Décision

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Lesieur et Centre Réadaptation L'Envol

2009 QCCLP 6204

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Trois-Rivières

14 septembre 2009

 

Région :

Mauricie-Centre-du-Québec

 

Dossier :

306031-04-0612      313964-04-0703      366960-04-0901

 

Dossier CSST :

112924154

 

Commissaire :

J. André Tremblay, juge administratif

 

Membres :

Guy-Paul Hardy, associations d’employeurs

 

Guy Plourde, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Manon Lesieur

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Centre Réadaptation L’Envol (F)

 

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 5 juin 2009, Mme Manon Lesieur (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête en révision de la décision rendue par le tribunal le 12 mai 2009.

[2]                Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles déclare que la demande de remise formulée le 11 mai 2009 est refusée.

[3]                La travailleuse est présente et représentée à l’audience tenue par la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision à Trois-Rivières le 1er septembre 2009. Centre Réadaptation L’Envol (Fermé) (l’employeur) n’est ni présent, ni représenté. La Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) qui est intervenue au dossier conformément à l’article 429.16 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), bien que dûment convoquée est absente à l’audience.

 

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[4]                La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de réviser la décision qu’elle a rendue le 12 mai 2009 au motif qu’elle n’a pu pour des raisons jugées suffisantes se faire entendre et que la décision est entachée d’erreurs manifestes et déterminantes assimilables à des vices de fond de nature à les invalider. La requête de la travailleuse ne porte que sur la décision refusant la demande de remise.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[5]                Les membres issus des associations d’employeurs ainsi que des associations syndicales estiment qu’il y a lieu de réviser la décision qu’a rendue la Commission des lésions professionnelles le 12 mai 2009 et d’accorder la remise demandée par le représentant de la travailleuse et de convoquer à nouveau les parties pour une audience sur le fond des requêtes.

[6]                Ils estiment qu’en l’espèce on peut pénaliser la travailleuse de l’erreur de son procureur.

 

LES FAITS ET LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[7]                Le tribunal siégeant en révision doit décider s’il y a matière à réviser la décision  rendue par la Commission des lésions professionnelles le 12 mai 2009.

[8]                L’article 429.56 de la loi prévoit que la Commission des lésions professionnelles peut réviser ou révoquer une décision qu’elle a rendue pour les motifs suivants :

429.56.  La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

 

2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[9]                L’article 429.56 constitue une dérogation à la règle générale énoncée à l’article 429.49 qui stipule qu’une décision rendue par la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel. Cet article se lit comme suit :

429.49.  Le commissaire rend seul la décision de la Commission des lésions professionnelles dans chacune de ses divisions.

 

Lorsqu'une affaire est entendue par plus d'un commissaire, la décision est prise à la majorité des commissaires qui l'ont entendue.

 

La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[10]           La révision d’une décision de la Commission des lésions professionnelles n’est possible que dans les situations prévues à l’article 429.56. Une telle procédure ne peut, en aucun cas, constituer un second appel ou un appel déguisé[2].

[11]           La jurisprudence a depuis longtemps établi que lorsque le deuxième paragraphe de l’article 429.56 est soulevé par une partie au soutien d’une requête en révision ou en révocation, il revient au tribunal d’apprécier la preuve et de décider si des raisons suffisantes ont été démontrées pour expliquer que la partie n’a pu se faire entendre. Pour être suffisantes, les raisons invoquées doivent être sérieuses et il ne doit pas y avoir eu négligence de la part de la partie qui prétend n’avoir pu se faire entendre. La règle qui doit toujours guider le tribunal lorsqu’il a à décider de cette question est le respect des règles de justice naturelle[3].

