Décision

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Langlois et Centre de chirurgie Rive-Sud inc

2009 QCCLP 5891

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Longueuil

26 août 2009

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

368601-62-0901

 

Dossier CSST :

133271056

 

Commissaire :

Richard L. Beaudoin, juge administratif

 

Membres :

Christian Tremblay, associations d’employeurs

 

Roland Meunier, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Pierrette Langlois

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Centre de chirurgie Rive-Sud inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 28 janvier 2009, Pierrette Langlois (la travailleuse) exerce, par requête, un recours à l’encontre d’une décision rendue le 19 décembre 2008 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]                Cette décision confirme une décision rendue le 8 octobre 2008 par la CSST et détermine que la travailleuse a droit à un remboursement partiel (1 564,18 $) des frais encourus (7 000 $) à la suite d’une intervention chirurgicale effectuée par un médecin non participant[1].

[3]                Les parties sont convoquées à une audience, à Longueuil, le 23 juin 2009. La travailleuse est présente. Le Centre de chirurgie Rive-Sud inc. (l'employeur) est représenté ainsi que la CSST. La Commission des lésions professionnelles a pris connaissance du dossier, entendu le témoignage de la travailleuse, l’argumentation des parties puis a délibéré.

OBJET DU RECOURS

[4]                La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles d’ordonner à la CSST de lui rembourser la totalité de la somme d’argent qu’elle a versée au docteur Beauchamp, chirurgien orthopédiste, non participant à la Régie de l’assurance maladie du Québec (la RAMQ), pour subir une intervention chirurgicale, afin de réparer les dommages causés à son épaule à la suite d’une lésion professionnelle.

PREUVE

[5]                La travailleuse, née le [...] 1947, subit une lésion professionnelle le 26 février 2008, soit une déchirure des tendons des muscles sous-scapulaire et sus-épineux de son épaule droite.

[6]                Elle est assistante médicale et est suivie par le docteur Courchesne, un médecin de la clinique où elle travaille.

[7]                Le docteur Girard, chirurgien orthopédiste, examine la travailleuse le 31 mars 2008. Il est alors d’avis que la travailleuse présente une tendinite de l’épaule et possiblement une déchirure tendineuse et il prescrit une résonance magnétique. Cet examen, le 16 avril 2008, montre effectivement une déchirure complète des tendons des muscles sous-scapulaire et sus-épineux.

[8]                Le docteur Blanchette, également chirurgien orthopédiste, le 22 mai 2008, sur une feuille de prescription, inscrit le diagnostic de déchirure de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite.

[9]                Le 25 juin 2008, le docteur Courchesne réfère la travailleuse au docteur Gauthier, indiquant sur sa demande de consultation que le docteur Blanchette n’envisageait pas de chirurgie pour la travailleuse. Il demande donc au docteur Gauthier de suivre la travailleuse.

[10]           C’est le 25 août 2008 que le docteur Courchesne demande l’intervention du docteur Beauchamp, alléguant une urgence chirurgicale.

[11]           Le docteur Beauchamp déclare à la travailleuse que si une intervention chirurgicale n’est pas pratiquée immédiatement, elle risque de perdre l’usage de son bras. Il exige et obtient de la travailleuse le versement d’une somme de 7 000 $ et effectue l’intervention chirurgicale le 28 août 2008. La preuve entendue à l’audience ne permet pas de qualifier de succès ou d’échec cette intervention chirurgicale.

[12]           La travailleuse réclame le remboursement de cette somme à la CSST. Cette dernière lui rembourse le montant correspondant à ce qu’elle aurait payé si la travailleuse avait été opérée par un chirurgien orthopédiste soumis à l’application d’une entente[2], soit 1 564,18 $.

[13]           Les notes évolutives de la CSST résument des conversations tenues entre divers intervenants (agent d’indemnisation et médecin régional) et le docteur Courchesne.

