensemble des pneumologues qui retiennent le diagnostic d’asthme professionnel au styrène même en l’absence de tests de provocation spécifique à cette substance.
[19] Le membre issu des associations d’employeurs est aussi d’avis de rejeter les requêtes de l’employeur au motif que l’ensemble des pneumologues qui interviennent au dossier retiennent le diagnostic d’asthme professionnel au styrène même en l’absence de tests de provocation spécifique à cette substance.
LES FAITS ET LES MOTIFS
Dossiers 291869-71-0606 et 293347-71-0607
[20] La Commission des lésions professionnelles doit décider si le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une lésion professionnelle.
[21] L’article 2 de la loi définit ainsi la lésion professionnelle :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;
__________
1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.
[22] En l’espèce, il n’est nullement prétendu par le travailleur ni soutenu par la preuve que le 7 novembre 2004 soit survenu un accident du travail ou encore une récidive, rechute ou aggravation d’une lésion professionnelle antérieure. La Commission des lésions professionnelles doit donc décider, comme le prétend le travailleur, si le 7 novembre 2004, il a subi une maladie professionnelle.
[23] L’article 2 de la loi définit ainsi la maladie professionnelle :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail;
__________
1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.
[24] L’article 29 de la loi édicte, par ailleurs, une présomption de maladie professionnelle dans les termes suivants :
29. Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.
Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.
__________
1985, c. 6, a. 29.
[25] En ce qui a trait aux maladies causées par des produits ou substances toxiques, la section I de l’annexe I prévoit ceci :
Section I
MaladieS Causées par des produits ou substances toxiques
Maladies Genres de travail
(…)
12. Intoxication par les hydro- un travail impliquant l’utilisation, la
carbures aliphatiques, alicycliques et manipulation ou une autre forme
aromatiques : d’exposition à ces substances.
[26] Finalement, l’article 30 de la loi prévoit un mode de preuve sans présomption et se lit comme suit :
30. Le travailleur atteint d'une maladie non prévue par l'annexe I, contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui ne résulte pas d'un accident du travail ni d'une blessure ou d'une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d'une maladie professionnelle s'il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d'un travail qu'il a exercé ou qu'elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.
__________
1985, c. 6, a. 30.
[27] Le travailleur occupe un poste de débosseleur dans différents garages depuis 1964. Les tâches qu’il exerce sont les mêmes d’un employeur à un autre. En 1964, il travaille pour l’entreprise RPM Garage, de 1966 à 1971, il travaille pour l’entreprise Bélanger Auto Repair ainsi que pour l’entreprise Adrian Auto Repair, de 1971 à 1982, il travaille pour l’entreprise Jarry Ford, de 1982 à 1994, il travaille pour l’entreprise Versailles Ford et, finalement, à compter du mois de juin 1994, il travaille pour l’employeur. Selon les informations au dossier, il travaille de 8 heures à 16 heures 30, 5 jours par semaine.
[28] Le 7 octobre 2004, il consulte le docteur J.-P. Roy, neurologue. Ce médecin note que le travailleur présente de la fatigue, un manque d’énergie, de l’irritabilité, une diminution de la libido, de l’anxiété et de la tension. Il fait mention de la prise de Paxil depuis quatre ans, ayant entraîné une diminution des symptômes; il précise que la cessation, de façon temporaire, de cette médication au cours de l’année 2003, correspond à une recrudescence des symptômes du travailleur. Le docteur Roy note une diminution de la mémoire, une diminution de la capacité de concentration, de la confusion, une désorientation spatiale et une perte d’intérêt pour les activités sociales. Il émet l’impression diagnostique de « sickness behavior », d’une légère atteinte pré-frontale, d’une polyneuropathie légère affectant surtout les fibres de gros calibre et d’une irritation prostatique d’origine indéterminée. Ce médecin recommande une résonance magnétique, une consultation en neuropsychologie et un électromyogramme.
[29] Le 3 novembre 2004, il consulte le docteur M. Isler qui pose un diagnostic de possibilité d’encéphalopathie chronique aux solvants. Le docteur Isler recommande une évaluation neuropsychologique.
[30] Le 7 novembre 2004, le travailleur produit une réclamation à la CSST. Il déclare que, dans le cadre de son travail de débosseleur, il a été exposé à des solvants et à des produits toxiques, qu’il y a possibilité d’encéphalopathie aux solvants et qu’une évaluation neuropsychologique est nécessaire. Interrogé par la CSST, il déclare que ses symptômes sont moins importants pendant l’été, les portes de garage étant alors ouvertes; dès qu’il fait froid, il indique que ses problèmes recommencent.
[31] Le 3 décembre 2004, le travailleur produit une annexe à sa réclamation dans laquelle il décrit les tâches qu’il effectue chez l’employeur de la façon suivante :
[…]
Redressage, remontage, soudure, « grinding », sablage, appliquer plastique «filler » et « putty » de finition sur les automobiles et les camions légers. [sic]
[32] Le travailleur énumère aussi d’autres substances avec lesquelles il a été en contact telles que le « thinner », le « reducer », le « clear », le durcisseur chromatique et l’apprêt.
[33] À l’item intitulé « Commentaires », le travailleur mentionne ce qui suit :
Perte de mémoire, problème de sommeil, perte de libido, a de la difficulté à garder l’équilibre, étourdissement, nez sec et toujours congestionné (bloqué), irritation de la gorge, fatigue des yeux, mon nez coule souvent (allergie à la poussière), fatigue corporelle. [sic]
[34] Le travailleur continue tout de même de travailler.