[12]           Par ailleurs, le tribunal peut évaluer si les raisons fournies par la partie requérante peuvent être qualifiées de suffisantes au sens de l'article 429.56 justifiant qu'elle n'ait pu être entendue. Le droit d'être entendu à l'audience est un droit fondamental reconnu à la Charte des droits et libertés de la personne[4] et également à l'article 429.13 de la loi. La règle qui doit toujours guider le tribunal lorsqu’il a à décider de cette question est le respect des règles de justice naturelle[5].

[13]           La jurisprudence a établi qu’une raison suffisante ne doit pas être interprétée comme équivalant à une impossibilité d'exercer son droit d'être entendu puisque le libellé utilisé par le législateur est beaucoup plus souple[6].

[14]           Par ailleurs, la jurisprudence a établi qu’il faut entendre par les termes « vice de fond … de nature à invalider la décision » une erreur manifeste de fait ou de droit qui est déterminante sur l’issue du litige[7].

[15]           Il y a erreur manifeste si la décision attaquée méconnaît une règle de droit, applique un faux principe, statue sans preuve, néglige un élément de preuve important ou adopte une méthode qui crée une injustice certaine[8].

[16]           La Cour d’appel du Québec s’est prononcée sur la notion de vice de fond, notamment dans l’affaire Bourassa[9] où elle a confirmé les principes jurisprudentiels précités.

[17]           La notion de vice de fond a aussi été analysée par ce même tribunal dans l’affaire CSST c. Fontaine[10] où la Cour d’appel du Québec rappelle le principe suivant lequel une décision attaquée pour motif de vice de fond ne peut faire l’objet d’une révision interne que lorsqu’elle est entachée d’une erreur dont la gravité, l’évidence et le caractère déterminant ont été démontrés par la partie qui demande la révision[11].

[18]           La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision ou révocation doit donc faire preuve d’une très grande retenue. Ce n’est qu'exceptionnellement qu’elle pourra réviser l’une de ses décisions.

[19]           La décision rendue par la première commissaire par laquelle elle refuse la demande de remise est une décision interlocutoire qui peut faire l’objet d’une requête en révision en vertu de l’article 429.56. À ce sujet, la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles[12] a établi que la révision ne se restreint pas aux seules décisions sur le fond du litige. La décision interlocutoire doit toutefois avoir un effet déterminant sur les droits des parties pour pouvoir faire l’objet d’une requête en révision, ce qui est le cas en l’espèce.

[20]           Il y a lieu de rappeler les faits tel qu’il appert au dossier de la travailleuse et tels qu’ils sont exposés dans la requête dont le présent tribunal est saisi.

[21]           En l’espèce, la travailleuse soutient que lors de l’audience du 12 mai 2009 elle n’a pu, pour des raisons suffisantes, se faire entendre et soutient par ailleurs que la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 12 mai 2009 à la suite de cette audience comporte des erreurs manifestes et déterminantes assimilables à des vices de fond de nature à l’invalider suivant les deuxième et troisième paragraphes du premier alinéa de l’article 429.56 de la loi.

[22]           Le 29 mars 1997, la travailleuse est victime d’une lésion professionnelle. Alors qu’elle relève un bénéficiaire pour lui administrer des médicaments, ce dernier résiste et la travailleuse ressent une vive douleur au niveau du dos et un engourdissement dans la cuisse. Une réclamation est produite à la CSST la journée même par la travailleuse, laquelle est acceptée le 17 avril 1997.

[23]           Un diagnostic initial de lombosciatalgie aiguë est émis.

[24]           Un diagnostic de hernie discale L5-S1 sera par la suite émis, laquelle hernie fera l’objet d’une discoïdectomie le 4 septembre 1997.

[25]           Cette lésion sera consolidée et entraînera une atteinte permanente et des limitations professionnelles.

[26]           La travailleuse est admise en réadaptation par la CSST et un programme de réadaptation est entrepris avec cette dernière.

[27]           Dans le cadre du traitement du dossier de la travailleuse, la CSST rend  plusieurs décisions, dont certaines seront contestées en révision administrative par la travailleuse et par la suite devant la Commission des lésions professionnelles. En l’espèce, le tribunal ne résume ici que celles à l’origine du présent recours.