[14]           Ces notes révèlent également que la CSST a avisé la travailleuse, le 22 août 2008, qu’elle ne rembourse aux professionnels de la santé que les frais qu’elle reconnaît et qui sont conformes soit à ses tarifs, soit à ceux de la RAMQ.

[15]           Ces notes révèlent de plus que le docteur Courchesne s’est engagé à rembourser à la travailleuse la différence entre les coûts exigés par le docteur Beauchamp et ceux remboursés par la CSST.

[16]           Le docteur Beauchamp a remis à la travailleuse une décision de la Commission des lésions professionnelles qui autorise le remboursement des frais engagés pour effectuer une intervention chirurgicale par un médecin non participant[3].

[17]           La travailleuse, à l’audience, confirme essentiellement ces faits, ajoutant que son employeur n’a pas encore respecté l’engagement qu’il a pris à son endroit. Sans cet engagement de son employeur, elle ne se serait pas fait opérer, n’ayant pas les moyens de débourser cette somme.

ARGUMENTATION

[18]           La travailleuse demande le remboursement de la somme qu’elle a payée.

[19]           La représentante de l’employeur soumet que le dossier contient le protocole opératoire et une opinion du docteur Beauchamp à l’effet que l’intervention chirurgicale était urgente.

[20]           L’avocate de la CSST soumet que le régime d’indemnisation des travailleurs est établi par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[4] (la loi). Les dispositions pertinentes de la loi se trouvent aux articles 192 et suivants. La travailleuse a droit de recevoir, du médecin de son choix, les soins médicaux nécessaires en raison d’une lésion professionnelle. Cependant, l’obligation financière de la CSST se limite aux sommes prévues par le régime public d’assurance santé. La CSST ne rembourse pas de somme supérieure.

[21]           La CSST, dont le rôle est assimilable à celui d’un assureur, s’est vu imposer, par la loi, des limites de couverture, comme on en trouve dans toutes les assurances de tous les secteurs.

[22]           La CSST paie les honoraires et frais qu’elle négocie ou qui sont négociés par la RAMQ.

[23]           Ainsi, tous les travailleurs bénéficient de la même couverture d’assurance.

[24]           Dans la jurisprudence, deux courants existent.

[25]           Le premier est illustré par la décision rendue dans l’affaire Fortin[5]. Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles déclare que le travailleur a droit au remboursement des frais qu’il a réellement encourus à la suite de l’intervention chirurgicale pratiquée par le docteur Beauchamp. Cette décision tient compte de l’équité et du fait qu’au moment de l’intervention, la CSST n’avait pas établi la description des frais payables aux médecins non participants.

[26]           Depuis cette décision, la Commission des lésions professionnelles a rendu cinq décisions[6] qui concluent que la CSST ne rembourse que les frais prévus et tarifés par la RAMQ. Il y a donc lieu de confirmer la décision rendue.

AVIS DES MEMBRES

[27]           Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d’avis de rejeter la requête de la travailleuse. En effet, il s’agit d’une question d’équité sociale et d’égalité des travailleurs devant la loi que de s’en tenir au paiement autorisé par le régime public d’assurance-maladie. Si la situation alléguée d’urgence est fondée, le système public peut y faire face.

MOTIFS

[28]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer s’il y a lieu de rembourser à la travailleuse, victime d’une lésion professionnelle, la totalité du montant qui lui a été réclamé et qu’elle a payé au docteur Beauchamp à la suite de l’intervention chirurgicale qu’il a pratiquée le 28 août 2008.

[29]           La loi, aux articles 188 et suivants, détermine les droits du travailleur, qui a subi une lésion professionnelle, à l’assistance médicale que requiert son état. Les articles 192 à 195 établissent les modalités du paiement de ces frais médicaux :

192.  Le travailleur a droit aux soins du professionnel de la santé de son choix.

 

 

193.  Le travailleur a droit aux soins de l'établissement de santé de son choix.

 

Cependant, dans l'intérêt du travailleur, si la Commission estime que les soins requis par l'état de ce dernier ne peuvent être fournis dans un délai raisonnable par l'établissement qu'il a choisi, ce travailleur peut, si le médecin qui en a charge est d'accord, se rendre auprès de l'établissement que lui indique la Commission pour qu'il reçoive plus rapidement les soins requis.