[35] Le 15 janvier 2005, une évaluation neuropsychologique est effectuée par madame M. Lassonde, neuropsychologue. Le but de cette évaluation consiste à déterminer si « Monsieur présente des séquelles cognitives pouvant être reliées à une exposition répétée à certains produits chimiques ( solvants de peinture, monoxyde de carbone, etc. ). Au chapitre intitulé « Résumé et conclusions», madame Lassonde s’exprime comme suit :
Par ailleurs, rappelons que Monsieur obtient une performance satisfaisante à une mesure évaluant la simulation de déficits, ce qui confirme son bon degré de collaboration et la validité des cotes obtenues au sein du profil cognitif, lequel nous apparaît d’ailleurs cohérent.
Sur le plan psychologique, on relève des symptômes appartenant à la lignée dépressive (sentiments de tristesse, etc.), symptomatologie qui est aussi ressortie des tests de personnalité.
En résumé, le profil cognitif actuel dénote un affaissement important de certaines compétences de Monsieur comparativement à son niveau de fonctionnement antérieur, tel qu’estimé à partir de certaines épreuves mieux réussies que d’autres (e.g. bon niveau de vocabulaire, résultats satisfaisants à certains tests de mémoire qui contrastent nettement avec les performances obtenues à d’autres tests). Les troubles cognitifs présentés par Monsieur, notamment au niveau des fonctions exécutives, suggèrent une atteinte fonctionnelle entre autres au niveau des régions cérébrales frontales. Considérant le caractère assez localisé de certains déficits cognitifs observés (facteur perceptuel inférieur au facteur verbal et indices de mémoire visuelle immédiate et différée inférieurs à ceux obtenus en modalité verbale, pouvant suggérer une atteinte plus marquée des fonctions desservies par l’hémisphère droit), nous croyons qu’il serait opportun que Monsieur puisse consulter en neurologie afin de subir, si cela n’a pas déjà été fait, des tests complémentaires (e.g., résonance magnétique cérébrale, etc.) afin de compléter son bilan médical. Par ailleurs, la symptomatologie cognitive et psychologique présentée par Monsieur apparaît tout à fait compatible avec celle documentée dans les cas d’exposition au monoxyde de carbone et aux solvants.
Compte tenu de l’ampleur des déficits cognitifs de Monsieur, nous croyons qu’il est primordial de le retirer de son milieu professionnel afin d’éviter une dégradation encore plus accentuée de ses fonctions cognitives. [sic]
[36] Le 19 mai 2005, le docteur Zaharia, médecin conseil à la CSST, émet l’opinion suivante :
Considérant les divers rapports médicaux, l’évaluation en neuropsychologie, le type de travail, les différentes fiches signalétiques, le DX d’encéphalopathie secondaire aux solvants est fortement à considérer. Toutefois, tel que suggéré par Mme Lassonde et prescrit par le Dr Roy, d’autres tests sont à obtenir pour éliminer d’autres causes potentielles (EMG, I.R.M.). Il faudra inviter le T à revoir ces M.D. pour obtenir leur opinion définitive. [sic]
[37] Le 1er juin 2005, le travailleur revoit le docteur Isler qui pose un diagnostic d’encéphalopathie chronique aux solvants; il indique que le travailleur ne doit plus être exposé aux solvants et prescrit un arrêt de travail. Le travailleur cesse effectivement de travailler à compter de cette date.
[38] Le 29 juin 2005, le docteur Isler produit un rapport final par lequel il pose un diagnostic d’encéphalopathie toxique chronique et indique que le travailleur ne peut plus être exposé aux solvants.
[39] Le 16 juillet 2005, le travailleur est examiné par le docteur M. H. Des Rosiers, à la demande de l’employeur. Ce médecin conclut que l’examen clinique ne démontre aucune atteinte neurologique fonctionnelle significative hormis des signes discrets d’une atteinte polyneuropathique périphérique aux membres inférieurs. Il note la présence d’un asthme probable secondaire à des infections des voies respiratoires et la présence d’une apnée du sommeil traitée avec C-PAP. Il est d’avis qu’il n’y a pas d’évidence cliniquement objectivable d’une encéphalopathie de quelque nature que ce soit. Il estime que plusieurs des symptômes allégués par le travailleur orientent plutôt vers une pathologie d’ordre psychologique. À son avis, des traits de caractère anxieux avec éléments dysthymiques peuvent expliquer les symptômes allégués. Il se dit d’accord avec le maintien du Paxil à une dose pharmacothérapeutique.
[40] Le 2 août 2005, une résonance magnétique du cerveau est effectuée à la demande du docteur Des Rosiers. Le radiologiste émet l’opinion suivante :
(…)
Opinion :
Absence d’atrophie cérébrale significative. Présence de quelques petites lésions hyper-intenses T2 « Flair » bifrontales soit d’origine post-traumatique ancienne ou reflétant quelques changements ischémiques chroniques de la substance blanche.
[41] De même, à la demande du docteur Des Rosiers, le 12 août 2005, le travailleur subit un électro-encéphalogramme (EEG) qui s’avère normal.
[42] Le 9 novembre 2005, le travailleur revoit le docteur Roy, neurologue. Ce médecin émet alors les diagnostics suivants :
1- Encéphalopathie pré-frontale d’origine toxique, avec histoire, le seul diagnostic plausible
2- Sickness behavior, secondaire à inflammation, secondaire à exposition aux solvants. Fatigue, ↓ conc, ↓ mémoire, sommeil léger.
3- Tremblement essentiel augmenté par exposition aux solvants. [sic]
[43] Le 12 novembre 2005, une autre résonance magnétique cérébrale est effectuée, cette fois à la demande du docteur Roy. Le radiologiste conclut ainsi :
« The small foci of T2 and Flair hypersignal described above are usually the result of chronic micro-angiopathic disease. »
[44] Le 15 novembre 2005, le travailleur est examiné par le docteur R. Filiatrault, neurologue et membre du Bureau d’évaluation médicale. Au chapitre intitulé « Discussion », ce médecin fait les commentaires suivants :
[…]
On comprendra que le patient a pu être exposé à différents produits chimiques y compris diluant, surfaçant, mastic, peinture, et autres solvants, sans cependant qu’il n’y ait de relation claire et précise entre l’un ou plusieurs d’entre eux, et la condition du patient par des évaluations formelles d’intoxication spécifique à ces produits. Il s’agit à notre avis plutôt d’un rapprochement phénoménologique que l’on fait entre ces produits et le déclin des fonctions cognitives observées chez ce patient plutôt que d’en établir clairement une causalité spécifique.