[28]           Le 2 septembre 2005, la travailleuse demande la révision d’une décision rendue le 2 août 2005, par laquelle la CSST accorde à la travailleuse une allocation d’aide à domicile pour la période du 1er octobre 2004 au 31 décembre 2005. Une somme de 5212,76 $ est autorisée pour couvrir la période du 1er octobre 2004  au 22 juillet 2005 et une allocation de 249,61 $ est autorisée et versée à toutes les deux semaines à compter du 22 juillet 2005, jusqu’au 31 décembre 2005.

[29]           Le 13 octobre 2005, la travailleuse demande la révision d’une décision du 26 juillet 2005, constituée d’un avis de paiement qui établit un ajustement de l’indemnité de remplacement du revenu pour la période du 22 octobre 2004 au 17 février 2005, au montant de 9 685,41 $.

[30]           Le 27 janvier 2006, la travailleuse demande la révision d’une décision de la CSST du 12 janvier 2006 par laquelle elle l’avise qu’une somme de 9 685,41 $ lui a été versée en trop pour la période du 22 octobre 2004 au 17 février 2005, puisqu’elle a déjà été indemnisée pour cette période.

[31]           Le 10 octobre 2006, la CSST rend une décision par laquelle elle informe la travailleuse qu’en raison de son déménagement à St-Boniface-de-Shawinigan, le processus d’évaluation de l’adaptation de son domicile situé à Lavaltrie prenait fin et que « Vos besoins d’aide personnelle, d’aides techniques et d’adaptation de domicile seront réévalués en fonction de votre nouvelle maison par un conseiller en réadaptation de la région de Trois-Rivières. À cet effet, votre dossier devrait y être transféré sous peu. »

[32]           Le 1er novembre 2006, une demande de révision de la décision du 10 octobre 2006 est transmise à la CSST par la travailleuse.

[33]           Le 16 novembre 2006, la CSST à la suite d’une révision administrative, confirme les décisions initiales des 2 août 2005, 12 janvier 2006 et 10 octobre 2006. Elle déclare par ailleurs irrecevable, car logée hors délai, la demande de révision du 13 octobre 2005.

[34]           Le 15 décembre 2006, le représentant de la travailleuse transmet à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste la décision de la CSST rendue le 16 novembre 2006 à la suite d’une révision administrative[13].

[35]           Le 22 décembre 2006, la travailleuse demande la révision d’une décision de la CSST rendue le 22 novembre 2006, par laquelle la CSST avise que l’allocation d’aide personnelle à domicile augmentera pour la période du 23 juin au 10 novembre 2006 et pour la période du 11 novembre 2006 au 31 mai 2007. Pour la première période, un ajustement sera versé au montant de 571 $ et pour la seconde période la travailleuse recevra 368,88 $ toutes les deux semaines.

[36]           Dans une décision du 27 février 2007, la CSST en révision administrative confirme la décision initiale du 22 novembre 2006.

[37]           Le 26 mars 2007, le représentant de la travailleuse dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision de la CSST rendue le 27 février 2007 à la suite d’une révision administrative[14].

[38]           Le 21 novembre 2007, la travailleuse demande la révision d’une décision de la CSST rendue le 22 octobre 2007, par laquelle elle maintient l’aide personnelle à domicile pour la période du 19 octobre 2007 au 19 octobre 2009 et conclut que la travailleuse recevra 434,28 $ toutes les deux semaines.

[39]           Le 12 décembre 2008, la CSST en révision administrative, confirme la décision du 22 octobre 2007.

[40]           Le 8 janvier 2009, le représentant de la travailleuse dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision de la CSST rendue le 12 décembre 2008 à la suite d’une révision administrative[15].

