COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

15 juillet 2004

 

Région :

Montréal

 

Dossier :

226220-71-0401

 

Dossier CSST :

001276591

 

Commissaire :

Me Lucie Couture

 

Membres :

Michel R. Giroux, associations d’employeurs

 

Jennifer Smith, associations syndicales

 

 

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Serge Bastien

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

CHSLD Plateau Mont-Royal

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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DÉCISION

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[1]                Le 28 janvier 2004, monsieur Serge Bastien, (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision rendue le 23 janvier 2004, par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme celle rendue initialement le 24 octobre 2003 et déclare que le travailleur a droit aux frais d’entretien (grand ménage) pour un total de 985,00 $.

[3]                Le travailleur est présent à l’audience du 9 juillet 2004 tenue à Montréal. L’employeur a fermé ses portes. La CSST n’est pas intervenue au dossier.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de faire droit à sa requête de déclarer qu’il a droit au remboursement de la somme de 1 500,00 $ à titre de frais d’entretien courant du domicile.

L’AVIS DES MEMBRES

[5]                Le membre issu des associations d’employeurs, monsieur Michel R. Giroux et la membre issue des associations syndicales, madame Jennifer Smith sont d’avis de faire droit à la requête du travailleur. Ils sont d’avis que ce dernier a fait la preuve qu’il avait droit au remboursement d’un montant de 1 070,00 $ à titre de frais d’entretien courant de son domicile et ce, pour l’année 2003.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[6]                La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a droit au montant qu’il réclame en vertu de l’article 165 de la  Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1](la loi) qui se lit comme suit :

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[7]                La Commission des lésions professionnelles retient du dossier que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 21 juillet 1987 lui occasionnant une entorse lombaire.

[8]                Le 11 octobre 1988, il subit une autre lésion professionnelle impliquant la région cervicale et la ceinture scapulaire gauche. En décembre 1988, un arbitre médical retient des limitations fonctionnelles.

[9]                Le 6 janvier 1989, la CSST détermine que le travailleur est incapable d’exercer son emploi habituel. Il est dirigé en réadaptation. Une atteinte permanente lui a été reconnue.

[10]           Le 20 juillet 1992, la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles confirme cette décision.

[11]           Le 14 octobre 2003, le travailleur soumet deux offres de services concernant l’entretien courant de son domicile. La première est datée du 18 septembre 2003. Cette soumission provient de la compagnie Plumeau, Chiffon et Cie et est au montant de 1 500,00 $. On précise que cet entretien sera d’une durée de trois jours complets et qu’il sera effectué à une date à déterminer.

[12]           La seconde, datée du 24 septembre 2003, est faite par monsieur Hassen Leulmi. Cette soumission est également au montant de 1 500,00 $. On précise que le travail sera effectué comme le travailleur le juge approprié, sans qu’il ait à quitter le logement, ni à se nourrir au restaurant durant les travaux. On précise que les taxes ne sont pas exigibles car le travail sera effectué par un travailleur autonome et sans numéro de taxe.

[13]           Le 24 octobre 2003, la CSST rend une décision par laquelle elle accepte de payer des frais d’entretien courant du domicile pour un grand ménage. On précise que des deux soumissions présentées, la CSST retient celle de Plumeau, Chiffon et Cie parce qu’il s’agit d’une compagnie reconnue et que le montant demandé est le plus bas. Le montant accordé est de 985,00 $.

[14]           Le 27 octobre 2003, le travailleur conteste cette décision en indiquant que la CSST ne pouvait demander une nouvelle soumission car c’est au travailleur de demander une soumission. Il soumet que les exigences qu’il avait en regard des travaux étaient motivées par l’encombrement du logement et par le fait qu’il serait présent durant tous les travaux. Il soumet qu’il avait le droit de demander de tels accommodements.

[15]           Le 23 janvier 2004, la CSST, à la suite d’une révision administrative, confirme la décision rendue le 24 octobre 2003, d’où la présente requête du travailleur.

[16]           La Commission des lésions professionnelles retient du dossier que la CSST a communiqué avec l’entreprise Plumeau, chiffon et Cie. Cette compagnie a précisé qu’elle pouvait effectuer le travail en deux jours, mais que c’est le travailleur qui a exigé que le travail s’effectue sur une période de trois jours. Elle a donc soumis une autre offre de services pour un montant de 985.00 $ que la CSST a accepté de rembourser.

[17]           La CSST a donc rendu la décision contestée accordant un montant de 985,00 $ pour des travaux d’entretien courant du domicile.