[…]
Nous pouvons de notre point de vue noter que les changements rapportés à la résonance magnétique ne semblent pas spécifiques et que l’EEG est normal. Nous notons également qu’il n’y a pas de preuve claire de l’intoxication au monoxyde de carbone, qui d’ailleurs se manifeste sous forme aiguë avec encéphalopathie anoxique, ce diagnostic n’étant pas manifeste dans ce dossier. Quant aux produits toxiques multiples auxquels est exposé monsieur Reda et un débosseleur dans le contexte de son travail, il n’est pas démontré de façon claire qu’une ou des combinaisons de ces produits aient amené une encéphalopathie toxique.
[…]
Somme toute, il n’y a pas d’évidence claire dans ce dossier d’intoxication au monoxyde de carbone, il n’a pas été démontré qu’il y a une anoxie cérébrale chez cette personne. Il n’a pas été démontré par ailleurs que certains produits toxiques sont détériorés la condition neurologique de ce patient maintenant âgé de 63 ans. Au contraire, il y a chez lui des facteurs dépressifs qui sont manifestes depuis plusieurs années et qui pourraient être reliés à une maladie pour l’instant non diagnostiquée mais qui pourrait évoluer dans les prochaines années.
[…]
[sic]
Le docteur Filiatrault est cependant d’avis que le travailleur n’est pas en mesure de reprendre son travail et ajoute le commentaire suivant :
Compte tenu du fait qu’il n’y a pas clairement détermination d’une encéphalopathie reliée à des phénomènes toxiques chez ce patient, il est possible que l’encéphalopathie manifeste soit d’origine plus pulmonaire qu’autre chose. [sic]
[45] Par contre, le 27 janvier 2006, le docteur Filiatrault produit un avis complémentaire par lequel il s’exprime comme suit :
Notre évaluation de ce travailleur nous porte à croire qu’il n’y a pas d’encéphalopathie toxique résiduelle présente chez lui, mais nous croyons qu’il a eu une intoxication partielle tout au plus aux produits toxiques utilisés dans le contexte de son travail comme débosseleur. Il y a une condition pulmonaire prévalante chez ce patient, nécessitant la prise de Ventolin et Flovent qui a possiblement été sous-jacente à cette problématique.
Pour cette raison, en conjonction avec une absence d’encéphalopathie toxique résiduelle mais dans le contexte d’une intoxication transitoire et réversible aux produits toxiques auxquels le travailleur est exposé, nous suggérons de retenir cette date du 16 juillet 2005 comme date de consolidation de la lésion.
Il y a donc dans ce dossier absence d’une lésion résiduelle mais présence d’une intoxication transitoire qui a évolué de façon positive et ce nonobstant les autres considérations qui sont faites dans notre dossier concernant la nature de ces problèmes (possibilité d’anxiété/dépression et de condition pulmonaire précaire). [sic]
[46] Le docteur Filiatrault conclut que la lésion du travailleur est consolidée depuis le 16 juillet 2005 et qu’elle n’entraîne aucune atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique de ce dernier et aucune limitation fonctionnelle.
[47] Le 15 mars 2006, le docteur Roy mentionne qu’il « persiste à conclure à une encéphalopathie secondaire à l’exposition aux solvants chez ce patient qui a travaillé x 40 ans dans des ateliers de débosselage avec exposition à des peintures automobile 5 jours/semaine ». Le docteur Roy ajoute que le travailleur « présente un déficit, notamment des fonctions pré-frontales qui sont celles retrouvées dans l’encéphalopathie aux solvants (« painter’s brain »). Il précise que « Pour avancer une autre explication de son encéphalopathie, telle que « respiratoire », il faudrait démontrer une hypoxie ou une hypercapnie prolongée ce qui n’a pas été fait chez M. Reda. »
[48] Le 25 septembre 2006, le docteur Roy réitère son opinion de la façon suivante :
J’ai évalué M. Reda pour des symptômes neurologiques qui sont typiques d’une encéphalopathie aux solvants. Puisque M. Reda a travaillé plusieurs années dans un environnement où il était exposé quotidiennement aux solvants, le lien causal entre l’exposition aux solvants et l’encéphalopathie ne fait pas de doute. Le Dr. M. Lassonde neuropsychologue, qui a évalué M. Reda de façon plus formelle encore, arrive à la même conclusion. On peut donc affirmer, sans crainte de se tromper que M. Reda souffre d’une encéphalopathie aux solvants (« paintor’s brain »). [sic]
[49] Entretemps, le docteur Isler réfère le travailleur au docteur H. Chertkow, neurologue. À la demande de ce médecin, le travailleur passe un PET scan cérébral qui s’avère dans les limites de la normale. Le 16 octobre 2007, le docteur Chertkow indique :
He certainly has mild cognitive impairment and some frontal lobe dysfunction. (…) A PET scan was carried out and this was essentially normal as was his MRI. It is difficult for me to state unequivocally that the solvents or toxins damage the brain but I certainly cannot exclude this possibility. [sic]
[50] Le 2 novembre 2007, le docteur Isler écrit au docteur Chertkow dans les termes suivants :
Dear Dr Chertkow,
Thank you for your assessment of Mr. Reda. In answer to the question in your last letter, although it is clear that he was regularly exposed to a number of hydrocarbon solvents as well as to carbon monoxide over the course of his professional lifetime, unfortunately we do not have good quantitative data on his exposures.