[41]           Le 18 mars 2009, un avis d’enquête et d’audition relativement aux dossiers nos 306031-04-0612, 313964-04-0703 et 366960-04-0901 est transmis aux parties, dont notamment à la travailleuse et à son représentant. L’audience est fixée au 12 mai 2009, à 13 h 30.

[42]           Le 19 mars 2009, une copie du dossier de la travailleuse est transmise au représentant de la travailleuse.

[43]           Dans une lettre adressée à la Commission des lésions professionnelles du 24 mars 2009, le représentant de la travailleuse, à la suite de la réception de l’avis d’audience pour le 12 mai 2009, demande la remise de celle-ci. Il souligne d’abord qu’il avait « spécifiquement demandé d’être consulté avant de fixer la date d’audience, ce qui n’a manifestement pas été fait ».

[44]           Il invoque par ailleurs qu’il lui sera impossible de procéder à cette date, puisqu’il sera en audience en Cour supérieure. Il demande de plus que le service de conciliation du tribunal entre en contact avec lui pour discuter du dossier.

[45]           Le 26 mars 2009, le tribunal refuse la demande de remise au motif que « les informations contenues dans sa demande ne sont pas conformes à celle [sic] que nous avons au dossier. ».

[46]           Il appert par ailleurs de la preuve que le 11 mai 2009, en fin de journée, une employée de la Commission des lésions professionnelles a communiqué avec le représentant de la travailleuse afin de s’enquérir de sa présence à l’audience du 12 mai 2009. Le représentant qui est entendu par le tribunal, confirme avoir parlé à cette personne qu’il ne peut identifier.

[47]           À 19 h 45, le 11 mai 2009, le représentant de la travailleuse transmet par télécopieur une nouvelle demande de remise (lettre datée du 1er [sic] mai 2009) de l’audience du 12 mai 2009.

[48]           Dans cette demande, le représentant soumet notamment au tribunal qu’il lui est impossible de procéder « demain » « parce qu’il était prévu que je serais en audience ce jour, dans un autre dossier, je vous ai écrit le 24 mars, à ce sujet ».

[49]           Il informe de plus le tribunal qu’il vient de déménager son bureau dans une nouvelle étude et qu’il a dû assumer un fardeau de tâches supplémentaires à compter du 27 avril 2009 en raison d’un collègue malade. Il souligne de plus que la date d’audience n’a pas été notée à son agenda et qu’il ne pourra être prêt. Le représentant ajoute enfin qu’en raison d’une inondation « partielle » des boîtes de dossiers ont été touchées. Il ajoute enfin que le 12 mai est la seule journée qu’il lui reste pour préparer des audiences à la Commission des relations de travail du Québec les 13 et 14 mai qu’il a dû accepter de faire en raison de l’absence de son collègue de travail.

[50]           Le 12 mai 2009, dans une demande de remise amendée, le représentant procède à une correction à la date de sa lettre transmise la veille et ajoute qu’aucun témoin n’a été assigné pour l’audience de l’après-midi.

[51]           Il appert du procès-verbal d’audience du 12 mai 2009, que ni le représentant de la travailleuse, ni cette dernière n’étaient présents. Aucune autre partie n’est par ailleurs présente. La première commissaire indique qu’une décision sera prise sur le fond sur dossier. Dans une décision consignée au procès-verbal, la première commissaire refuse la demande de remise formulée par le représentant de la travailleuse, le 11 mai 2009.

[52]           Elle rappelle d’abord qu’un avis de convocation pour l’audience a été dûment transmis à la travailleuse et à son représentant le 18 mars 2009. Elle souligne également qu’une décision du tribunal refusant une première remise a été rendue à la suite de la demande de remise du 24 mars 2009. Elle ajoute que cette décision n’a pas été contestée. La première commissaire écrit :

« Cette remise ayant été refusée, le tribunal était en droit de s’attendre à ce que la T et son représentant soient présents à l’audience du 12 mai 09. » [sic]

 

[53]           La première commissaire relate la communication de la maître des rôles de la veille avec le représentant de la travailleuse, ainsi que du fait qu’elle aurait tenté de communiquer avec cette dernière par téléphone. Elle relate par ailleurs des propos que le représentant aurait dit à la maître des rôles et du fait que ce dernier aurait informé la maître des rôles de son absence à l’audience.

