Décision

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Leduc et Réseau de transport de Longueuil

2008 QCCLP 3224

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Longueuil

3 juin 2008

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

322327-62-0707

 

Dossier CSST :

128210663

 

Commissaire :

Me Hélène Marchand

 

Membres :

M. Raynald Asselin, associations d’employeurs

 

M. Alain Lefebvre, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Yvon Leduc

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Réseau de transport de Longueuil

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 10 juillet 2007, monsieur Yvon Leduc (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision rendue le 27 juin 2007 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme la décision initiale du 21 février 2007 et déclare que le travailleur a le droit de recevoir 192,00 $ de remboursement pour les traitements par ondes de choc pulsées au lieu des 1 200 $ qu’il lui en a coûté.

[3]                Ni le travailleur ni le Réseau de transport de Longueuil (l'employeur) n’était présent à l’audience prévue le 22 mai 2008 puisque les deux parties ont demandé qu’une décision soit rendue sur dossier. Le procureur du travailleur avait déjà produit une argumentation écrite.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision du 27 juin 2007 et de déclarer qu’il a droit au remboursement du montant de 1 200 $ qu’il a versé pour les traitements par ondes de choc pulsées qu’il a reçus.

LES FAITS

[5]                Le travailleur est né le 28 décembre 1956. Il est carrossier chez l'employeur depuis 1980.

[6]                Le 2 novembre 2005, le travailleur est victime d’un accident du travail au cours duquel il se blesse au membre inférieur gauche.

[7]                Le 23 novembre 2005, la CSST rend une décision par laquelle elle reconnaît que le travailleur a été victime d’un accident du travail dont les diagnostics sont une entorse et une tendinite à la cheville gauche.

[8]                À la suite d’une résonance magnétique passée le 17 février 2006, qui fait état d’une fine déchirure partielle du tendon d’Achille associée à une bursite achilléenne, le docteur Tran retient les diagnostics de tendinite, de déchirure partielle du tendon d’Achille et de bursite achilléenne.

[9]                Le 21 mars 2006, le docteur Mac, chirurgien-orthopédiste, reprend les mêmes diagnostics que le docteur Tran.

[10]           Le 30 mars 2006, le docteur Tran recommande des traitements par ondes de choc pulsées (shockwave).

[11]           Le 5 avril 2006, le travailleur débute les traitements prescrits à une clinique de physiothérapie.

[12]           Le travailleur a reçu six traitements par ondes de choc pulsées entre le 5 avril et le 21 septembre 2006 pour lesquels il a payé la somme de 1 200 $.

[13]           Le 7 septembre 2006, la CSST rend une décision par laquelle elle reconnaît la relation entre les diagnostics de « déchirure partielle calcanéenne d’Achille et bursite achilléenne gauche » et l’accident du travail.

[14]           Le 6 octobre 2006, la révision administrative déclare que le travailleur a droit au remboursement des frais reliés aux traitements par ondes de choc pulsées.

[15]           Le 21 février 2007, la CSST fait parvenir un chèque de 192 $ au travailleur en paiement des traitements réclamés alors qu’il réclamait 1 200 $. Elle refuse ainsi de rembourser le plein montant du coût des traitements.

[16]           Le 27 juin 2007, la révision administrative confirme la décision du 21 février 2007 et déclare que la CSST a eu raison de rembourser les traitements au coût de 32 $ chacun.

L’AVIS DES MEMBRES

[17]           Le membre issu des associations d'employeurs est d’avis de rejeter la requête du travailleur. Il croit en effet exorbitant le coût des traitements reçus et ne peut imaginer que le travailleur ait déboursé un tel montant pour les recevoir.

[18]           Le membre issu des associations syndicales est d’avis d’accueillir la requête du travailleur et souscrit aux motifs de la décision. Il retient plus particulièrement le fait que selon la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), le coût de l’assistance médicale est à la charge de la CSST.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[19]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si la CSST doit rembourser le coût des traitements par ondes de choc pulsées payés par le travailleur au montant de 1 200 $.

[20]           Les articles 188 et 189 de la loi prévoient qu’un travailleur victime d’une lésion professionnelle a droit à l’assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion, tout comme la nature de cette assistance médicale et se lisent comme suit :

188.  Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.

 

 

189.  L'assistance médicale consiste en ce qui suit :

 

1° les services de professionnels de la santé;

 

2° les soins ou les traitements fournis par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5);

 

3° les médicaments et autres produits pharmaceutiques;

 

4° les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons et la disposition des cadavres (chapitre L-0.2), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;

 

5° les soins, les traitements, les aides techniques et les frais non visés aux paragraphes 1° à 4° que la Commission détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.

 

 

[21]           Les articles 204 et 212 de la loi prévoient que la CSST et l'employeur peuvent recourir à l’avis d’un expert afin de contredire l’avis du médecin qui a charge sur toute question relative à la lésion.