Qualitatively, the most significant (ie having documented CSN effects) components identified through researching the Material safety data sheets of the products identified were :
Hardners : xylene and trimethylbenzene
Basecoats : Benzene, 2-enthylacrylate, xylene, butyl alcohol
« Clear » Methylisobutylcetone, toluene, xylene
It must be noted that the products used are mixtures, the toxic components identified above representing sometimes a small proportion of the mixture. Of course, other components in these products not identified as having well documented CNS effects may also contribute to toxicity because of undocumented effects or because of interaction with the metabolism of the CNS toxic solvents listed above. In addition, we are talking of chronic long-term effects of repeated exposures over many (30) years.
In attempting to quantify the extent and duration of these repeated exposures, I had a discussion with the industrial hygieniste, M Gaetan Handfield, from CSSS Montréal-Nord,
who visited the last workplace and supervised some measurements of CO. He stated that measurements indicated that ventilation was poor in the area where Mr Reda worked, and that because of this gases and vapours put into suspension at any one time were likely to stay there for several hours. Therefore a relatively short paint job could still mean exposure to the vapours generated for several more hours than the procedure itself. In addition, a low ceiling in the departement where Mr Reda worked means less dilution of whatever products is put into suspension that in some other departments in this garage. Finally, a thinner commonly used for handwashing contained toluene which is well absorbed through the skin.
Secondly, it is clear that there are likely to have been repeated exposures to levels of CO because 1) it was common practice in the area close to where the patient worked, to do tests on cars after a repair or adjustement, which required leaving the motor running 20 minutes or more, without any system to direct exhaust outside. In fact at one time an industrial hygiene technician was present and made them stop the test because she was recording more than 200 PPM of CO in the patient’s department. Therefore, although most of the measurements recorded at the time of environmental evaluation (planned by appointment with employer) showed levels that did not go above the legal limits, there are indicators that there may have been higher exposures.
Your letter states that Mr Reda would like a letter stating that his neurological impairments/dysfunction is related to the chemical toxicity. I am note sure that anybody can make an « unequivocal » statement because the literature when I last looked at it was not unequivocal either.
(…)
[51] Finalement, le 6 décembre 2007, le docteur Chertkow écrit au docteur Isler dans les termes suivants :
IMPRESSION : It is very difficult to conclude what is impairing this man’s cognition. His MRI and his PET scan have not shown any brain damage. It is clear that he is impaired but I am unable to make any definite causal connection between his toxic exposures and his brain damage. He will return to you for follow-up. I have really nothing else to offer in terms of therapy since none of the medications have helped him. [sic]
[52] Témoignant à l’audience, le travailleur déclare qu’il travaillait chez l’employeur depuis 1994 à titre de débosseleur. Il réitère essentiellement les informations apparaissant au formulaire de réclamation adressé à la CSST. Les réparations qu’il effectuait impliquaient, entre autres, l’enlèvement de la peinture avec un « grinder », l’application d’un plastique et le sablage de celui-ci à l’aide d’une sableuse à air ou d’une lime à main, puis l’application d’un plastique plus mince et le sablage de celui-ci à l’aide d’un papier plus fin. Avant l’année 1996, le travailleur appliquait aussi un apprêt (« primer ») à l’aide d’un « spray-gun », tâche devenue plus rare par la suite. Par ailleurs, le travailleur peinturait au « spray-gun » l’intérieur des pièces réparées, à raison d’une à trois fois par semaine; il faisait aussi de la soudure de pièces. Il utilisait un diluant (« thinner ») pour se laver les mains, à raison de 4 à 8 fois par jour. Toutes les tâches étaient effectuées dans l’atelier lequel est à aires ouvertes.
[53] Le travailleur déclare que le système de ventilation était « très pauvre » et qu’il lui arrivait de porter un masque pour se protéger. Il indique la présence de poussière de plastique, de fumée de soudure et de monoxyde de carbone à l’intérieur de l’atelier. Il se souvient avoir utilisé un masque « cheap » lorsqu’il travaillait chez Jarry Ford mais déclare ne pas en avoir porté lorsqu’il travaillait pour le compte des autres employeurs.
[54] Le travailleur déclare souffrir de bronchites depuis environ 15 ans et utiliser une « pompe » depuis plusieurs années. Il indique qu’il prend encore du Paxil; il a déjà consulté un psychiatre en raison de ses symptômes dépressifs. Il mentionne éprouver des problèmes de mémoire (mémoire récente) depuis 6 ou 7 ans. Il déclare que son état s’est amélioré environ un an après son arrêt de travail.
[55] Témoignant aussi à l’audience, monsieur Jacques Hétu, embauché en 1996 et directeur de la carosserie chez l’employeur, déclare que 7 employés travaillent à l’atelier (3 débosseleurs, 2 préparateurs, 1 « trim man » et 1 peintre). Il estime que les débosseleurs utilisent le « primer » environ une à deux fois par semaine et qu’ils utilisent la peinture environ deux fois par semaine. Il confirme que le schéma de l’atelier dessiné par le travailleur et qu’on retrouve au dossier est conforme à la réalité; il s’agit d’un atelier à aires ouvertes. Depuis 2003, l’allée centrale est délimitée par un rideau de plastique sur rails qui est utilisé pendant l’hiver afin de « couper le froid ».