 

 

194.  Le coût de l'assistance médicale est à la charge de la Commission.

 

Aucun montant ne peut être réclamé au travailleur pour une prestation d'assistance médicale à laquelle il a droit en vertu de la présente loi et aucune action à ce sujet n'est reçue par une cour de justice.

 

 

195.  La Commission et le ministre de la Santé et des Services sociaux concluent une entente type au sujet de tout ou partie des soins et des traitements fournis par les établissements visés au paragraphe 2° de l'article 189; cette entente a pour objet la dispensation de ces soins et de ces traitements et précise notamment les montants payables par la Commission pour ceux-ci, les délais applicables à leur prestation par les établissements et les rapports qui doivent être produits à la Commission.

 

La Commission conclut avec chaque agence visée par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) et avec chaque conseil régional institué par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5) une entente spécifique qui vise à assurer la mise en application de l'entente type sur leur territoire. Cette entente spécifique doit être conforme aux termes et conditions de l'entente type.

 

Un établissement est réputé accepter de se conformer à l'entente spécifique, à moins de signifier son refus à la Commission et à l'agence ou au conseil régional, selon le cas, dans le délai imparti par cette entente, au moyen d'une résolution de son conseil d'administration; dans ce dernier cas, cet établissement est rémunéré selon ce qui est prévu par l'entente type.

 

Pour le territoire auquel s'applique la partie IV.2 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, l'entente spécifique est conclue par l'établissement ayant son siège sur ce territoire.

 

 

[30]           Au paragraphe 14 de l’article 3 de la Loi sur l’assurance-maladie[7], on peut lire que c’est la RAMQ qui assume le coût des services qui sont rendus par un professionnel de la santé à un travailleur qui a subi une lésion professionnelle.

[31]           L’article 586 de la loi prévoit la situation d’une entente entre le ministre de la santé et des services sociaux et une association de médecins :

586.  Malgré le quatorzième alinéa de l'article 3 de la Loi sur l'assurance-maladie (chapitre A-29), édicté par l'article 488, la Commission assume le coût d'un service visé dans cet alinéa tant qu'une entente visée dans le deuxième alinéa de l'article 19 de cette loi, édicté par l'article 489, n'est pas en vigueur relativement à ce service.

 

La Commission fixe ce coût d'après ce qu'il serait convenable et raisonnable de réclamer du travailleur pour un service semblable s'il devait le payer lui-même.

 

 

[32]           Dans les notes évolutives de la CSST, on peut lire que le docteur Favreau, médecin régional de la CSST, se réfère à une grille de tarifs pour les actes posés par le docteur Beauchamp pour établir le montant du remboursement auquel la travailleuse a droit.

[33]           Des dispositions de la loi, il y a lieu de conclure qu’un médecin ne peut réclamer aucun montant d’argent pour une prestation d’assistance médicale à laquelle une travailleuse a droit en vertu de la loi. La loi ne fait pas de distinction entre un médecin participant ou non.

[34]           Dans la décision Fortin[8], la Commission des lésions professionnelles rapporte ainsi les arguments proposés par le représentant du travailleur :

[7]        Le procureur du travailleur allègue que le docteur Beauchamp est un professionnel de la santé au sens de l’article 189 de la loi et que l’intervention chirurgicale qu’il a pratiquée constitue une assistance médicale visée à l’article 188 de la loi. Il s’appuie essentiellement sur la décision Brousseau et Isolation Confort ltée2 dans laquelle la Commission des lésions professionnelles a déterminé que le travailleur a droit au remboursement du coût d’une telle intervention. Le procureur reconnaît que cette décision a été révoquée sur l’aspect du montant à être remboursé3; cependant, dans le présent dossier, il estime que pour des raisons d’équité prévues à l’article 351 de la loi, le travailleur devrait être remboursé des frais réellement encourus.