[54]           La première commissaire indique dans sa décision qu’à 13 h 50, après avoir constaté l’absence de la travailleuse et noté que le représentant avait « clairement indiqué qu’il ne serait pas présent à l’audience », elle a procédé avec les membres issus des associations syndicales et d’employeurs à l’analyse de la demande de remise.

[55]           La commissaire écrit :

« Cette demande de remise comporte plusieurs motifs que le tribunal estime non justifiés ni sérieux et il refuse donc la demande pour les raisons suivantes. Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs partagent cet avis.

 

·         Le représentant allègue qu’aucun témoin n’a été assigné qt qu’il n’est pas prêt en vue de l’audience du 12 mai. Le tribunal estime qu’à la suite du refus de sa demande de remise du 24 mars 09, refusée le 26 mars, il était de la responsabilité du représentant d’assigner ses témoins et de s’assurer qu’il disposait d’un dossier complet et de toute la preuve qu’il entendait soumettre au tribunal.

·         Par ailleurs, le représentant mentionne que l’audience devait avoir lieu en C.S. le 12 mai et qui avait motivé sa première demande de remise n’a finalement pas lieu. Le tribunal retient donc qu’il était maintenant disponible pour procéder dans la présente affaire.

·         Il allègue que cette journée du 12 mai est la seule disponible pour lui permettre de préparer l’audience devant la CRT les 13 et 14 mai.

Le tribunal est d’avis que le représentant sait depuis la fin de mars 09 qu’il est convoqué devant la CLP et il lui appartient de planifier son travail en conséquence.

·         Il ajoute que son arrivée dans un nouveau bureau implique un surplus de travail, d’autant plus qu’un collègue a dû s’absenter pour raison de maladie. Encore une fois, le tribunal est d’avis qu’il lui appartient de gérer ce surplus de travail et le tribunal s’attend à ce que l’audience pour laquelle il est dûment convoqué depuis le 18 mars 09 soit traitée en priorité par rapport aux dossiers nouveaux.

·         Le représentant allègue avoir déménagé le 3 mai 09 mais que certains de ses dossiers sont toujours dans des boîtes, dont celui de la T. Le tribunal estime que cela dénote un manque de sérieux, surtout si l’on considère qu’il y a dans le dossier de la T une audience dûment convoqué le 12 mai. Le tribunal ne peut cautionner un tel comportement.

·         Au surplus, le tribunal souligne que le représentant n’a formulé aucune demande après le refus de celle du 24 mars 09 et avant celle du 11 mai 09, laquelle semble avoir été provoquée davantage par l’appel de la maître des rôles que par la situation décrite par le représentant de la T.

·         Le représentant allègue ne pas avoir de voiture vu l’absence de sa conjointe. Il existe toutefois d’autres moyens de transport accessibles pour se rendre à la CLP de 3 Rivières.

·         S’ajoute à ces motifs allégués le fait que le 11 mai 09 de l’eau se serait écoulée d’un tuyau créant ainsi des dommages aux boîtes de dossiers. Vu l’audience prévue le 12 mai 09, on se serait attendu, de la part d’un procureur sérieux, à ce que le dossier concerné ne soit plus dans une caisse la veille de l’audience.

·         Le représentant allègue aussi qu’il a contesté le 29 avril 09 une décision de la CSST au nom de sa cliente. D’abord, si le représentant a fait cette contestation au nom de sa cliente, cela laisse croire qu’il a eu l’occasion de communiquer avec elle, alors qu’il a mentionné à la maître des rôles qu’il n’avait pas eu de ses nouvelles depuis très longtemps.