[56] Le docteur M.H. Des Rosiers témoigne à l’audience, à la demande de l’employeur. Il explique que le terme encéphalopathie est un terme général désignant une atteinte de l’encéphale, de causes diverses. Parmi celles-ci, on retrouve des causes d’origine toxique, dégénérative, infectieuse, métabolique et anoxique. Il explique que dans le cas d’une encéphalopathie reliée à une exposition aux solvants, les symptômes et signes peuvent être très variés : céphalées, nausées, vomissements, troubles d’équilibre, tremblements, troubles moteurs, troubles de coordination, troubles cognitifs (mémoire, orientation, jugement) et même des troubles psychiatriques dont un syndrome dépressif. L’atteinte peut être de sévérité variable. Il réitère les conclusions auxquelles il en venait à son expertise médicale du 16 juillet 2005. Il réitère que la normalité des examens neurologiques des différents médecins au dossier de même que le bilan para-clinique ne supportent pas le diagnostic d’encéphalopathie toxique chez le travailleur : il n’y a que des symptômes et un trouble cognitif non spécifique à une encéphalopathie. Il soulève aussi une certaine contradiction lorsqu’on compare la performance du travailleur à certains tests (MOCA et Folstein). Le docteur Des Rosiers indique que le test PET scan cérébral dont le résultat est négatif constitue un test d’imagerie très utile et très précis dans l’analyse des fonctions du cerveau. Il estime que puisque les symptômes allégués par le travailleur sont très importants, l’atteinte cérébrale du travailleur devrait être corroborée par l’imagerie, ce qui n’est pas le cas et permet d’éliminer une atteinte organique de l’encéphale. Le docteur Des Rosiers indique, par ailleurs, que dans le cas d’une encéphalopathie légère, les résultats de l’imagerie peuvent toutefois être négatifs. Quant au diagnostic d’intoxication transitoire et réversible aux produits toxiques posé par le membre du Bureau d’évaluation médicale, le docteur Des Rosiers explique que ce diagnostic fait plutôt référence à une intoxication ciblée dans le temps et entraînant des symptômes aigus sur l’organisme. Il déclare qu’il ne s’agit pas de la situation vécue par le travailleur.
[57] Les fiches signalétiques des produits utilisés chez l’employeur sont à l’effet que plusieurs d’entre eux comportent des risques pour le système nerveux central. Les produits qu’utilise plus particulièrement le travailleur (Rage Gold, Spot Lite, Thinner, Durcisseur chromatique) comportent de tels risques. À titre d’exemple, le Rage Gold peut, s’il est chauffé, produire des vapeurs contenant du monoxyde de carbone, du dioxyde de carbone et divers hydrocarbures. L’inhalation excessive de ces vapeurs peut causer l’irritation des voies nasales et respiratoires, une baisse aiguë du système nerveux central, de la fatigue, des faiblesses, des nausées, des maux de tête et des étourdissements. La fiche signalétique concernant le Spot Lite indique qu’il contient, entre autres, du styrène et de la « Crystalline silica ». On peut y lire ce qui suit :
Chronic Effects of Overexposure (Long term) :
Styrene : Excessive overexposure to styrene has been found to cause the following effects in humans and may aggravate pre-existing disorders of these organs; central nervous system effects, effects on hearing, mild effects on color vision and respiratory tract damage.
Crystalline Silica : Crystalline silica is considered to be hazardous by inhalation, and is a potential human carcinogen (IARC Group 1). The risk depends on the duration and level of exposure to dust from sanding surfaces or mist from spray applications. Crystalline silica may also produce silicosis, which is a non-cancerous lung disease.
[58] Au cours de l’année 2005, une évaluation environnementale de l’établissement de l’employeur a été effectuée. Un rapport d’évaluation concernant le monoxyde de carbone est produit en mai 2005. Madame G. Casimir, technicienne en hygiène du travail qui procède à l’évaluation, conclut comme suit :
Les concentrations du monoxyde de carbone mesurées dans l’air des départements de la carrosserie et de la mécanique sont toutes inférieures aux limites légales. Par contre, les résultats et les observations faites au département de la carrosserie nous laissent entendre que les travailleurs qui y oeuvrent sont probablement exposés à des concentrations qui peuvent à l’occasion dépasser les limites légales. La faible dilution de ce contaminant par de l’air neuf assure le maintient de concentrations importantes durant des périodes plus importantes de monoxyde de carbone que ce n’est le cas dans le département de la mécanique. [sic]
[59] Au mois d’octobre 2005, madame Casimir produit un autre rapport d’évaluation environnementale concernant, cette fois, les solvants et isocyanates susceptibles de se retrouver à l’établissement de l’employeur. Madame Casimir conclut comme suit :
(…)
Chez les employés du département de débosselage, les concentrations sont aussi faibles pour la majorité. L’exposition la plus élevée correspond à 11 à 13 % des limites légales pour les produits analysés. Elle est associée au poste au nord, dans la zone protégée par un rideau de plastique. À l’opposé, les expositions les plus faibles correspondent aux postes les plus éloignés de la peinture, soit le long du mur sud.
Les faibles valeurs de concentrations de solvant mesurées à la peinture laissent entendre que les travaux réalisés par les débosseleurs libèrent eux-mêmes des solvants dans l’air ambiant. Ces vapeurs de solvants proviennent possiblement de pâtes et mastic utilisés pour réparer des dommages de carrosserie.
L’exposition des travailleurs du département de la carrosserie aux divers solvants est somme toute assez faible. En effet dans bien des cas la méthode analytique n’a pas permis de mettre en évidence la présence de ce contaminant dans la zone respiratoire de certains travailleurs.
(…)
[60] À la suite de l’audience du 7 novembre 2008, les parties ont complété leur preuve par le dépôt d’opinions ou de rapports médicaux complémentaires. Le 13 novembre 2008, après avoir pris connaissance d’un article de doctrine médicale déposé par le docteur Des Rosiers à l’audience, le docteur Roy s’exprime comme suit :
J’ai lu l’article. Il ne m’a pas convaincu. Les auteurs sont payés par les compagnies qui vendent les produits responsables de neurotoxicité. La science surtout médicale étant rarement désintéressée leur crédibilité en est grandement affectée. Par ailleurs avec les évidences de déficits cognitifs démontrés en neuropsychologie il ne fait pas de doute que M. Reda souffre d’encéphalopathie toxique aux solvants (« painter’s brain »).
[61] Le 8 décembre 2008, le docteur Roy dépose un article de doctrine médicale portant sur les critères diagnostiques d’une encéphalopathie toxique aux solvants.