[22]           Dans le cas qui nous occupe, ni la CSST ni l'employeur ne se sont prévalus de ce droit.

[23]           Le 30 mars 2006, le docteur Tran prescrit des traitements par ondes de choc pulsées et le 31 août 2006, il recommande la poursuite de ces traitements.

[24]           L’article 194 de la loi prévoit que le coût de l’assistance médicale est à la charge de la CSST en ces termes :

194.  Le coût de l'assistance médicale est à la charge de la Commission.

 

Aucun montant ne peut être réclamé au travailleur pour une prestation d'assistance médicale à laquelle il a droit en vertu de la présente loi et aucune action à ce sujet n'est reçue par une cour de justice.

 

 

[25]           La CSST a remboursé 32 $ par traitement au travailleur en s’inspirant du règlement prévu à l’article 189 5° où le montant du remboursement pour des traitements de physiothérapie est prévu, et ce, à la suite d’une entente en vertu des articles 195 et 196 de la loi.

[26]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis que puisque le type de traitement reçu par le travailleur n’est pas prévu au règlement et n’a pas fait l’objet d’une entente en vertu des articles 195 et 196 de la loi, le travailleur doit être remboursé pour les coûts qu’il a effectivement déboursés pour ses traitements.

[27]           À cet égard, le tribunal fait siens les propos tenus par la commissaire Tardif dans l’arrêt Chabot et Super C Division E.U.M.R.[2] lorsqu’elle écrit :

[34]      De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, les ententes visées aux articles 195 et 196 de la loi permettent de restreindre le montant des frais réclamés par les établissements de santé et les médecins à la Régie de l’assurance-maladie et à la CSST. Elles ne permettent toutefois pas de restreindre le droit même du travailleur à l’assistance médicale vis-à-vis la CSST, puisqu’elles ne changent pas la définition de l’assistance médicale, laquelle est prévue à l’article 189 de la loi.

 

[35]      Si la CSST peut opposer ces ententes aux professionnels de la santé et aux établissements de santé qui lui réclament certaines sommes, elle ne peut se libérer de son obligation à l’égard du travailleur ni exclure de facto le coût de certains soins ou services professionnels compris dans la définition de l’assistance médicale, en prenant appui sur ces ententes.

 

[36]      La Commission des lésions professionnelles trouve également confirmation de la justesse de cette conclusion dans le texte de l’article 586 de la loi qui prévoit ce qu’il advient du coût du service d’un professionnel de la santé lorsqu’aucune entente n’est intervenue relativement à ce service. Cette disposition se lit comme suit :

 

586. Malgré le quatorzième alinéa de l'article 3 de la Loi sur l'assurance-maladie (chapitre A-29), édicté par l'article 488, la Commission assume le coût d'un service visé dans cet alinéa tant qu'une entente visée dans le deuxième alinéa de l'article 19 de cette loi, édicté par l'article 489, n'est pas en vigueur relativement à ce service.

 

La Commission fixe ce coût d'après ce qu'il serait convenable et raisonnable de réclamer du travailleur pour un service semblable s'il devait le payer lui-même.

__________

1985, c. 6, a. 586; 1999, c. 89, a. 44.

 

[…]

 

[38]      Il va sans dire que la loi a préséance sur la politique de la CSST. Conséquemment, le fait que la politique de la CSST alors en vigueur ne prévoyait pas le remboursement des frais relatifs aux traitements reçus ne peut pas signifier que le travailleur n’y a pas droit. De même, le fait que le travailleur a payé ces frais directement alors qu’il n’y était pas obligé n’emporte aucune conséquence, puisque la CSST aurait pu être forcée, pour les motifs énoncés précédemment, de payer ces frais directement aux médecins et à l’Institut.

 

 

[28]           Dans le cas sous étude, le tribunal est d’avis que la CSST, en l’absence d’entente spécifique concernant les traitements reçus par le travailleur, ne pouvait utiliser les termes de son entente avec les physiothérapeutes pour rembourser le travailleur à un coût moindre que ce qu’il lui en a coûté. En effet, bien que les traitements par ondes de choc pulsées sont prodigués par des physiothérapeutes, il ne s’agit pas de traitements de physiothérapie tels que visés par l’entente. C’est pourquoi le travailleur doit être remboursé de la totalité du montant qu’il a dû payer.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête déposée le 10 juillet 2007 par monsieur Yvon Leduc à la Commission des lésions professionnelles;

INFIRME la décision rendue le 27 juin 2007 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que la Commission de la santé et de la sécurité du travail doit rembourser la somme de 1 200 $ à monsieur Yvon Leduc correspondant au montant qu’il a dû verser pour recevoir les traitements prescrits par son médecin traitant.

 

 

 

__________________________________

 

Me Hélène Marchand

 

Commissaire

 

 

 

 

Me Denis Mailloux

C.S.N.

Représentant de la partie requérante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           C.L.P. 286839-31-0604, 16 janvier 2007, G. Tardif.

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