Ensuite, et quoiqu’il en soit, cette nouvelle contestation n’empêche pas de procéder dans les dossiers dont le tribunal est saisi.

·         Il allègue également que sa cliente n’est pas en mesure de collaborer compte tenu de ses handicaps et de sa médication. Il appert toutefois des notes évolutives du dossier que la T est toujours impliquée dans son dossier et rien n’indique qu’elle ne soit pas en état de collaborer.

·         Le représentant allègue qu’il a fait une demande de conciliation. Toutefois malgré la disponibilité manifestée par la  conciliatrice au dossier, il n’a pas donné suite.

·         Le représentant n’a jamais allégué qu’une preuve additionnelle était requise.

·         Il appert de plus que la T a déménagé sans en aviser le tribunal.

 

Pour l’ensemble de ces motifs et considérant l’article 17 du Règlement sur la preuve et la procédure devant la Commission des lésions professionnelles qui prévoit qu’une partie doit présenter une demande de remise dès qu’elle a connaissance des raisons qu’elle veut invoquer et que la remise est accordée que si les motifs invoqués sont sérieux, le tribunal conclut que le demande de remise n’est pas fondée. » [sic]

 

 

[56]           Dans une lettre du 19 mai 2009, le représentant de la travailleuse avise la première commissaire qu’il va entreprendre une procédure en révision judiciaire en Cour supérieure à l’encontre de la décision du 12 mai 2009 refusant sa demande de remise et lui demande de suspendre son délibéré.

[57]           Le 20 mai 2009, la première commissaire accepte de donner suite à la demande de suspension du délibéré, d’où le fait que la présente requête ne porte que sur la décision de refuser la demande de remise.

[58]           Le 5 juin 2009, le représentant de la travailleuse avise la Commission des lésions professionnelles qu’il transforme sa requête en révision judiciaire, en requête en révision ou en révocation interne conformément à l’article 429.56 de la loi.

[59]           Par sa requête, le représentant demande la révision de la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 12 mai 2009 refusant sa demande de remise.

[60]           Le représentant de la travailleuse reproche au tribunal des erreurs manifestes et déterminantes, lesquelles se résument ainsi :

·              la décision du tribunal nie le droit de la travailleuse d’être entendue   conformément à l’article 429.13 de la loi;

·              la travailleuse et son représentant n’ont pas donné leur consentement à ce que      le tribunal rende une décision sur dossier, contrairement à ce qui est prévu à         l’article 429.14 de la loi;

·              le représentant allègue que conformément à l’article 429.15 de la loi, il avait des    motifs valables justifiant son absence et en conséquence, le tribunal ne pouvait   procéder à l’instruction de l’affaire en son absence;

·              la travailleuse conformément à l’article 429.17 a le droit d’être représentée par      une personne de son choix, en l’occurrence son représentant actuel;

·              s’appuyant sur le libellé de l’article 429.19, il souligne qu’aucune partie n’aurait      subi un préjudice grave du report de l’audience;

·              il souligne que le tribunal n’a pas traité la demande comme il se doit, à savoir        comme un cas particulier (article 429.20);

·              il ajoute que le tribunal a nié à la partie son droit d’être assistée ou   représentée et qu’il ne pouvait procéder puisque le représentant était « justifié       valablement » d’être absent (article 429.37);

·              s’appuyant sur le Règlement sur la procédure et la preuve de la Commission des          lésions professionnelles[16] il souligne que conformément à l’article 9, le tribunal             devait lui communiquer les éléments de preuve, les avis et autres informations             relatifs au cheminement du dossier;

·              le représentant soumet que conformément à l’article 17 du règlement il avait des   motifs sérieux et que les fins de la justice requéraient de donner suite à sa demande de remise;

·              il souligne enfin que selon les articles 22 et 27 du règlement le tribunal ne peut       retenir un élément de preuve que si les parties ont été à même d’en commenter       ou d’en contredire la substance et souligne qu’un témoin peut être interrogé par           chacune des parties, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce en regard des propos           rapportés de la maître des rôles et de la conciliatrice.