[62] Pour sa part, le 17 février 2009, le docteur Des Rosiers répond de la façon suivante :
Or, même en convenant que monsieur Reda souffrirait d’un déficit cognitif significatif, ce seul déficit et ces seules anomalies retrouvés à l’évaluation neuropsychologique ne sont pas suffisantes ni suffisamment spécifiques pour conclure d’emblée qu’il existerait chez lui une encéphalopathie toxique aux solvants, en l’absence d’autres données objectives telles des anomalies de l’examen neurologique et de l’investigation paraclinique, et la présence démontrée des produits toxiques incriminés en quantité suffisante pour expliquer la symptomatologie et les déficits allégués.
[63] Commentant l’article déposé par le docteur Roy, le docteur Des Rosiers ajoute :
Les auteurs concluent « …we recommend that the diagnostic work-up for CTE should include an extensive interview, the duration and categorization of exposure, and quantification of exposure by on-site measurements or by use of an exposure index, neuropsychological and laboratory test, and a physical and neurological examination… » Le diagnostic d’une CTE « …should be compiled and reported according to an internationally accepted classification… »
Dans le cas de monsieur Reda, aucune quantification, ni aucune explication, ni aucun document spécifique n’a pu être produit, ni aucune histoire détaillée sur son exposition antérieure n’a été présentée par aucun des professionnels traitants impliqués dans son dossier. Les seuls renseignements objectifs à ce sujet sont ceux rapportés par monsieur Hétu, chef d’atelier, ainsi que ceux obtenus lors de l’étude environnementale de janvier 2005, renseignements selon lesquels l’exposition aux solvants chez les débosseleurs de Circuit Ford Lincoln Ltée aurait été très faible.
J’attire également votre attention que l’étude neuropsychologique, menée le 15 janvier 2005 par madame Maryse Lassonde, contemporainement à l’étude environnementale, l’a été alors que monsieur prenait une médication psychotrope depuis quelques années, à savoir le Paxil et le Neurontin aux doses déjà citées dans mon expertise du 16 juillet 2005 et dont fait mention madame Lassonde dans son introduction.
Quant à la symptomatologie de monsieur Reda, ni le docteur Roy ni aucun des médecins impliqués dans le dossier ne l’a située dans l’une ou l’autre des échelles de classification recommandées.
[64] Commentant le rapport d’évaluation environnementale de 2005, le docteur Des Rosiers confirme qu’on a alors mesuré les émanations de divers solvants d’hydro-carbures, à savoir le méthyle éthyle cétone, le méthyle isobutyl cétone, le toluène et le xylène. Il souligne les conclusions auxquelles en arrive madame Casimir et déclare que les données de cette évaluation n’indiquent pas l’existence d’une exposition suffisante aux produits toxiques, en particulier aux solvants d’hydrocarbures, pour expliquer la «symptomatologie floride » du travailleur et les dommages cognitifs allégués.
[65] Le 15 mai 2009, le docteur Isler commente, lui aussi, le rapport d’évaluation environnementale en indiquant que cette étude n’est d’aucune utilité pour évaluer l’exposition du travailleur à des solvants. Il fait les commentaires suivants :
Le niveau moyen pour une substance donnée peut être comparé à une norme légale. Toutefois il s’agit toujours d’une fraction du produit et les normes sont fixées pour une substance individuelle comme s’il n’y avait pas d’autres expositions concomitantes. Il est donc nécessaire de faire une interprétation intelligente des résultats obtenus pour ces indicateurs. Cela devrait se trouver dans la section « discussion » d’un rapport d’hygiène, avec l’identification des limites de l’étude. Cette discussion doit se faire en se référant aux objectifs de l’étude.
Finalement, dans l’interprétation d’un rapport d’une évaluation des expositions environnementales pour des fins médicales ou toxicologiques, on ne peut s’en tenir à l’interprétation des estimés de l’exposition en fonction d’une norme légale. En effet, les normes règlementées tiennent compte de plusieurs facteurs incluant des facteurs économiques et politiques et ne sont pas nécessairement une garantie de niveaux non toxiques.
De plus les effets sur la santé de Monsieur Reda sont le résultat d’expositions cumulatives sur presque 30 ans. L’intensité des expositions contribue certainement aux effets, mais il est reconnu que des effets neurologiques peuvent résulter d’expositions à des niveaux inférieurs aux normes sur une longue période. Ainsi ce n’est pas parce qu’un résultat d’échantillonnage serait évalué comme « faible », qu’on pourrait conclure que l’exposition cumulative à l’ensemble des solvants neurotoxiques serait « faible ». Il faut plutôt documenter les tâches, les produits utilisés et les conditions dans lesquelles se faisait le travail dans chacun de ces emplois afin de pouvoir porter un jugement.
[66] Afin de décider de l’admissibilité de la lésion professionnelle alléguée par le travailleur, la Commission des lésions professionnelles doit d’abord déterminer le diagnostic à retenir en l’espèce.
[67] Dans l’affaire Mineault et Hull Volskwagen[3], la Commission des lésions professionnelles rappelle ce qui suit :
[159] Avant de procéder à l’analyse, le tribunal croit opportun de rappeler que le fardeau de la preuve repose sur les épaules du travailleur. Ce fardeau implique que ce dernier doit faire la preuve prépondérante de sa thèse. Ainsi, pour trancher la question qui lui est soumise, la Commission des lésions professionnelles doit se fonder sur des règles juridiques et doit décider selon la balance des probabilités. Elle n’a pas à rechercher la certitude scientifique. C’est ce qu’énonçait la Cour suprême du Canada dans l’affaire Snell c. Farrell25 :
La causalité n’a pas à être déterminée avec une précision scientifique.
(…)
…Il n’est pas essentiel que les experts médicaux donnent un avis ferme à l’appui de la théorie de la causalité du demandeur. Les experts médicaux déterminent habituellement l’existence de causalité en des termes de certitude, alors qu’une norme inférieure est exigée par le droit.