 

[8]        À cet effet, il dépose une facture de 5 575 $ adressée au travailleur, un reçu pour le paiement effectué par carte de crédit de la moitié de cette somme (2 787,50 $) et le protocole opératoire.

____________________

2           [2004] C.L.P. 509

3           [2004] C.L.P.1513

 

 

[35]           Constatant que l’intervention chirurgicale subie par le travailleur, dans cette instance, a été effectuée alors que la CSST n’avait pas mis en place son orientation en matière de remboursement des honoraires des médecins non participants, la Commission des lésions professionnelles tient le raisonnement suivant :

[24]      De plus, contrairement à l’affaire Brousseau, le tribunal considère que dans le cas présent, la CSST s’est prononcée sur le « quantum admissible ». Il correspond, suivant sa nouvelle orientation, à ce que la RAMQ payerait dans un cas semblable. Il faut donc en déduire que pour la CSST, ce tarif est « convenable et raisonnable » au sens de l’article 586 de la loi.

 

[25]      Or, le tribunal constate que cette nouvelle orientation n’existait pas en octobre 2005 au moment où le travailleur a subi son intervention chirurgicale. Il n’y a donc pas lieu de s’y référer en l’espèce. Comme le précisait le premier commissaire dans l’affaire Brousseau, « le remboursement des services ici en cause n’est donc pas limité dans sa quotité à un tarif légalement déterminé ».

 

 

[36]           Puis, la Commission des lésions professionnelles conclut ainsi :

[27]      Considérant la jurisprudence, les faits particuliers du présent dossier et la preuve dont il dispose, le tribunal conclut que le travailleur doit être remboursé des frais qu’il a réellement encourus pour obtenir l’assistance médicale à laquelle il avait droit. 

 

 

[37]           Cette décision est donc rendue dans un contexte bien particulier. On ne trouve pas, en l’instance, des faits similaires à ceux qui ont été mis en preuve dans cette affaire.

[38]           Dans la décision Pearson et Amusements Spectaculaires inc.[9], la Commission des lésions professionnelles est saisie d’une requête de la travailleuse qui demande le remboursement intégral des frais de consultation médicale qu’elle a dû débourser. Après avoir rappelé les faits et les dispositions légales pertinentes, la Commission des lésions professionnelles écrit :

[71]      Dans la présente affaire, la Commission des lésions professionnelles estime que la CSST doit payer le montant fixé selon le tarif de la RAMQ et à cet égard, la soussignée fait siens les commentaires de la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Brousseau et Isolation confort ltée12 lorsqu’elle mentionne en obiter dictum ce qui suit :

 

[22]      De plus, la soussignée ne croit pas que la loi puisse permettre à un travailleur accidenté de bénéficier d’une médecine plus onéreuse que celle couverte par la Loi sur l’assurance-maladie et à laquelle ne peut prétendre la majorité des citoyens puisqu’il s’agirait d’une injustice et d’une iniquité à l’encontre de l’ensemble des citoyens du Québec.

 

[72]      Le remboursement du coût des soins d’un médecin non participant au régime de la RAMQ, alors que les services rendus font l’objet d’une entente entre les fédérations médicales et le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), n’est pas expressément prévu à la L.a.t.m.p.; il faut donc s’en remettre à l’intention du législateur.

 

[73]      Or, la L.a.t.m.p. prévoit le mécanisme de paiement des honoraires des médecins pour les soins donnés relativement à une lésion professionnelle. 

 

[74]      Selon l’article 196 de la L.a.t.m.p., le médecin doit facturer la RAMQ pour les services fournis à la travailleuse accidentée conformément aux ententes intervenues dans le cadre de l’article 19 de la L.a.m. La CSST rembourse alors le coût de ces services à la RAMQ selon l’article 197 de la L.a.t.m.p.