[61]           À l’appui de sa requête, le représentant a soumis un affidavit de la travailleuse. Cet affidavit n’apparaît, dans son ensemble, pas nécessaire à la résolution du présent débat, si ce n’est que la travailleuse confirme le mandat qu’elle a donné à son représentant quant à une demande de remise de l’audience du 12 mai 2009.

[62]           Par ailleurs, le tribunal a entendu les explications du représentant de la travailleuse. Pour l’essentiel, il a repris les motifs invoqués dans la demande de remise du 11 mai 2009 et qui sont relatés dans la décision de la première commissaire du 12 mai 2009.

[63]           Le représentant a par ailleurs admis à plus d’une reprise que c’est en raison d’une erreur de la part d’un membre du personnel de son étude qu’il y a eu confusion. Le représentant explique que la première décision du tribunal du 26 mars 2009 refusant sa demande de remise du 24 mars 2009 a été classée dans le dossier d’un autre client, ce qui a créé un « imbroglio ».

[64]           Cette erreur de classement a fait notamment en sorte qu’il a cru que l’audience des dossiers de la travailleuse ne devait pas avoir lieu en mai 2009. Il réitère de plus que l’audience du 12 mai 2009 n’avait pas été inscrite à son agenda. Une copie de la page pertinente de cet agenda jointe à la requête, démontre effectivement que l’audience du 12 mai 2009 n’y est pas inscrite. 

[65]           Il précise de plus qu’il a cru que l’audience devait avoir lieu en juillet 2009.

[66]           Le représentant admet ainsi son unique responsabilité et souligne les conséquences importantes que la décision du 12 mai 2009 aurait, sur les nombreuses contestations de la travailleuse, si elle est maintenue.

[67]           Le représentant souligne que sa demande de remise a été faite conformément au Règlement sur la procédure et la preuve de la Commission des lésions professionnelles, à savoir qu’elle a été faite par écrit et motivée.

[68]           Force est de constater que les explications données par le représentant au présent tribunal, ajoutées aux motifs déjà invoqués par ce dernier dans sa demande de remise du 11 mai 2009, constituent des raisons suffisantes pour accepter sa demande de remise.

[69]           Par ailleurs, le présent tribunal estime qu’en l’espèce, en raison du refus de la demande de remise la travailleuse n'a pu, et ce, pour des raisons qu’il juge suffisantes, se faire entendre, ce qui constitue l’un des motifs de révision prévu à l'article 429.56 de la loi.

[70]           Comme l’a rappelé avec raison la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Tzelardonis et Ameublement Lafrance (Fermé)[17] :

[66]      Dans un tel contexte, les règles de justice naturelle et particulièrement celle consacrant le droit d’être entendu, doivent primer par rapport à cette certaine imprudence ou insouciance dont à pu faire preuve le travailleur à la suite de l’envoi de sa demande de remise à la Commission des lésions professionnelles le 16 juin 2006. Ce faisant, le tribunal est d’avis que la décision du 22 juin 2006 (copie anglaise le 22 septembre 2006) doit être révoquée. Cette décision a été rendue alors que le travailleur n’a pu, pour des raisons jugées suffisantes,  se faire entendre.

 

 

[71]           Comme dans l’affaire Abrigo et Gusdorf Canada ltée[18], le tribunal estime que la travailleuse ne doit pas être pénalisée par l’erreur de son représentant.

[72]           Au surplus et tel que souligné par ce dernier, aucune partie ne subit de préjudice à ce que le tribunal fasse droit à la présente requête; l’employeur et la CSST ne s’étant pas déplacés lors de l’audience du 12 mai 2009.