[18]           Le travailleur explique à l’audience qu’il peut choisir les personnes qu’il veut pour effectuer le grand ménage de son appartement et qu’il n’a pas à se voir imposer par la CSST, une entreprise plutôt qu’une autre. Il précise également que les dispositions de la loi ne spécifient nullement que le droit prévu à l’article 165 de la loi ne vise uniquement qu’un grand ménage par année. Il peut choisir le moment où il veut faire faire les travaux ainsi que le type de travaux qu’il veut faire faire. La seule exigence de la loi est que ces travaux auraient été faits par lui, n’eut été de sa lésion professionnelle et de ses conséquences. Il soumet avoir fait faire deux soumissions comme le demandait la CSST. Il a préféré par la suite, faire faire les travaux par deux personnes à qui il a payé des montants totalisant la somme de 1 070,00 $. Il a choisi ces personnes parce qu’elles pouvaient respecter ses exigences quant au moment et à la façon de faire le grand ménage. C’est-à-dire, en lui garantissant l’accès aux lieux durant le travail et en ne l’obligeant pas à quitter son appartement.

[19]           La Commission des lésions professionnelles, après avoir entendu le témoignage du travailleur et pris connaissance des pièces justificatives déposées par le travailleur, est d’avis de faire droit à la requête du travailleur.

[20]           Dans un premier temps, la soussignée constate qu’il n’est nullement contesté que le travailleur remplit les deux premières conditions prévues à l’article 165 de la loi, à savoir que le travailleur conserve, à la suite de ses lésions professionnelles, une atteinte permanente grave et que n’eut été de ces lésions professionnelles, il aurait accompli lui - même les travaux d’entretien courant de son domicile.

[21]           La soussignée a pris connaissance des reçus des montants déboursés par le travailleur pour les travaux effectués en octobre, novembre et décembre 2003. Le travailleur a également témoigné que ces travaux visaient à laver les murs et les plafonds des différentes pièces de son appartement ainsi que des corridors, de même que de vider les armoires de cuisine et en laver l’intérieur, laver les garde-robes et laver les planchers, les stores etc.

[22]           La Commission des lésions professionnelles constate que les dispositions de l’article 165 de la loi, contrairement à ce qui est prévu aux articles 154 et 155 de la loi,  n’obligent nullement le travailleur à fournir deux soumissions pour des travaux d’entretien courant du domicile. La CSST ne pouvait donc pas exiger du travailleur de telles soumissions, sans ajouter au texte de la loi. La soussignée souscrit ainsi à l’opinion exprimée par la commissaire Blanchard dans une décision[2] rendue sur le même objet, à l’effet que les soumissions demandées par la CSST ne sont pas nécessaires en vertu de l’article 165 de la loi, aux fins du remboursement de montants pour l’entretien courant du domicile.

[23]           La seule obligation du travailleur est de fournir la preuve que les travaux engagés représentent effectivement des travaux d’entretien courant du domicile et que des sommes ont effectivement été déboursées pour de tels travaux.

[24]            La Commission des lésions professionnelles note que dans sa décision, la CSST semble limiter ces travaux à un seul grand ménage par année. Or, rien dans la loi ne vient limiter la fréquence des travaux exécutés. La seule limite étant le montant annuel de remboursement et le type de travaux.

[25]           En l’espèce, le travailleur a démontré que les travaux exécutés visaient à faire un grand ménage de son appartement. Ce type de travaux correspond à la définition retenue par la Commission des lésions professionnelles pour des travaux courants d’entretien.

[26]           De plus, il a démontré avoir déboursé la somme de 1 070,00 $ pour faire faire ces travaux. Rien dans les dispositions de la loi ne prévoit que les travaux doivent être exécutés par une entreprise donnée, approuvée par la CSST. S’il apparaît souhaitable qu’une entreprise sérieuse soit encouragée à faire de tels travaux et que la CSST encourage les travailleurs à faire affaire avec de telles entreprises, il est également souhaitable que la CSST n’intervienne pas directement auprès d’une telle entreprise lorsque le travailleur choisit justement d’en retenir les services, afin de faire modifier, à la baisse, les conditions négociées par le travailleur. Il n’appartient pas à la CSST d’intervenir dans les modalités et l’horaire choisis par le travailleur pour l’exécution de tels travaux. C’est du moins la lecture que fait la soussignée des conditions imposées par le législateur pour qu’un travailleur puisse obtenir un remboursement en vertu de cet article 165 de la loi.

[27]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que le travailleur a rempli les conditions exigées par l’article 165 de la loi et qu’il a droit, par conséquent au remboursement du montant engagé de 1 070,00 $, plutôt que le montant de 1 500,00 $ qu’il réclamait à l’origine.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Serge Bastien, le travailleur;

INFIRME la décision rendue le 24 janvier 2004, par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement d’un montant de 1 070,00 $ à titre de frais d’entretien courant de son domicile pour l’année 2003.

 

 

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Me Lucie Couture

 

Commissaire

 



[1]          L.R.Q. c.A-3.001

[2]          Babeu et Boulangerie Weston Québec ltée. C.L.P. 166478-62B-0108, 16 janvier 2003, N. Blanchard.

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