 

[75]      En vertu de l’article 586 de la L.a.t.m.p., ce n’est qu’à défaut d’entente entre les fédérations médicales et le MSSS à ce sujet que la CSST assume le coût du service d’après ce qu’il serait convenable et raisonnable de réclamer de la travailleuse pour un service semblable si la travailleuse devait le payer elle-même.

 

[76]      Force est de constater, à la lecture du dossier, qu’il existe une entente entre les fédérations médicales et le MSSS visant les actes professionnels posés par le docteur La Barre à l’égard de la travailleuse; c’est ce qui appert des lettres que la CSST a adressées au docteur La Barre.

 

[77]      La Commission des lésions professionnelles en infère donc que la volonté du législateur est que les services posés par un médecin dans le cadre de la L.a.t.m.p. qui font l’objet d’une entente entre les fédérations médicales et le MSSS en vertu des articles 196 de cette loi et 19 de la L.a.m. soient remboursés selon le tarif du régime public de la RAMQ puisque ce n’est qu’à défaut d’entente que la L.a.t.m.p. prévoit que la CSST rembourse un coût convenable et raisonnable pour ce service.

 

[78]      Au surplus, l’article 194 de la L.a.t.m.p. prévoit qu’aucun montant ne peut être réclamé à la travailleuse pour une prestation d’assistance médicale à laquelle elle a droit en vertu de la L.a.t.m.p. et qu’aucune action en justice à ce sujet n’est recevable par une cour de justice.

 

[79]      Or, si le professionnel non participant au régime public ne peut demander à la travailleuse le remboursement des coûts du service offert et qu’il doit s’adresser à la RAMQ en vertu de la L.a.t.m.p. et de la L.a.m., alors il se verra rembourser le montant prévu à l’entente. Il faut donc en conclure que ce professionnel non participant ne peut demander un coût supérieur à ce qui est prévu à l’entente, ni à la travailleuse ni à la CSST. En effet, la loi ne permet pas de faire indirectement ce que l’on ne peut faire directement.

 

[80]      Étant donné que le docteur La Barre ne peut réclamer à la CSST un montant supérieur à celui prévu à l’entente, la travailleuse, qui a acquitté le coût des services rendus à ce professionnel de la santé, ne peut avoir plus de droit que celui-ci aurait eu s’il avait facturé directement la CSST.

 

[81]      Donc, la travailleuse a droit au remboursement des frais de consultation médicale qu’elle a payés au docteur La Barre selon les tarifs de la RAMQ.

 

[82]      Pour la différence, le tribunal estime que ce n’est pas à la CSST à rembourser à la travailleuse le coût excédentaire de la réclamation du docteur La Barre qui a été faite en violation de l’article 194 de la L.a.t.m.p. qui stipule clairement qu’aucun montant ne peut être réclamé à la travailleuse pour une prestation d’assitance médicale à laquelle elle a droit en vertu de la L.a.t.m.p. La Commission des lésions professionnelles considère que la CSST ne peut être responsable des gestes posés par un professionnel de la santé en violation de la L.a.t.m.p.

________________

12                   C.L.P. 217221-64-0310, 4 février 2005, G. Godin (décision accueillant une requête en révision)

 

 

[39]           Dans la décision Nadeau et C & R Développement inc.[10], la Commission des lésions professionnelles est saisie d’un litige ayant le même objet. Après avoir cité les dispositions pertinentes de la loi, le commissaire écrit :

[46]      Il ressort des dispositions législatives précédentes ainsi que de la preuve soumise au présent dossier que le travailleur a droit de choisir le docteur Langlois à titre de médecin traitant pour les fins des traitements requis pour injections de cortisone et que la CSST ne peut s’objecter à ce choix. D’ailleurs, il appert du présent dossier que la CSST ne conteste pas le droit du travailleur de recourir aux soins et traitements du docteur Langlois qui exerce dans une clinique privée, mais elle est d’avis qu’elle n’a pas à payer la totalité des frais encourus par le travailleur pour consulter ce médecin et recevoir les traitements prescrits par ce dernier.