(…)
___________
25 Snell c. Farrell, [1990] 2 R.C.S. 311
[68] Tel que le rappelle la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Mineault précitée, note 3, il ressort des dispositions concernant la présomption de maladie professionnelle et de celles de l’annexe I que deux éléments doivent être prouvés pour que cette présomption s’applique : une intoxication à certaines substances d’une part et, d’autre part, un travail impliquant une exposition à ces substances.
[69] L’intoxication n’est pas un terme défini par la loi. Comme dans l’affaire Mineault, il convient de s’en remettre à la définition de ce terme par le dictionnaire Le Petit Robert[4].
Intoxication : (…) Action nocive qu’exerce une substance toxique (poison) sur l’organisme; ensemble des troubles qui en résultent. (…)
[70] On peut donc conclure (comme dans l’affaire Mineault) à une intoxication au sens de l’annexe I de la loi dès que « l’exposition à la substance toxique a été suffisante pour être la cause plausible de la maladie diagnostiquée ».
[71] La Commission des lésions professionnelles estime que la preuve médicale prépondérante milite en faveur de la reconnaissance du diagnostic d’encéphalopathie toxique aux solvants.
[72] Le travailleur a témoigné de façon crédible quant à ses symptômes lesquels sont mentionnés dans les nombreux rapports médicaux au dossier. Il s’agit de symptômes compatibles avec le diagnostic d’encéphalopathie toxique aux solvants.
[73] La possibilité d’une encéphalopathie toxique aux solvants est d’abord évoquée par le docteur Isler en novembre 2004. L’étude neuro-psychologique de madame Lassonde confirme que le travailleur présente des déficits cognitifs qui sont compatibles avec ceux qu’on retrouve dans les cas d’exposition aux solvants. Cette étude a été faite selon les règles de l’art et rien ne permet à la Commission des lésions professionnelles de l’écarter, bien au contraire. Prenant connaissance de la preuve médicale au dossier, le docteur Zaharia, médecin conseil à la CSST, estime que le diagnostic d’encéphalopathie aux solvants « est fortement à considérer ». À son rapport final, le docteur Isler retient, sans équivoque, le diagnostic d’encéphalopathie toxique chronique tout en précisant que le travailleur ne peut être exposé aux solvants. De même, le docteur Roy, neurologue traitant, réitère ce diagnostic à plusieurs reprises tout au long du suivi médical du travailleur; il s’agit, pour ce spécialiste, du seul diagnostic plausible.
[74] Pour sa part, dans son avis du 15 novembre 2005, le docteur Filiatrault, membre du Bureau d’évaluation médicale, observe l’existence d’un déclin des fonctions cognitives du travailleur. Il est cependant d’avis qu’on ne peut établir une « relation claire et précise » entre cette condition et les différents produits auxquels le travailleur a pu être exposé. Par contre, dans l’avis complémentaire qu’il produit le 27 janvier 2006, le docteur Filiatrault conclut finalement que le travailleur a eu une « intoxication partielle tout au plus aux produits toxiques utilités dans le contexte de son travail (…) » . On peut donc retenir que le docteur Filiatrault conclut, en bout de ligne, à la présence d’une intoxication chez le travailleur et à l’existence d’une relation entre celle-ci et le travail exercé par ce dernier.
[75] Quant à l’opinion exprimée par le docteur Chertkow, la Commission des lésions professionnelles estime que celle-ci confirme que, malgré la normalité des tests para-cliniques, le travailleur présente un déficit cognitif léger (« mild cognitive impairment »). Ce médecin déclare cependant qu’il ne peut établir un lien causal définitif (« definite causal connection ») entre l’exposition du travailleur à des produits toxiques et son déficit cognitif mais qu’il ne peut pas non plus exclure cette possibilité (« but I certainly cannot exclude this possibility »). Tel que souligné précédemment, la Commission des lésions professionnelles estime que ce lien causal n’a pas à être déterminé avec une précision scientifique. Elle considère donc que l’avis du docteur Chertkow, même si non catégorique, est plutôt favorable à la reconnaissance d’un lien causal et ne contredit pas les opinions très claires des docteurs Isler et Roy ou celle, plus mitigée, du docteur Filiatrault.
[76] De ce qui précède, la Commission des lésions professionnelles estime que la majorité des médecins intervenus dans le dossier du travailleur sont d’avis que celui-ci présente une atteinte cognitive, que cette atteinte découle d’une intoxication et que cette intoxication est secondaire à une exposition à des solvants.
[77] L’opinion du docteur Des Rosiers apparaît donc ici isolée et ne peut être retenue à l’encontre de la majorité. Au surplus, l’opinion de ce médecin se base en grande partie sur le fait que le travailleur allègue des symptômes sévères alors que les examens paracliniques sont essentiellement normaux. Le docteur Des Rosiers admet cependant que dans le cas d’une atteinte légère, les résultats paracliniques peuvent être négatifs. Or, selon le docteur Chertkow l’atteinte du travailleur est légère (« mild cognitive impairment »), ce qui vient, en quelque sorte, minimiser la force probante de l’opinion du docteur Des Rosiers.
[78] Par ailleurs, la Commission des lésions professionnelles ne retient pas le diagnostic d’intoxication transitoire et réversible aux produits toxiques, le docteur Filiatrault étant le seul médecin à poser ce diagnostic qui, selon le témoignage non contredit du docteur Des Rosiers à ce sujet, ne correspond pas à la situation vécue par le travailleur.
[79] Reste donc à décider si le travailleur a exercé un travail impliquant une exposition à des substances ou produits toxiques.