[73]           Le présent tribunal, souligne toutefois qu’il aurait été beaucoup plus simple que le représentant se présente à l’audience le 12 mai 2009 pour expliquer de vive voix à la première commissaire les motifs de sa demande de remise, comme il l’a fait en l’espèce. Celle-ci, comme les deux membres issus des associations d’employeurs et des associations syndicales, aurait pu évaluer, avec cette fois toutes les explications du représentant, le bien-fondé de sa demande. Malheureusement, ce n’est pas ce qui s’est passé et la première commissaire a dû rendre une décision à partir des seuls éléments dont elle disposait.

[74]           Compte tenu de la conclusion à laquelle en arrive le présent tribunal, il lui apparaît inutile d’examiner si la décision du 12 mai 2009 comporte des erreurs manifestes et déterminantes assimilables à des vices de fond de nature à l’invalider.

[75]           La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision doit donc réviser la décision rendue le 12 mai 2009 et accueillir la demande de remise soumise le 11 mai 2009 par le représentant de la travailleuse et convoquer de nouveau les parties à une audience sur le fond des requêtes de la travailleuse.

[76]           Il y a donc lieu de convoquer à nouveau les parties afin que la Commission des lésions professionnelles, en présence des parties intéressées, tienne une audience sur les requêtes de la travailleuse soumises à l’encontre des décisions de la CSST rendues à la suite de révisions administratives.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête en révision déposée le 5 juin 2009 par Mme Manon Lesieur, la travailleuse;

RÉVISE la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles du 12 mai 2009;

ACCUEILLE la demande de remise de l’audience du 12 mai 2009;

CONVOQUERA à nouveau les parties devant une autre formation que celle présidée par la première commissaire, afin qu’il soit disposé des requêtes de la travailleuse. La nouvelle audience devra être tenue dans les 90 jours de la présente, à une date qui sera  convenue avec les parties.

 

 

__________________________________

 

J. André Tremblay

 

 

Me Gaétan Couturier

OUELLET, NADEAU ASSOCIÉS

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Sonia Grenier

PANNETON LESSARD

Représentante de la partie intervenante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783 ; Moschin et Communauté urbaine de Montréal, [1998] C.L.P. 860 .

[3]           Imbeault et S.E.C.A.L., C.L.P. 84137-02-9611, 24 septembre 1999, M. Carignan.

[4]           L.R.Q., c. C-12.

[5]           Les viandes du Breton inc. et Dupont, C.L.P. 89720-01A-9707, 18 décembre 2000, M. Carignan.

[6]           Idem, note précédente.

[7]           Produits Forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733 .

[8]           Desjardins et Réno-Dépôt inc., [1999] C.L.P. 898 .

[9]           Bourassa c. Commission des lésions professionnelles, [2003] C.L.P. 601 (C.A.).

[10]         [2005] C.L.P. 626 (C.A.).

[11]         La Cour d’appel reprend à nouveau ce principe dans l’affaire CSST c. Touloumi, C.A. 500-09-015132-046, 6 octobre 2005, jj. Robert, Morissette, Bich, 05LP-159.

[12]         Desrochers et Marché Bel-Air inc., C.L.P. 90831-63-9708, 13 décembre 1999, P. Brazeau; Palma Mazzaferro et Confection de vêtements Nadia inc. et CSST, C.L.P. 150945-72-0011, 18 décembre 2003, L. Boucher; Michèle Chrétien et ville de Verdun, C.L.P. 178234-72-0202, 20 avril 2004, B. Roy.

[13]         Dossier no 306031-04-0612.

[14]         Dossier no 313964-04-0703.

[15]         Dossier no 366969-04-0901.

[16]         C. A-3.001, r.2.01.3.

[17]         C.L.P. 208378-71-0305, 7 mars 2008, S. Sénéchal.

[18]         C.L.P. 164884-72-0106, 21 janvier 2003, L. Landriault.

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