 

[47]      Dans le cas sous étude, la Commission des lésions professionnelles estime que la CSST doit payer le montant fixé selon le tarif de la Régie d’assurance maladie du Québec (RAMQ) pour les soins que le travailleur devrait recevoir pour ses injections à la cortisone et à cet égard, la Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’en vertu de l’article 196 de la LATMP, le médecin auquel est référé le travailleur pour prodiguer lesdits traitements, doit facturer la RAMQ pour les services fournis au travailleur accidenté conformément aux ententes intervenues dans le cadre de l’article 19 de la LAM. La CSST rembourse alors le coût de ces services à la RAMQ selon l’article 197 de la LATMP.

 

[48]      Dans ce contexte, le tribunal est d’avis que le travailleur a droit de recevoir les soins ou traitements prescrits par le docteur Langlois, mais que le coût à être assumé par la CSST en vertu de la LATMP ne peut dépasser la limite fixée par la CSST dans un tel cas, tel qu’il appert de l’interprétation des dispositions législatives précitées.

 

[49]      En d’autres termes, le travailleur ne peut exiger de la CSST qu’elle défraie le coût des traitements à lui être prodigués en fonction de sa lésion professionnelle au delà de la limite pré-établie.

 

 

[40]           Dans la décision Lauzon et Sécurité des incendies de Montréal[11], la Commission des lésions professionnelles tient le même raisonnement en ce qui concerne le remboursement de médicaments utilisés alors que la travailleuse subit une intervention chirurgicale en clinique privée.

[41]           Dans la décision Morin et Experts sur roues[12], le juge administratif qui a rendu la décision dans l’affaire Nadeau[13] maintient sa position à l’effet que le remboursement des honoraires et frais est limité aux tarifs négociés.

[42]           Dans la décision Leguerrier et (P.P.) Denis Leguerrier[14], la Commission des lésions professionnelles rapporte les faits pertinents. Il s’agit ici d’une intervention pratiquée par le docteur Beauchamp pour réparer une coiffe des rotateurs, dans un contexte d’urgence. Dans cette décision, le juge administratif Daniel analyse la jurisprudence portant sur le sujet. Il rapporte les deux tendances puis tient le raisonnement suivant :

[59]      Le tribunal constate que, dans la vaste majorité des décisions de la Commission des lésions professionnelles qui accorde le remboursement des frais, ceux-ci avaient été engagés avant que ne survienne une entente décrite à l’article 198 de la loi qui précise :

 

198.  La Commission et la Régie de l'assurance maladie du Québec concluent une entente qui a pour objet les règles régissant le remboursement des sommes que la Régie débourse pour l'application de la présente loi et la détermination des frais d'administration qu'entraîne le paiement des services visés à l'article 196.

__________

1985, c. 6, a. 198; 1996, c. 70, a. 7; 1999, c. 89, a. 53.

 

[60]      C’est en l'absence d'une telle entente, que le remboursement intégral des frais engagés était accordé en fonction de l’article 586 de la loi qui stipule :

 

586.  Malgré le quatorzième alinéa de l'article 3 de la Loi sur l'assurance-maladie (chapitre A 29), édicté par l'article 488, la Commission assume le coût d'un service visé dans cet alinéa tant qu'une entente visée dans le deuxième alinéa de l'article 19 de cette loi, édicté par l'article 489, n'est pas en vigueur relativement à ce service.

 

La Commission fixe ce coût d'après ce qu'il serait convenable et raisonnable de réclamer du travailleur pour un service semblable s'il devait le payer lui-même.

__________

1985, c. 6, a. 586; 1999, c. 89, a. 44.