[80] Selon les rapports environnementaux au dossier, en ce qui a trait au monoxyde de carbone, les travailleurs qui oeuvrent au département de la carrosserie «sont probablement exposés à des concentrations qui peuvent à l’occasion dépasser les limites légales. » En ce qui a trait aux solvants, il semble que l’exposition de ces travailleurs est assez faible. À cet égard, la Commission des lésions professionnelles fait siens les motifs exprimés dans l’affaire Mineault à l’effet qu’un travailleur n’a pas à être exposé à un seuil minimal pour conclure qu’il a bel et bien été exposé, le législateur ne précisant aucun seuil particulier à l’annexe I de la loi.
[81] La Commission des lésions professionnelles retient les informations non contredites données par le docteur Isler à sa lettre du 2 novembre 2007 adressée au docteur Chertkow concernant les produits retrouvés dans l’environnement de travail du travailleur de même que les fiches signalétiques qui démontrent l’utilisation par ce dernier de solvants comportant des propriétés toxiques.
[82] De cette preuve, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a été exposé à des solvants dans le cadre de son travail de débosseleur depuis plusieurs années et qu’en conséquence, la présomption édictée à l’article 29 de la loi s’applique.
[83] Cette présomption est-elle renversée? La Commission des lésions professionnelles ne le croit pas : elle est d’avis que la seule opinion catégorique du docteur Des Rosiers à l’encontre de celles catégoriques des docteurs Isler et Roy et plus nuancées mais favorables à la reconnaissance d’une atteinte cognitive d’origine toxique probable ou possible des docteurs Filiatrault, Chertkow et Zaharia n’est pas suffisante pour renverser cette présomption.
[84] En conséquence, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur est affecté d’une encéphalopathie toxique aux solvants, que ce diagnostic constitue une intoxication par les hydrocarbures aliphatiques, alicycliques et aromatiques au sens du paragraphe 12 de la section I de l’annexe I de la loi et que le travailleur a été exposé à ces substances à son travail. Le tribunal conclut que le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une maladie professionnelle justifiant son arrêt de travail à compter du 1er juin 2005.
Dossiers 330787-71-0710 et 344538-71-0804
[85] Le 15 septembre 2006, le travailleur dépose une réclamation pour une maladie professionnelle pulmonaire. Au rapport médical qu’il signe le 12 juillet 2006, le docteur M. Isler pose un diagnostic d’asthme exacerbé par l’environnement de travail.
[86] Le 30 novembre 2006, les docteurs G. Ostiguy, M. Labrecque et J. Gruber, pneumologues et membres du Comité B des maladies professionnelles pulmonaires de Montréal, examinent le travailleur et émettent un avis concluant à la possibilité d’un asthme professionnel chez ce dernier. Ils le réfèrent à la Clinique d’asthme professionnel de l’hôpital du Sacré-cœur pour des tests de provocation bronchique spécifique.
[87] Le 27 février 2007, le travailleur subit certains tests de provocation bronchique. Le docteur M. Labrecque conclut comme suit :
Les tests donc demeurent négatifs chez ce réclamant. Toutefois, d’après les fiches signalétiques, il est exposé à un autre agent sensibilisant soit le Basecoat qui contient du styrène. Sauf que pour l’exposer au styrène on doit le diluer avec au moins 80 % de solvant, comme il est reconnu porteur d’une encéphalopathie importante aux solvants, cette exposition est impossible. Dans ce contexte les tests de provocation bronchique spécifique demeurent incomplets.
[88] Le 22 mars 2007, les membres du Comité B des maladies professionnelles pulmonaires de Montréal signent un rapport complémentaire. Ils déclarent que « devant l’impossibilité de compléter l’investigation chez ce réclamant et devant l’histoire fortement suggestive d’un asthme professionnel, les membres du Comité acceptent le diagnostic d’asthme professionnel. » Le travailleur conserve une atteinte permanente de 3 % et ne doit pas être exposé aux peintures d’automobile.
[89] Finalement, le 26 avril 2007, le Comité Spécial des présidents formé des docteurs R. Bégin, A. Cartier et M. Desmeules, pneumologues, entérine les conclusions du Comité B des maladies professionnelles pulmonaires de Montréal et retient le diagnostic d’asthme d’origine professionnelle au styrène.
[90] Compte tenu du diagnostic d’encéphalopathie toxique aux solvants retenu par la Commission des lésions professionnelles, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de l’employeur concernant la réalisation de tests de provocation spécifique au styrène.
[91] Par ailleurs, même si ce diagnostic n’avait pas été retenu, la Commission des lésions professionnelles n’aurait pas davantage fait droit à la demande de l’employeur. En effet, le tribunal considère que selon la preuve au dossier, l’ensemble des pneumologues qui ont examiné le travailleur considère que ce dernier est porteur d’un asthme professionnel au styrène même si les tests de provocation spécifique n’ont pas été faits. L’opinion de tous ces médecins n’est pas contredite et constitue une preuve médicale plus que prépondérante.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossiers 291869-71-0606 et 293347-71-0607
REJETTE la requête de l’employeur, Le Circuit Ford Lincoln ltée;
ACCUEILLE la requête du travailleur, monsieur Luigi Reda;
MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 1er juin 2006 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le 7 novembre 2004, le travailleur a subi une lésion professionnelle;
DÉCLARE que le diagnostic de cette lésion professionnelle est celui d’une encéphalopathie toxique aux solvants.
Dossiers 330787-71-0710 et 344538-71-0804
REJETTE les requêtes de l’employeur, Le Circuit Ford Lincoln ltée;
CONFIRME les décisions de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendues les 17 septembre 2007 et 26 février 2008 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur, monsieur Luigi Reda, est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire et qu’il a droit aux prestations prévues à la loi;
DÉCLARE que le travailleur conserve une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique de 3,30 % lui donnant droit à une indemnité pour préjudice corporel de 1 524,04 $.
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Danièle Gruffy |
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Me Émilie Lessard |
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Béchard, Morin et ass. |
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Représentante de l’employeur |
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Me Pasquale Di Prima |
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Di Prima, Piccolino, avocats |
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Représentant du travailleur |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.