 

[61]      Dans le présent dossier, le tribunal constate que les frais engagés le furent en date du 13 mars 2008.  Le tribunal ne peut que supposer dans le présent cas qu'une telle entente existe entre la CSST, le Ministère de la santé et des services sociaux et les fédérations médicales, comme le mentionnent la jurisprudence récente du tribunal et la décision rendue en révision administrative dans le présent dossier.  Le tribunal n'est pas à même d'interpréter cette entente, ne l'ayant pas en sa possession.

 

[62]      Il ressort ainsi que, dans l'état actuel du dossier et considérant les principes énoncés ci-haut, le tribunal ne dispose d'aucune preuve probante voulant que la décision rendue par la CSST, en révision administrative, soit illégale ou découle d'une mauvaise interprétation de la loi et des articles pertinents au présent litige.

 

[63]      La lecture de la jurisprudence récente amène le tribunal à conclure qu’en présence d'une telle entente, le travailleur aurait ainsi droit au remboursement des frais engagés pour une chirurgie à l'épaule droite, selon les tarifs prévus par la RAMQ pour une telle chirurgie, comme si elle avait eu lieu dans un établissement public de santé.

 

[64]      Par conséquent, le tribunal déclare que le travailleur a droit au remboursement partiel des dépenses occasionnées à la suite de la chirurgie effectuée par le docteur Beauchamp le 13 mars 2008, soit l'équivalent du montant que celui-ci recevrait de la RAMQ s'il n'était pas non participant au régime.

 

 

[43]           En l’instance, la Commission des lésions professionnelles adhère à cette jurisprudence. Aucune disposition de la loi n’autorise le remboursement, à un médecin non participant, d’une somme supérieure à celle qui a été négociée entre soit la CSST, soit la RAMQ et les associations représentant les professionnels de la santé.

[44]           Il est malheureux que la travailleuse ait été incitée à débourser une somme importante pour subir une intervention chirurgicale devenue urgente plusieurs mois après la lésion professionnelle. Cependant, les dispositions de la loi et des règles prévues pour le remboursement des frais médicaux, à la lumière de la jurisprudence récente, sont claires.

[45]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il s’agit là d’une question d’équité et d’égalité devant la loi pour les travailleurs. Il y a donc lieu de rejeter la requête de la travailleuse.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de Pierrette Langlois, la travailleuse;

CONFIRME la décision rendue le 19 décembre 2008 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que la travailleuse a droit au remboursement de la somme de 1 564,18 $.

 

 

 

__________________________________

 

Richard L. Beaudoin

 

 

 

 

Me Marie-Anne Lecavalier

Panneton, Lessard

Représentante de la partie intervenante

 



[1]           Loi sur l’assurance-maladie, L.R.Q., c. A-29, art. 1 e).

[2]           Cf, note 1, article 1 c).

[3]           Fortin et Gestion Berthelot inc., C.L.P. 290718-62A-0605, 20 juin 2007, J. Landry, juge administratif.

[4]           L.R.Q., c. A-3.001.

[5]           Précitée, note 3.

[6]           Pearson et Amusements Spectaculaires inc., C.L.P. 306256-07-0612, 25 octobre 2007, S. Séguin, juge administratif; Nadeau et C & R Développement inc., C.L.P. 329784-07-0710, 15 août 2008, P. Sincennes, juge administratif; Lauzon et Sécurité des incendies de Montréal, C.L.P. 324259-63-0707, 30 octobre 2008, L. Morissette, juge administratif; Morin et Experts sur roues, C.L.P. 334450-07-0711, 17 novembre 2008, P. Sincennes, juge administratif; Leguerrier et (P.P.) Denis Leguerrier, C.L.P. 341244-64-0802, 26 février 2009, R. Daniel, juge administratif.

[7]           Précitée, note 1.

[8]           Précitée, note 3.

[9]           Précitée, note 6.

[10]         Précitée, note 6.

[11]         Précitée, note 6.

[12]         Précitée, note 6.

[13]         Précitée, note 6.

[14]         Précitée, note 6.

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